Le cancer du pancréas - L'Infirmière Magazine n° 216 du 01/05/2006 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 216 du 01/05/2006

 

oncologie

Cours

Le cancer du pancréas est la cinquième cause de décès par cancer dans les pays occidentaux. Le nombre de nouveaux cas en France oscille entre 3 000 et 5 000. Cependant, le classement tristement flatteur de cette maladie mérite d'être nuancé... En effet, le terme de cancer du pancréas peut recouvrir des affections de nature et de pronostic assez différents.

Le pancréas est une glande annexe du tube digestif. On distingue deux fonctions principales assurées par des compartiments différents de la glande.

La fonction exocrine correspond à la synthèse et à la sécrétion dans la lumière digestive d'enzymes dont le rôle est d'assurer la dégradation des aliments juste après leur passage dans l'estomac. En tout, une vingtaine d'enzymes comme la trypsine, l'élastase, la lipase, ou l'amylase sont impliquées dans ce phénomène. Elles sont synthétisées par les cellules acineuses avant d'être acheminées dans la lumière digestive au travers d'un réseau de petits canaux convergeant pour former le canal de Wirsung.

Le pancréas endocrine est constitué des îlots de Langerhans. Il s'agit de cellules endocrines (cellules produisant des hormones), regroupées en îlots disséminés dans la glande. Leur fonction est de sécréter dans la circulation générale différentes hormones impliquées dans la régulation de la glycémie, plus particulièrement l'insuline et le glucagon.

pathologies tumorales

Différents types de tumeurs peuvent se développer dans le pancréas à partir de ces différents types cellulaires.

Adénocarcinome. Le plus fréquent d'entre eux, l'adénocarcinome, se développe à partir des cellules de l'épithélium des canaux pancréatiques. Il s'agit du plus mauvais pronostic.

Tumeurs endocrines. Plus rares, elles naissent comme leur nom l'indique des cellules endocrines des îlots de Langerhans. Elles sont caractérisées par un pronostic en général meilleur du fait d'une évolutivité souvent plus lente, et surtout par la persistance pour certaines d'entre elles d'une sécrétion hormonale à des doses supraphysiologiques. On parle alors de syndrome hormonal, en règle générale caractéristique de l'hormone sécrétée. Quand une tumeur sécrète de l'insuline, on parle d'insulinome, du glucagon, de glucagonome, de la somatostatine, de somatostatinome, de la gastrine, de gastrinome, etc. Ces manifestations particulières posent des problèmes thérapeutiques spécifiques sur lesquels nous reviendrons par la suite. Enfin, certaines tumeurs peuvent se développer à partir des cellules acineuses mais sont extrêmement rares, et ne seront pas abordées plus avant.

survenue, facteurs de risque

Formes sporadiques. La grande majorité des cancers du pancréas surviennent de façon sporadique. Le risque de survenue de l'adénocarcinome du pancréas est augmenté chez les fumeurs et les patients atteints de pancréatite chronique. Le risque reste néanmoins relativement faible, car moins de 1 % des patients suivis pour pancréatite chronique développent un cancer. La plupart des adénocarcinomes se manifestent donc chez des patients sans facteur de risque connu.

Formes familiales. Les familles concernées comportent plusieurs sujets atteints de cancer du pancréas ou de tumeur s'intégrant dans certains syndromes de prédisposition familiale assez caractéristiques. Les tumeurs associées s'intégrant dans ces syndromes sont des mélanomes, des tumeurs du côlon ou du sein. La caractérisation de ces formes familiales et la découverte des anomalies génétiques associées a conduit à mieux les repérer et à les diagnostiquer, permettant ainsi de proposer aux sujets de la même famille un conseil génétique.

Pour les tumeurs endocrines, il n'existe pas de facteur de risque environnemental connu. En revanche, là aussi, on observe des formes familiales, toutefois rares. Il s'agit de la maladie de Von Hippel Lindau et de maladies appelées néoplasies endocriniennes multiples, qui comme leur nom l'indique, prédisposent à la survenue de tumeurs à partir du tissu endocrinien, à savoir la thyroïde, les glandes parathyroïdiennes, les surrénales, l'hypophyse, etc.

