Les hépatites virales - L'Infirmière Magazine n° 203 du 01/03/2005 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 203 du 01/03/2005

 

hépatologie

Cours

Les hépatites virales sont des inflammations du foie provoquées par un virus. Des vaccins préventifs pour les hépatites A et B existent. Seules les hépatites B, C et D peuvent passer à la chronicité et, parfois, mener à une cirrhose. Présentation détaillée des différents types d'hépatites virales et de leurs traitements.

On distingue deux grands types d'hépatites virales, celles à transmission orofécale ne donnant pas d'hépatite chronique : virus de l'hépatite A et de l'hépatite E, et celles à transmission parentérale et sexuelle : virus de l'hépatite B (VHB), de l'hépatite C (VHC) et de l'hépatite delta (VHD).

HÉPATITE A

La France est une zone de faible endémie pour l'hépatite A. Les zones de très forte endémie (100 % de contamination) sont l'Afrique, l'Asie du Sud-Est, l'Inde, la Chine, l'Amérique du Sud et l'Amérique Centrale.

Transmission. Le virus de l'hépatite A (VHA) est un virus ARN. La contamination se fait par voie orofécale (ingestion d'aliments ou d'eau souillée contenant le virus). Les fruits de mer sont à risque plus élevé en raison de la capacité de filtration de l'eau et de concentration du virus par les coquillages. La contamination peut se faire également via l'entourage familial et entre partenaires sexuels. L'incubation dure quinze à quarante-cinq jours ; la virémie débute entre dix et vingt jours après la contamination et disparaît cinq à dix jours après l'apparition de l'ictère. Le virus est éliminé essentiellement dans les selles. Il est présent pendant toute la durée de l'hépatite, d'où l'importance de l'hygiène des mains. La contagiosité existe avant et pendant la durée des symptômes. Des formes plus sévères sont rencontrées chez les jeunes enfants et les personnes âgées. Dans un cas symptomatique sur mille, l'hépatite peut être fulminante. Il n'y a jamais d'évolution vers la chronicité ou la cirrhose. On voit cependant dans quelques cas des formes dites prolongées, évoluant sur plus de six mois, ou biphasiques (premier pic de transaminases, décroissance et second pic).

Diagnostic. Le diagnostic est simple ; il est fait par la détection de l'IgM antihépatite A dans le sérum. Ce test est très sensible et très spécifique.

Vaccination. Seulement 10 % de la population âgée de 20 ans a des anticorps protecteurs anti-VHA. Donc 90 % de la population jeune n'est pas immunisée et risque d'être contaminée lors de voyages dans des zones d'endémie. La vaccination est par conséquent recommandée. Il s'agit d'une injection vaccinale à zéro et six mois avec une tolérance excellente et un taux de réponse supérieur à 95 %. Aucun rappel n'est nécessaire.

HÉPATITE E

L'hépatite E est rare en France. Son virus est un virus ARN. Il se présente habituellement chez des personnes revenant de voyage dans des zones dites à risque (Maghreb, Inde notamment). Cette hypothèse doit être vérifiée par un interrogatoire indispensable.

Transmission. La contamination est orofécale. L'hépatite E n'évolue jamais vers la chronicité ou la cirrhose. Il peut y avoir des cas d'hépatites fulminantes peu fréquentes chez la femme enceinte dans le troisième trimestre de la grossesse. Dans les pays à forte endémie, elles surviennent même en dehors de la grossesse.

Diagnostic. Il est fait par la détection de l'IgM anti-VHE. Ce test est moins spécifique que celui de l'hépatite A et, dans certains cas, le diagnostic doit être fait par la détection de l'ARN du virus dans le sang ou dans les selles. Ce test n'est réalisé que par quelques laboratoires spécialisés en France.

