L'épilepsie de l'enfant - L'Infirmière Magazine n° 205 du 01/05/2005 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 205 du 01/05/2005

 

neurologie

Cours

L'épilepsie est la maladie neurologique chronique la plus fréquente dans l'enfance. Ses symptômes sont la manifestation de décharges électriques transitoires et paroxystiques des neurones du cortex cérébral. Elles peuvent être localisées et produire des crises partielles ou bien généralisées.

L'épilepsie est un ensemble d'affections chroniques caractérisées par la récurrence de manifestations paroxystiques dues à des décharges électriques d'un ensemble de neurones. Les neurones ont une activité électrique physiologique qui correspond aux modifications de leur potentiel de membrane. La cellule dépolarisée est plus excitable ; elle est moins excitable ou inhibée quand elle est hyperpolarisée. Il existe un équilibre entre excitation et inhibition lié à l'équilibre entre les neurotransmetteurs inhibiteurs (comme l'acide gamma amino-butyrique) et les neurotransmetteurs excitateurs (comme le glutamate). Lorsque cet équilibre est rompu, une dépolarisation d'un groupe de neurones a lieu, ce qui entraîne une crise. Pour qu'il y ait épilepsie, il faut un facteur déclenchant source de dépolarisation récurrente d'un groupe de neurones, soit par excès d'excitation, soit par défaut d'inhibition. La survenue d'une crise unique est insuffisante pour parler d'épilepsie.

FORMES CLINIQUES

La crise épileptique peut prendre différentes formes cliniques en fonction du tissu cortical dans lequel la dépolarisation a lieu et de sa propagation anatomique dans le cerveau. Les crises partielles simples restent limitées au néocortex cérébral. Les crises partielles complexes touchent le néocortex et les structures limbiques. Quand une crise partielle se généralise, il y a implication du tronc cérébral. Les crises généralisées intéressent le cortex et probablement le thalamus. Le développement cérébral qui se poursuit bien après la naissance favorise la survenue d'épilepsie chez le jeune enfant par plusieurs mécanismes : hyperexcitabilité transitoire des réseaux neuronaux en formation, excès transitoire de récepteurs excitateurs, apparition retardée des récepteurs inhibiteurs. Les épilepsies du nourrisson peuvent se modifier avec l'âge, se stabiliser, voire disparaître. Cependant, lorsque l'épilepsie a été très active pendant cette période de maturation, certains réseaux peuvent rester épileptiques même sans lésion sous-jacente. Le développement régional du cerveau explique également les manifestations cliniques de l'épilepsie en fonction de l'âge : les phénomènes d'hyperexcitabilité commencent à la naissance dans les aires motrices ; au cours du premier trimestre, dans les aires visuelles ; au cours du deuxième trimestre, dans les aires associatives postérieures ; seulement au cours de la deuxième année, dans la région frontale et beaucoup plus tard, dans le cortex temporal. Les nouveau-nés font essentiellement des crises motrices.

Les crises occipitales débutent dans les premiers mois de la vie, les épilepsies frontales ne surviennent qu'après l'âge de 2 ans et les épilepsies temporales qu'après l'âge de 8 ans. Les nourrissons ne présentent pas de crises cloniques ou tonicocloniques comme le grand enfant ou l'adulte, car la myéline qui assure la rapidité de la conduction nerveuse a une maturation postnatale qui se termine vers l'âge de 4 ans. La crise épileptique est un événement stéréotypé au cours duquel le patient peut perdre conscience. En général, elle débute soudainement et cesse spontanément. Sa durée est variable, de quelques secondes à quelques minutes, et est suivie d'un état postcritique de somnolence et de confusion.

ÉTIOLOGIE

Il existe trois facteurs dans l'étiologie de l'épilepsie chez l'enfant qui peuvent se manifester seuls ou associés : la maturation cérébrale, les lésions épileptogènes et les causes génétiques. Un facteur génétique peut modifier le potentiel épileptogène d'une lésion structurelle du système nerveux et des facteurs exogènes peuvent modifier celui d'une cause génétique. L'épilepsie est dite symptomatique lorsqu'une lésion cérébrale est démontrée, cryptogénique lorsque la lésion est suspectée mais non démontrée et idiopathique lorsque la lésion cérébrale est écartée.