Manifestations cliniques

Adénocarcinome pancréatique. Les manifestations cliniques dépendent de la localisation de la tumeur et de son extension. Malheureusement, au stade initial, les signes cliniques sont peu fréquents, et souvent peu spécifiques, à type de gène ou de douleur épigastrique. Pour cette raison, le diagnostic est souvent porté tardivement. Les tumeurs localisées dans la tête peuvent comprimer le canal cholédoque, entraînant un ictère souvent associé à un intense prurit. La tumeur peut aussi envahir le duodénum, et provoquer son obstruction, responsable d'une intolérance alimentaire avec vomissements post-prandiaux. Les douleurs souvent intenses traduisent l'atteinte du plexus coeliaque et ont typiquement une irradiation postérieure. La maladie retentit également sur l'état général et les patients ont souvent une perte de poids importante. Une circonstance diagnostique particulière est l'apparition récente d'un diabète. Toutefois, ce cas de figure est peu fréquent et la proportion de cancer du pancréas chez les patients consultant pour l'apparition récente d'un diabète reste faible. Enfin, les formes diagnostiquées plus tardivement peuvent être associées à des signes de dissémination de la maladie comme une ascite, traduisant une carcinose péritonéale, ou une hépatomégalie douloureuse secondaire à la présence de métastases hépatiques.

Tumeurs endocrines. Les symptômes dépendent essentiellement du caractère fonctionnel ou non de la tumeur, à savoir de l'existence ou non d'une sécrétion hormonale. Les tumeurs non fonctionnelles restent longtemps asymptomatiques car lentement évolutives, conduisant malheureusement à un diagnostic tardif. Il faut noter que les patients ont souvent un état général moins altéré qu'au cours de l'adénocarcinome pancréatique. Parfois, lorsque la tumeur est localisée dans la tête, elle peut se révéler plus précocement par un ictère.

Pour les tumeurs fonctionnelles, les symptômes liés à l'hypersécrétion hormonale sont en général au premier plan et dépendent du type d'hormone sécrétée.

- L'insulinome est une tumeur produisant de l'insuline, responsable comme on s'y attend, d'épisodes d'hypoglycémie et parfois d'une prise de poids.

- Le gastrinome, responsable du syndrome de Zollinger-Ellison, est une tumeur produisant de la gastrine, comme son nom l'indique. Cette hormone induit la sécrétion d'histamine dans l'estomac et une importante augmentation de la sécrétion d'acide, entraînant des ulcères et/ou une diarrhée.

- Les tumeurs carcinoïdes produisent de la sérotonine et provoquent des bouffées vaso-motrices appelées flushs, parfois associées à des malaises et une diarrhée.

- Les glucagonomes produisent du glucagon. Les symptômes sont un peu moins évocateurs. Ils associent des lésions cutanées et un diabète.

- Le VIPome est responsable du syndrome de Verner-Morrison ou choléra endocrine. Le produit sécrété est alors le VIP, un peptide induisant la sécrétion d'ions et d'électrolytes par le côlon, responsable d'une importante diarrhée, semblable à celle du choléra.

- Le somatostatinome, dont la sécrétion excessive de somatostatine est responsable de manifestations cliniques moins caractéristiques : diarrhée, diabète modéré, amaigrissement.

Cette liste n'est pas exhaustive mais les autres types de tumeurs sont plus rares.

Diagnostic

Le diagnostic des tumeurs du pancréas repose avant tout sur l'imagerie.

Scanner. L'examen de référence est le scanner spiralé abdominal avec injection de produit de contraste. Il faut s'assurer avant sa réalisation de l'absence de contre-indication absolue ou relative, c'est-à-dire d'allergie ou d'insuffisance rénale. Il permet de visualiser une masse en général mal limitée et hétérogène, d'évaluer son extension locale, en particulier les rapports avec les vaisseaux, et de rechercher des localisations secondaires, hépatiques ou péritonéales. Cet examen est essentiel pour déterminer les modalités du traitement.

Échographie abdominale. Elle est utile pour mettre en évidence des métastases hépatiques mais ne permet pas en général un bon examen du pancréas.

Imagerie par résonance nucléaire. Elle n'est utile qu'en cas de contre-indication à l'injection d'un produit de contraste lors du scanner.

