L'esprit des lois - L'Infirmière Magazine n° 223 du 01/01/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 223 du 01/01/2007

 

Livre

Éthique

Odile Paycheng et Stéphane Szerman rééditent un ouvrage indispensable à la réflexion et à la pratique éthique.

Abstention de soins, clonage, contraception, dons et greffes d'organes, information et consentement aux soins... Pour celles et ceux et qui avaient manqué la première édition publiée en 1997, Odile Paycheng, ancienne cadre de santé, qui a effectué la majeure partie de sa carrière comme formatrice en Ifsi et Stéphane Szerman, infirmier de formation, aujourd'hui psychothérapeute, offrent une session de rattrapage. « Revue et augmentée », la nouvelle mouture(1) s'affirme, à l'image de la précédente, comme une boîte à outils à mettre entre les mains de tous ceux qui soignent et sont confrontés à une problématique éthique, ou bien qui souhaitent approfondir leurs connaissances dans ce domaine sans cesse en évolution. On n'y trouvera pas de réponses toutes faites, mais une aide précieuse pour construire et étayer, au quotidien, un questionnement éthique indissociable de la pratique soignante.

foisonnement

Ainsi sont présentés, dans leur intégralité, les textes de référence (lois, décrets, codes déontologiques) français ou élaborés par les instances européennes et internationales et ratifiés par la France. De la déclaration universelle des droits de l'homme à la loi de bioéthique en passant par la récente charte de la personne hospitalisée, tout y est. « Outre que la 1re édition était épuisée, en dix ans, la législation française, nourrie des travaux éthiques, notamment de ceux du Conseil consultatif national d'éthique, a beaucoup évolué. Les lois du 4 mars 2002 et du 6 août 2004 sont, à ce titre, emblématiques de cette évolution. Leur esprit est, en effet, fortement marqué par la pensée éthique du soin puisque ces lois placent la personne au coeur de leurs préoccupations. Il est également notable que la conception de la vie et celle de la fin de vie ont vu un foisonnement spectaculaire de textes entourant leur pratique », indique Odile Paycheng.

repères religieux

À travers quatre grandes thématiques éthiques, une dizaine de problématiques spécifiques (euthanasie, expérimentation médicale, IVG, soins palliatifs...) sont explorées grâce à un récapitulatif des articles de lois, extraits des textes de références, puis par le biais de repères juridiques, déontologiques et moraux. Ces derniers sont abordés dans leur dimension philosophique, éthique et religieuse (bouddhisme, catholicisme, islam et judaïsme). À noter que les repères religieux ont fait l'objet d'une validation par les autorités religieuses respectives. « Nous avons voulu développer cette approche croisée afin que le lecteur puisse, au regard de ses valeurs personnelles et professionnelles, se forger une opinion propre », souligne Odile Paycheng. Malgré son prix, ce guide devrait trouver la place qu'il mérite dans tous les services et lieux de soins.

1- À la rencontre de l'éthique, les fondements du questionnement éthique dans le domaine de la santé. Éd. Heures de France, 34 euros.

TÉMOIN Florence Gruat, cadre de santé

« Garder son libre arbitre »

« La démarche éthique du soin ne relève pas d'un supplément d'âme, mais d'une nécessité. À l'heure où les enjeux éthiques ne cessent d'émerger, s'appuyer sur cette démarche consolide les bonnes pratiques infirmières, explique Florence Gruat, cadre de santé, formatrice à l'Ifsi de l'hôpital René-Dubos de Pontoise (Val d'Oise) et doctorante en éthique. Nous devons clairement définir nos priorités, en gardant à l'esprit que la finalité de notre réflexion demeure la personne soignée. Dans ce contexte, nous sommes responsables de ce que nous faisons, tout autant que de ce que nous ne faisons pas, ou laissons faire. En outre, avoir recours au questionnement éthique, en se référant aux concepts fondamentaux et aux valeurs du soin, permet de garder son libre arbitre. Si, confrontée à une situation donnée, une infirmière se questionnant a la conviction que dire "non" est dans l'intérêt du patient, quitte à se singulariser, il est important qu'elle exprime son point de vue, afin de relancer le débat dans l'équipe et contribuer à l'analyse des pratiques professionnelles. »