HÉPATITE B

Le VHB est une particule enveloppée de 42 nanomètres. Le virion complet est aussi appelé particule de Dane. Il s'agit d'un virus à ADN, partiellement double brin. Il est présent dans le sang sous plusieurs formes : le virion complet, l'antigène HBe, l'ADN du VHB, l'antigène HBs (l'enveloppe du virus, sous forme de sphère ou de filaments ne contenant pas d'ADN). Il peut être présent dans les sécrétions sexuelles, plus rarement dans la sueur et la salive. La France est un pays d'endémie faible à intermédiaire pour le virus de l'hépatite B. Les zones à forte endémie sont l'Afrique subsaharienne, l'Asie du Sud-Est, l'Alaska, certains pays d'Amérique du Sud. Il existe un gradient croissant Nord-Sud de prévalence de l'hépatite B. La France a une prévalence de l'hépatite B, très élevée dans certaines populations migrantes vivant en France, nettement plus importante que dans les pays du nord de l'Europe. Le taux d'hépatite B aiguë est en déclin. Le vaccin existe depuis 1981. Son arrivée n'a pas entraîné de décroissance de l'incidence de nouveaux cas d'hépatite B, car son administration était limitée aux groupes dits à risque. Les éléments qui ont permis la décroissance de l'incidence de l'hépatite B sont : les mesures prophylactiques vis-à-vis du VIH ; le dépistage des femmes enceintes pour l'antigène HBs, la vaccination néonatale des enfants nés de mère porteuse de l'antigène HBs et la vaccination des nourrissons ou des adolescents selon les pays. Les mesures vaccinales de différents pays ont entraîné un déclin des nouveaux cas d'hépatite B.

Diagnostic. Il est fait par la détection dans le sérum de l'IgM anti-HBc et de l'antigène HBs (dans quelques cas, l'antigène HBs peut être absent mais l'IgM anti-HBc est positif).

Transmission. La transmission du virus se fait par voie parentérale et sexuelle : piqûres avec du matériel infecté (tatouage, acupuncture, soins dentaires, etc.) ; transfusions sanguines (le risque actuel est évalué à 1 pour 200 000 unités de produit sanguin) ; contamination inter-individu par voie sexuelle essentiellement. Dans les pays à forte endémie, il y a des contaminations dites horizontales non sexuelles, intrafamiliales ou à l'école. La contamination verticale mère-enfant existe : elle se fait à la naissance et dans la période périnatale. C'est pourquoi la vaccination des nourrissons nés de mère porteuse de l'antigène HBs, éventuellement associée à une administration d'immunoglobulines anti-HBs, est absolument impérative.

Conséquences de l'exposition au virus. Chez l'adulte sain, 10 % des hépatites aiguës B symptomatiques évoluent vers une forme chronique et 1 % de ces hépatites vers une forme fulminante. Cependant, un grand nombre d'hépatites aiguës virales B sont totalement asymptomatiques. Dans ce cas, le risque de passage à la chronicité est probablement plus élevé. Ce risque est aussi plus fréquent que chez l'adulte sain dans plusieurs autres cas (chez le nourrisson : risque de 90 % ; chez les patients immunodéprimés : sous corticoïdes, cirrhotiques, avec un cancer, sous hémodialyse, le risque est de 30 à 40 %). Il est possible que l'hépatite chronique évolue en dix à quarante ans vers la cirrhose, surtout si le virus reste actif (persistance d'une réplication virale). La cirrhose peut se compliquer d'une insuffisance hépatique et d'un carcinome hépatocellulaire.

Un point important à savoir : le VHB est directement oncogène, c'est-à-dire que son génome peut intégrer celui de la cellule, et donc permettre la formation d'un carcinome hépatocellulaire au bout de plusieurs dizaines d'années, même en l'absence de cirrhose.

