Face aux risques d'agression - L'Infirmière Magazine n° 210 du 01/11/2005 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 210 du 01/11/2005

 

Sécurité

Juridique

Confronté aux risques d'agression, le soignant a la possibilité d'exercer son droit de retrait, ou encore de répondre à toute menace, en usant de son droit à la légitime défense. L'établissement qui emploie le soignant est tenu d'assurer sa protection.

Le droit de retrait est justifié par la nécessité pour l'agent de protéger sa vie, menacée par une situation de travail éminemment dangereuse. Selon l'article 5 alinéa 6 du décret du 9 mai 1995, aucune sanction ni retenue de salaire ne peut être prise à l'encontre d'un agent ou groupe d'agents qui se sont retirés d'une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de chacun d'eux.

non-assistance

Reste que l'infirmière qui exerce son droit de retrait ne saurait mettre en péril la situation d'autrui.

En effet, en s'abstenant d'agir sans risque pour elle ou pour un tiers, l'infirmière peut être poursuivie pour non-assistance (article 223-6 du Code pénal). Son devoir d'assistance peut alors prendre n'importe quelle forme, comme prévenir la police par exemple.

Réagir légalement face aux situations dangereuses peut aussi prendre la forme de la « légitime défense ». Il s'agit alors de faire face directement en cas d'agression personnelle.

Le principe de légitime défense va ainsi dégager la personne de toute responsabilité, conformément à l'article 122-5 du Code pénal.

acte de défense

Dans le même sens, un agent qui, pour interrompre l'exécution d'un crime ou d'un délit contre un bien, accomplit un acte de défense, autre qu'un homicide volontaire, dès lors que les moyens employés sont proportionnés à la gravité de l'infraction, ne sera pas pénalement responsable.

La légitime défense suppose avant tout une atteinte à l'intégrité corporelle (coups et blessures, violences, tentatives de viol, attentat à la pudeur, etc.), ou une atteinte aux biens (tentative de vol), voire, dans certains cas, les deux (vol accompagné de violences).

En deuxième lieu, l'attaque qui a provoqué la riposte doit être actuelle ou imminente. Ainsi, il ne doit pas s'agir d'une simple menace qui laisse le temps d'appeler la police. L'attaque peut n'être que vraisemblable dans l'esprit de l'agent qui s'apprête à se défendre : arme factice, hors d'usage, non approvisionnée ou toute arme qui fait craindre pour sa vie ou celle des autres personnes présentes. Enfin, la riposte de l'agent doit être proportionnée à l'attaque. De graves blessures en réplique d'une bousculade ne sauraient constituer une légitime défense et l'excuse de provocation n'existe plus dans le Code pénal.

La personne qui a agi dans le cadre de la légitime défense n'est pas pénalement responsable. Et si elle est poursuivie, elle fera l'objet d'un non-lieu, d'une relaxe, ou d'un acquitte

inertie

Toute administration, hôpital inclus, est tenue d'organiser une protection spécifique de ses agents contre les menaces, violences, injures, etc.

Cette obligation légale concerne tout type d'agression physique (altercation, blessures volontaires, séquestration, etc.) ou morale (injures, insultes, propos diffamants ou calomnieux, etc.). Ce principe, posé à l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, signifie que l'établissement de soins est tenu de protéger ses agents contre les menaces, outrages, injures ou diffamations, dont ils peuvent être victimes à l'occasion de leurs fonctions et de protéger et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté.

soutien actif

Cette protection peut prendre la forme d'un soutien actif en assurant matériellement la prévention des faits et la protection des personnes : recours par exemple à une société de gardiennage, face à une insécurité grandissante. L'hôpital peut aussi décider d'octroyer à son agent agressé une réparation directe en argent, afin de réparer au plus vite le préjudice subi sans attendre les résultats du procès engagé.

Bien souvent dans ce cas, l'établissement va lui-même se porter partie civile afin de se faire rembourser, ou agir seul si l'agent ne s'est pas constitué partie civile, en exerçant une « action subrogatoire » (au titre des droits de la victime) à l'encontre de l'auteur du dommage.

recours contre l'hôpital

Et si l'établissement manque à ses obligations en n'accordant pas la protection nécessaire, l'agent, qui n'a pas reçu le soutien attendu, peut exercer un recours contre l'établissement défaillant en saisissant le tribunal administratif, afin d'obtenir l'annulation du refus de protection et l'exécution de son obligation de garantie, ainsi qu'une compensation financière en réparation du préjudice subi du fait du refus fautif de l'établissement.

CE QU'IL FAUT RETENIR

En cas de situation de travail susceptible de présenter un danger grave et imminent, l'agent hospitalier peut exercer son droit de retrait. S'il réagit face à une menace personnelle, il bénéficie de la légitime défense, à condition que sa riposte soit proportionnée à l'attaque. Enfin, l'établissement de soins est tenu de protéger ses agents et de réparer d'éventuels préjudices à leur encontre.

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