Facteurs génétiques. Il existe une forte corrélation entre l'épilepsie idiopathique et la prédisposition génétique. Pour certaines maladies, le gène en cause a été pleinement identifié, par exemple sur le chromosome 20 pour les convulsions néonatales familiales bénignes et sur le bras court du chromosome 6 pour l'épilepsie myoclonique juvénile. Quant aux épilepsies symptomatiques, l'identification d'une anomalie génétique a été démontrée dans la lissencéphalie. Il y a environ 150 maladies génétiquement déterminées dont les crises épileptiques font partie du tableau clinique. Ces crises représentent 1 % de l'ensemble des épilepsies.

Lésions épileptogènes.

Malformations cérébrales. Les malformations corticales sont les lésions épileptogènes les plus fréquentes chez l'enfant. Il peut s'agir de troubles de la migration pure (hétérotopie), c'est-à-dire des neurones en position aberrante, des troubles de l'organisation corticale (micropolygyries diffuses ou localisées) ou des troubles de la différenciation neurono-gliale plus ou moins étendus : forme localisée (dysplasie corticale focale), forme hémisphérique diffuse mais unilatérale (hémimégalencéphalie) ou forme multifocale (sclérose tubéreuse de Bourneville). L'agénésie du corps calleux et les microcéphalies sont d'autres malformations épileptogènes. Les tumeurs neuronales, comme les gangliogliomes, les dysembryo-neuro-épithéliomes et les hamartomes, sont souvent associées à l'épilepsie.

Autres lésions. Les lésions anoxo-ischémiques de survenue anté ou périnatale (leucomalacie périventriculaire du prématuré, porencéphalie) donnent des épilepsies de sévérité variable. En revanche, l'anoxo-ischémie du nouveau-né à terme et d'origine postnatale (noyade, mort subite « rattrapée », arrêt cardiaque) provoque des lésions circulatoires corticales sources d'épilepsie sévère.

Les malformations vasculaires, comme les angiomatoses, les angiomes caverneux et les malformations artério-veineuses, sont sources d'épilepsie dont la gravité varie en fonction de l'étendue et de la localisation. Les infections bactériennes, virales ou parasitaires peuvent entraîner une épilepsie en provoquant des lésions corticales de type anoxo-ischémique, nécrotique ou inflammatoire.

CLASSIFICATION

Il est indispensable de classifier les épilepsies pour pouvoir établir un pronostic, adapter un traitement et chercher les gènes de prédisposition. Chez l'enfant, la classification en fonction du type de crise s'avère parfois insuffisante. Il existe donc une classification des syndromes épileptiques qui tient compte du type de crise, mais aussi des caractéristiques à l'EEG critique et intercritique (pattern), de l'état neurologique et mental entre les crises, des résultats de l'imagerie cérébrale et de l'évolution.

Épilepsies et syndromes liés à une localisation (locale, focale et partielle).

Idiopathiques (avec début âge dépendant).

- Épilepsie bénigne de l'enfance avec pointes centro-temporales ;

- épilepsie de l'enfance à paroxysmes occipitaux ;

- épilepsie primaire de la lecture.

Symptomatiques.

- Épilepsie partielle continue progressive de l'enfance ;

- syndromes constitués de crises précipitées par des stimulations spécifiques ;

- épilepsies du lobe temporal ;

- épilepsies du lobe frontal ;

- épilepsies du lobe pariétal ;

- épilepsies du lobe occipital.

Cryptogéniques.

Épilepsies et syndromes généralisés.

Idiopathiques (avec début âge dépendant).

- Convulsions néonatales familiales bénignes ;

- épilepsie myoclonique bénigne du nourrisson ;

- épilepsie absence de l'enfant ;

- épilepsie absence juvénile ;

- épilepsie myoclonique juvénile ;

- épilepsie avec crises grand mal du réveil ;

- autres épilepsies idiopathiques généralisées ;

- épilepsies avec crises précipitées par des stimulations spécifiques.

Cryptogéniques ou symptomatiques.

- Syndrome de West (spasmes infantiles) ;

- syndrome de Lennox-Gastaut ;

- épilepsie avec crises myoclono-astatiques (syndrome de Doose) ;

- épilepsies avec absences myocloniques.

Symptomatiques.

