L'Infirmière Magazine n° 219 du 01/09/2006

 

Secret

Juridique

Le sida a bouleversé l'approche des politiques sanitaires en matière de MST. Toute mesure de contrainte a été délibérément écartée par les pouvoirs publics afin de préserver la vie privée.

Une personne ne saurait juridiquement renoncer à sa liberté et son intégrité physique. De ce principe découle la règle du consentement libre et éclairé du malade à tout acte thérapeutique, aussi bénin soit-il.

Les exceptions à la règle du consentement sont relativement peu nombreuses et en tout cas strictement réglementées. C'est en matière de prévention sanitaire que le consentement du patient peut être volontairement ignoré. Ces cas définis par le Code de la santé publique concernent les vaccinations, mais aussi la lutte contre les fléaux sociaux à travers les maladies vénériennes, l'alcoolisme, la toxicomanie, la tuberculose ou les maladies mentales.

Face au virus du sida, un cas de dépistage a été rendu obligatoire : celui du don de sang, d'organes, de spermatozoïdes ou d'ovocytes. Le refus de dépistage peut poser des problèmes importants : par exemple au bloc opératoire, lorsqu'un membre de l'équipe se pique et doit se soumettre à un dépistage dans le cadre de la législation sur les accidents du travail. Le dépistage du patient va bien souvent se faire à son insu : que faire alors en cas de découverte de séropositivité ?

Le test est aujourd'hui aussi obligatoirement proposé aux personnes incarcérées.

femmes enceintes

Dans le même sens, le dépistage est aujourd'hui systématiquement proposé aux femmes enceintes, sans caractère obligatoire, et le taux d'acceptation est de l'ordre de 98 à 99,5 %. Certains ont proposé que les dépistages soient obligatoires concernant les femmes enceintes. Néanmoins, on pourrait s'interroger sur les conséquences d'une telle obligation qui risquerait de constituer indirectement une pression en faveur de l'IVG. Plus que l'obligation d'un test, la prévention, l'information sont sans aucun doute de meilleures armes pour lutter contre la maladie, information signifiant responsabilisation du malade et donc meilleure prise en charge.

Dans l'esprit de la loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades, le refus de soins du malade du sida doit être respecté, comme pour toute pathologie.

La règle du secret s'applique en matière de sida de manière absolue. Pourtant, les conséquences de ce secret absolu peuvent être lourdes au vu des risques de contamination. En effet, le médecin, en théorie, n'est pas autorisé à alerter les proches d'un patient séropositif. Il s'expose alors à des poursuites pour non-assistance à personne en danger par le partenaire contaminé. On observe là un conflit de devoirs et la doctrine considère que l'obligation de secret prévaut sur l'obligation d'assistance. Quoi qu'il en soit, les recommandations sont les suivantes : convaincre le patient d'informer son conjoint ou partenaire, de proposer un entretien commun avec ce dernier, et en cas de refus, demander au malade une attestation précisant qu'il a été informé de son état et des risques encourus pour son ou ses partenaires.

Notons que les peines de prison sont lourdes à l'encontre de ceux ou celles qui, se sachant porteurs du HIV, ont des relations sexuelles non protégées et dissimulent leur état à leur(s) partenaire(s).

époux

Le test de dépistage du VIH ne fait pas partie des examens prénuptiaux obligatoires. En revanche, il doit être systématiquement proposé aux futurs époux. Et en cas de séropositivité, seul le partenaire atteint sera informé. Reste le problème délicat de l'information du futur conjoint évoqué ci-avant. Le refus de révéler la séropositivité ou la maladie peut constituer une cause de nullité du mariage ou de divorce, en raison de l'impossibilité de procréer sans risque pour le conjoint. D'autre part, la séropositivité pourra être un élément révélateur d'un comportement adultérin ou de l'usage de drogue, considérés comme fautifs et pouvant constituer le motif d'un divorce.

À RETENIR

> La France ne recourt pas au dépistage et traitement obligatoires du sida.

> Le dépistage est seulement obligatoire en cas de don du sang, d'organes, de spermatozoïdes ou d'ovocytes.

> Le médecin n'est pas autorisé à alerter les proches d'un patient séropositif mais il doit tenter de convaincre ce dernier d'informer son partenaire.

SIDA ET DROIT AU TRAVAIL

Le droit du travail dans le secteur privé est dominé par le principe de la liberté contractuelle. Théoriquement, l'employeur reste libre d'engager ou pas une personne séropositive ou porteuse du virus. Cette liberté n'est néanmoins pas absolue. En effet, il est prévu aux articles 225-1 et suivants du Code pénal qu'un employeur ne peut refuser d'embaucher une personne en raison de son état de santé et en dehors des cas d'inaptitude à l'emploi médicalement constatés.

Le médecin du travail s'assure que le salarié est médicalement apte au poste de travail proposé. Il est bien évidemment tenu au secret professionnel et seule sera communiquée à l'employeur la fiche mentionnant l'aptitude ou non du salarié.

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