Petite enfance et maladies de peau - L'Infirmière Magazine n° 223 du 01/01/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 223 du 01/01/2007

 

dermatologie

Cours

La peau est sensiblement différente selon l'âge. Chez le nouveau-né, la couche cornée est mince, peu résistante et particulièrement perméable aux germes infectieux. Les glandes sébacées sont très actives en raison de l'excès d'androgènes d'origine maternelle.

L'ÉRYTHÈME FESSIER

Très fréquent, l'érythème fessier est favorisé par la fragilité de la peau du jeune enfant, son pH alcalin, le contact prolongé avec l'urine et les matières fécales, les couches occlusives source de macération. De plus, certains produits détergents utilisés pour la lessive, ou encore certains produits de toilette sont allergisants, mal tolérés et peuvent induire ou aggraver une dermatose.

On oppose ainsi quatre types d'érythème :

L'érythème par acidité des selles. Il se voit plus volontiers chez l'enfant nourri au sein et s'accompagne d'une diarrhée postprandiale. Le lactose du lait de mère, mal dégradé par une lactase insuffisamment active au niveau de l'intestin, est transformé par les bactéries en acides organiques irritants. Les laits modernes, sucrés au lactose, favorisent également cet érythème. C'est un érythème érosif qui débute au niveau de la marge de l'anus et s'étend en cocarde de façon centrifuge. Un traitement local par une pâte à l'eau à l'oxyde de zinc doit suffire. Il est évident qu'il ne faut pas interrompre l'alimentation au sein.

L'érythème ammoniacal. Se voit chez le nourrisson plus âgé dont l'alimentation est diversifiée. Plus riche en protides, la dégradation ammoniacale de l'urée entraîne l'agressivité de l'urine. La rougeur prédominera au niveau des parties convexes : fesses, lombes, abdomen, là où les langes imbibées d'urine sont en contact.

Le traitement est simple : changes plus fréquents, fesses à l'air le plus possible, pâte à l'eau. Des conseils diététiques pour diminuer l'apport protidique doivent être prodigués.

L'érythème d'origine infectieuse. D'origine mycosique (Candida) ou moins souvent bactérienne, il coïncide souvent avec une poussée dentaire ou une rhinopharyngite. C'est un érythème particulièrement érosif, qui débute au niveau des plis cruraux et inguinaux pour remonter dans le plis interfessier jusqu'aux lombes en « Y ». Il est plus souvent de couleur rouge sombre quand son origine est mycosique, avec des contours légèrement saillants formant bordure. Le traitement comporte des bains de permanganate à 1/10 000e, suivis d'un badigeonnage à l'éosine ou au bleu de méthylène en solution aqueuse à 1 ou 2 %, solutions mieux supportées que les solutions antiseptiques du commerce (Hexomedine®, Solubacter®, Merfène®). En cas de mycose, après le bain au MnO4K, masser avec une crème ou un gel antifongique : Pevaryl®, Daktarin®.

L'érythème de contact. Il est secondaire à une intolérance des produits de lessive, du plastique de la culotte ou du tissu de la couche. C'est un érythème étendu aux surfaces en contact avec le produit en cause, entraînant une topographie en « W ». Son aspect peut être érosif, vésiculeux voire suintant. Pâte à l'eau, fesses à l'air et éradication du produit incriminé doivent guérir cet érythème. Pour la toilette, on utilisera un savon surgras.

Acte infirmier et traitement

Traitement préventif. Le traitement est d'abord préventif :

- faire des changes fréquents, savonnage et rinçage du siège au savon liquide, éviter les antiseptiques ou les colorants qui ne permettent pas de bien suivre l'évolution clinique ;

- favoriser l'exposition à l'air et à la lumière.

Le traitement curatif. Le traitement curatif comprend :

- des changes fréquents avec un savonnage au savon de Marseille (éviter les antiseptiques qui peuvent être irritants) ;

- en cas de suintement important, un rinçage dans un bain de siège avec une solution de permanganate de potasse à 1/10 000e (permanganate en sachet bien dilué) ;

- un séchage et une application de solution antiseptique non alcoolisée et, parfois, de crème dermique antimycosique ;

- l'exposition à l'air, pour la cicatrisation ;

- dans les formes en « Y » liées à l'intertrigo mycosique, une crème antimycosique type Pevaryl® est indiquée ;

- l'utilisation d'une pâte à l'eau (Aloplastine®) permet de protéger les zones irritées et d'assécher les plaies.

