Cefiec : les IDE ont des idées - L'Infirmière Magazine n° 183 du 01/06/2003 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 183 du 01/06/2003

 

Événement

Actualités

Première année d'études commune, validation des acquis, quotas étudiants... Les participants aux 58es Journées du Cefiec ont potassé les sujets brûlants de la profession. Un seul regret, aucun calendrier n'a été proposé à ces réformes attendues.

C'est à la Maison de la Mutualité à Paris que se sont déroulées les 58es Journées du Cefiec (Comité d'entente des formations infirmières et cadres), les 21, 22, 23 mai derniers. Le 22 mai, les spécialistes de la profession, de la DHOS et de la DGS sont venus nombreux débattre avec la salle des enjeux de la formation initiale et continue.

Premier sujet brûlant, la première année commune. Jean-Marc Braichet, chef du bureau de la formation des professions de santé à la DGS, a présenté les dernières avancées de ce dossier qui devrait être bouclé fin juin 2003. Son message est clair : « À ce jour, rien n'est décidé. »

Jean-Marc Braichet a rappelé les objectifs de cette première année commune aux études de santé : une culture commune pour dépasser les cloisonnements et les corporatismes existants entre les différents métiers de la santé, éviter le gâchis humain des reçus-collés de médecine et enfin, permettre une reconnaissance du cursus universitaire. Donc rien de très nouveau. Six grands principes ont été retenus par la Direction générale de la santé : l'acquisition d'une culture commune, la conservation du niveau actuel de recrutement, l'absence de hiérarchisation dans les concours, la possibilité de se présenter à un ou plusieurs concours, de redoubler avec une concur- rence plus loyale entre « primant et doublant », et la mise en place de passerelles entre les formations.

Même rengaine.

Selon Jean-Marc Braichet, plusieurs questions restent à résoudre. D'abord, le périmètre des professions de santé incluses dans cette réforme : « Les infirmières devraient en faire partie. Cependant, la question du calendrier et de la logistique reste à régler. » Deuxième question : l'articulation des études de santé avec la mise en place du cursus européen, et notamment le fameux système L/M/D (licence, master, doctorat). Et enfin des questions comme la détermination de la durée des études, le devenir des Ifsi et leur articulation avec l'universalisation de la première année commune... À toutes ces questions, M. Braichet dégaine la même rengaine : « Rien n'est décidé. » Cet impressionnant scoop a fait frémir la salle... Quelques pistes ont cependant été avancées. La densité des études infirmières ferait davantage pencher pour un étalement des études sur quatre ans (première année commune incluse). La formation continue pourrait être réactualisée par des modules complémentaires qui mèneraient à de nouveaux diplômes spécialisés d'infirmières expertes.

Validation des acquis.

La formation continue a été présentée par Claudine Mesclon, chef de bureau de la DHOS. Un élément préoccupant, le système de mutualisation existant entre les établissements, a été revu afin que les établissements de grande taille ne soient pas favorisés par rapport aux plus petits. « Nous nous sommes engagés sur ce point », déclare Claudine Mesclon.

Sur le thème de la VAE, sujet commun à la DHOS et à la DGS, la définition d'un socle de compétences à acquérir est un préalable incontournable, car la VAE s'inscrit dans le cadre de professions réglementées. Donc une fois les compétences à acquérir pour chaque métier clairement définies, des formations modulaires devront être suivies, qui prennent en compte l'expérience professionnelle. Les diplômes d'aide-soignant, d'IDE, d'Ibode et de préparateur en pharmacie seront les premiers à expérimenter la VAE. Martine Perrasse, présidente du Cefiec, a précisé que le Comité était convié en juin au prochain rendez-vous sur les référentiels métiers et les formations. La question de la décentralisation, cheval de bataille de Jean-Pierre Raffarin, a été exposée par Édouard Couty, directeur de la DHOS. Le fil rouge de cette orientation politique forte est d'impliquer davantage les collectivités locales dans la formation des jeunes et des professionnels. « Quand les régions auront un droit de regard plus important sur le fonctionnement des Ifsi, cela accélérera les anticipations, et affinera l'adaptation des politiques nationales. »

Quotas en hausse.

