Surveillance d'un antidiabétique oral - L'Infirmière Magazine n° 223 du 01/01/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 223 du 01/01/2007

 

endocrinologie

Conduites à tenir

Le syndrome métabolique associe au diabète l'hypertension, l'hypercholestérolémie et l'embonpoint. La surveillance du traitement du diabète non-insulinodépendant par un antidiabétique oral demande à l'infirmière une mise en place complexe.

LES OBJECTIFS DU TRAITEMENT

Le diabète non insulinodépendant (DNID) n'est pas dû à une carence totale en insuline, mais il est généré par un apport insuffisant en insuline ou une présence excessive en sucre. Le pancréas fonctionne. Il s'agit de stabiliser le diabète par les antidiabétiques oraux quand le régime alimentaire faible en sucre est insuffisant pour normaliser à lui seul la glycémie.

- La glycémie à jeun normale est de 0,7 à 1,10 g/l (3,9 à 6,1 mmol/l)(1). Dès que la glycémie à jeun est supérieure à 1,26 g/l, le diabète est avéré.

- La glycémie postprandiale normale (1 h 30 après les repas) est inférieure à 1,40 g/l ou 7,78 mmol/l.

- Dans les urines, la quantité de sucre retrouvé doit être égale à 0 g/l.

Une monothérapie est instaurée dans un premier temps avec un sulfamide hypoglycémiant ou de la metformine. Si ce traitement est inefficace, une bithérapie est mise en place, voire une trithérapie. Si ce nouveau traitement n'est pas suffisant, il sera ajouté de l'insuline.

LES DÉMARCHES DE SURVEILLANCE

L'excès de sucre dans le sang fait apparaître à long terme des complications organiques. La glycémie doit être autosurveillée régulièrement par des glycémies capillaires.

Constater l'efficacité du traitement. Le diabète doit être rapidement stabilisé.

Disparition des signes physiques du diabète. Une hyperglycémie supérieure à 2,50 g/l se traduit par une asthénie (non-utilisation du sucre par les cellules), un amaigrissement (utilisation des réserves lipidiques et protidiques), une polyurie (urines abondantes) et une polydipsie (avoir soif et boire beaucoup).

Absence de signes de complications. L'insuffisance coronarienne et l'artérite des membres inférieurs sont fréquentes. Les rétinopathies, les néphropathies et les neuropathies vont apparaître si le diabète n'est pas stabilisé.

L'écoute du patient. L'infirmière doit rester attentive à toutes les plaintes qui sont des messages qu'il ne faut pas ignorer. Il s'agit de petites phrase du type : « j'ai toujours soif, ma vue se dégrade, j'ai mal aux pieds, je saigne du nez, j'ai une infection urinaire, j'ai des crampes, etc. »

Suivi de l'hémoglobine glyquée. Le dosage de l'hémoglobine glyquée donne le reflet de la consommation de sucre des 6 à 8 semaines précédant le prélèvement. L'hémoglobine glyquée (HbA1C) correspond à la partie du globule rouge où se fixe le sucre (niveau normal : 3,5 % à 6,5 %). Les dosages sont effectués tous les 3 à 4 mois. L'objectif est d'obtenir une HbA1C à 6,5 %. Au-dessus de 8 %, un changement de traitement est nécessaire en raison de la dégradation progressive de la fonction pancréatique et du risque de la survenue des complications microvasculaires et cardio-vasculaires du diabète.

Recherche des signes de complications du diabète. Le diabète se caractérise par l'absence de signes pendant plusieurs années et se traduit à long terme par des troubles graves.

Au niveau des yeux. La diminution de la vision est due à une rétinopathie (dégénérescence de la rétine) ou à une cataracte (opacification du cristallin) et va aboutir à long terme à une cécité.

- Le fond d'oeil permet de rechercher une rétinopathie en évolution.

- La mesure du champ visuel évalue la perte de vision.

L'hypertension artérielle. À long terme, l'hypertension et l'athérosclérose sont responsables d'artériopathie des membres inférieurs et d'insuffisance coronarienne.

- La tension doit être stabilisée autour de 140/80 mm de Hg.