ÉRYTHRODERMIE DESQUAMATIVE DU NOURRISSON

Elle est également appelée « maladie de Leiner-Moussous ».

Description clinique. Le début a lieu entre le 8e et le 15e jour, souvent plus tard.

Il apparaît aux plis inguinaux et fessiers, aux plis des oreilles et du cou, ainsi qu'au niveau du cuir chevelu constituant l'atteinte bipolaire. Au niveau fessier, il prend l'aspect d'un érythème fessier en « Y ». Il s'étend par essaimage « en médaillon » aux surfaces des fesses, des cuisses, de l'abdomen, au visage et au crâne, atteignant les sourcils. C'est un érythème suintant associé à des zones desquamantes à la périphérie. Les squames, surtout sur le crâne et le visage, sont grasses, jaune-brun, et dessous, la peau est rouge, suintante, parfois ulcérée.

Évolution. Dans un tiers des cas, la maladie de Leiner-Moussous va régresser. Dans un autre tiers des cas, elle évoluera vers un eczéma atopique. Dans le tiers restant, elle évoluera vers un psoriasis. Il est donc important de rechercher des antécédents familiaux d'eczéma atopique et de psoriasis. Les surinfections mycosiques et microbiennes sont alors constantes ; l'état général, d'abord conservé, va s'altérer ; une dénutrition et des troubles digestifs associés ne sont pas rares.

Le rôle infirmier. Relevant du rôle de l'IDE et de la prescription, il s'agira des actions suivantes :

Soulager l'irritation : supprimer les changes complets, la couche plastifiée, et laisser le plus possible les fesses à l'air.

Assurer les soins locaux

- savonnage matin et soir avec un savon liquide de type savon de Marseille ou un savon surgras ;

- rinçage dans une eau tiède à 37 °C dans laquelle est dilué un sachet de 0,50 g de permanganate de potassium (pour 10 l d'eau) en veillant à ce qu'il n'y ait pas de cristaux ;

- plonger délicatement l'enfant dans ce bain en évitant que les mains aillent dans l'eau, que les gouttes atteignent les yeux et que l'enfant ingère de l'eau en remuant ;

- laisser l'enfant pendant 15 minutes en jouant avec lui, tout en surveillant la température de l'eau et de la pièce ;

- le sortir du bain et le sécher soigneusement en tamponnant (insister au niveau des plis) ;

- laisser la peau à l'air 15 à 20 minutes avant l'application du bleu de Milian, en tamponnant doucement les zone irritées (poser l'enfant sur un linge réservé à cet effet pour éviter les taches) ;

- le soir, avant le coucher, appliquer de la vaseline sur le cuir chevelu et les sourcils (ainsi les squames vont ramollir et le shampooing, le lendemain matin, sera efficace). Après trois jours, ces soins permettent d'améliorer l'état cutané qui semble en voie de cicatrisation. Par ailleurs, les squames des sourcils et du cuir chevelu disparaissent peu à peu.

Éviter la surinfection

- laisser le plus possible le siège à l'air (décubitus ventral ou latéral) ;

- surveiller la température ;

- éviter la sudation, ne pas trop couvrir.

La surveillance quotidienne des zones irritées et l'observation de l'état général permettent d'éviter toute surinfection.

Répondre aux besoins de l'enfant

- en plus des soins locaux, veiller à l'hygiène en général (mains, visage, nez, pieds) ;

- changer très régulièrement l'enfant et surveiller l'état de son linge (draps, vêtements) et de sa peau ;

- le couvrir légèrement (vêtements amples), utiliser des couches en coton ;

- vérifier les quantités et les concentrations alimentaires;

- prise en charge affective ;

- repos.

