Du bon usage des protocoles - L'Infirmière Magazine n° 205 du 01/05/2005 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 205 du 01/05/2005

 

Urgence

Juridique

Le protocole, qui est une prescription médicale, permet à l'infirmière d'intervenir dans l'urgence, en l'absence de médecin. Mais c'est à lui de définir les cas qui relèvent de l'urgence.

Par protocole, on entend le descriptif de techniques à appliquer ou de consignes à observer dans certaines situations. Un protocole est une prescription médicale. En cela, il doit être écrit, daté et signé de la main du médecin prescripteur, pour pouvoir être validé dans un service. L'infirmière est compétente pour effectuer un certain nombre d'actes conservatoires face à des situations d'urgence, définies ou non dans un protocole. Son intervention devra obligatoirement faire l'objet d'un compte rendu écrit, daté, signé, qui devra être remis au médecin et annexé au dossier du patient.

Notion d'urgence

Selon les tribunaux, l'acte infirmier urgent est celui qui, « s'il n'est pas réalisé dans les meilleurs délais, ferait perdre au patient une chance de survivre ou de guérir ». Certaines situations d'urgence sont prévisibles, en raison de l'état du malade ou de la nature du traitement.

Dans ces conditions, il est possible d'établir des protocoles écrits préalables, que l'infirmière appliquera. Même en l'absence de protocoles, l'infirmière devra, en vertu du principe d'assistance à personne en péril, mettre en oeuvre les moyens rapides et adéquats d'assistance, quel que soit le résultat obtenu, ou adopter des mesures susceptibles de déclencher un secours, dès lors que cela n'entraîne aucun risque réel pour elle ou pour des tiers. Un dépassement exceptionnel de ses compétences est même permis par les textes.

Les tribunaux se montrent ainsi très sévères vis-à-vis de tout manquement volontaire à l'obligation morale de soins et de surveillance. Dans le délit de non-assistance, l'élément moral de l'infraction est prépondérant. Il s'agit d'un comportement personnel volontaire : la loi punit celui qui s'abstient consciemment, en toute connaissance de cause.

Et c'est à travers cet élément moral que l'erreur d'appréciation peut être fatale pour l'infirmière : avant de refuser de répondre à l'appel d'un malade, elle doit se demander s'il y a vraiment péril imminent, c'est-à-dire urgence, et si le soin réclamé relève de sa compétence. Pour cela, il convient d'avoir un maximum de renseignements sur le péril qui menace le malade, ce qui n'est pas toujours possible. La règle de prudence est l'intervention immédiate.

Application des protocoles de soins

Rappelons que, même si la mise en place d'un protocole résulte d'un travail d'équipe et doit s'intégrer dans l'organisation des soins, seul le médecin est compétent pour décider quelles sont les situations qui relèvent de l'urgence et nécessitant alors l'élaboration d'un protocole. Par ailleurs, le protocole, validé par un médecin, doit être approuvé par la direction des soins qui doit s'assurer de sa diffusion, de son utilisation et de sa remise à jour. Le protocole doit généralement être revêtu de la date et de la signature du médecin prescripteur. Dans le cas contraire, l'existence même de l'écrit peut être utilement complétée par la reprise, dans le dossier de soins infirmiers, de l'ordre de prescription, de la date et du nom du médecin prescripteur. Dans certains domaines, des arrêtés imposent des conditions de forme au protocole.

Une infirmière qui refuserait d'appliquer un protocole conforme aux conditions de validité, sans motif légitime, serait fautive et s'exposerait à des poursuites disciplinaires. Le décret de compétence de février 1993 (actuels articles R 4312-1 et suivants du Code de la santé publique) limitait l'utilisation des protocoles à des situations d'urgence, le décret de février 2002 étend le champ des protocoles de soins à l'ensemble des actes de soins réalisés sur prescription médicale, sauf pour ceux qui requièrent l'intervention possible d'un médecin à tout moment.

CE QU'IL FAUT RETENIR

En cas d'urgence, l'infirmière est tenue de déployer des moyens rapides et adéquats d'assistance.

Elle peut, notamment, s'appuyer sur les protocoles de soins, validés par un médecin, et approuvés par la direction des soins.

Une soignante qui refuserait d'appliquer un protocole conforme aux conditions de validité s'expose à des poursuites disciplinaires.

CE QUE PRÉVOIENT LES TEXTES

« En l'absence d'un médecin, [l'infirmière est habilitée], après avoir reconnu une situation comme relevant de l'urgence ou de la détresse psychologique, à mettre en oeuvre des protocoles de soins d'urgence, préalablement écrits, datés et signés par le médecin responsable. Dans ce cas, [l'infirmière] accomplit les actes conservatoires nécessaires jusqu'à l'intervention d'un médecin. Ces actes doivent obligatoirement faire l'objet de sa part d'un compte rendu écrit, daté, signé, remis au médecin et annexé au dossier du patient. En cas d'urgence et en dehors de la mise en oeuvre du protocole, [l'infirmière] décide des gestes à pratiquer en attendant que puisse intervenir un médecin. [Elle] prend toutes mesures en son pouvoir afin de diriger la personne vers la structure de soins la plus appropriée à son état. »

Code de la santé publique, article R 4311-14.

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