Écho-endoscopie. Cet examen est réalisé par le gastroentérologue sous anesthésie générale. Il s'agit de combiner le principe de l'endoscopie avec celui de l'échographie. On utilise un écho-endoscope, c'est-à-dire un endoscope ayant à son extrémité une sonde d'échographie, permettant d'étudier en détail la paroi des organes digestifs et les organes sous-jacents avec une précision inégalable. Ainsi, le pancréas, situé au contact de l'estomac et du duodénum, peut être très bien visualisé. En particulier, il permet d'évaluer l'extension tumorale et les rapports de la tumeur avec les vaisseaux quand il existe un doute sur le scanner. L'autre intérêt de cet examen réside dans le fait que certains appareils sont dotés d'un canal opérateur permettant le passage d'une aiguille à ponction et la réalisation d'une biopsie.

Marqueurs tumoraux. Il existe des marqueurs tumoraux dosables sur un prélèvement sanguin. Pour l'adénocarcinome, il s'agit du CA 19-9. Celui-ci n'est cependant ni spécifique ni sensible. Il peut être élevé au cours de nombreuses affections, bénignes ou malignes. Son intérêt réside notamment dans le suivi des patients lors du traitement. Pour les tumeurs endocrines, le marqueur le plus utilisé est la chromogranine A, et en fonction du type de sécrétion suspecté selon les signes cliniques, il est possible de réaliser des dosages hormonaux spécifiques (insuline, sérotonine et dérivées urinaires, glucagon, gastrine...).

TRAITEMENT

Adénocarcinome.

Traitement chirurgical. Le traitement de l'adénocarcinome repose avant tout sur la chirurgie, dont l'objectif est de retirer la tumeur et les ganglions susceptibles de constituer des relais pour la dissémination tumorale. Celle-ci n'est possible qu'en l'absence de localisation secondaire, notamment péritonéale et hépatique, et d'extension locale trop importante, correspondant en pratique à une tumeur envahissant les troncs artériels (tronc coeliaque ou artère mésentérique supérieure). En fonction de la localisation de la tumeur, différents types d'interventions sont réalisés. Pour les tumeurs de la tête, l'intervention réalisée est une duodénopancréatectomie céphalique. Du fait des rapports étroits du duodénum avec la tête du pancréas, celui-ci doit être retiré en bloc. Aussi, la continuité digestive est rétablie par la réalisation d'une anastomose gastro-jéjunale. La partie basse du cholédoque est également réséquée, rendant nécessaire la confection d'une anastomose bilio-digestive. Enfin, le pancréas est abouché soit à une anse jéjunale, soit à l'estomac. Pour les tumeurs de la queue du pancréas, l'intervention est une splénopancréatectomie gauche. On retire la partie gauche du pancréas (correspondant à la queue) avec la rate, car le contact étroit des vaisseaux spléniques avec le pancréas dans cette région rend leur préservation difficile.

Il s'agit d'interventions relativement importantes nécessitant au moins 10 à 15 jours d'hospitalisation. En dehors des complications générales de la chirurgie (hémorragie, infection, complication de parois, accidents thromboemboliques...), il existe des complications plus spécifiques : les fistules pancréatiques. Elles sont dues à la fuite des sécrétions pancréatiques au niveau de l'anastomose pancréatico-digestive, dont la conséquence est une collection, susceptible de s'infecter. Le traitement fait en général appel aux analogues de la somatostatine qui diminuent les sécrétions pancréatiques. Il est parfois nécessaire de procéder à un drainage. L'autre complication fréquente est un trouble de la vidange gastrique, traité à l'aide de prokinétiques.

Chimiothérapie. Celle-ci peut être indiquée dans deux situations :

- en situation palliative, lorsque la tumeur n'est pas résécable, afin d'améliorer la qualité de vie et de prolonger la survie ;

- en situation adjuvante, c'est-à-dire après traitement chirurgical, afin de réduire le risque de rechute. Ces traitements nécessitent la mise en place d'une chambre de perfusion. Plusieurs molécules sont utilisées. Les plus courantes sont la gemcitabine, le 5-fluorouracile et les sels de platine (oxaliplatine, cisplatine).

Radiothérapie. Son usage est limité aux tumeurs dont l'extension locale empêche la résection en l'absence de localisation à distance, en général en complément de la chimiothérapie.