Prévention. La prévention de l'hépatite B repose sur la vaccination anti-VHB. Ce vaccin est commercialisé en France depuis 1981. Tous les vaccins sont à base d'antigène HBs (l'enveloppe du virus) et ne contiennent pas d'ADN viral, donc ne peuvent pas transmettre la maladie. Les premiers vaccins étaient faits à partir de purification de plasma ; les vaccins actuels sont le résultat de recombinaison génétique. Des cellules de mammifères ou des levures génétiquement modifiées produisent du gène S ou pré-S codant pour l'antigène HBs. La concentration antigénique est entre 5 et 40 microg d'antigène HBs avec un adjuvant, l'hydroxyde d'aluminium. Les schémas actuels d'administration du vaccin sont à zéro (première injection), un mois et six mois, sans injection de rappel hors situation à risque. Il existe des vaccins monovalents, des vaccins combinés VHA + VHB, et des vaccins hexavalents pour les enfants. Le but de la vaccination est d'induire un taux d'anticorps anti-HBs protecteur supérieur à 10 UI/l. Dans certaines situations à risque (métiers à risque, infirmières, médecins), un taux protecteur de 100 UI/l est recommandé. Le but est également d'induire une mémoire immune : même après la baisse du taux d'anticorps anti-HBs en dessous de cette limite, la personne est protégée et produira des anticorps protecteurs en cas de contact avec le VHB. Le taux de protection est de 95 % chez le nouveau-né et l'enfant, de 80 % chez le prématuré, de 90 à 95 % dans la tranche 20-40 ans, de 85 % dans la tranche 40-49 ans, de 70 % dans la tranche 50-59 ans, et de 50 % dans la tranche supérieure à 59 ans. Le vaccin est moins efficace chez les patients insuffisants rénaux, dialysés, et sous corticoïdes. Dans les pays de forte endémie, des programmes de vaccination à la naissance pour tous les nourrissons ont été établis. Dans les pays à faible endémie, comme la France, les risques de transmission sont essentiellement des infections périnatales, si la mère est Ag HBs + ou des infections à l'adolescence, période plus à risque.

En France, dès 1982, la vaccination était ciblée pour les personnes à risque, avec recommandations vaccinales pour le personnel de santé et les hémodialysés. En 1991, elle est devenue obligatoire pour le personnel de santé. En 1992, le dépistage de l'antigène HBs a été déclaré obligatoire au 6e mois de grossesse. En 1994, une campagne nationale de vaccination a été effectuée avec vaccination gratuite des élèves de sixième, ce qui a permis la vaccination de plusieurs millions d'adolescents. En 1995, le vaccin a été intégré dans le calendrier vaccinal. En 2000, une AMM européenne a été obtenue pour les vaccins hexavalents. La survenue de cas d'affections démyélinisantes (sclérose en plaques notamment) dans les suites ou à distance de la vaccination, a entraîné une suspension de la campagne nationale de vaccination en 1998. Une conférence de consensus sur la vaccination anti-VHB s'est tenue à Paris en 2003. Conclusion : les liens entre le vaccin contre l'hépatite B et la survenue d'une affection démyélinisante ne peuvent être établis avec certitude. Si ce lien existe, il est faible (le risque relatif oscille entre 0,6 et 1,4) et le bénéfice/risque reste, en France, très en faveur de la vaccination. La relation entre la sclérose en plaques et le vaccin est difficile à établir, car le risque de développer une sclérose en plaques est peu différent dans les populations vaccinées et non vaccinées. On ne peut exclure chez certains patients que le vaccin, qui est un stimulus antigénique, ait activé une affection auto-immune comme la sclérose en plaques. Cela reste cependant à l'échelon individuel, et le lien entre le vaccin et la survenue d'une sclérose en plaques est considéré comme faible. Par ailleurs, aucun cas d'affection démyélinisante n'a été observé chez des enfants de moins de sept ans. Il est donc recommandé de vacciner les enfants de mères Ag HBs + à la naissance, d'insérer le vaccin anti-VHB dans le calendrier vaccinal des enfants et de vacciner les adolescents, qui sont une population à risque.

Traitement de l'hépatite aiguë B. Il n'y en a pas. Il n'existe en effet pas de preuves que les chances de guérison soient augmentées par un traitement antiviral. Le risque d'évolution vers la chronicité après une hépatite aiguë B dépend surtout de l'état immunitaire. Il est plus fréquent chez le nourrisson et chez l'immunodéprimé que chez l'adulte sain.

