Grève et manifestations - L'Infirmière Magazine n° 193 du 01/05/2004 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 193 du 01/05/2004

 

Juridique

Officiellement reconnu depuis 1946, le droit de grève est soumis à des conditions d'exercice strictes. Ainsi, un service minimum, en période de grève, doit être assuré dans le service public, notamment au sein de l'hôpital.

Les libertés collectives, ou publiques au sens strict, visent les droits reconnus aux groupes sociaux. S'ajoutent à ces droits politiques des droits économiques et sociaux, plus récents, qui accordent aux individus le droit d'attendre de l'État un certain nombre de prestations ou de droits collectifs. C'est dans cette catégorie que s'inscrit le droit de grève. Les manifestations consistent en un rassemblement de personnes sur la voie publique. Si ces personnes se déplacent, il s'agit d'un défilé ou d'un cortège, sinon d'un rassemblement. Le droit de manifester sur la voie publique est soumis au principe de la déclaration. La déclaration à l'autorité de police doit être faite trois à quinze jours avant le déroulement de la manifestation, en indiquant, entre autres, l'objet, la date, l'heure et le trajet du cortège. Dans les communes où la police est étatisée, la compétence est celle du préfet ; dans les autres, celle du maire.

L'autorité de police peut interdire la manifestation en cas de risque de trouble de l'ordre public ou d'insuffisance de moyens. Un cortège réalisé en dépit d'une interdiction n'est pas sans conséquences. Ainsi, les organisateurs risquent des sanctions correctionnelles et les participants sont considérés en état de rébellion s'ils ne donnent pas suite aux sommations de dispersion (article 105 du Code pénal).

Dans l'histoire des conflits et de leur règlement, les grèves ouvrières, au milieu d'un XIXe siècle marqué par la naissance de l'ère industrielle, ont été les premières manifestations. Malgré la reconnaissance de la liberté de coalition en 1864 et des syndicats en 1884, les grèves sont restées en dehors d'une réglementation précise et contraignante. C'est seulement avec la loi du 31 décembre 1936 qu'apparaît une véritable réglementation des conflits collectifs instituant une obligation de conciliation et d'arbitrage, puis en 1946 (préambule de la Constitution) qu' est reconnu officiellement le droit de grève.

CONDITIONS D'EXERCICE

« Le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent », dit simplement la Constitution. Ce droit est donc reconnu, mais sa réglementation est réduite au minimum. Elle se résume en trois points essentiels : la grève interrompt le service, elle ne le rompt pas sauf faute lourde de l'agent hospitalier ; tout licenciement pour cause de grève est nul de plein droit ; aucune mesure discriminatoire relative à la rémunération ou aux avantages sociaux ne peut être prise par l'hôpital pour fait de grève à l'encontre des agents grévistes ou non grévistes. Rappelons aussi que l'hôpital ne peut recourir à du personnel sous contrat à durée déterminée ou à des travailleurs temporaires pour remplacer le personnel en grève. La grève doit être précédée d'un préavis de cinq jours francs déposé par les organisations syndicales les plus représentatives. Certaines formes de grève sont strictement interdites : il s'agit des grèves tournantes, des grèves à motif exclusivement politique, des piquets de grève dans l'enceinte hospitalière, des actes de séquestration, de violence ou de détérioration, ou encore des grèves avec occupation des locaux.

SERVICE MINIMUM

Comme le droit de grève, la notion de continuité du service public est un principe constitutionnel d'où découlent les règles d'organisation d'un service minimum au sein de l'hôpital. Si le droit de grève des fonctionnaires hospitaliers doit être préservé, certains intérêts des usagers doivent aussi l'être : la sécurité physique des personnes, la continuité des soins et des prestations hôtelières et enfin, la conservation des installations et du matériel. C'est le directeur de l'établissement qui fixe les règles de service minimum, à savoir : la liste des services dont le fonctionnement ne saurait être interrompu, les effectifs nécessaires, la liste des personnes présentes à leur poste de travail. La liste nominative des personnes tenues au service minimum doit être transmise aux syndicats. En cas de non-respect par les agents du service minimum imposé par la direction, des sanctions disciplinaires sont tout à fait possibles à leur encontre.

Qui est responsable des dommages causés par une manifestation ?

Au premier chef, les organisateurs et les participants sont responsables civilement et pénalement. Depuis la loi du 7 janvier 1983, la responsabilité de l'État est engagée, à charge pour lui d'exercer une action récursoire contre la commune ou les auteurs du dommage.

Le législateur peut-il interdire le droit de grève ?

Non, sauf pour certaines professions, tels les gendarmes. Cependant, il peut en réglementer l'exercice, en instaurant par exemple la nécessité d'un service minimum.

Qui prononce la réquisition ?

Procédure complexe et finalement peu utilisée, la réquisition exige la publication d'un décret pris en Conseil des ministres. Chacun des ministres du ministère concerné prononce ensuite la réquisition par arrêté ministériel. Les ordres de réquisition, individuels ou collectifs, émanent quant à eux du préfet.

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