Traitements endoscopiques. Comme précédemment indiqué, les tumeurs localisées dans la tête du pancréas compriment souvent le cholédoque ou le duodénum, entraînant prurit, dans le premier cas, et intolérance alimentaire dans le second cas. Dans cette situation, si la tumeur n'est pas extirpable, il est possible de réaliser un traitement par voie endoscopique. Pour ce faire, une endoscopie est réalisée sous anesthésie générale, un fil guide est inséré au travers de la sténose, permettant le positionnement d'un ballonnet dont la dilatation calibre la sténose, suivi de la mise en place d'une prothèse métallique expansible, équivalent d'un stent dans les artères coronaires. Ces traitements permettent de soulager les symptômes en rapport avec ces sténoses et améliorent la qualité de vie, au prix d'une hospitalisation de courte durée. Les effets secondaires et les échecs sont peu fréquents. L'avènement des traitements endoscopiques a ainsi constitué une avancée notable car, auparavant, le seul moyen de soulager les symptômes était la réalisation de dérivations chirurgicales (anastomoses bilio-digestive ou gastro-jéjunale), court-circuitant les sténoses.

Thérapeutiques moléculaires. Au cours des dernières années, sont apparues de nouvelles molécules anticancéreuses issues des progrès de la recherche en biologie moléculaire. Contrairement aux chimiothérapies conventionnelles qui détruisent les cellules tumorales sans véritables spécificités, entraînant du coup des effets secondaires assez marqués, ces nouveaux médicaments permettent de mieux cibler les cellules tumorales en visant des mécanismes biologiques essentiels pour leur survie (cf. encadré p. VIII). De nombreux essais thérapeutiques sont actuellement en cours, et certaines de ces molécules devraient bientôt devenir d'utilisation courante pour l'adénocarcinome pancréatique.

Traitement de la douleur. L'adénocarcinome pancréatique est une affection souvent douloureuse du fait de l'envahissement des plexus nerveux. Aussi, le traitement de la douleur est de toute première importance. Son retentissement sur la qualité de vie est majeur et se répercute indirectement sur la tolérance des traitements.

Aussi, il est important de la rechercher et de ne pas la minorer. Son évaluation repose sur divers types d'échelles dont la plus fréquemment utilisée est l'échelle visuelle analogique. Il existe trois classes d'antalgiques :

- niveau 1 (paracétamol) ;

- niveau 2 (codéine, dextropropoxyphène) ;

- niveau 3 (dérivés morphiniques).

Il est également important de déterminer la meilleure voie d'administration. Chez un patient qui risque de vomir, la voie orale est à éviter. On préférera alors des suppositoires ou des patchs. Lorsque les douleurs sont mal contrôlées, ou les antalgiques mal tolérés du fait de doses élevées, il est possible de proposer une alcoolisation splanchnique sous contrôle écho-endoscopique, afin de détruire les racines nerveuses impliquées dans ces douleurs.

Tumeurs endocrines. L'approche thérapeutique des tumeurs endocrines du pancréas est très différente de celle de l'adénocarcinome, et cela pour deux raisons. La première est l'existence dans un certain nombre de cas d'un syndrome hormonal, nécessitant une prise en charge spécifique, et la seconde tient à leur évolutivité. En général, ces tumeurs sont considérées comme lentement évolutives et donc de meilleur pronostic, mais ceci est inconstant, certaines tumeurs pouvant être quasiment indolentes, alors que d'autres au contraire sont aussi agressives que l'adénocarcinome.

Traitement chirurgical. Là aussi, le traitement repose en première intension sur la chirurgie dont le principe est de réséquer complètement la tumeur. Les principes de la chirurgie pancréatique restent les mêmes que pour l'adénocarcinome. Cependant, les indications de la chirurgie sont ici plus larges, car celle-ci est indiquée également dans le cas où il existe des métastases susceptibles d'être résécables. Le siège le plus fréquent des métastases est le foie. Il est donc possible de réaliser une hépatectomie en association avec l'exérèse de la lésion primitive. La chirurgie est alors réalisable en plusieurs temps.

Dans les circonstances où la tumeur n'est pas résécable dans son ensemble, l'attitude thérapeutique dépend des deux caractéristiques des tumeurs endocrines précédemment citées, à savoir, l'existence d'un syndrome hormonal et l'évolutivité de la tumeur. Il est donc parfois nécessaire chez les patients asymptomatiques de surveiller la tumeur par des scanners répétés et de n'entreprendre un traitement que lorsqu'une progression est constatée.