- Étiologie non spécifique : encéphalopathie myoclonique précoce, encéphalopathie épileptique infantile précoce avec suppression bursts, autres épilepsies symptomatiques généralisées ;

- syndromes spécifiques : crises épileptiques compliquant l'évolution d'autres maladies.

Épilepsies et syndromes épileptiques dont l'origine focale ou généralisée n'est pas déterminée.

Avec crises focales et généralisées.

- Convulsions néonatales ;

- épilepsie myoclonique sévère de l'enfant ;

- épilepsie avec pointes-ondes continues pendant le sommeil lent ;

- aphasie épileptique acquise (syndrome de Landau-Kleffner) ;

- autres épilepsies déterminées.

Sans caractéristiques permettant de les classer comme syndromes généralisés ou focaux.

Syndromes spéciaux.

Situations particulières. Les crises sont liées à une situation : convulsions fébriles, crises uniquement provoquées par des événements métaboliques ou toxiques aigus, etc.

Absences. Les absences sont des crises de brève durée caractérisées par une perte de conscience. Dans les absences simples, il y a uniquement une perte de contact, l'enfant reste figé le regard dans le vide, cessant son activité pendant une durée comprise entre cinq secondes et deux minutes. La crise terminée, l'enfant reprend son activité sans garder de souvenir de l'épisode. Les absences peuvent s'accompagner de mouvements cloniques, toniques, d'automatismes, de signes végétatifs ou d'atonie. Les absences atypiques ont un début plus insidieux et une durée plus longue, avec une atonie ou des mouvements cloniques plus prononcés. Les crises myocloniques sont caractérisées par des secousses musculaires brèves, en éclair, bilatérales et symétriques en absence d'altération perceptible de la conscience. Dans les crises partielles simples, il n'y a pas de modification de la conscience. Lors des crises partielles complexes, la perte de contact survient d'emblée ou secondairement, après un début partiel simple.

ÉPIDÉMIOLOGIE

L'épilepsie affecte environ cinquante millions de personnes dans le monde, dont un tiers sont des enfants. Chaque année en France, 4 000 enfants de moins de 10 ans deviennent épileptiques. La prévalence globale de la maladie épileptique paraît stable - entre 0,5 et 0,8 % de la population générale -, mais les résultats des enquêtes montrent une diminution au cours du temps de l'incidence de l'épilepsie dans les tranches d'âge les plus basses avec une augmentation chez le sujet âgé. Il est très difficile de réaliser des travaux épidémiologiques sur l'épilepsie en raison de l'hétérogénéité clinique de l'affection et des difficultés diagnostiques, toute crise convulsive n'étant pas forcément une épilepsie.

DIAGNOSTIC

Le diagnostic doit être évoqué devant la survenue d'une crise. L'interrogatoire a pour but de préciser le caractère partiel ou généralisé, la perte ou non de la conscience, la présence de circonstances favorisantes.

EEG. L'électroencéphalogramme (EEG) enregistre l'activité électrique du cerveau au moyen d'électrodes de surface, variant de 8 à 20 en fonction de l'âge, posés sur le scalp de façon standardisée. Il existe des montages classiques en dérivation bipolaire longitudinale et transverse, des montages alternés coronaux et des montages avec électrode référentielle. La technique de l'examen dépend de l'âge de l'enfant. Chez le nouveau-né, le nourrisson et le jeune enfant, le tracé de sommeil fait partie de l'enregistrement de routine. Cet enregistrement doit se faire idéalement sans prémédication. Des manoeuvres de stimulation sont réalisées pendant celui-ci : l'hyperpnée (respiration profonde et lente) dès que l'enfant est en mesure de le faire et la stimulation lumineuse intermittente à partir d'un an. L'activité EEG varie en fonction de l'âge, du degré de vigilance et de la condition physiologique du patient. Les ondes cérébrales se caractérisent par leur fréquence, leur amplitude, leur morphologie, leur stabilité, leur topographie et leur réactivité. Elles sont classées en fonction de leur amplitude : activité delta (fréquence inférieure à 3,5 Hz), activité thêta (fréquence entre 4 et 7,5 Hz), activité alpha (fréquence entre 8 et 13 Hz) et activité bêta (fréquence supérieure à 13 Hz). Il existe plusieurs types d'activité pathologique. Le terme paroxystique implique un début et une fin brutale, avec une amplitude maximale atteinte rapidement. On retrouve ainsi :

- pointe : onde de très brève durée et de grande amplitude qui peut être mono, bi ou triphasique ;

- pointe-onde ou onde pointue : onde d'une durée plus longue (200 ms) ;

- pointe-onde lente : pointe suivie d'une onde lente ;

- polypointe : succession de plusieurs pointes ;

- polypointe-onde : succession d'une polypointe et d'une ou plusieurs ondes lentes.