Traitement de l'hépatite chronique B. Les indications du traitement sont l'existence d'une hépatite chronique constituée, prouvée par une biopsie hépatique avec une élévation des transaminases et une présence de l'ADN du virus de l'hépatite B à un taux de 105-106 copies/ml.

Interféron recombinant alpha. Il s'agit d'un traitement par injections sous-cutanées de 4,5 à 10 millions d'unités X3 par semaine pendant une durée de six mois. Il entraîne une disparition de l'antigène HBs uniquement dans 10 % des cas et un arrêt de la réplication virale (négativation de l'ADN du virus de l'hépatite B ou séroconversion dans le système HBe) dans 30 à 40 % des cas. Les patients les plus à même d'en bénéficier sont les personnes atteintes d'une hépatite chronique B sans cirrhose avec une charge virale B faible et des transaminases très élevées. L'interféron pégylé est actuellement en évaluation.

Analogues des nucléosides ou des nucléotides. La lamivudine est un analogue des nucléosides. Ce traitement a la capacité d'inhiber la réplication du virus de l'hépatite B par une inhibition de l'ADN polymérase. Elle est administrée à la dose de 100 mg par jour par voie orale. Il s'agit d'un traitement extrêmement puissant, très efficace, très bien supporté. Mais la lamivudine ne pouvant éliminer le virus de l'hépatite B, un traitement prolongé pendant des années (le virus, en état non réplicant, reste présent dans le foie) est nécessaire. D'autre part, il y a un risque d'échappement virologique dû à une mutation du gène de l'ADN polymérase du virus de l'hépatite B (mutant YMDD) qui augmente avec le temps et qui peut atteindre 40 % en trois ans.

L'adéfovir est un analogue des nucléotides. Il est administré, à la dose de 10 mg par jour par voie orale, sur de longues périodes et ne peut éliminer lui-même le virus de l'hépatite B. Le taux de résistance semble plus faible (3 % en trois ans). Il a l'avantage d'être efficace sur les virus de l'hépatite B résistants à la lamivudine. Actuellement, la stratégie thérapeutique idéale n'est pas connue. On ne sait pas si un traitement combiné lamivudine ou adéfovir doit être utilisé. Cela reste en évaluation.

HÉPATITE DELTA

Le virus de l'hépatite delta est un virus ARN. Il s'agit d'un virus défectif qui est présent uniquement chez les personnes infectées par l'hépatite B. En effet, le virus de l'hépatite delta nécessite la présence de celui de l'hépatite B pour pouvoir se multiplier. Il est entouré par l'enveloppe du virus de l'hépatite B, l'antigène HBs.

La prévalence du virus est en déclin constant. Les hépatites delta existent actuellement encore en France dans la population toxicomane infectée par l'hépatite B. Il y a encore quelques foyers d'infection à virus delta, comme certaines régions du sud de l'Italie, de la Turquie, les républiques de l'ex-URSS, et le Venezuela.

Diagnostic. L'hépatite delta peut se manifester sous deux formes : une hépatite par co-infection B et delta (contamination simultanée par les deux virus) ou la surinfection d'un portage chronique du virus de l'hépatite B par le virus delta (un patient ayant une hépatite chronique B ou porteur chronique du virus de l'hépatite B est infecté par le virus delta). Il faut penser à ce virus, et les marqueurs du virus delta doivent toujours être recherchés chez un patient porteur de l'antigène HBs. Ces marqueurs sont l'anticorps antidelta total (Igg) et l'IgM antidelta. La réplication du virus delta est affirmée par la présence de l'ARN du virus delta dans le sérum ou la présence de l'antigène delta dans les hépatocytes sur une analyse de la biopsie du foie.

Traitement. On emploie le même traitement que pour l'hépatite B. Si le virus de l'hépatite B est éliminé, celui de l'hépatite delta le sera aussi. Il n'y a pas d'antiviral spécifique sur le virus delta. La lamivudine et l'adéfovir ne sont pas efficaces sur la réplication delta.

