Surveillance d'une perfusion - L'Infirmière Magazine n° 225 du 01/03/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 225 du 01/03/2007

 

pharmacologie

Conduites à tenir

La surveillance d'un médicament en perfusion doit se faire avec rigueur et vigilance en raison de son administration directe dans l'organisme. L'effraction de la barrière cutanée et le maintien du cathéter provoquent un risque infectieux.

RECOMMANDATIONS

La perfusion est une injection intraveineuse lente et continue. Elle permet d'injecter goutte-à-goutte des solutés isotoniques ou hypertoniques, contenant ou non des médicaments.

Vérification de la prescription.

L'ordonnance est nominative. Elle comporte le nom du patient et son prénom, ainsi que l'âge et le poids pour les enfants. Elle doit être signée et datée par le médecin prescripteur. Elle contient aussi le nom du médicament, sa forme et son dosage, l'heure d'administration ou le nombre d'injections par cycle de 24 heures, le type d'injection, la quantité à injecter et la durée de l'injection, le liquide de dilution à utiliser et son volume.

Exemple de prescription : Clamoxyl®, 2 g dans 100 ml de sérum physiologique à 0,9 %, à passer en 30 minutes, 3 fois par jour, en intraveineuse. Des doutes existent si l'ordonnance est mal écrite, si des données sont absentes ou incorrectes. Dans ces cas, l'infirmière doit demander une confirmation au prescripteur ou à un autre médecin en cas d'absence du premier.

Vérification du flacon ou de la poche.

Il faut s'assurer que le flacon ou la poche n'ont pas été ouverts. L'infirmière doit vérifier la date de péremption inscrite sur chaque flacon et sur chaque ampoule. Les dosages doivent être conformes à la prescription.

Préparer l'étiquetage du flacon.

L'infirmière vérifie l'identité du malade et note son nom sur l'étiquette. Doivent également y figurer l'horaire de la perfusion (heure de début et de fin) et le nom du médicament injecté. Il est préférable de noter le nom du malade plutôt que le numéro de son lit pour éviter les inversions.

Rassurer le patient.

Il faut le prévenir de la mise en place prochaine d'une perfusion ainsi que du type ou du nom des produits injectés avec la perfusion. Rapprocher ses effets personnels.

MODALITÉS DE POSE

La préparation du matériel et la pose de la perfusion doivent être effectuées avec une asepsie rigoureuse. La plupart des établissements de soins ont validé un protocole de pose de perfusion par voie veineuse périphérique.

Mise en place de la perfusion.

Lavage antiseptique des mains. Il consiste en un savonnage de 30 secondes, avec un savon antiseptique (Hibiscrub® ou Bétadine Scrub®), suivi d'un rinçage de 30 secondes.

Préparation des poches et des flacons. L'opercule de protection de la poche doit être cassé et l'embout de la poche sera désinfecté par une compresse imbibée d'alcool. Les médicaments ajoutés seront injectés dans le site prévu à cet effet. La capsule de protection en aluminium du flacon de poudre éventuellement utilisé sera enlevée et le bouchon sera désinfecté à l'alcool. Ne jamais ouvrir les flacons mais injecter à l'aide d'une seringue d'ajout à travers le bouchon pour reconstituer les solutions.

La solution reconstituée doit être limpide, sans particule en suspension, ni présence de cristallisation. Une suspension ne doit jamais être injectée en IV, en raison des risques d'obstruction des capillaires sanguins par les particules non dissoutes.

Le soluté injectable après reconstitution doit être mis en place dans l'heure qui suit. Dans certains cas, la solution peut être conservée dans le réfrigérateur en respectant les délais imposés par le laboratoire.

Fixation du perfuseur. La tubulure est clampée et le régulateur de débit est fermé. La fiche perforante est introduite par un mouvement de vissage dans le flacon placé ensuite sur le pied à sérum. La chambre compte-gouttes se remplira en la comprimant légèrement, sans la noyer, ce qui empêcherait de compter les gouttes. La tubulure est purgée sans toucher à l'embout et le capuchon est remis.