Chimiothérapie. Son indication est essentiellement le contrôle de la maladie lorsque celle-ci est progressive. Il n'existe, à l'heure actuelle, aucune recommandation particulière en situation adjuvante. Les molécules utilisées sont le 5-fluorouracile, les anthracyclines (Adriamycine®), la streptozotocine, le Déticène®, et dans certains cas particuliers, le VP16 et le cisplatine.

Chimio-embolisation intra-artérielle hépatique. Le siège, le plus fréquent des métastases, est le foie. Une caractéristique des tumeurs endocrines est leur hypervascularisation, plus particulièrement par voie artérielle. Le reste du parenchyme hépatique possède une vascularisation mixte provenant à la fois du réseau artériel et de la veine porte. Le principe de la chimio-embolisation est d'utiliser cette caractéristique pour traiter spécifiquement les métastases sans endommager le foie normal. Un cathétérisme rétrograde artériel est alors réalisé, en général par voie fémorale. Le cathéter est positionné dans l'artère hépatique permettant d'injecter directement une molécule de chimiothérapie, puis des particules résorbables afin de réaliser une embolisation. L'ischémie, induite par l'embolisation, potentialise l'effet de la chimiothérapie sur les cellules tumorales tandis que les cellules hépatiques non tumorales en sont protégées par leur vascularisation porte. On comprend bien pourquoi ce traitement est contre-indiqué en cas de thrombose porte.

Les autres contre-indications sont associées à l'injection d'iode. Des effets secondaires peuvent survenir. Le plus fréquent, le syndrome post-embolisation, associe douleurs de l'hypochondre droit, nausées, vomissements et parfois fièvre. Il répond bien au traitement symptomatique.

D'autres effets secondaires, plus sévères, peuvent apparaître, comme des poussées d'insuffisance hépatique ou rénale, des ulcérations gastriques ou une cholécystite. Ils sont toutefois plus rares. Les cures sont répétées tous les trois mois, et en cas de bonne réponse, peuvent être espacées.

Radiothérapie. Elle n'a que peu d'indication pour le traitement des tumeurs endocrines. Ses indications sont limitées aux traitements des métastases cérébrales et de certaines lésions osseuses douloureuses.

Une forme particulière de radiothérapie actuellement en voie de développement est la radiothérapie métabolique. Elle repose sur l'utilisation de traceurs, couplés à une molécule radioactive. Une grande proportion des tumeurs endocrines exprime les récepteurs d'une hormone, la somatostatine. Il existe des analogues de la somatostatine, spécifiques de ces récepteurs, qui vont se fixer sur les cellules tumorales. Il est alors possible de les conjuguer avec une molécule radioactive, à des fins diagnostiques ou thérapeutiques. En effet, en fonction du type de molécule radioactive utilisée, il est possible soit de détecter le traceur - il s'agit alors d'une scintigraphie des récepteurs de la somatostatine ou octréoscan - permettant de préciser l'extension de la maladie, soit de réaliser un traitement avec une irradiation directement réalisée in situ.

Somatostatine et analogues. Une forte proportion des tumeurs endocrines exprime les récepteurs de la somatostatine. Les analogues actuellement disponibles ciblent les principaux d'entre eux. Leur effet est essentiellement de diminuer les sécrétions hormonales, notamment au cours du syndrome carcinoïde. Dans leur forme initiale, ces molécules nécessitaient des injections quotidiennes. Il existe désormais des formes à action prolongée qui s'administrent par voie intramusculaire, mensuellement.

BILAN

Plusieurs types de tumeurs peuvent toucher le pancréas, le plus fréquent étant l'adénocarcinome. Celui-ci reste de mauvais pronostic et son traitement repose essentiellement sur la chirurgie. Dans les formes impossibles à opérer, les traitements endoscopiques associés à la chimiothérapie et une prise en charge attentive de la douleur permettent d'améliorer la qualité de vie des patients. Les progrès récents de la chimiothérapie et l'émergence de nouvelles thérapeutiques moléculaires font espérer des avancées thérapeutiques significatives dans un futur proche.