Donner des conseils à la mère

- la prévenir de l'heure des soins et éventuellement les lui faire exécuter ;

- bien expliquer le pourquoi et le comment du traitement (bain de permanganate, savon, séchage, bleu de Milian, vaseline) à poursuivre à la maison ;

- lui donner des conseils afin que cela ne se reproduise pas :

- attendre 15 jours avant d'utiliser les changes complets ;

- ne jamais mettre deux épaisseurs de plastique ;

- changer l'enfant avant chaque repas ;

- bien laver le siège à l'eau savonneuse (savon non parfumé, type savon de Marseille, le Chat®, Soleil®) ;

- rincer à l'eau claire ;

- sécher soigneusement les plis ;

- ne pas utiliser de lait de toilette ni de talc ;

- appliquer une crème protectrice au niveau du siège ;

- pour les cheveux et les sourcils : faire quotidiennement un shampoing, ne pas avoir peur de frotter, bien rincer et sécher ;

- revoir avec elle la poursuite du traitement, du régime et de la surveillance ultérieure ;

- remplir le carnet de santé.

DERMATITE ATOPIQUE (ECZÉMA CONSTITUTIONNEL)

Définition. La dermatite atopique (DA) est une affection cutanée érythémato-vésiculeuse et prurigineuse, évoluant par poussées, survenant chez des enfants appartenant au « milieu atopique », prédisposés génétiquement au développement d'autres affections allergiques (asthme bronchique, rhinites allergiques).

Fréquence. Cette affection toucherait 3 à 5 % des enfants européens âgés de moins de 7 ans. Ces chiffres permettent de classer la DA parmi les maladies infantiles les plus fréquentes.

Avant l'âge de 1 an, on note une prédominance masculine (deux garçons pour une fille). Un contexte familial d'atopie est retrouvé dans 70 % des cas.

Histopathologie. Au point de vue histologique, la dermatite est caractérisée par :

- des lésions épidermiques, notamment la spongiose. C'est une dissociation du corps muqueux et un écartement des cellules de Malpighi par la sérosité et l'oedème ;

- des lésions dermiques avec oedème, infiltrat périvasculaire, lymphohistiocytaire.

Actuellement, on admet que la vasodilatation papillaire au niveau du derme est responsable d'une exsudation de sérosité qui, envahissant le corps muqueux, réalise la spongiose puis les vésicules.

Étude clinique

Sémiologie. Les lésions élémentaires caractérisant l'affection sont représentées par l'érythème et les microvésicules.

Évolution. D'une poussée aiguë de dermatite, la poussée évolue en cinq phases.

Phase érythémateuse. Il y a apparition d'un placard érythémateux, chaud, chagriné, grenu au toucher ; à ce stade, le prurit est intense.

Phase vésiculeuse. Les vésicules apparaissent précocement ; elles sont visibles à l'oeil nu ou à la loupe, transparentes, renfermant une sérosité claire. Ces vésicules sont fragiles et vont sécréter spontanément ou à la suite d'un grattage.

Phase de suintement. À ce stade, le prurit diminue, les vésicules s'ouvrent et le placard va suinter.

Phase croûteuse. Peu à peu, le suintement se tarit, la peau va se couvrir de croûtes formant une carapace.

En quelques jours, les croûtes vont se dessécher et tomber.

Phase de réparation. Lorsque les croûtes sont tombées, les téguments et la peau prennent un aspect lisse, érythémateux ; sa teinte est rouge vif. Puis, rapidement, elle sera couverte de squames fines qui vont tomber, laissant une peau d'aspect normal. Ainsi, la poussée de dermatite va évoluer en cinq phases schématiques ; il faut savoir qu'un télescopage entre ces phases peut survenir, réalisant des lésions d'âge et d'aspect variables sur les différents points du corps.

Diagnostic clinique. Une dermatite atopique peut se présenter d'une façon typique ou sous des aspects atypiques, ce qui justifie l'utilisation de critères diagnostics dont aucun n'est spécifique.

Critères diagnostics majeurs. Le prurit est constant, parfois féroce ; il favorise la surinfection.

Les aspects morphologiques et topographiques en fonction de l'âge sont également importants.

- Forme du nourrisson

C'est la plus fréquente (80 % des cas). Elle débute habituellement vers le 3e mois de vie, mais parfois plus tôt, dès la 2e ou la 3e semaine.