- L'électrocardiogramme sur prescription recherche les troubles du rythme.

- La mesure du poids permet le suivi de la perte de poids nécessaire en cas d'embonpoint.

Au niveau vasculaire. L'obstruction des petits vaisseaux engendre un risque de gangrène par ischémie vasculaire périphérique. Une néphropathie par atteinte du glomérule est cause d'une insuffisance rénale.

- La créatinémie est le reflet de la fonction rénale et permet de dépister une insuffisance rénale. Niveau normal : 7-13 mg/l (65-120 mmol/l) chez l'homme et 6-11 mg/l (50-100 mmol/l) chez la femme.

- L'écho-doppler assure le suivi vasculaire des membres inférieurs.

Augmentation du risque athéromateux. Des dépôts de plaques d'athérome sont dus à la diminution de l'élasticité des vaisseaux et se traduisent par des troubles coronariens.

Le HDL(2)-cholestérol est normal entre 0,60-0,94 g/l (1,55-2,45 mmol/l) chez l'homme et 0,40-0,68 g/l (1,03-1,76 mmol/l) chez la femme.

Atteinte des nerfs périphériques. La neuropathie diabétique périphérique est responsable d'une diminution de la sensibilité, de douleurs et de troubles de la microcirculation au niveau des pieds. Le patient perçoit mal la chaleur, le froid, la douleur. Il risque de se blesser sans s'en rendre compte. L'examen des pieds doit être systématique. La perte de sensibilité est recherchée par le médecin avec un diapason médical.

Le risque d'infection. Il est fréquent. Les micro-organismes (microbes, champignons, virus) voient leur croissance favorisée par la mauvaise circulation périphérique et le substrat sucré. La cicatrisation d'un diabétique est lente.

- L'examen et les soins des pieds du diabétique (propreté et pédicure) nécessitent une vigilance particulière (mal perforant plantaire, artérite des membres inférieurs, risque d'amputation).

- La prise de température doit se faire dès les premiers signes d'infection.

Mise en place de la surveillance

Tous les jours. L'autosurveillance de la glycémie s'effectue tous le matins à jeun et/ou en postprandial, c'est-à-dire après un repas.

Les glycémies permettent au médecin de juger de l'équilibre glycémique et d'intervenir sur les dosages ou de modifier le traitement. Elles permettent au patient de modifier son comportement alimentaire. Les résultats sont notés par le patient qui les montre à son médecin à chaque consultation. Le nombre de glycémies à effectuer est à établir avec le médecin.

Elle peut être complétée par la recherche de glycosurie (sucre dans les urines) et cétonurie (acétone dans les urines) avec une bandelette à tremper dans l'urine.

Tous les 3 à 4 mois. Mesure du poids, de la tension artérielle, examen des pieds, dosage de l'hémoglobine glyquée (HbA1C), glycémie à jeun et postprandiale par un laboratoire.

Une fois par an.

- Chez le médecin : examen approfondi avec étude du réflexe ostéotendineux, palpation du pouls, recherche d'une hypotension orthostatique, examen de la bouche, de la sphère ORL et de la peau.

- Un bilan ophtalmologique : acuité visuelle, pression intra-oculaire, examen du cristallin, du fond d'oeil.

- Un examen cardiovasculaire : électrocardiogramme de repos, électrocardiogramme d'effort, scintigraphie myocardique.

- Une visite chez le dentiste.

Le bilan biologique régulier. Il comprend :

- Un bilan lipidique à jeun : cholestérol total, triglycérides, HDL-cholestérol.

- Un bilan glycémique : glycémie à jeun, glycémie postprandiale, hémoglobine glyquée, glycosurie des vingt-quatre heures, cétonurie.

- Un bilan rénal : évaluation de la créatininémie, calcul de la clairance à la créatinine, recherche d'une protéinurie (bandelette urinaire) et d'une hématurie, recherche d'infection par bandelette urinaire ou par un ECBU (examen cytobactériologique des urines).

- Un bilan hépatique recherche les transaminases : ASAT comprises entre 5 et 30, ALAT comprises entre 5 et 35 chez l'homme.