Les îlots de Langerhans

Les îlots de Langerhans représentent environ 1 à 2 % de la masse du pancréas soit 1 à 1,5 gramme. Un adulte possède à peu près 1 million d'îlots, majoritairement dans la queue du pancréas. Chaque îlot, d'une taille comprise entre 50 et 500 µm, est constitué d'un millier de cellules. Les hormones produites par les îlots de Langerhans sont sécrétées directement dans la circulation sanguine par au moins 4 types de cellules :

> l'insuline est produite par les cellules ß (65-80 % des îlots) ;

> le glucagon est produit par les cellules a (15-20 %) ;

> la somatostatine est produite par les cellules d (3-10 %) ;

> le polypeptide pancréatique par les cellules PP (1 %).

Anatomie du pancréas

L'anatomie du pancréas est importante à connaître car elle explique les manifestations cliniques et permet de comprendre les bases du traitement. Le pancréas est situé à l'intérieur du cadre duodénal, sous l'estomac. Il peut être divisé schématiquement en deux parties : la tête constituant la partie la plus volumineuse, au contact du duodénum, traversée par le partie terminale du canal cholédoque, qui vient s'aboucher dans le duodénum en rejoignant le canal pancréatique principal, aussi appelé canal de Wirsung, pour former l'ampoule de Water. En arrière de la tête passent les vaisseaux mésentériques (artère et veine) et à la partie haute, l'artère hépatique et la veine porte. Le reste du pancréas est constitué du corps et de la queue, sous l'estomac, se terminant en arrière en regard de la rate, en contact étroit avec les vaisseaux spléniques.

Conseil

Le conseil génétique en oncologie a pour but :

> d'évaluer un risque héréditaire de cancer(s) ;

> de proposer, si possible, une attitude de surveillance adaptée au risque ;

> de proposer, quand cela est réalisable, des recherches moléculaires sur les gènes de prédisposition au cancer, en expliquant leurs intérêts et leurs limites ;

> d'assurer une prise en charge des conséquences psychologiques de la présomption ou la connaissance d'un risque héréditaire ;

> d'assurer un suivi à long terme des individus et des familles.

La pancréatite chronique

La pancréatite chronique est liée à une inflammation chronique du pancréas. Sa principale cause est la consommation excessive d'alcool. Il existe également des formes héréditaires de mieux en mieux connues et comprises du fait des progrès récents de la biologie moléculaire. Les patients peuvent rester longtemps asymptomatiques, ou bien avoir des douleurs caractéristiquement aggravées par l'alimentation, qui stimule le pancréas. Dans d'autres cas, les patients peuvent être victimes d'épisodes de pancréatite aiguë. Enfin, les formes ayant évolué pendant plusieurs années peuvent aboutir à une perte de fonction de la glande pancréatique, concernant aussi bien la fonction exocrine, impliquée dans la digestion et responsable d'une malabsorption et d'un amaigrissement, que la fonction endocrine, avec la possibilité d'un diabète. Une autre complication potentielle de cette maladie réside dans la survenue de pseudokystes. Il s'agit de collections composées de liquide pancréatique et/ou de tissu nécrotique, secondaire à l'organisation d'une zone de nécrose, à la rupture ou à la dilatation d'un canal pancréatique. Ceux-ci peuvent éventuellement se compliquer d'infection, d'hémorragie ou bien devenir compressifs.

Molécules

Les thérapeutiques moléculaires sont des molécules ciblant des mécanismes biologiques essentiels à la survie des tumeurs.

> L'angiogenèse : pour se développer, les tumeurs induisent la synthèse de nouveaux vaisseaux. Certaines molécules comme les anti-VEGF bloquent le phénomène.

> Les facteurs de croissance : certaines tumeurs expriment des récepteurs pour certains facteurs de croissance. De nouvelles molécules bloquent ces récepteurs et abolissent leur effet prolifératif.

La carcinose péritonéale

La carcinose péritonéale est une complication fréquente des tumeurs digestives, notamment du cancer du pancréas. Elle correspond au développement de métastases péritonéales. Ses conséquences peuvent être une ascite, des douleurs ou un syndrome occlusif. Celui-ci est particulièrement grave car, du fait du caractère diffus de la maladie dans la cavité abdominale, on ne peut envisager un traitement chirurgical pour lever l'occlusion. Le traitement repose donc sur l'aspiration digestive. Certains médicaments permettent parfois de franchir un cap, mais leur efficacité reste discutée. Il s'agit des corticoïdes, des antisécrétoires gastriques et des analogues de la somatostatine dont l'objectif est de diminuer les secrétions digestives. En cas de réponse à la chimiothérapie, on peut espérer une amélioration clinique.