L'aspect est celui d'un eczéma aigu (rougeur, vésicules, suintement, croûtes), dont la topographie est pathognomonique : atteinte initiale du visage, avec localisation aux régions convexes (bosses frontales, joues, menton) et respect de la région centrofaciale. Ces lésions peuvent s'étendre par poussées successives au tronc, aux plis de flexion des membres, aux mains, aux doigts. Les lésions du cuir chevelu peuvent dominer et persister et la zone péribuccale peut être atteinte. L'érythème fessier peut également être présent prenant un aspect en « Y ». Cette forme, à début précoce, bénéficie dans la majorité des cas d'une rémission spontanée vers l'âge de 2 ans.

- Forme de l'enfant

Après 2-3 ans, elle représente 20 % des cas. Elle survient surtout d'emblée ou fait suite à la forme du nourrisson. La dermatose a tendance à se modifier dans son aspect et sa topographie. Il s'agit de lésions bien délimitées, épaisses, chroniques, prédominant aux plis de flexion des coudes, des genoux, au cou et sur la face antérieure des chevilles. Seulement 6 % des cas persistent au-delà de la puberté, ils sont alors souvent sévères.

Tendance à la chronicité :

- à court terme, les lésions évoluent par poussées ;

- à long terme, l'évolution est imprévisible : les lésions peuvent guérir vers l'âge de 2 ans ou, plus tard, vers l'âge de 7 ans, à la puberté, ou encore évoluer de façon indéfinie.

Contexte atopique :

- le contexte atopique familial : environ 70 % des enfants atteints de dermatite atopique ont des antécédents familiaux d'allergie respiratoire ou cutanée ;

- le contexte atopique personnel : il existe un asthme évolutif dans 30 % des cas, l'association asthme, conjonctivite, rhinite allergique existe dans 12 % des cas et l'urticaire aiguë est fréquente dans 11 % des cas.

Critères diagnostics mineurs :

- xérose ou sécheresse cutanée ;

- ichtyose vulgaire ;

- accentuation des plis palmaires ;

- pâleur faciale, prurit accentué par le port de vêtements en laine ;

- aspect sombre des régions sous-orbitaires ;

- repli sous-palpébral inférieur (signe de Dennie-Morgan) ;

- déformation conique de la cornée ;

- tendance aux infections cutanées récidivantes ;

- positivité immédiate des tests cutanés à divers allergènes ;

- élévation des IgE sériques totales.

En conclusion, le diagnostic de dermatite atopique est facile dans les formes typiques, réunissant au moins trois critères majeurs. Dans les formes atypiques, l'analyse des critères mineurs peut aider au diagnostic.

Étude biologique. Il n'existe pas de marqueurs biologiques susceptibles d'aider au diagnostic positif ; toutefois, on peut chercher deux ordres d'anomalies biologiques fréquemment associées :

- l'hyperéosinophilie sanguine, avec un chiffre de polynucléaires éosinophiles supérieur à 300/mm3 ;

- l'élévation des IgE sériques totales, avec souvent des chiffres 3 à 10 fois supérieurs au taux sérique normal.

Les taux les plus élevés sont notés chez des enfants présentant parallèlement une dermatite atopique et des manifestations d'allergie respiratoire. À noter enfin que près de 25 % des enfants atteints de DA ont des taux sériques normaux d'IgE totales.

Évolution. La dermatite atopique est une maladie chronique, émaillée de poussées inflammatoires et de complications, de durée imprévisible.

Poussées. Elles sont inévitables, mais habituellement atténuées par un traitement bien conduit. Interviennent dans ces poussées :

- le climat, avec aggravation hivernale par le froid qui accentue la xérose cutanée ;

- les facteurs psychiques, avec les problèmes relationnels mère-enfant ;

- les facteurs alimentaires, dont la responsabilité reste à prouver ;

- les facteurs vestimentaires (préférer toujours les vêtements en coton) ;

- la poussière de maison (éviter les moquettes dans les chambres, les doubles rideaux, passer régulièrement l'aspirateur, préférer les literies synthétiques) ;

- les acariens : conseiller l'utilisation des acaricides et les housses de matelas antiacariens ;

- les animaux.