Dépister les effets secondaires

Effets secondaires des sulfamides (Daonil®, Amarel®, Hémidaonil®, Diamicron®, etc.)

- Hypoglycémie : elle survient en fin de journée quand la quantité de sucre est insuffisante en regard de l'activité de l'antidiabétique oral. C'est également le cas lors d'une activité physique importante ou en cas d'un état de jeûne prolongé. L'hypoglycémie s'exprime par des sueurs froides, des tremblements, une faim impérieuse, une fatigue subite. La correction de l'hypoglycémie modérée, sans perte de connaissance, consiste à administrer un morceau de sucre, ou un jus de fruits sucré après avoir effectué une glycémie et averti le médecin. Il est recommandé au diabétique d'avoir sur lui 1 ou 2 morceaux de sucre (enveloppés). L'entourage du patient doit savoir reconnaître et traiter une hypoglycémie. L'hypoglycémie sévère se traduit par un coma, des convulsions et des troubles neurologiques, nécessitant une hospitalisation (perfusion de glucose en urgence). Le rétablissement de la glycémie se fera par injection intraveineuse de glucose ou par le Glucagon® qui est l'hormone hyperglycémiante.

- Troubles dermatologiques : ils s'expriment par des éruptions cutanées, un prurit, de l'urticaire.

- Troubles gastro-intestinaux : nausées, diarrhées et gêne gastrique.

Effets secondaires de la metformine (Stagid®, Glucophage®, etc.). La metformine administrée seule ne provoque pas d'accident d'hypoglycémie.

- Risque d'acidose lactique : il s'agit de l'accumulation de lactates dans le sang. Elle est rare mais grave et est due au surdosage de metformine dans le sang. Elle s'exprime par une dyspnée (difficultés à respirer), des douleurs abdominales avec des crampes, un malaise et une hypothermie suivie d'un coma.

- Troubles digestifs : nausées, vomissements, diarrhées et flatulences, goût métallique et perte d'appétit.

Effets secondaires des glitazones (Actos®, Avandia®...) Ils réduisent l'insulinorésistance des cellules du muscle et le glucose est mieux utilisé. Ils ne stimulent pas la sécrétion d'insuline par le pancréas.

- Hépatotoxicité : suivi des ALAT et ASAT tous les 2 mois pendant la première année de traitement et contre-indication en cas d'insuffisance hépatique.

- Autres troubles : rétention hydrique et insuffisance cardiaque, anémie (due à l'hémodilution), augmentation de l'appétit, prise de poids, augmentation bénéfique du cholestérol HDL.

CONSEILS AUX PATIENTS

Les règles hygiéno-diététiques Le respect des conseils nutritionnels reste majeur malgré la mise sous médicaments.

L'alimentation. Elle doit être suffisante, régulière et équilibrée (3 repas et 2 collations). Il ne faut jamais sauter un repas ni faire de jeûne prolongé. L'alimentation devra respecter une bonne répartition entre les glucides, lipides et protides. Il faut diminuer l'apport en graisses pour diminuer les apports caloriques (préférer les graisses végétales, les viandes maigres et le poisson). On favorisera la prise de sucres lents (pâtes, riz, céréales) au détriment de sucres à assimilation rapide (chocolat, soda, friandises).

L'activité physique. Une dépense énergétique quotidienne permet d'éviter la surcharge pondérale. Il faut marcher un peu tous les jours de façon à cumuler 2 à 3 heures de marche par semaine. Une collation avant, pendant et après une activité sportive évite l'hypoglycémie.

L'hygiène corporelle. Elle est importante pour prévenir les complications infectieuses et dégénératives. Il faut soigner ses pieds : les laver à l'eau tiède, changer de chaussettes tous les jours, voir un médecin à la moindre lésion, dépister et traiter les mycoses et éviter de marcher pieds nus.

Le suivi du traitement. Les analyses biologiques recommandées doivent être effectuées régulièrement. La réévaluation régulière par le médecin de l'efficacité du traitement est nécessaire, en raison de la progression de la sévérité du diabète ou d'une diminution de réponse au traitement.

1- millimoles par litre.

2- High-density lipoprotein, lipoprotéine de haute densité, responsable du transport du cholestérol vers le foie.

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