Le dépistage de la BPCO - L'Infirmière Magazine n° 202 du 01/02/2005 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 202 du 01/02/2005

 

Pneumologie

Conduites a tenir

La broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) est responsable chaque année de la mort de plus de 15 000 personnes. Son dépistage permet de conduire un diagnostic précoce essentiel.

Principalement due au tabac, la BPCO se manifeste à ses débuts par une toux et une expectoration matinales. Ces signes ont été trop longtemps négligés. Les personnes atteintes ne consultent que lorsqu'apparaît un essoufflement progressif à l'effort ou que les épisodes de bronchite se multiplient. À ce stade, il est déjà trop tard : la BPCO est patente et l'obstruction des voies aériennes irréversibles. Son évolution peut conduire en 10 ou 15 ans à une insuffisance respiratoire chronique grave.

DÉFINITION

La BPCO se caractérise par une diminution non complètement réversible des débits expiratoires. Cette diminution est provoquée par un rétrécissement progressif des bronches qui empêche le passage de l'air et entraîne un essoufflement, d'abord à l'effort, puis au repos.

Elle résulte d'une réponse inflammatoire des voies aériennes. Cette inflammation chronique entraîne une altération de l'épithélium bronchique, avec augmentation des cellules sécrétant le mucus et une diminution des cellules vibratiles qui, par leurs cils, véhiculent les sécrétions et particules inhalées vers le carrefour aérodigestif où elles sont ensuite dégluties.

A cette inflammation, risque de s'associer l'emphysème, une altération progressive du tissu élastique des poumons, et la bronchite chronique. La BPCO évolue progressivement vers l'insuffisance respiratoire, à l'origine d'une baisse de la concentration en oxygène dans le sang (hypoxémie) pouvant avoir des conséquences sur le fonctionnement du coeur. A ce stade, plus de 60 % des malades sont dépendants de l'oxygène 15 heures par jour !

FACTEURS DE RISQUES

Le tabac représente le principal facteur causal et aggravant. 90 % des BPCO sont dues au tabagisme : un fumeur sur cinq est touché après 40 ans. Quel que soit le stade de la maladie, l'interruption du tabac empêche toujours la dégradation de la fonction respiratoire. D'autres facteurs environnementaux existent comme l'exposition professionnelle à des polluants (gaz toxiques, ciments...).

Des facteurs « intrinsèques » liés à la personne elle-même sont aussi à prendre en compte. Les hommes et les femmes ne sont pas égaux devant les maladies des bronches telles que l'asthme et la BPCO. Les femmes développent, plus souvent et plus facilement, des formes précoces et sévères de la maladie.

Enfin, les infections bronchopulmonaires de la petite enfance et le patrimoine génétique jouent également un rôle dans le développement de la maladie.

DÉPISTAGE

Dépister une maladie consiste à repérer au sein d'une population cible - en l'occurrence les fumeurs - les sujets qui en sont atteints grâce à un examen simple et fiable. En général, les fumeurs ne prennent pas leurs symptômes matinaux - toux et expectoration - au sérieux. Il s'agit donc d'organiser le contact entre ces sujets et le système de dépistage. Diagnostiquer une maladie suppose que les données cliniques soient disponibles chez un sujet donné. Elles permettent de qualifier ce sujet de malade, mais il revient au médecin de vérifier ces données pour établir son diagnostic final.

Interrogatoire en première approche. Le diagnostic s'appuie sur les informations recueillies par l'interrogatoire : tabagisme ancien et entretenu, chez un sujet de plus de 40 ans ; toux chronique matinale et expectoration ; maladie à un stade d'évolution plus avancée, gêne respiratoire à l'effort...

Ce pré-diagnostic doit être ensuite confirmé par des explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) : en pneumologie, une gamme variée d'appareils permet d'explorer la fonction respiratoire et de mesurer les gaz dans le sang artériel (oxygène et gaz carbonique).

Mesurer le souffle. Face au développement insidieux de la maladie, il est nécessaire de pratiquer un dépistage systématique de la BPCO par la mesure du souffle chez tout fumeur de plus de quarante ans. Cette mesure s'effectue à l'aide de deux appareils complémentaires :

Débitmètre de pointe. Cet appareil mécanique simple qui sert aussi au diagnostic de l'asthme mesure le débit expiratoire maximal. Si le débit est normal, il n'y a pas de trouble ventilatoire obstructif important. Cela ne veut pas dire pour autant qu'il n'y ait pas de petites anomalies de débits. Si le débit de pointe est abaissé, il faut recourir à une spirométrie.

Spiromètre. Le spiromètre utilisé en pneumologie représente le meilleur outil de repérage du trouble ventilatoire obstructif. Cet appareil explore plusieurs facettes de fonction respiratoire dont la mesure du VEMS (volume maximal d'air expiré en une seconde) et confirme le trouble ventilatoire obstructif.

ÉVOLUTION

Les données ainsi recueillies permettent de classer le stade évolutif de la BPCO et d'établir un pronostic. La BPCO se caractérise chez le fumeur par un déclin accéléré du VEMS par rapport au déclin normal observé chez le non-fumeur. L'arrêt du tabac ramène le déclin du VEMS au rythme de celui du non-fumeur (mais à partir d'un niveau de VEMS abaissé).

Chez un fumeur souffrant de BPCO, le VEMS va décroître 3 à 5 fois plus vite que chez un non fumeur ou chez un malade cessant son tabagisme. Ainsi, il est possible de prédire à un fumeur de 40 ans ayant un VEMS de 1,5 litres (contre plus de trois litres pour un non-fumeur) qu'il risque de mourir d'ici à dix ans s'il ne se traite pas. La vie est en fait impossible avec un VEMS inférieur à 400 ml et un handicap majeur survient en dessous de 800 ml. Il est important d'informer le malade de ces différentes évolutions. L'exploration fonctionnelle respiratoire est le seul examen capable de confirmer le diagnostic et de permettre d'évoquer d'autres diagnostics. Radiographie standard et scanner sont utiles pour évaluer la sévérité de la maladie et en suivre l'évolution. Ces examens montrent aussi les complications de la BPCO : lésions emphysémateuses, distension thoracique, augmentation des artères pulmonaires, etc.

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