Ces anomalies s'organisent selon diverses modalités qui caractérisent chaque syndrome épileptique. Elles peuvent se présenter au cours de la crise (tracé critique) ou lors des intervalles entre les crises (tracé intercritique). Chez l'enfant, l'EEG vidéo permet de mieux caractériser les crises et d'obtenir un tracé critique.

Bilan radiologique. Les progrès réalisés en imagerie anatomo-fonctionnelle cérébrale non invasive ont permis de reclasser des syndromes épileptiques idiopathiques en cryptogéniques ou symptomatiques et de mieux prendre en charge certains patients atteints d'épilepsie réfractaire.

- Résonance magnétique (IRM). La résolution spatiale actuelle de la technique IRM permet une précision anatomique unique des lésions cérébrales même les plus subtiles, comme les malformations du développement cortical. Par ailleurs, la résolution temporelle permet de suivre les modifications physiologiques cérébrales après l'injection d'un produit de contraste.

- Tomographie par émission de positrons (TEP) et Single Photon Emission Computed Tomography (SPECT). Ces techniques de médecine nucléaire permettent par l'utilisation de traceurs radioactifs une imagerie du métabolisme cérébral du glucose, du flux sanguin et de certains neurotransmetteurs. Ces images peuvent être obtenues lors d'une crise, au repos ou lors de la mise en place d'une fonction neurologique.

La localisation précise et la connaissance du fonctionnement physiologique d'une lésion cérébrale permettent de mieux préparer une éventuelle intervention chirurgicale.

TABLEAU CLINIQUE

Les épilepsies partielles idiopathiques représentent entre 30 et 60 % des épilepsies de l'enfant. Elles débutent après l'âge de 2 ans chez des enfants normaux par des crises partielles survenant souvent pendant le sommeil. L'EEG montre des pointes triphasiques intercritiques avec un tracé de fond normal. L'évolution est favorable, sans retentissement sur les fonctions cognitives. La plus fréquente est l'épilepsie à paroxysmes rolandiques, suivie de l'épilepsie à paroxysmes occipitaux et de l'épilepsie psychomotrice bénigne avec crises de terreur. Dans les épilepsies généralisées idiopathiques, la plus fréquente est l'épilepsie absence ou « petit mal ». Elle débute entre 4 et 8 ans chez des enfants normaux par des absences de courtes durées. On observe à l'EEG des bouffées généralisées de pointes-ondes. Le pronostic est favorable, mais le retard du diagnostic peut entraîner des difficultés psychosociales et un échec scolaire. L'apparition tardive de crises généralisées tonicocloniques est possible. L'épilepsie avec crises généralisées tonicocloniques débute entre 3 et 11 ans chez des enfants normaux souvent par des convulsions fébriles ; elle est plus fréquente chez l'adolescent. L'épilepsie myoclonique bénigne du nourrisson est plus rare ; elle apparaît entre 6 mois et 3 ans chez des enfants normaux. Les myoclonies se majorent avec l'endormissement. On retrouve à l'EEG un tracé de polypointe généralisé. Quant à l'épilepsie myoclonique sévère du nourrisson, elle débute avant l'âge d'un an chez des enfants normaux par des convulsions fébriles complexes. Puis, vers l'âge de deux ans, apparaissent des myoclonies, des absences atypiques, une hyperkinésie, une ataxie et un ralentissement cognitif. L'EEG se caractérise par des bouffées de pointes-ondes et polypointes-ondes. Le pronostic est réservé avec un retard mental sévère à terme. L'épilepsie avec crises migrantes du nourrisson débute entre 2 et 6 mois par des crises polymorphes qui migrent d'un côté à l'autre ou d'une région à une autre. Les crises augmentent en fréquence. Une hypotonie et un retard mental sévère apparaissent.