Durée de la dermatite atopique. Environ 45 à 50 % des dermatites atopiques du nourrisson cèdent avant 2 ans. La majorité des formes de l'enfant, après 2 ans et représentant 20 % des cas, guérissent vers la puberté. Seulement 1 % des cas de dermatite atopique se pérennisent chez l'adulte.

Complications

Infections cutanées. Elles sont très fréquentes et de natures différentes :

- bactériennes : à staphylocoque doré, surtout avec impétiginisation ;

- virales : à herpès virus, avec risque de pustulose de Kaposi-Juliusberg, aux poxvirus avec molluscum contagiosum, aux virus du papillome humain, avec verrues vulgaires multiples et chroniques ;

- mycosiques.

Syndrome de Kaposi-Juliusberg. Il est favorisé par la vaccination antivariolique ; elle doit donc être contre-indiquée.

Retard staturo-pondéral. Il est rare, d'origine souvent iatrogène (corticothérapie mal suivie et restriction alimentaire inutile).

Absentéisme scolaire et troubles psychiques. Ils sont causés par cette affection chronique.

Diagnostic différentiel

- La dermite séborrhéique : avec sa forme généralisée de Leiner-Moussous (dans cette affection qui commence souvent plus tôt manquent le prurit et la notion de terrain atopique) ;

- Les dermites allergiques de contact ;

- Le psoriasis ;

- Les eczématides du visage : dartres ou pityriasis alba ;

- Les prurigos de l'enfance ;

- Les parasitoses cutanées eczématisées comme la gale.

Étiopathogénie. Le mécanisme pathogénique exact demeure imprécis.

Les différentes anomalies biologiques constatées au cours de la dermatite atopique ont été analysées, puis incriminées inégalement dans la genèse de cette affection :

- l'élévation des IgE avec la théorie réaginique ;

- le déficit lymphocytaire T ;

- l'hyperhistaminémie ;

- le trouble du métabolisme des nucléotides cycliques, avec la théorie du blocage du récepteur béta-adrénergique, avec vasoconstriction ;

- le déficit en acides gras essentiels (acide linoléique et acide linolénique).

Traitement et prise en charge d'une dermatite atopique

Traitement symptomatique. En pratique, il associe les soins locaux et les traitements généraux, il vise à contrôler deux facteurs :

- l'inflammation ;

- la sécheresse cutanée.

Tous deux ont un rôle déterminant dans le symptôme, qu'il faut à tout prix contrôler.

Lutte contre l'inflammation cutanée. Elle fait appel à un dermocorticoïde non fluoré, adapté à l'âge de l'enfant et au siège des lésions. On dispose actuellement en France d'environ 150 préparations locales contenant un corticoïde isolé ou en association.

Actuellement, les dermocorticoïdes sont classés selon le niveau d'activité :

- classe I : activité très forte, type Dermoval® ;

- classe II : activité forte, Topsyne®, Diprosone® ;

- classe III : activité moyenne, Locapred®, Tridésonit® ;

- classe IV : activité faible, Dectancyl®, hydrocortisone.

Chez le nourrisson, on utilisera les produits des classes II, III et IV. Les crèmes sont les préparations les plus faciles à manier. Les effets secondaires des dermocorticoïdes se voient avec les traitements mal conduits, mal surveillés :

- effets secondaires locaux (atrophie cutanée, hypertrichose, surinfections cutanées, dyschromie).

- effets secondaires systémiques (syndrome cushingoïde, HTA, retard statural, insuffisance surrénalienne par blocage de l'axe hypothalamo-hypophysaire).

Lutte contre la sécheresse cutanée ou xérose. Elle fait appel aux préparations graissantes récentes et aux pains dermatologiques surgras :

- pain surgras ;

- émulsion Xeroderm®, Nioleol®, Hydranorme®, Ictyane®, Physiane®.

Conduite pratique du traitement. Il n'y a pas d'impétigo : il faut d'emblée utiliser un dermocorticoïde de façon adaptée, c'est-à-dire à raison d'une application par jour, le soir, sur les plaques d'eczéma, et ce pendant 8 jours.