Mais l'interféron, à très forte dose (9 millions d'unités par jour pour une durée prolongée supérieure à un an), peut inhiber la réplication delta. Dans des cas assez fréquents, il y a une réapparition du virus à l'arrêt de l'interféron. Ce traitement est peu utilisé en raison de sa mauvaise tolérance à ces doses très fortes.

HÉPATITE VIRALE C

Le virus de l'hépatite C est un virus ARN simple brin, de la famille des flavivirus. C'est un virus à transmission essentiellement parentérale. Il se caractérise par l'existence de plusieurs sous-types ou génotypes, et certains génotypes sont plus sensibles au traitement que d'autres. La détermination du génotype sera un élément important dans les décisions thérapeutiques.

La prévalence de l'hépatite C se situe aux alentours de 1 % dans la population française. Elle oscille entre 0,8 et 2 % dans la plupart des pays industrialisés. Elle est un peu plus élevée dans certains pays comme le Japon (2 %) et beaucoup plus élevée en Égypte (jusqu'à 20 %). Dans les pays industrialisés, les groupes qui présentent la plus forte prévalence de l'hépatite C sont les hémophiles, les toxicomanes et les hémodialysés.

Chez les toxicomanes, une prévalence supérieure à 50 % peut être retrouvée. Elle augmente avec la durée de la toxicomanie intraveineuse. Les risques de l'hépatite C post-transfusionnelle sont devenus minimes en France depuis l'utilisation des tests de dépistage sanguins (1 pour 200 000 à 400 000 unités de produits sanguins labiles).

L'introduction de ces tests en France date de mars 1990 ; les tests de 2e et 3e génération sont arrivés en 1991-1992. L'hépatite aiguë C est surtout répandue dans les populations toxicomanes, dans quelques cas après transmission intracouple ou après transmission nosocomiale.

Transmission. Le mode de contamination est essentiellement parentéral. Le risque transfusionnel a quasiment disparu, mais il persiste pour toutes les piqûres avec du matériel infecté (toxicomanie intraveineuse, soins médicaux, tatouage, piercing, soins dentaires, etc.).

Diagnostic. L'incubation est de quatre à douze semaines. La plupart des cas sont asymptomatiques ou peu symptomatiques (80 %). Il n'y a pas d'hépatite fulminante C en dehors de cas exceptionnels probablement favorisés par des cofacteurs. L'ARN du virus de l'hépatite C est le premier marqueur détecté dans le sérum, en général dès le quinzième jour ; l'anticorps anti-VHC n'apparaît qu'au bout de deux à quatre mois. Ainsi, en cas de piqûre accidentelle, la surveillance nécessite un dosage des transaminases tous les quinze jours à partir du contage et une détection de l'ARN du virus à quinze jours, à un, deux et trois mois et en cas d'élévation des transaminases (une recherche de l'anticorps anti-VHC sera effectuée à trois mois). Ceci est d'autant plus important que le traitement est efficace.

Traitement. L'hépatite aiguë C doit être traitée dans la majorité des cas dans les trois mois qui suivent le contage. Le traitement prophylactique, immédiatement après une piqûre accidentelle, n'est pas recommandé. Le traitement précoce est en revanche recommandé en cas de montée des transaminases et de positivité de l'ARN du virus de l'hépatite C. Il s'agit d'un traitement de six mois, soit à base d'interféron alpha seul (dose de 3 à 10 millions d'unités X3 par semaine), soit à base d'interféron pégylé, soit à base d'interféron pégylé et ribavirine. Ce traitement est efficace dans 90 % des cas, permettant la négativation définitive de l'ARN du virus de l'hépatite C.

HÉPATITE C CHRONIQUE

Il est important de rappeler que 50 à 80 % des patients contaminés vont développer spontanément une hépatite chronique.