Les encéphalopathies épileptiques les plus fréquentes après le syndrome de West sont :

- l'encéphalopathie épileptique néonatale, qui commence dès la naissance par des crises partielles et généralisées. L'EEG montre un tracé de suppression bursts (aplatissements prolongés du tracé). Chez les enfants porteurs de maladie métabolique, les myoclonies sont fréquentes, tandis que chez ceux qui présentent une lésion cérébrale, les spasmes sont plus fréquents. L'épilepsie est souvent rebelle au traitement et le retard psychomoteur est sévère ;

- le syndrome de Lennox-Gastaut, qui commence entre 2 et 8 ans par des crises toniques associées à des absences atypiques. À l'EEG, on retrouve des bouffées de pointes-ondes lentes en région frontale qui persistent en intercritique. L'enfant se détériore progressivement sur le plan cognitif ;

- le syndrome de Doose, qui débute entre 2 et 5 ans par des crises généralisées tonicocloniques puis des crises myoclono-astatiques augmentant en fréquence. L'EEG montre des ondes lentes et des pointes diffuses en intercritique. Les enfants deviennent ataxiques et hyperkinétiques. Bien que certains guérissent sans séquelles, la plupart d'entre eux évoluent vers la dégradation cognitive ;

- les pointes-ondes continues du sommeil, qui commencent entre 2 et 8 ans par une dégradation cognitive avec peu ou pas de crises mais un EEG qui montre une activité de pointes-ondes lentes diffuses, synchrones et subcontinues pendant le sommeil. Le tableau clinique dépend de la localisation des pointes-ondes : localisation temporale avec l'aphasie-épilepsie du syndrome de Landau-Kleffner ; localisation pariétale avec apraxie ; localisation frontale avec régression du comportement.

Dans les syndromes spéciaux ou crises survenant en relation avec une situation, le plus fréquent est la convulsion fébrile. Il existe d'autres cas qui entraînent des crises convulsives, comme l'hypoglycémie - en particulier chez le nouveau-né -, mais aussi d'autres troubles métaboliques : l'hyponatrémie et l'hypocalcémie. L'épilepsie post-traumatique est rare chez l'enfant, mais il peut y avoir survenue d'une crise isolée lors d'un traumatisme crânien bénin.

TRAITEMENT

La décision de débuter un traitement antiépileptique doit peser le risque de récidive des crises versus les effets secondaires des médicaments. Le traitement doit être mis en route devant un diagnostic certain (crises bien documentées, EEG pathologique). Si le tableau clinique est douteux, mieux vaut temporiser et surveiller l'évolution. La constatation d'anomalies à l'EEG sans éléments cliniques ne justifie pas un traitement d'emblée. Après une première crise, le traitement sera débuté pour les syndromes épileptiques bien identifiés et les épilepsies partielles cryptogéniques et symptomatiques au cours desquelles la récidive est hautement probable. C'est le cas également des épilepsies absence. Pour les autres patients, en fonction du contexte, le traitement sera mis en route lors de la deuxième crise. Lorsque la décision de traiter est prise, la monothérapie permet d'obtenir la disparition des crises dans 70 à 80 % des cas. Si le premier choix médicamenteux ne permet pas une rémission, il est préférable d'utiliser une monothérapie alternative avant de passer à la bithérapie. Le choix du médicament dépend de ses caractéristiques pharmacologiques et du syndrome épileptique. Lorsque ce dernier n'est pas identifié, le choix tient compte du type de crise. Il est important de savoir que le risque de retentissement sur les fonctions cognitives ou de troubles du comportement est de 15 % lors de la première prescription d'antiépileptiques. Par ailleurs, la famille doit comprendre l'utilité du traitement afin que la compliance soit la meilleure possible, d'autant plus que la durée minimum d'un traitement est longue, entre dix-huit mois et deux ans.

Choix du médicament. Classiquement, en cas d'épilepsie généralisée, le traitement de choix est l'acide valproïque. Lors d'une épilepsie partielle, la carbamazépine est le médicament de première intention. Mais quelques molécules peuvent aggraver certains types de crises.

