Diagnostic de l'âge ingrat - L'Infirmière Magazine n° 203 du 01/03/2005 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 203 du 01/03/2005

 

Pédopsychiatrie

Du côté des associations

Le douzième colloque Adolescentes adolescents, organisé par l'Association de santé mentale du XIIIe arrondissement, ASM13, s'est tenu le 21 janvier dernier à Paris sur le thème de « la clinique dans divers pays ». Addictions et psychothérapie chez les ados ont été largement débattues.

Plus de deux cents personnes sont venues assister au colloque Adolescentes Adolescents, organisé le 21 janvier dernier à l'espace Reuilly à Paris. Cette douzième édition, organisée par l'ASM13 (Association de santé mentale du XIIIe arrondissement, cf. p. 18), s'ouvre sur le thème de « La clinique dans divers pays ». Objectif affiché : écouter les réflexions des meilleurs cliniciens du monde entier. Alain Braconnier, psychiatre et directeur médical d'un centre de l'ASM13, insiste sur « l'utilité de ce débat, la grande richesse de connaître ce qui se passe ailleurs ».

Dépendance

Premier sujet du colloque, les addictions. Anna Kokkevi, professeur de psychologie à Athènes, fait un état des lieux de la consommation des substances psychoactives par les jeunes en Europe. Elle insiste sur « la minorité (non négligeable) des adolescents qui prolongent leur consommation de drogue pour évoluer vers des dépendances ». Selon son étude, 38 % des jeunes Français fument du cannabis, contre 21 % dans tous les autres pays européens. En France, les adolescents sont 13 % à consommer des tranquillisants et sédatifs, contre 6 % dans les autres pays. En revanche, l'usage du tabac se stabilise, voire diminue en Europe. Même chose pour l'alcool, mais uniquement dans l'ouest du continent.

Anna Kokkevi indique que « chez les adolescents, l'interdiction peut entraîner la consommation ». Une prise en charge précoce est donc indispensable. De son côté, Marie Choquet, directrice de recherche à l'Inserm, note une nouvelle dépendance : celle de l'Internet. « C'est une question qui doit aujourd'hui se poser dans chaque famille. »

Psychothérapies

Patricia Garel, pédopsychiatre au Québec, s'interroge sur l'« evidence based medecine », la médecine fondée sur des données probantes. « Les chercheurs devraient être au service des cliniciens, affirme-t-elle. Un résultat statistiquement significatif ne signifie pas un résultat cliniquement significatif. » D'après le Dr Garel, tout type de psychothérapie ne convient pas à n'importe quel sujet, d'où l'importance de l'évaluation, de la réévaluation, de l'adaptation, mais aussi de l'humilité. Une psychothérapie est un outil thérapeutique potentiellement très efficace, mais qui peut présenter - comme tout traitement efficace - des effets secondaires néfastes.

L'indication d'une psychothérapie pour un enfant ou un adolescent (et aussi un adulte, mais ce dernier est plus autonome) impose une évaluation rigoureuse de sa situation, et une analyse des objectifs du traitement proposé, tout comme la validation en cours d'évolution des résultats attendus. Car il existe des contre-indications aux thérapies individuelles. Dans le cas d'un enfant dont la symptomatologie serait secondaire à un conflit parental majeur non exprimé, une thérapie individuelle risquerait de le conduire à penser qu'il est responsable des difficultés familiales.

« Évaluer nos actions est indispensable, mais loin d'être simple ! » Pour certains, comme Gianluigi Monniello, professeur et psychanalyste à Rome, l'auto-analyse du médecin est un outil incontournable permettant de « connaître et transformer la relation thérapeutique qui risque continuellement de se fermer dans une unité confuse et une fonction miroir interminable ». L'analyste est obligé de voyager dans sa propre adolescence, de prendre de la distance par rapport à l'adolescent qu'il a été.

Apprendre de l'enfant

On ne peut plus se contenter d'une seule explication, poursuit Véronique Delvenne, pédopsychiatre à Bruxelles. « Lors de l'évaluation d'un adolescent en souffrance, il faut toujours avoir en tête le questionnement relatif au passé psychopathologique de son enfance. » Concernant l'approche thérapeutique des états limites à l'adolescence, Jaume Claret, pédopsychiatre à Barcelone, voit « l'hospitalisation comme indispensable car il faut une coupure avec le milieu extérieur, source de conflits ». Il définit trois moments thérapeutiques indissociables : le travail avec les familles, le travail individuel avec le patient et les réunions de groupes.

Colette Chiland, de l'ASM 13, met l'accent sur le soutien des parents et l'importance du dialogue avec leurs enfants. « Les bons parents sont ceux qui pensent pouvoir apprendre de leur enfant. »

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