Si ces plaques se localisent au niveau du tronc et des membres, on utilisera un dermocorticoïde de classe II. Si les plaques se localisent au niveau du visage, on utilisera un dermocorticoïde de classe III. Les applications sous occlusion, couches par exemple, sont contre-indiquées.

L'utilisation d'antihistaminiques peut permettre de passer un cap aigu mais ne doit pas être chronique, car elle pourrait interférer sur l'éveil de l'enfant. Si l'enfant est agité la nuit, on peut lui proposer soit de l'Atarax® en sirop ou de la Polaramine®, soit du Tinset® en sirop ou de la Clarityne®.

Quelques conseils concernant la vie courante. Pour la toilette de l'enfant, il faut utiliser un pain surgras. Les bains doivent être quotidiens. La peau de l'enfant doit être « graissée » tous les jours.

Il faut laver le linge de l'enfant avec du savon de Marseille (ou Le Chat® machine) en évitant les adoucisseurs ; un bon rinçage est important. Il faut éviter les habits rêches (laines et synthétiques) et préférer les vêtements en coton.

Aucun régime alimentaire n'est nécessaire, en dehors, bien entendu, d'une allergie alimentaire associée et confirmée. Les animaux domestiques doivent être évités : les poils de chat et de chien favorisent les poussées d'eczéma. Ceci pourra être conforté par des tests : prick-tests ou IDR aux poils d'animaux.

Si les animaux sont déjà présents dans la famille, il faudra conseiller aux parents d'être très vigilants vis-à-vis des poils dans la maison qu'il faudra aspirer très régulièrement, en particulier dans la chambre de l'enfant.

Le soleil et la mer ont la plupart du temps une action bénéfique sur la peau, qui doit être bien traitée au préalable. Cependant, les lésions sont parfois aggravées.

Le bain en piscine n'est pas contre-indiqué, il faut simplement conseiller à l'enfant de bien rincer sa peau et de l'hydrater.

Ces enfants doivent conserver une vie normale et ne pas vivre dans une « bulle », ce qui entraînerait, bien sûr, des troubles psychoaffectifs.

Tous les vaccins peuvent être pratiqués en dehors d'une poussée aiguë (hormis le vaccin antivariolique). Plusieurs poussées peuvent survenir, et ce malgré un traitement bien conduit. À chaque poussée, le traitement doit être rediscuté entre le médecin et les parents.

Le bain de permanganate

Pour éviter la présence dans le bain de cristaux de permanganate qui, en s'incrustant dans la peau de l'enfant, pourraient occasionner des escarres, il faut diluer le sachet (paillettes) dans un verre d'eau, puis filtrer la dilution.

L'utilisation de gants de protection est vivement conseillée : le permanganate de potassium colore les ongles en violet de manière persistante. Il faut opérer dans une baignoire réservée à cet usage, car le permanganate, qui est un antiseptique doux et peu sensibilisant, tache énormément.

Peau à hydrater

Il faut expliquer aux parents que les enfants atteints d'un eczéma atopique ont une peau sèche et que l'hydratation de cette peau sèche aura pour propriété d'améliorer les déficiences cutanées comme le ferait une « seconde peau ». Plus l'enfant aura une peau hydratée, moins il courra le risque d'une poussée d'eczéma.

On peut utiliser pour la toilette un savon surgras et une crème hydratante. Sachant que ces enfants devront utiliser des doses importantes de crèmes, ce qui représente un budget non négligeable pour la famille, on peut conseiller l'utilisation du cérat de Galien, qui a l'avantage d'être une préparation magistrale remboursée. On pourra également proposer des huiles de bain pour améliorer cette hydratation, tel l'amidon de blé, à raison de trois poignées par jour.

Les sirops et gélules à base d'acides gras essentiels peuvent apporter un plus, mais leur coût est élevé.

Nourrissons à risque

Une prévention primaire systématique est conseillée chez les nourrissons à risque (antécédents d'atopie chez les parents ou la fratrie) : allaitement maternel ou, à défaut, lait hypoallergénique dès le premier biberon en excluant toute autre supplémentation. L'allaitement maternel n'est bénéfique que s'il est poursuivi 6 mois et associé à un sursis de diversification alimentaire.

