Esprit de détail - L'Infirmière Magazine n° 225 du 01/03/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 225 du 01/03/2007

 

Maltraitance

Du côté des associations

Manque d'écoute, déni d'estime... Solres 92 met le doigt sur les violences insidieuses.

Où commence la maltraitance ? Un tutoiement, une sonnette d'appel placée trop loin, une attitude condescendante.... De « petites choses, des détails, mais qui peuvent porter atteinte à la dignité ». Selon les chiffres de 2002 du secrétariat d'État aux personnes âgées, 5 % des plus de 65 ans et 15 % des plus de 75 ans seraient victimes de maltraitance. Sylvie Tounsi est coordinatrice de Solres 92 (Solidarité respect 92). Créée en novembre 2002 avec l'appui du conseil général des Hauts-de-Seine et de différents partenaires(1), l'association a pour but de promouvoir la « bientraitance » des personnes âgées dans le département. À travers des activités de médiation et de prévention, elle touche à la fois les professionnels et les particuliers.

« par omission »

Solres, c'est d'abord une écoute. Grâce à la permanence téléphonique animée par Florence Chekroun, psychologue, les professionnels de la santé peuvent obtenir des informations et faire part de situations inquiétantes. À partir d'une enquête auprès des équipes soignantes et des travailleurs sociaux concernés, les cas signalés sont référés au comité technique interdisciplinaire de l'association (gériatre, psychiatre, avocats, agents de la Ddass...). Réunie tous les premiers mardis du mois, cette cellule peut aussi être saisie à n'importe quel moment. Pour autant, l'association n'intervient pas directement, mais sert plutôt de médiateur : après avoir analysé la situation, le comité produit des préconisations pour aider le professionnel à résoudre la crise et trouver des solutions en équipe avec ses collègues et sa hiérarchie. Depuis janvier 2004, la ligne téléphonique est également ouverte aux particuliers, familles ou personnes âgées elles-mêmes, via la plateforme d'Île-de-France solidarité vieillesse, qui transmet à Solres les appels concernant les Hauts-de-Seine. Au total, une centaine de cas ont ainsi été traités en 2006, dont la moitié transmis par la ligne régionale.

La maltraitance décrite lors de ces SOS peut être physique, psychologique, civique, financière, médicamenteuse, mais aussi « par omission ». « Ces formes de violences sont rarement volontaires, et viennent souvent d'un manque d'informations, ou de négligence », confirme Sylvie Tounsi. C'est pourquoi Solres propose également des formations destinées aux professionnels des établissements d'accueil ou des services d'aide à domicile. L'une est intitulée « Sommes-nous bientraitants ? » « On y insiste sur la maltraitance psychologique ou la négligence, précise Hélène Kerhervé, psychologue spécialisée en gérontologie, formatrice depuis plus d'un an. Le fait d'appeler quelqu'un "madame" ou "mamie", ça fait déjà toute la différence. »

transversal

Au cours de deux modules successifs, des groupes de 10 à 15 personnes sont appelées à partager des situations vécues qui ont posé question, pour interroger plus largement l'ensemble des pratiques professionnelles. Les jeux de rôle, les bandes dessinées, ou les débats théâtraux autour d'une pièce de la compagnie Entrée de jeu, sont autant de supports pour susciter le dialogue. Cadres, équipe médicale ou personnel technique, l'hétérogénéité des groupes souligne aussi l'aspect transversal de la maltraitance, et la responsabilité de chacun dans le bien-être des personnes âgées dépendantes. Au cours de l'année 2006, 1 500 personnes ont ainsi été formées dans plus d'une trentaine de structures des Hauts-de-Seine, et depuis un an, Solres 92 a étendu ses sessions à toute la région.

La formation « sommes-nous bientraitants ? » est gratuite pour les Ehpad et les services de maintien à domicile des Hauts- de-Seine grâce à une subvention du conseil général. Et l'année dernière, un catalogue composé d'autres enseignements plus ciblés (pour les directeurs, infirmières ou médecins coordinateurs, professionnels de l'aide à domicile...) a vu le jour. Ces sessions, payantes, peuvent être prises en charge par les différentes structures au titre de la formation continue. Le thème d'une des formations les plus récentes, « construire un lien positif avec les familles », sera aussi l'objet du prochain colloque organisé par l'association à Nanterre, en mai prochain.

« adulte »

À la fin de chaque formation, les participants font le bilan. Des considérations pratiques ressortent : « ne pas parler fort », « utiliser le vouvoiement », « emmener aux toilettes une personne qui le demande, même si elle porte une protection ». Parfois, ce sont des plaintes voilées sur des conditions de travail qui s'expriment. « La définition de la maltraitance est très large, écrit une infirmière. Elle fait peur, et devrait prendre compte la charge de travail et la quantité des effectifs du personnel. » Mais une formule revient sans cesse dans les bonnes résolutions de ceux qui veillent au bien-être des anciens : « être plus à l'écoute ». Sylvie Tounsi acquiesce. « Si une personne âgée est vulnérable, elle reste un adulte. Il faut respecter sa volonté, son projet de vie, et jusqu'au bout, lui permettre de faire ses choix, d'être un citoyen. »

1- La Ddass, la Fassad 92, la Cnav, la Cramif, l'AG2R, le Coderpa et l'Udaf.

en savoir plus

- Solres 92 : 88, rue Gabriel-Fauré, 92500 Rueil-Malmaison.

Tél. : 01 41 39 06 20.

Mél : solres92@wanadoo.fr.

- Internet : http://solres92.free.fr.

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