Les conditions d'accès aux formations, les modalités d'études et des diplômes resteront sous l'égide de l'État. Le ministre de la Santé déterminerait toujours les quotas, mais à partir des propositions des conseils régionaux. Les quotas ont d'ailleurs été relevés à 30 000 pour la rentrée prochaine. Cette décision ne remporte pas le consensus des acteurs de la formation initiale infirmière. Car pour beaucoup, cette augmentation est synonyme de baisse de qualité de la formation. Les locaux, les formateurs ainsi que l'accueil et l'encadrement des étudiants en stage ne sont pas des facteurs modulables du jour au lendemain. Édouard Couty a assuré que les efforts pour maintenir la qualité de la formation seraient poursuivis : cinq millions d'euros ont déjà été mobilisés pour accompagner la formation initiale en 2003, le même budget est engagé pour 2004. Cependant, ces enveloppes proviennent du Fonds de modernisation des établissements de santé (FMES). Les Ifsi sont donc tributaires des orientations décidées par l'établissement auquel ils sont rattachés, et peuvent ne pas voir la couleur de l'argent si l'établissement en a décidé autrement. Et puis, on ne forme pas un formateur en un an...

Les directeurs d'Ifsi ont souligné à cette occasion le manque de lisibilité concernant la gestion de leurs instituts. Ils ont réclamé de connaître les quotas pour leurs Ifsi sur trois ans. Ce à quoi le directeur de la DHOS a déclaré que les quotas seraient stabilisés à 30 000 pour quelques années . Différents travaux nationaux et régionaux initiés par le Cefiec ont couvert des sujets comme la VAE, et le travail de fin d'étude (TFE). La présentation des enjeux et des perspectives du TFE par Patrick Viollet (directeur de l'Ifsi de Toulouse) fut l'occasion de rappeler l'importance de ce travail écrit de recherche.

Il représente, depuis la réforme du DE de septembre 2001, 50 % du DE. Le TFE doit amener l'étudiant en soins infirmiers à utiliser avec rigueur une méthode de questionnement sur une problématique professionnelle nouvelle. La question du rôle et des modalités de la « guidance » de l'étudiant infirmier est, à ce propos, centrale.

Vers le changement.

La dernière journée fut consacrée aux perspectives de la formation infirmière. Les différentes interventions rassurent car elles convergent vers au moins une certitude : le monde infirmier évolue et la profession en ébullition se livre à un questionnement qui est déjà le signe de prochains changements.

FOCUS

Bruits de couloir

> Première année commune : « Il est grand temps, pour l'intérêt du patient que se développe cette culture commune » (Jean-Marc Braichet).

> VAE : « La VAE passe par la définition d'un socle de compétences à acquérir, car sinon on réglementerait un exercice illégal » (Claudine Mesclon).

« Il faut être très strict pour définir ce référentiel de compétences car nous n'avons pas oublié l'épisode des aides opératoires... » (Brigitte Louvel, présidente de l'Aifibode).

> Augmentation des quotas : « Le problème de la lisibilité des quotas provient du manque de visibilité à un niveau national. Et celui-ci dépend de la pyramide des âges, des départs en retraite et de l'impact de l'ARTT qui n'ont pas été anticipés en amont » (Édouard Couty).

> Stages de projet professionnel : « La DGS et la DHOS sont très préoccupées par la question de l'organisation des stages. Nous avons commencé à travailler sur cette question. Une piste possible serait l'évolution des programmes » (Jean-Marc Braichet).

3 Questions à Martine Perrasse, présidente du Cefiec

Quels sont les principaux points positifs de ces journées ?

La nouvelle organisation de ces trois journées (qui a détaché l'assemblée générale statutaire des deux autres journées) a permis un véritable débat entre les adhérents. De plus, la présence de personnalités de la DGS et de la DHOS nous a permis d'avoir des interlocuteurs privilégiés sur les dossiers clés de l'actualité de notre profession. Le choix des intervenants de la journée consacrée aux perspectives de la formation s'est avéré judicieux par rapport à la thématique. Sur le fond, la qualité des intervenants aussi bien du Cefiec que du ministère de la Santé ou de l'Éducation, était excellente.

Et les points négatifs ?

Des questions, notamment concernant la première année commune, sont restées sans réponse. C'est dommage. Cependant, il faut comprendre que certains dossiers sont encore sous le coude du ministre de la Santé et les représentants du ministère ne peuvent divulguer des informations encore confidentielles. Bien que les conclusions du rapport sur la réforme des études de santé aient été annoncées pour fin juin, je pense qu'elle ne seront rendues publiques qu'à la rentrée prochaine.

Votre bilan ?

Ces journées étaient évolutives, productives, intensives et enrichissantes. J'ai déjà donné rendez-vous à nos adhérents et aux représentants de la DGS et de la DHOS les 12, 13, 14 mai prochains à Bordeaux. Ils m'ont déjà assurée de leur présence.