Dermatoses bulleuses

- Origine infecteuse

Il s'agit d'un syndrome staphylococcique de Lyell. Il débute après 15 jours par des phlyctènes qui vont envahir tout le corps donnant un aspect ébouillanté et de linge mouillé.

- Origine congénitale (rare).

En dehors d'une infection, il faut peut s'agir :

- d'une épidermolyse bulleuse congénitale, qui se diagnostiquera par une fragilité cutanée importante ;

- d'une ichtyose congénitale avec un aspect en écailles de poisson sur un fond plus ou moins érythrodermique pouvant donner l'aspect de « bébé collodion » ou de « bébé arlequin » avec une carapace épaisse de kératine ;

- d'un Incontinentia pigmenti avec un aspect de bulles et de pigmentation en jet d'eau ;

- d'une porphyrie congénitale.

Le « prurigo strophulus »

Il est très fréquent entre 2 et 5 ans.

Il évolue par poussées successives et est très tenace, très prurigineux.

Il est lié, le plus souvent, à la réaction immuno-allergique à une piqûre de micro-insecte.

Il prédomine sur les parties découvertes.

- Forme vésiculaire

Elle est la plus fréquente :

- les papules sont érythémateuses, ortiées, centrées par une petite vésicule ;

- la lésion est vite modifiée par l'assèchement, le prurit, la surinfection fréquente.

- Forme bulleuse

Elle est faite de grosses vésicules réunies, très prurigineuses, de taille inégale, à contenu clair, voire louche ou hématique.

L'impétiginisation de ces formes est fréquente.

- Conduite à tenir

- soulager le prurit (antihistaminique) ;

- éviter la surinfection (savon antiseptique et colorants) ;

- n'administrer aucun régime d'exclusion ;

- arrêter les vaccinations durant l'évolution ;

- lutter contre les parasites domestiques (hexachlorohexane sur les parquets et la literie).

Information des parents

Il faut consacrer un temps suffisant pour expliquer l'affection et les buts du traitement, afin que les informations suivantes soient comprises par la famille :

- il n'y a pas de traitement curatif de la dermatite atopique ; tout traitement est palliatif et a pour but d'atténuer la gêne et de maintenir la dermatose à un niveau lésionnel faible ;

- une dermatite atopique n'est pas une maladie contagieuse, mais une affection s'intégrant dans un cadre « atopique » à caractère familial, comme l'asthme ou la rhinite allergique, qui doivent être guettés d'une façon vigilante ;

- un traitement bien conduit est indispensable et sans danger ; les détails du traitement doivent être expliqués, afin que les parents l'appliquent d'une façon intelligente et logique.

L'impétigo

Il est d'origine staphylococcique ou streptococcique. Il débute par des bulles louches, qui se rompent et se dessèchent en croûtes mélicériques (prenant l'aspect du miel) de plus en plus larges et épaisses. Sous les croûtes se forment des ulcérations purulentes évolutives, entraînant une réaction ganglionnaire en rapport. L'impétigo chez l'enfant est fréquent. Il peut survenir spontanément sans dermatose sous-jacente. Il nécessite une éviction scolaire, car il est très contagieux. Dans certains cas, l'impétigo est lié à une dermatose sous-jacente prurigineuse qui s'est surinfectée, on parle alors d'impétiginisation.

- Traitement local de l'impétigo

- savonnage antiseptique des lésions, voire pulvérisation avec de l'Hexomédine® en solution, associée à l'application de Fucidine® en crème, ou de vaseline, pour faire tomber les croûtes rapidement ;

- antibiothérapie générale (rarement et adaptée à l'étendue et la chronicité).

- À savoir

Ne pas oublier, au cours du traitement, de couper très court les ongles de l'enfant, de les brosser et de les désinfecter avec la solution d'Hexomédine®.

L'enfant a en effet l'habitude de toucher aux lésions prurigineuses, ce qui essaime l'infection si on n'y prend pas garde. Ces soins sont à répéter après chaque intervention.