Droit du travail : J'ai été embauchée comme infirmière DE contractuelle dans une maison de retraite publique relevant du département, au service des soins à domicile en 1997. Je n'ai jamais été « stagiérisée ». Suite à un différend relatif au fait que je refusais de recopier les renouvellements de prescription médicale, j'ai été licenciée. Je suis aujourd'hui décidée à saisir le tribunal pour contester mon licenciement. Mais je ne suis pas sûre du tribunal compétent. Il me semble que c'est le conseil de prud'hommes puisque j'ai toujours été contractuelle. Pourtant, d'anciennes collègues me disent que c'est le tribunal administratif. Rien n'est précisé sur mon contrat de travail. Qu'en est-il et quelles sont mes chances de succès par rapport à ce que l'établissement me reproche ? - L'Infirmière Magazine n° 204 du 01/04/2005 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 204 du 01/04/2005

 

Juridique

Les textes ne sont pas très clairs sur le statut des agents contractuels de la fonction publique hospitalière.

Il convient de se référer aux décisions rendues par les tribunaux, ce qu'on appelle la jurisprudence.

À ce titre, le tribunal des conflits considère, depuis 1996 (arrêt Berkani du 25 mars 1996), que les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public administratif sont des agents contractuels de droit public, quel que soit leur emploi.

Dans ces conditions, une maison de retraite publique étant bien, par définition, un établissement public administratif (par opposition aux établissements publics industriels et commerciaux), vous entrez obligatoirement dans la catégorie des agents contractuels de droit public.

La jurisprudence Berkani a été d'ailleurs confirmée la même année par une autre décision qui concernait une infirmière contractuelle exerçant dans un centre hospitalier général.

Dans ce cas encore, les juges ont décidé que cette infirmière avait le statut d'agent contractuel de droit public.

Aussi, seul le tribunal administratif est compétent pour se prononcer sur votre licenciement, à l'exclusion du conseil de prud'hommes.

Textes peu clairs

En second lieu, concernant le motif de votre licenciement lié au refus de recopier les renouvellements de prescription médicale, il est un peu difficile de vous répondre précisément au vu du manque d'informations précises. Quoi qu'il en soit, les textes, cette fois encore, ne sont pas d'une grande clarté.

Conformément aux articles R 4312-1 et suivants du Code de la santé publique (ancien article 29 du décret no 93-221 du 16 février 1993 relatif aux règles professionnelles des infirmiers et infirmières) : « L'infirmier ou l'infirmière applique et respecte la prescription médicale écrite, datée et signée par le médecin prescripteur, ainsi que les protocoles thérapeutiques et de soins d'urgence que celui-ci a déterminés [...]. »

Protéger du risque d'erreur

Dans le même sens, les articles R 4311-1 et suivants du Code de la santé publique (ancien article 6 du décret n° 2002-194 du 11 février 2002 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'infirmière) prévoit que « l'infirmier est habilité à pratiquer les actes suivants (notamment la distribution de médicaments) soit en application d'une prescription médicale qui, sauf urgence, est écrite, qualitative et quantitative, datée et signée par le médecin, soit en application d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par un médecin [...] ».

Qui plus est, plusieurs circulaires ont confirmé l'exigence selon laquelle la rédaction d'une prescription médicale constitue une prérogative exclusivement médicale, comme la circulaire du 28 novembre 1997 de la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales d'Alsace : « Les ordonnances doivent être rédigées exclusivement par le médecin lui-même, qui a obligation de les dater, de les signer et d'y apposer son cachet. »

Pourtant, l'article 76 du Code de déontologie médicale (décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 paru au Journal officiel du 8 septembre 1995) ne pose pas la règle de manière aussi explicite, se contentant de la formule suivante : « L'exercice de la médecine comporte normalement l'établissement par le médecin, conformément aux consultations médicales qu'il est en mesure de faire, des certificats, attestations et documents dont la production est prescrite par les textes législatifs et réglementaires.

Tout certificat, ordonnance, attestation ou document délivré par un médecin doit être rédigé lisiblement, en langue française et daté, et permettre l'identification du praticien dont il émane et être signé par lui. Le médecin peut en remettre une traduction au patient dans la langue de celui-ci. »

Exiger du médecin qu'il rédige lui-même ses prescriptions (renouvellement ou pas) protège les patients du risque d'erreur inhérent à une prescription recopiée par l'infirmière. Cette dernière, si elle accepte une telle délégation, est passible de poursuites pénales pour exercice illégal de la médecine.

Peut-être pourriez-vous vous rapprocher du médecin inspecteur de la Direction (départementale ou régionale) des affaires sanitaires et sociales dont dépendait l'établissement qui vous employait.

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