Les yeux dans les bleus - L'Infirmière Magazine n° 218 du 01/07/2006 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 218 du 01/07/2006

 

Adolescents

Du côté des associations

Créée en 1997, l'association La Note bleue s'adresse aux jeunes en souffrance, à leur entourage ainsi qu'aux professionnels de la santé.

Petite soeur d'« Urgence psychiatrie », de « SOS dépression », et de « SOS anor », La Note bleue s'intéresse à « l'adolescence comme période de mutation durant laquelle le corps subit des bouleversements. Ces transformations physiques sont sans commune mesure avec les transformations psychiques qui les accompagnent », précise Alain Meunier, psychiatre et psychothérapeute, cofondateur de La Note bleue. L'association se dédie à la prise en charge des pathologies liées à ces bouleversements : troubles alimentaires, fugues, dépressions, tentatives de suicide.

constat d'échec

« Auparavant, les pathologies spécifiques à l'adolescence étaient prises en charge par des psychiatres du secteur adulte qui traitaient l'anorexie, par exemple, en tant que trouble de l'humeur. La solution psychanalytique s'est aussi révélée inefficace », constate le psychiatre. Et ce n'est pas le seul mal de l'adolescence : en matière de tentative de suicide, la France déplore 160 000 passages à l'acte chaque année.

Révélatrice de l'importance du phénomène en France, l'association « SOS dépression » reçoit 16 000 appels par an. Malheureusement, notre pays est bien moins efficace que d'autres en matière de prévention. La Suède ou le Canada ont su faire baisser considérablement le nombre de tentatives de suicide au cours des quinze dernières années grâce à la mise en place de structures d'écoute et d'accueil performantes et à des prises en charge spécifiques.

« En Suède, face à une tentative de suicide, l'assistante sociale et le médecin se déplacent, et la famille est mise sous contrôle. La France manque toujours cruellement de structures spécialisées. La prise en charge et le suivi sont quasi inexistants, quand on sait qu'une personne sur trois récidive... »

soins appropriés

Dès lors, « il nous a paru indispensable de créer un lieu d'aide, de soutien, d'information et de prévention et d'organiser une prise en charge en ville, destinée à éviter l'hospitalisation et, à terme, faciliter l'accès aux soins ». Concrètement, La Note bleue offre à travers « SOS jeunes » un soutien téléphonique assuré 24 heures sur 24 par des psychologues et des bénévoles formés. Les appels aboutissent dans certains cas à une prise de rendez-vous.

« Dans le cadre des troubles du comportement alimentaire, on comptabilise environ 60 appels par jour, dont la moitié proviennent de proches. » Des rencontres en groupe sont également organisées dans les locaux de l'association pour partager ses inquiétudes avec d'anciens patients et établir un dialogue. Ces réunions sont destinées aux jeunes, à leur entourage et aux médecins confrontés à ces pathologies.

semaine thérapeutique

Pour soigner l'anorexie, outre les groupes de parole, sont mises à la disposition des malades des séances d'hypnose et des consultations de psychiatres, de psychologues, et d'une diététicienne. L'association anime aussi un atelier des parents, ainsi que différents ateliers d'art-thérapie dont le but est de développer la créativité en prenant conscience de son corps et de ses ressources. Enfin, cet été, une quinzaine de personnes anorexiques, accompagnées par un médecin et une diététicienne, partiront pour une semaine thérapeutique dans un centre de thalassothérapie qui permettra un suivi permanent de ces malades ainsi qu'une synergie des soins.

Pour mieux entrer en relation avec les adolescents, La Note bleue a développé son site Internet : « le courrier électronique est aujourd'hui le premier moyen de communication des ados ». L'association s'est aussi fait connaître grâce à la diffusion d'un reportage dans l'émission Zone interdite sur une anorexique suivie par le Dr Alain Meunier. Ainsi, la grande réussite de La Note bleue réside dans la prise de conscience plus précoce de ces troubles : « les appels concernaient surtout des anorexiques de 18-19 ans dans un premier temps, alors qu'aujourd'hui, ce sont aussi de plus jeunes adolescents (de 10 à 13 ans), donc plus faciles à guérir ».

ligne d'écoute

Au-delà de l'aide que cette association peut apporter aux personnes souffrant des divers troubles de l'adolescence, « le standard est le témoin privilégié de pathologies souvent impossibles à observer en milieu médical ». De ces informations, le Dr Alain Meunier a tiré un ouvrage intitulé Anorexie, ados au régime, ados en danger ?(2) où il définit notamment « l'anorexique (comme) une personne qui tente de maîtriser une souffrance par la maîtrise de son alimentation. Des signes forts et facilement décelables annoncent une anorexie. Un grand pas serait fait si l'on parvenait à mieux former les infirmières à la détection de ces signes. »

1- 162, bd du Montparnasse, 75014 Paris. Ligne d'écoute : 01 40 47 73 73.

Internet : http://www.lanotebleue.org.

2- Éditions Platypus Press.

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