« Informer, le fil rouge » - L'Infirmière Magazine n° 224 du 01/02/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 224 du 01/02/2007

 

Accompagnement

Questions à

La Maison des usagers de Sainte-Anne veut pallier le manque d'informations données aux patients et à leurs proches. Un domaine dans lequel la France fait figure de mauvaise élève.

Comment vous êtes-vous intéressée à l'amélioration de l'information des patients ?

À la fin des années 1990, j'étais « responsable qualité » à l'hôpital Esquirol, à Saint- Maurice (Val-de-Marne). Pour mieux connaître le ressenti des patients en psychiatrie, nous avons fait plusieurs enquêtes de satisfaction auprès de ces patients, démarche totalement nouvelle en France. Plus de 700 personnes ont été interrogées, parmi lesquelles des patients hospitalisés ou suivis en CMP, ainsi que les parents d'enfants suivis en psychiatrie. Les questionnaires ont été conçus avec l'aide des associations de patients Fnapsy(1) et Unafam(2). Ces enquêtes nous ont montré que la principale source d'insatisfaction venait du manque d'information sur les pathologies, la prise en charge, les médicaments et leurs effets. Je me suis alors renseignée sur ce qui se faisait en Angleterre, en Australie et au Québec, autour de l'information du patient. J'ai été très sensible, par exemple, à des brochures anglaises sur la dépression et la schizophrénie... J'ai fait le constat que rien d'équivalent n'existait en France.

La Maison des usagers du centre hospitalier Sainte-Anne répond-elle à une attente des patients ?

Dès 2002, à Sainte-Anne, la communauté médicale et soignante, la direction et les représentants des usagers ont manifesté le souhait de créer une Maison des usagers. Une façon de participer à l'application de la nouvelle loi, en créant un lieu d'information, coanimé par les associations de patients, la question de l'information conduisant à celle de l'accompagnement. À la Maison des usagers, les personnes trouvent une écoute et un accompagnement, par des gens qui connaissent les pathologies psychiatriques ou neurologiques (patients ou proches).

C'est un lieu contribuant à l'appropriation du savoir sur la maladie, pour apprendre à mieux gérer la pathologie, pour se projeter après une hospitalisation et rencontrer des gens partageant les mêmes difficultés de santé. La maison est ouverte à tous. Les statistiques d'activité montrent que 40 % des personnes qui viennent sont des patients suivis dans les services de Sainte-Anne, 30 % des proches, et le reste, des professionnels ou des personnes extérieures.

Avec 2 000 passages par an, un chiffre en constante augmentation, et maintenant 18 associations présentes, nous sommes satisfaits de la fréquentation. On sent dans les commentaires des usagers que cet espace répond à un besoin. Des liens se créent entre associations, et entre les associations et les services... Cela facilite l'accès aux soins. Certaines personnes vont finalement réaliser l'importance de se soigner en venant à la Maison des usagers. En revanche, nous gagnerions à être plus connus par les services et les professionnels. 95 % de ces derniers savent que nous existons mais ne connaissent pas forcément nos activités, ni les associations présentes.

Vous portez plusieurs casquettes. Les différentes fonctions que vous occupez s'imbriquent-elles ?

Le fil rouge est l'information du patient, ainsi qu'une volonté de changer l'image de la psychiatrie. Mes trois activités se complètent. Le Psycom-75 édite des brochures sur les pathologies psychiatriques, les psychothérapies, les médicaments, les droits des patients et l'organisation des soins. Je me suis fortement inspirée de ce qui existait à l'étranger en développant un outil d'information indépendante des laboratoires pharmaceutiques. Le Centre collaborateur de l'OMS (CCOMS) et le Psycom-75 travaillent en lien, par exemple sur les documents sur les médicaments psychotropes. Et le CCOMS assure la coordination de la semaine d'information sur la santé mentale, qui a lieu en mars. Nous avons aussi fait une enquête sur la problématique des représentations en psychiatrie, ainsi qu'une campagne d'information contre la discrimination. Il faut du temps et de l'énergie pour contribuer à changer les croyances et les fantasmes !

1- Fédération nationale des associations d'(ex-) patients en psychiatrie.

2- Union nationale des amis et familles de malades mentaux.

Aude Caria Psychologue

Aude Caria est responsable de la Maison des usagers de Sainte-Anne. Elle travaille également pour le Psycom-75, le Syndicat interhospitalier des établissements publics de santé mentale de Paris. Pour le Centre collaborateur OMS pour la recherche et la formation en santé mentale (CCOMS, installé à Lille), elle assure la responsabilité méthodologique d'une enquête initiée il y a dix ans, intitulée La Santé mentale en population générale : images et réalités.

Maison des usagers ; Internet : http://www.ch-sainte-anne.fr

Psycom-75 ; Internet : http://www.psycom75.org

CCOMS ; Internet : http://www.epsm-lille-metropole.fr