L'irrigation colique - L'Infirmière Magazine n° 206 du 01/06/2005 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 206 du 01/06/2005

 

soins

Modes opératoires

La réalisation d'une colostomie définitive est une épreuve difficile pour le patient. Toutefois, la perspective de pouvoir éviter le port de poches en pratiquant l'irrigation colique peut faciliter son acceptation. Cette technique améliore la qualité de vie des patients qui parviennent à en maîtriser parfaitement l'utilisation.

PRINCIPE

L'irrigation colique consiste à vider entièrement le côlon en injectant de l'eau tiède (environ trois quarts de litre à 37°) par le biais de la stomie pour déclencher le péristaltisme et l'évacuation des matières fécales.

Entre chaque irrigation, l'orifice de la stomie est équipé d'un bouchon obturateur ou d'une minipoche (d'environ 7 cm de diamètre) pourvue d'un filtre pour les gaz, ce qui évite le port permanent d'une poche de recueil standard.

Cette alternative doit faire l'objet d'une prescription médicale et n'est envisageable qu'en cas de colostomies gauches. Son apprentissage, accompagné par une infirmière stomathérapeute, est indispensable. Il faut compter un mois pour obtenir une parfaite étanchéité du dispositif. Durant cette période, une poche standard est utilisée pour faire face à d'éventuelles fuites.

PÉRIODICITÉ

En pratique, l'irrigation colique peut être réalisée toutes les quarante-huit à soixante-douze heures. Pour être efficace, elle doit être pratiquée selon une périodicité régulière et si possible à heure fixe (matin ou soir, à la convenance de chacun).

AVANTAGE

Une fois le côlon « éduqué » et la technique maîtrisée, il n'y a aucun risque de fuite de matières ni de gaz. Le patient exerce un contrôle total de l'évacuation des selles, ce qui lui confère une plus grande liberté d'action.

MISE EN OEUVRE

- Enlever le matériel obturant la stomie ;

- nettoyer la stomie à l'eau claire et bien sécher le pourtour ;

- adapter le manchon collecteur. Celui-ci peut être collé ou connecté au support servant à fixer les minipoches ;

- placer l'extrémité inférieure du manchon collecteur dans la cuvette des toilettes ou le seau en la retournant vers l'extérieur de manière à ce qu'elle reste propre, ce qui facilitera ensuite les manipulations ;

- remplir le réservoir d'irrigation d'eau tiède et le placer sur un support à hauteur d'épaule ;

- chasser l'air de la tubulure (pour éviter de l'injecter au malade et de provoquer des gaz et des coliques) et fermer le régulateur de débit ;

- effectuer un toucher stomial avec un doigt ganté, afin de repérer la direction de la stomie et d'orienter correctement le cône d'irrigation. Cette étape, nécessaire dans les premiers temps, n'est plus systématique lorsque le patient est rodé ;

- introduire le cône d'irrigation dans la stomie. La forme du cône permet de l'enfoncer de 3 à 4 cm, ce qui facilite le passage de l'eau et évite son refoulement immédiat une fois l'injection terminée ;

- ouvrir le régulateur de débit de manière à ce que l'eau s'écoule assez rapidement (pendant environ trois minutes). En effet, un débit trop lent nuit à l'efficacité de l'irrigation ;

- attendre une minute avant d'enlever le cône d'irrigation. Ce geste peut entraîner l'évacuation immédiate d'un premier jet, mais il faut attendre vingt à trente minutes avant que se déclenche l'évacuation massive des selles (la débâcle). Dans l'intervalle, il est conseillé au patient de fermer le manchon à ses deux extrémités à l'aide des épingles fournies dans les kits et de vaquer à ses occupations, car l'activité déclenche plus rapidement la vidange du côlon. Lorsque les signes précurseurs de la débâcle s'annoncent (sensations de colique, notamment), le patient peut retourner aux toilettes et ouvrir le manchon pour permettre l'évacuation des selles ;

- une fois l'opération terminée, le manchon doit être jeté à la poubelle. Enfin, la stomie est nettoyée à l'eau claire puis appareillée.

PROBLÈMES SPÉCIFIQUES

Coliques pendant le passage de l'eau. Ces coliques surviennent surtout dans les premiers temps puis s'estompent progressivement.

Lorsqu'elles sont violentes, l'irrigation doit être interrompue (fermer le régulateur de débit sans retirer le cône d'irrigation) ou ralentie jusqu'à ce que les spasmes cèdent. Lorsqu'elles sont supportables, le patient peut les maîtriser en respirant lentement et profondément et/ou en massant doucement le ventre dans le sens du transit après avoir interrompu l'irrigation.

Diarrhées. Elles constituent une contre-indication à la pratique de l'irrigation colique.

Celle-ci doit donc être interrompue et remplacée par l'utilisation de poches standard « vidables ».

Difficulté à faire pénétrer l'eau.

- Le cône n'est pas dans l'axe du côlon, et il suffit de le repositionner ;

- la stomie forme un coude postérieur, et le patient doit trouver une position permettant de dégager la voie ;

- un fécalome fait obstacle au passage de l'eau, et il convient de l'évacuer. En prévention, le patient doit boire au minimum 1,5 l de liquide par jour pour assurer une bonne fluidité des matières, le côlon absorbant beaucoup d'eau, y compris celle apportée par l'irrigation ;

- il existe une sténose de la stomie. Dans ce cas, il faut souvent se résigner à abandonner l'irrigation colique.

Voyage ou interruption momentanée. Cela ne pose aucun problème. Il suffit d'utiliser des poches (en prévoir deux par jour), mais plus la période d'interruption est importante, plus la réadaptation à l'irrigation colique est longue.