Épilepsies généralisées idiopathiques. Le médicament de première intention est l'acide valproïque (VPA). La dose initiale est de 15 à 20 mg/kg/j en deux prises journalières. Elle doit être augmentée progressivement en deux semaines jusqu'à atteindre 30 mg/kg/j. Le VPA est le traitement de l'épilepsie myoclonique du nourrisson et de l'épilepsie myoclonique juvénile. Dans l'épilepsie absence, le traitement initial est le VPA. Si des crises tonicocloniques surviennent, le traitement par éthosuximide (ETH) est alors indiqué. En cas d'échec de ces deux monothérapies, la lamotrigine (LTG) peut être utilisée. En revanche, dans l'épilepsie absence avec myoclonies, le traitement par ETH doit être débuté d'emblée, le clobazam (CLB) étant le médicament de second choix.

Épilepsies partielles idiopathiques. Lorsque le traitement s'impose, le médicament de choix est le VPA.

Épilepsies idiopathiques sans caractère généralisé ou partiel déterminé. Le traitement de choix est le clobazam, à une dose de 0,5 à 1 mg/kg/j, ou l'éthosuximide, à une dose de 25 mg/kg/j, en cas d'échec.

Épilepsies généralisées symptomatiques ou cryptogéniques.

Syndrome de West. Le traitement de choix est le vigabatrine (Sabril®) à une dose initiale de 100 mg/kg/j. Après une semaine, l'efficacité du traitement est évaluée par un EEG vidéo. Si les spasmes persistent, la dose est augmentée à 150 mg/kg/j pendant une semaine. Un nouvel EEG vidéo est alors réalisé ; si la symptomatologie clinique ou les anomalies électroencéphalographiques persistent, un traitement par hydrocortisone à une dose de 15 mg/kg/j est alors débuté, suivi d'un traitement par ACTH en cas de nouvel échec.

Syndrome de Lennox-Gastaut. Le médicament de choix est la lamotrigine, à débuter de façon très progressive sur six semaines afin de limiter la survenue d'effets secondaires. La dose est de 10 à 15 mg/kg/j. En association avec le VPA, elle ne doit pas dépasser 5 mg/kg/j. En cas d'échec, le felbamate est indiqué à une dose de 3 à 5 mg/kg/j à atteindre progressivement par paliers de 1 mg par semaine. Le topiramate est également utilisé.

Épilepsies partielles symptomatiques. Le médicament de choix est la carbamazépine (CBZ), la dose initiale étant de 10 à 15 mg/kg/j avec une augmentation progressive sur deux semaines. En cas d'échec, l'acide valproïque peut être utilisé. Si ces deux molécules s'avèrent inefficaces, on peut faire appel au vigabatrine (VGB) ou à la gabapentine.

Effets secondaires. Les médicaments antiépileptiques ont des effets indésirables de type digestif plus ou moins importants selon la molécule (nausées, vomissements, atteinte hépatique) ; des effets neurologiques (somnolence, céphalées, troubles de l'équilibre et de la coordination, troubles visuels, vertiges, états confusionnels) ; des effets hématologiques (anémie, leucopénie, aplasie médullaire possible avec le felbamate) ; des réactions allergiques cutanées simples, mais allant dans certains cas jusqu'au syndrome de Stevens-Johnson.

La phénytoïne administrée par voie veineuse peut entraîner des troubles du rythme cardiaque, les benzodiazépines, une dépression respiratoire ou une réaction paradoxale avec agitation et irritabilité. Le principal danger du vigabatrine sont les altérations du champ visuel avec amputation de celui-ci. L'effet des antiépileptiques sur la fonction cognitive est difficile à interpréter puisque les patients traités par des molécules différentes présentent des épilepsies également différentes. Le phénobarbital et la phénytoïne semblent être les molécules les plus nocives pour la fonction cognitive, surtout à fortes doses. La polythérapie est également en cause. Quant aux effets de la carbamazépine et de l'acide valproïque, ils semblent moins délétères.

Les anti- épileptiques

Prolongation de la dépolarisation, limitation des décharges de potentiel d'action (canaux de sodium) :

- phénytoïne (Di-Hydan®, Dilantin®) ;

- fosphénytoïne (Prodilantin®) ;

- carbamazépine (Tégrétol®) ;

- acide valproïque (Dépakine®) ;

- lamotrigine (Lamictal®).

Renforcement de la transmission synaptique de GABA (effet inhibiteur) :

- phénobarbital (Kaneuron®, Gardénal®) ;

- primidone (Mysoline®) ;

- benzodiazépines :

. diazépam (Valium®)

. clonazépam (Rivotril®)

. clobazam (Urbanyl®)

- vigabatrine (Sabril®) ;

- gabapentine (Neurontin®).