Pose du cathéter veineux périphérique. Le nettoyage de la peau se fait avec une solution antiseptique moussante et le rinçage à l'eau stérile suivi d'un séchage doux à l'aide d'une compresse stérile. La mise en place du garrot permet de repérer la veine. Le garrot ne sera ni trop, ni trop peu serré, afin que les veines gonflent suffisamment. Repérer soigneusement au toucher l'endroit où l'on va piquer et introduire le cathéter, s'assurer d'un bon reflux veineux qui permet de confirmer la perméabilité de la voie veineuse. On sent une résistance vaincue, et du sang reflue dans la chambre de visualisation. Desserrer ensuite le garrot, retirer le mandrin, brancher la tubulure et arrimer l'aiguille.

Si le patient est agité, il est possible de placer son bras dans une attelle ou une gouttière pour l'immobiliser.

Réglage du débit.

Le débit doit être stable. La chambre compte-gouttes est toujours remplie aux trois quarts. Pour calculer le débit, il faut savoir qu'1 ml de soluté correspond à 20 gouttes.

Pose du pansement stérile.

L'aiguille du cathéter (intranule) sera fixée par du sparadrap, de préférence placé en forme de « H » ou de chevron. Le pansement sur l'intranule est réalisé à l'aide d'un pansement imperméable de type Opsite® ou Tegaderm®.

Il devra être refait à chaque fois qu'il est souillé, s'il est décollé et toutes les 48 heures par principe de précaution.

À la fin du soin, le matériel doit être décontaminé avec les antiseptiques prévus à cet effet (bac de décontamination). Le matériel souillé à usage unique doit être jeté en respectant le tri des déchets. Le matériel non utilisé doit être rangé après avoir vérifié qu'il n'est ni souillé, ni dégradé, ni ouvert.

Assurer la transmission.

L'heure de pose sera inscrite sur le pansement. Noter sur la fiche de transmission : « pose de cathéter veineux périphérique faite selon le protocole », et signer. Les médicaments administrés sont également portés sur la fiche de transmission et la prescription est conservée dans le dossier médical du patient. Il est préférable de traiter les médicaments à partir de la prescription plutôt que sur la base d'un document recopié successivement parfois par plusieurs personnes.

Retrait du cathéter.

L'infirmière retire le cathéter. Elle va désinfecter la zone d'injection avec un antiseptique (type Bétadine®) et placer une compresse stérile sur le point d'injection, maintenue par du sparadrap.

RECUEIL DES DONNÉES DE LA SURVEILLANCE

Un certain nombre de paramètres servent à suivre l'évolution de la maladie et à constater la guérison. L'infirmière mettra en oeuvre la recherche de ces paramètres en fonction de la pathologie en cause ou de l'apparition potentielle d'effets secondaires, et cela dans le cadre de son rôle propre : température, pulsations, pression artérielle, fréquence respiratoire, volume de la diurèse, évaluation de la douleur, poids, mensurations, réflexes pupillaires, réflexes de défense cutanée, observation des manifestations de l'état de conscience.

D'autres moyens de surveillance seront mis en place sur prescription (ECG, examens biologiques, radiologiques, etc.).

CONTRÔLE DE L'ENSEMBLE DE LA PERFUSION

Il se pratique régulièrement en suivant le trajet du médicament à injecter en partant du flacon jusqu'au point d'infection. La surveillance de la perfusion doit être pluriquotidienne, au minimum une fois par équipe et systématique avec chaque injection.

Le flacon.

Si des solutés sont ajoutés au flacon de perfusion en trop grand nombre, des dégradations du bouchon peuvent se produire. Il faut surveiller le niveau de remplissage du flacon perfusé.

Le débit.

