Éternelle beauté

Évelyne Benard est esthéticienne. Pourtant, elle porte une blouse blanche estampillée AP-HP. Dans les couloirs de l'hôpital Sainte-Périne à Paris, un établissement gériatrique, elle propose de refaire une beauté aux patientes, encore coquettes, qui le souhaitent. Grâce à un chariot bien fourni en produits de beauté, petits miroirs, rouges à lèvres et autres brosses à cheveux, elle passe de chambre en chambre. Évelyne fait partie de l'association CEW dont les prestations, très larges, permettent entre autres de profiter de soins esthétiques en milieu hospitalier. Une fois par semaine depuis cinq ans, Évelyne s'installe dans cet établissement gériatrique. « Au départ, j'avais ce vrai désir d'aider les gens, raconte-t-elle. J'ai été comptable avant d'ouvrir mon institut de beauté. Un jour, j'ai eu envie de donner plus aux autres. Je voulais apporter du bien-être. Aujourd'hui, je travaille pour plusieurs associations dont le CEW et Étincelle qui vient en aide aux femmes atteintes de cancer. »

pas futile !

L'association américaine CEW a été créée en 1954 outre-Manche avant de s'installer en 1986 en France. « La beauté n'est pas futile mais aide à mieux vivre ! », reste son postulat. Cosmetic Executive Women réunit plus de 240 membres qui occupent des postes clés dans l'ensemble des disciplines liées à la beauté, de l'industrie à la médecine, recherche, études, fabrication, distribution, services, finance, juridique, formation et communication...

projets caritatifs

Représentant les grandes marques de cosmétiques, elle rassemble des fonds destinés à appuyer des projets caritatifs au sein de l'univers hospitalier. CEW a ainsi mis en place des instituts de beauté mobiles dans les hôpitaux. Active dans douze établissements, elle est présente tout aussi bien dans des services de cancérologie, traumatologie, gérontologie, rééducation fonctionnelle, gynécologie, médecine interne, dermatologie et en maison des adolescents.

À l'Institut Curie, par exemple, les femmes qui viennent de subir une intervention chirurgicale peuvent gratuitement se faire maquiller, coiffer, épiler ou prêter des perruques, etc. Une thérapie plus que salutaire. Pour les personnes âgées, ces prestations sont tout aussi bénéfiques ! Les yeux pétillants, Évelyne Benard explique son bonheur de s'occuper de ces patients.

« C'est très important de les "bichonner", lance-t-elle. La vieillesse génère une vraie perte de l'image de soi. On fait le deuil de son image d'avant. J'ai fait de belles rencontres ici. Les personnes hospitalisées descendent au salon situé au rez-de-chaussée. À la demande de la famille ou du corps médical, je passe dans leur chambre dans les étages. Le salon de coiffure leur permet de sortir de leur chambre et de leur quotidien. Elles changent ainsi de décor et s'efforcent de s'extraire de leurs petites habitudes. Les dames d'un certain âge aiment avoir les ongles vernis ou être maquillées et renvoyer une image d'elle-même positive. En arrivant ici, beaucoup changent subitement. Le choc de l'hospitalisation est tel que beaucoup se referment sur elles-mêmes. Elles sont conscientes d'être là jusqu'à la fin. »

émotions fortes

Évelyne avoue ici faire des rencontres déterminantes. « Les personnes âgées apprécient beaucoup le toucher, explique-t-elle. Le fait de se faire masser, maquiller ou coiffer leur plaît beaucoup. Cela déclenche parfois des émotions fortes. Je me souviens de cette dame de cent ans qui ne pouvait plus parler. En me voyant maquiller une dame, elle a insisté pour que je lui mette des couleurs aux joues. »

Les équipes soignantes sont contentes de cette présence dans le service. « Les soignants savent que cela maintient les aînés en vie, ajoute Évelyne. Cela les motive. Aujourd'hui, en tant qu'esthéticienne, je ne pourrais plus exercer dans un salon en ville. Ici, j'ai le sentiment d'avoir un rôle à jouer. »