Diagnostic. L'hépatite chronique C est décelée soit lors d'un bilan systématique, pour une fatigue par exemple, soit lors de la découverte de transaminases élevées ou lors d'un dépistage systématique dans des situations dites potentiellement à risque (transfusion avant 1990, hospitalisations fréquentes, toxicomanie intraveineuse, partenaire de personne porteuse d'une hépatite C). L'hépatite C est caractérisée par la présence quasi constante de l'anticorps anti-VHC. Cet anticorps n'est pas protecteur et signifie uniquement que la personne a été en contact avec le virus de l'hépatite C. Lorsque les transaminases sont élevées, l'ARN du virus est presque toujours détecté, alors qu'elles peuvent être normales, avec présence de l'ARN du virus dans le sérum. Le seul marqueur d'activité persistante du virus est la détection de l'ARN du virus de l'hépatite C dans le sérum des patients par PCR.

Les transaminases ALAT sont en général supérieures aux ASAT dans l'hépatite C. L'élévation des transaminases est très modérée et non corrélée avec la sévérité de l'hépatite. La gravité de l'hépatite C est évaluée par la biopsie hépatique qui permet de grader son activité (degré de nécrose des hépatocytes et activité inflammatoire) et le degré de fibrose qui pronostique le passage ultime vers la cirrhose. Le score le plus utilisé en France est le score dit Métavir qui cote l'activité (A de 0 à 3) et la fibrose (F de 0 à 4 ; 4 étant la cirrhose). En parallèle, se développent actuellement des tests non invasifs pour évaluer la fibrose et l'activité. Le plus connu est l'Actitest® ou Fibrotest®, qui peut être effectué dans certains laboratoires validés pour ce test et a un bon taux de corrélation avec la biopsie dans les extrêmes (fibroses 0 et 4) et un moindre taux de corrélation dans les zones de fibrose moyenne (2 et 3). Ce test n'est pas, actuellement, remboursé par la Sécurité sociale.

Traitement. Il repose actuellement sur l'association interféron pégylé et ribavirine. Il y a trois grands types de réponses.

Réponse virologique complète. Sous traitement, l'ARN du virus de l'hépatite C devient indétectable par PCR. Les transaminases se normalisent (dans 20 % à 30 % des cas, elles peuvent rester élevées, notamment sous interféron pégylé). Lorsque le traitement est arrêté, l'ARN du virus ne réapparaît pas dans le sérum. Les transaminases restent normales. Si l'ARN reste indétectable six mois après la fin du traitement, le risque de réactivation tardive est inférieur à 5 %. On peut donc estimer que le virus est éliminé définitivement.

Réponse à une rechute virologique. Pendant le traitement, l'ARN du virus de l'hépatite C est indétectable, mais dans les six mois qui suivent la fin du traitement, il réapparaît. Il est en général corrélé à une augmentation des transaminases, souvent plus élevée transitoirement qu'en début de traitement. L'ARN reste positif sur le long terme.

Non-réponse virologique. Dans ce cadre-là, l'ARN du virus de l'hépatite C reste positif dans le sérum sous traitement. Les transaminases se normalisent rarement. On peut cependant individualiser plusieurs types de non-réponses : des réponses partielles où la charge virale baisse de façon significative pendant le traitement mais ne se négative pas, ou se négative de façon intermittente, et des non-réponses complètes où la charge virale ne varie pas sous traitement.

Les médicaments utilisés sont :

- l'interféron alpha-pégylé, dont l'administration se fait une fois par semaine en sous-cutané. Les effets secondaires les plus fréquents sont un syndrome grippal, après la première ou deuxième injection, une asthénie variable d'un patient à l'autre, une leucopénie, une thrombopénie, des troubles de l'humeur (dépression ou irritabilité), une fragilité capillaire, des rougeurs au point d'injection ;

- la ribavirine, un analogue des nucléosides, est un médicament donné par voie orale sans efficacité antivirale propre contre le virus, mais qui augmente de façon significative l'efficacité de l'interféron. Ses complications sont : l'anémie hémolytique, à dose dépendante, réversible, due à une accumulation du médicament dans les globules rouges ; la toux sèche ; l'insomnie. Elle a une élimination rénale et sa dose doit être réduite en cas d'insuffisance rénale.

