« Casita », une auberge espagnole pour les ados - L'Infirmière Magazine n° 211 du 01/12/2005 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 211 du 01/12/2005

 

Mal-être

Du côté des réseaux

Au sein de l'hôpital Avicenne (Bobigny), la « Casita », dont les membres sont issus de multiples institutions, propose aux adolescents en souffrance consultations et ateliers thérapeutiques.

Un pavillon entouré d'un jardin, dans l'enceinte de l'hôpital Avicenne à Bobigny. « Casita », la maison des adolescents, l'une des unités rattachées au service psychiatrique, a ouvert ses portes depuis la rentrée 2004. Une équipe pluridisciplinaire accueille des adolescents en souffrance et leur famille et dispense un suivi autour de consultations et d'ateliers thérapeutiques : écriture, musique-rythme, poésie urbaine, psychodrame, arts plastiques... Située au coeur du bassin d'Avicenne, Casita reçoit des patients venus des communes avoisinantes : Bobigny, Aubervilliers, La Courneuve, Pantin, Drancy.

une équipe inhabituelle

L'une des originalités de cette structure est de compter, parmi les membres de l'équipe, des collaborateurs issus d'institutions extérieures. Leur présence inhabituelle à l'hôpital facilite les liens avec les partenaires : « chaque institution a tendance à s'autocentrer, observe Fabienne Combéléran, cadre infirmier. Nos logiques et impératifs de missions différents font que l'on n'oeuvre pas systématiquement dans la construction ! ».

À Casita, un éducateur de la PJJ (protection judiciaire de la jeunesse) travaille à mi-temps , mais aussi un pédiatre (en relation avec les médecins généralistes) et une éducatrice spécialisée, détachée de l'ASE (Aide sociale à l'enfance). Sa mission est d'assurer le contact avec les services de l'ASE du secteur, mais aussi d'organiser avec le psychiatre des consultations destinées aux médecins de PMI et aux professionnels de l'ASE. André Mercadante, psychologue scolaire, détaché à plein temps à Casita, est chargé du lien entre l'institution éducative et l'hôpital ; il consacre une partie de son temps à des évaluations diagnostiques (cognitive ou psychologique). Son autre mission est l'orientation. Il reçoit les jeunes en entretien et prépare des dossiers d'entrée en écoles spécialisées ou, pour d'autres, effectue des démarches visant à l'insertion dans la vie professionnelle.

André Mercadante est persuadé de la richesse d'une équipe pluridisciplinaire, « surtout auprès de l'adolescent. Ce dernier a besoin que l'on intervienne à tous les niveaux de sa vie. J'ai travaillé pendant des années au sein de l'école. On envoyait des enfants à l'hôpital sans trop se soucier de ce qui allait y être fait. Problèmes scolaires et thérapeutiques étaient scindés, les deux milieux ne communiquaient pas. Sans dévoiler les activités de l'un et de l'autre, il est important que l'adolescent se trouve sur une seule scène, et que les différents acteurs oeuvrent en commun. »

travailler en réseau

La pluridisciplinarité de l'équipe permet à Casita de travailler en réseau, fort d'une centaine de membres. Il est composé d'intervenants sanitaires et sociaux du département et de la région, comme le Conseil général (ASE, PMI) et le Conseil régional, les intersecteurs de pédopsychiatrie et les secteurs de psychiatrie adulte, la PJJ, l'État et la Ddass, l'Éducation nationale, la justice, les missions locales, les lieux d'écoute et les associations, les médecins généralistes... Ces partenaires se réunissent lors de formations communes pour apprendre à identifier les missions de chacun. Un comité de pilotage rassemblant des représentants des différentes institutions se réunit tous les mois afin de préparer une réunion trimestrielle autour d'une thématique et non de dossiers nominatifs. Un choix argumenté afin d'apaiser les débats sans entrer dans le détail d'un dossier. Les thèmes sont variés et fédérateurs. « Nous avons récemment débattu du secret professionnel, note Fabienne Combéléran. Éducateurs de rues, directeurs d'établissements scolaires, infirmières... ont pu exposer ce que signifie pour eux le secret professionnel. Comprendre que les logiques sont différentes rend plus flexible et plus patient. »

infirmières scolaires

L'un des points forts du réseau est le maillage constitué par les infirmières scolaires du secteur. Ayant bien compris le fonctionnement de Casita, les orientations qu'elles effectuent se révèlent pertinentes : « elles repèrent bien les problèmes, confirme Mallory Nadreau, IDE. Les ados qu'elles nous adressent relèvent souvent de l'hospitalisation d'urgence. Même si nous leur faisons un retour des cas, cette réunion sur le secret professionnel nous a permis de leur expliquer que Casita est un lieu de soins. Pour que l'adolescent puisse investir ce lieu sur le plan thérapeutique, il faut que le secret lui soit garanti. Ce n'est qu'avec son accord que nous recontactons médecins et infirmières scolaires. »

Le prochain thème traitera de l'autonomie de l'adolescence...

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