Ecimud et femmes enceintes - L'Infirmière Magazine n° 225 du 01/03/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 225 du 01/03/2007

 

addictologie

Conduites à tenir

Les équipes de coordination et d'intervention auprès des malades usagers de drogues offrent aux toxicomanes de nouveaux choix de vie.

Plusieurs objectifs sont visés par l'équipe de coordination et d'intervention auprès des malades usagers de drogues (Ecimud) dans la prise en charge des femmes enceintes. Il s'agit de dépister la consommation de drogues auprès de la population des femmes suivies, d'améliorer leur hygiène de vie au cours de la grossesse et de diminuer au maximum les risques liés à ces consommations. Enfin, cette prise en charge doit permettre à la future mère de mieux appréhender sa grossesse et l'arrivée du nouveau-né.

DEUX PROFILS

Lorsqu'il s'agit de femmes enceintes substituées depuis plusieurs années, qui ont pris suffisamment de distance avec leur problème de toxicomanie, l'intervention restera ponctuelle. En revanche, un suivi personnalisé est nécessaire face à des femmes enceintes toxicomanes, marginalisées socialement, polyconsommatrices, en rupture avec le système sanitaire, et sensibles au regard qu'on peut leur porter.

La plupart du temps, elles ont déjà eu un contact avec la maternité, un médecin traitant ou les urgences, le plus souvent au cours du deuxième trimestre de la grossesse, les produits consommés masquant les premiers signes. La prise en charge s'articule autour de deux ou trois entretiens afin d'initier une démarche éducative.

CLIMAT DE CONFIANCE

Informel, le premier entretien a pour objectif de favoriser l'approche au soin. Le dialogue s'instaure par le biais d'un entretien interactif destiné à aider la personne à :

- prendre le temps de se poser ;

- verbaliser ses appréhensions face à l'institution ;

- exposer sa situation personnelle, qu'il s'agisse de ses consommations ou de sa situation sociale.

À ce stade, le rôle du soignant est d'installer un climat de confiance afin que la personne puisse exposer sa situation sans se sentir jugée.

ÉCOUTER ET INFORMER

Cette approche permet de cerner le ressenti de la femme face à la grossesse, de faire le point sur sa situation familiale, ses habitudes et son hygiène de vie. Ensuite, il faut aborder les conséquences de sa consommation, à la fois pour elle-même, le futur bébé et leur avenir. Puis réfléchir avec elle, évaluer sa volonté de « décrocher » et ses attentes en termes de prise en charge. Cela permet de l'informer sur les risques encourus et les outils thérapeutiques disponibles, et de favoriser un climat de confiance afin de l'aider à accéder au soin.

À l'issue de cet entretien, soit la femme décide de prendre le temps de la réflexion, soit elle accepte un deuxième rendez-vous rapide avec le médecin, la psychologue ou l'éducatrice spécialisée. Le rôle de l'infirmière est de la guider dans ses choix afin de favoriser la mise en place d'un suivi régulier qui lui convienne.

DÉMARCHE ÉDUCATIVE

Lorsque la personne accepte un suivi, une démarche éducative s'engage afin de mettre en place un projet à court et moyen terme comme la diminution de ses consommations sur un temps donné ou la récupération de papiers d'identité afin de pouvoir reconnaître son bébé. Toutes ces démarches sont souvent difficiles pour ces femmes toxicomanes qui vivent, au jour le jour, en dehors du cadre social.

La démarche éducative s'établit autour de plusieurs items : la conduite addictive et la substitution, l'observance du suivi en maternité et l'hygiène de vie.

Substitution.

Lors d'une mise sous substitution, le sevrage étant déconseillé durant la grossesse, il s'agit d'évaluer la prise et la bonne tolérance du traitement, d'apporter des compléments d'information, d'aborder une éventuelle consommation de produits parallèlement au traitement et de mettre en relief les difficultés rencontrées. Cette évaluation permet de mettre en place des actions afin de favoriser l'observance du traitement et, à terme, l'arrêt de la consommation de drogues.

Suivi en maternité.

Au niveau de l'observance des consultations en maternité, le rôle éducatif consiste à mettre en évidence d'éventuelles difficultés à honorer les consultations ainsi que les questions sur le déroulement de la grossesse. Ces éléments vont permettre d'argumenter en faveur d'un suivi régulier.

Autre angle abordé : la fonction de mère. Le rôle éducatif concerne les besoins du bébé, les suites de couches ainsi que l'organisation familiale avec l'arrivée du bébé.

Hygiène de vie.

La mission éducative s'articule autour :

- des risques liés aux modes de consommation et aux pratiques sexuelles ;

- du suivi infectieux pour les femmes séropositives au VIH ou au VHC ;

- de l'hygiène alimentaire ;

- des troubles du sommeil ;

- de l'hygiène corporelle et bucco-dentaire.

En fonction des besoins de la personne, d'autres interlocuteurs (infectiologue, dentiste, assistante sociale...) peuvent être sollicités. Dans certains cas, il est nécessaire d'orienter ces femmes vers des structures dont le travail autour du lien mère-enfant est plus spécifique.

L'objectif est de permettre à la future mère de retrouver un contexte psychosocial plus propice à une grossesse et de mettre en place un lien mère-enfant satisfaisant et stable dans le temps. Mais la mise en place du soin ne pourra être bénéfique qu'en tenant compte des difficultés de la personne, de ses contraintes de vie et de ses croyances.

Articles de la même rubrique d'un même numéro