Le traitement recommandé est l'association interféron pégylé et ribavirine : interféron pégylé alpha-2b (1,5 microg/kg par semaine) et ribavirine (1 000 à 1 200 mg par jour) ou interféron pégylé alpha-2a (180 microg par semaine) et ribavirine (800 mg). La durée du traitement pour les génotypes 2 ou 3 est de vingt-quatre semaines, et quarante-huit semaines pour les génotypes 1 et 4. Pour le génotype 1, une baisse de la charge virale de 2 log à la douzième semaine est prédictive d'une réponse virologique complète. Les taux de réponse virologique complets pour les génotypes 2 et 3 avec cette combinaison sont de l'ordre de 75 à 80 % et pour le génotype 1 de 40 à 50 %. Ce traitement peut être effectué avec succès, même en cas de non-réponse à un premier traitement par interféron seul ou par interféron non pégylé plus ribavirine. En cas de non-réponse à un traitement bien conduit par l'interféron pégylé plus ribavirine, il n'y a pas de solution thérapeutique idéale, et il faut soit participer à des essais cliniques évaluant de nouvelles combinaisons thérapeutiques, soit attendre de nouvelles générations d'antiviraux.

La prise en charge du traitement par interféron pégylé plus ribavirine est très importante. Il se fait exclusivement en ambulatoire, ce qui est à la fois un avantage pour les patients et une source de stress, car ils peuvent se retrouver seuls à gérer leurs problèmes. Un support soit par le médecin traitant, soit par l'infirmière qui fait les piqûres à domicile, soit par l'équipe en charge du patient est essentiel. Les effets secondaires du traitement doivent être surveillés lors de consultations et par la surveillance des tests biologiques effectués régulièrement. Une explication approfondie, avant le démarrage, de l'intérêt du traitement, des chances de réussite, de sa durée et des effets secondaires potentiels, est nécessaire pour le mener à bien. Ce traitement n'est une urgence qu'exceptionnellement et doit être fait à un moment propice pour le patient et pour le médecin. Le patient doit se préparer, prévenir son entourage, adapter éventuellement sa charge de travail à la période de traitement. Il vaut mieux attendre six mois ou un an avant de le commencer plutôt que de le faire dans la précipitation. Seuls les cas où il y a un risque d'évolution rapide vers la cirrhose sont de réelles urgences. L'accompagnement au cours du traitement est donc essentiel pour sa réussite.

La présence dans les services hospitaliers d'infirmières spécialisées dans la prise en charge de l'hépatite C représente une aide considérable pour les patients, permettant de gérer les problèmes techniques liés aux injections de l'interféron ou les inquiétudes des patients quant à la réussite du traitement, à sa tolérance et à la gestion des effets secondaires.

Notions importantes

Au cours d'une hépatite virale aiguë, les transaminases peuvent être très élevées et dépasser 50 fois la normale sans aucune corrélation avec la gravité de l'hépatite. Les éléments de sévérité et de gravité d'une hépatite sont d'une part la baisse des facteurs de coagulation et du taux de prothrombine en dessous de 50 %, d'autre part l'apparition d'une encéphalopathie au cours d'une hépatite aiguë, qui définit ce que l'on appelle l'hépatite fulminante dont la mortalité est élevée (supérieure à 50 %). Au cours d'une hépatite virale aiguë, la biopsie hépatique n'est habituellement pas nécessaire. Il est très important d'en effectuer le diagnostic étiologique, d'en affirmer au cours du suivi la guérison biologique et virologique et d'éviter la prescription de médicaments de type paracétamol, qui peut aggraver l'hépatite, ainsi que de médicaments à action sédative centrale dont le métabolisme est habituellement hépatique (somnifères, anti-émétiques à action neuroleptique centrale).