Limitation des décharges de potentiel d'action (canaux de calcium) :

- associé aux deux autres mécanismes : Topiramate (Epitomax®) ;

- mécanisme inconnu : . éthosuximide (Zarontin®) . felbamate (Taloxa®).

Classification internationale des crises

Crises partielles

- Crises partielles simples :

- avec signes moteurs ;

- avec manifestations somatosensorielles ou hallucinations sensorielles particulières ;

- avec signes de dérèglement du système nerveux autonome ;

- avec symptômes psychiques.

- Crises partielles complexes :

- avec début partiel simple suivi d'un trouble de conscience ;

- avec troubles initiaux de l'état de conscience.

- Crises partielles évoluant vers une généralisation :

- crises partielles simples évoluant vers des convulsions généralisées ;

- crises partielles complexes évoluant vers des convulsions généralisées.

Crises généralisées

- Épilepsies absences :

- typiques ;

- atypiques.

- Crises myocloniques

- Crises cloniques

- Crises toniques

- Crises tonicocloniques

- Crises atoniques

Crises épileptiques inclassables

Chirurgie

L'opérabilité d'une lésion dépend de son caractère focal (d'où l'importance du bilan radiologique préopératoire) et des relations entre cette lésion épileptogène et les régions corticales fonctionnelles avoisinantes. Le résultat optimal d'une intervention est la résection totale de la lésion en respectant le cortex, donc les fonctions majeures (comme la vision, la motricité et le langage). Le traitement peut être curatif dans le cas des épilepsies partielles. Pour certaines épilepsies généralisées, un traitement palliatif afin de limiter la diffusion des décharges peut se faire en supprimant certaines connections (la callosotomie, par exemple).

Le syndrome de West (spasmes infantiles)

Il s'agit de l'encéphalopathie épileptique la plus fréquente et la plus grave de la petite enfance, avec une incidence entre 2,9 et 4,5 sur 100 000 naissances vivantes et une prédominance chez les garçons (60 %). Les symptômes débutent entre 3 et 7 mois. Le diagnostic est fondé sur la triade suivante :

- spasmes infantiles : contraction brusque bilatérale et symétrique des muscles extenseurs ou fléchisseurs du cou, du tronc et des extrémités. Chaque spasme a une durée d'environ une seconde et se répète toutes les quinze secondes en salves de 10 à 50. Plusieurs épisodes peuvent avoir lieu pendant la journée et pendant les périodes d'éveil ;

- régression psychomotrice : perte des acquisitions, en particulier sur les fonctions de communication visuelle et le tonus du tronc ;

- pattern EEG intercritique d'hypsarythmie : disparition des activités électriques normales et apparition d'une activité paroxystique multifocale constituée de pointes et d'ondes lentes asynchrones pendant tout le tracé de veille. Durant la crise, on observe un complexe constitué d'une grande onde lente positive suivie d'une activité rapide puis d'un aplatissement du tracé.

Le syndrome de West peut être symptomatique (30 % des cas), idiopathique et de bon pronostic (5 à 10 % des cas) et cryptogénique (60 à 65 % des cas). Les spasmes, souvent difficiles à maîtriser avec le traitement, disparaissent spontanément, mais les séquelles neurologiques (motrices, sensorielles et mentales) sont souvent très importantes et l'apparition d'une épilepsie généralisée est fréquente.

Convulsions fébriles

Elles se présentent chez environ 3 à 5 % des enfants entre 6 mois et 5 ans, souvent au début de l'affection fébrile et à l'acmé de la fièvre. Il faut différencier la crise simple (80 à 90 % des cas), brève, tonicoclonique généralisée unique, sans déficit postcritique, survenant chez un enfant avec un examen neurologique normal et sans antécédents familiaux d'épilepsie, et la crise complexe (10 à 20 % des cas), de plus de quinze minutes, partielle, avec des signes de focalisation postcritique ou survenant chez un enfant de moins d'un an avec un examen neurologique anormal et des antécédents familiaux d'épilepsie.

Plus de 95 % des convulsions fébriles sont bénignes, sans séquelles neurologiques ni apparition d'épilepsie.