Esqui rétablit le lien social - L'Infirmière Magazine n° 212 du 01/01/2006 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 212 du 01/01/2006

 

Réseau d'entraide

Du côté des associations

Depuis bientôt dix ans, l'association Esqui agit dans le champ de la psychiatrie et de la santé mentale. Elle a pour particularité de ne compter que des usagers et des ex-usagers de l'hôpital Esquirol, situé à Saint-Maurice (94).

L'aventure a commencé en 1997. De retour d'un séjour aux Pays-Bas, à l'époque très en avance sur la France en ce qui concerne les associations de patients d'hôpitaux psychiatriques, Mme Saragousi et le Dr Ochonyski proposent à des patients de l'hôpital Esquirol de créer une association.

soutien entre patients

Dès lors, pour dire que les maladies mentales n'arrivent pas qu'aux autres, que ce ne sont pas des maladies honteuses, et pour briser la solitude de certains de ses membres, Esqui se propose de « favoriser le soutien entre les patients et les anciens patients, notamment en vue de leur réinsertion sociale », souligne Béatrice Desmazières. Cette ancienne institutrice, aujourd'hui présidente de l'association Esqui et secrétaire adjointe de la Fnap Psy, veut alors marquer son opposition par rapport à l'état des chambres d'isolement de l'époque et au ton condescendant des médecins. Elle a toujours fait partie de l'association, où l'absence de soignants exprime la volonté de « placer sur un pied d'égalité la totalité de ses membres ».

L'association est financée pour la plus grande partie par une subvention de l'hôpital Esquirol, à laquelle s'ajoutent des subventions du conseil régional du Val-de-Marne et de la mairie de Saint-Maurice. L'hôpital aide également l'association en prenant en charge son secrétariat, et met à sa disposition un local situé dans la cour d'honneur de l'hôpital.

instaurer le dialogue

Concrètement, les usagers d'Esqui rendent visite à des patients hospitalisés, fournissent des renseignements sur les droits des patients, et organisent des animations telles que des concerts à l'hôpital, des activités philatéliques, ou des randonnées pédestres dans le Morvan. Par ailleurs, les deuxièmes et quatrièmes jeudis de chaque mois, Esqui tient une permanence animée par Didier Bussy, ancien président de l'association. Ces permanences sont un moyen d'instaurer « un dialogue direct entre les usagers des différentes structures de l'hôpital, qui prennent ainsi une part active dans la réflexion sur les orientations de l'hôpital Esquirol », poursuit la présidente.

échanger autour d'un café

Esqui tient aussi une permanence en ville qui s'adresse davantage aux usagers parisiens. Tenues jusqu'en décembre dernier au CAT Café dans le 11e arrondissement par Béatrice Desmazières et Annick Lepape, les permanences parisiennes ont désormais lieu au café Le Voltaire(1) un lundi après-midi sur deux. Dans ce lieu convivial, les membres présents discutent de l'actualité autour d'un café, s'échangent des informations sur la santé, les loisirs et les activités culturelles, ce qui mène parfois à des sorties communes dans des expositions ou au cinéma. « Il ne s'agit pas d'écouter mais d'échanger car nous ne sommes pas des professionnels. C'est surtout une invitation à organiser ensemble des projets. » Béatrice Desmazières fait aussi le lien avec d'autres associations telles que le Réseau d'échange du savoir de Belleville-Ménilmontant, ou l'association Amitié-loisirs du quartier, car c'est « un moyen de se réinsérer que d'aller dans des associations sans connotation "psy" ».

éviter les tragédies

Enfin, dernière préoccupation mais non des moindres : veiller à ce que les membres se soignent, à ce qu'ils prennent bien leur traitement, quitte à en informer les centres concernés dans le cas contraire. Il s'agit d'éviter les tragédies, comme celle d'un jeune suicidaire membre d'Esqui qui est passé à l'acte, faute d'avoir pris son traitement. Les membres sont aussi orientés vers un centre de santé mutualiste où ils peuvent consulter des spécialistes.

Récemment, le CATTP de la rue de Rivoli a envoyé des personnes à la permanence parisienne, mais l'expérience n'a pas été concluante. En réalité, selon Béatrice Desmazières, « ils ne concevaient pas l'état d'esprit de ce genre de contact purement égalitaire et n'ont pas supporté l'absence d'infirmière ». Même incompatibilité avec la philosophie de l'Unafam qui prône des actions plus encadrées, comme « le président, Jean Canneva, qui ne conçoit pas de permanences sans soignants ».

la parole aux usagers

Affiliée à la Fnap Psy, qui la représente auprès des pouvoirs publics, Esqui intervient elle aussi lors de réunions de santé mentale, « autant d'occasions où la parole est donnée aux usagers dans des assemblées qui réunissent souvent les seuls professionnels ».

Esqui fait d'ailleurs partie des associations de la Fnap Psy, destinées à devenir des groupes d'entraide mutuelle. Les Gem devraient permettre de consolider les associations en leur apportant un financement provenant de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

1- Association Esqui, hôpital Esquirol, 57, rue du Maréchal-Leclerc, 94413

Saint-Maurice cedex.

Tél. : 01 43 96 61 61 (poste 5019).

Site Internet : http://www.soliane.net/esqui.

Permanence parisienne au café Le Voltaire, 103, avenue de la République, 75011 Paris.