Le débit doit être contrôlé régulièrement, afin d'assurer le respect de la prescription :

- si la perfusion coule trop vite, il existe un risque d'oedème aigu du poumon ou de surcharge médicamenteuse ;

- si la perfusion coule trop lentement, le médicament sera inefficace et le sang risque de coaguler dans l'aiguille ;

- si la perfusion ne coule plus, il faut observer si le bras est induré et gonflé. Si ce n'est pas le cas, il convient de bouger légèrement l'aiguille. D'autre part, une obstruction peut être due à la formation d'un précipité médicamenteux ou d'un caillot sanguin en bout de cathéter ou à l'intérieur de la lumière du cathéter.

La tubulure.

Il ne doit pas y avoir de sang dans la tubulure, et elle ne doit jamais être écrasée ou coudée. Il ne doit jamais y avoir d'air non plus dans la tubulure, qui imposerait une nouvelle purge dans le strict respect de l'asepsie.

Le pansement.

Le pansement devra être changé en cas de décollement, de fuites ou de souillure. Une irritation cutanée peut être due à une allergie à l'antiseptique, à une allergie au sparadrap ou à une intolérance au pansement utilisé.

Le point d'injection et le bras perfusé.

Rougeur, douleur, oedème d'apparition immédiate, chaleur, cordon rouge ou induré peuvent être les signes d'un mauvais positionnement de l'aiguille dans la veine. Il faut arrêter la perfusion et changer de veine.

DÉPISTAGE DES ACCIDENTS

La surveillance doit se faire le plus souvent possible, par exemple toutes les heures et chaque fois que l'on passe devant le lit.

Extravasation.

L'extravasation est la diffusion du produit en sous-cutanée et non plus en intraveineuse. Elle se manifeste généralement par une douleur, une rougeur et un oedème en amont du point d'injection. Les produits irritants pour les veines (acide fort, base forte, solutés hypertoniques...) ne doivent pas être perfusés sur de petites veines périphériques. Leur injection est lente car ils entraînent des scléroses des veines utilisées. Leur injection extra-vasculaire peut provoquer une nécrose. La perfusion est arrêtée en cas d'infiltration ou hématome autour du point d'injection.

Allergie à la substance injectée.

Les signes cutanés de l'allergie sont le prurit, l'urticaire, les rougeurs et les éruptions cutanées. On observe un oedème des paupières, de la face et des membres. Dans les cas graves, il peut se produire un oedème de Quincke (oedème de la glotte). L'accident allergique se traduit par un malaise, un choc anaphylactique avec baisse de la pression artérielle, accélération du pouls, pâleur, cyanose des extrémités.

Apparition des effets secondaires du médicament.

La surveillance générale recherchera l'apparition d'effets secondaires spécifiques de la substance dont les données sont notifiées dans la rubrique « effets secondaires » du Vidal®.

Complications infectieuses.

Lors de l'injection, on observe une rupture de la barrière contre les germes. Une infection peut être due à la souillure du montage de perfusion ou à un ensemencement endogène. Plus le cathéter reste longtemps en place, plus le risque infectieux grandit.

Ces complications infectieuses peuvent s'exprimer par une élévation de la température, des frissons, des sueurs, des signes de choc et peuvent aller jusqu'à une septicémie. Il faut rechercher un écoulement purulent au point d'injection. Une asepsie rigoureuse lors de la préparation du flacon, de la pose du cathéter, des manipulations de la tubulure doivent permettre de prévenir les risques infectieux.

La confirmation de la responsabilité du cathéter se fait par la mise en évidence (hémoculture) de microbes similaires dans les prélèvements provenant de la perfusion et ceux provenant des veines. Le traitement est antibiotique. Afin de limiter le risque infectieux, l'aiguille du cathéter (intranule) doit être changée toutes les 72 heures.

Accidents pulmonaires.

Si le rythme de perfusion est rapide et les volumes importants (surcharge), un oedème aigu du poumon est alors à redouter. La recherche d'un essoufflement et la surveillance du rythme respiratoire seront nécessaires. Traitement par le Lasilix®.

Une embolie pulmonaire en cours de perfusion peut être due à la migration d'une thrombose du cathéter. Le traitement repose sur une héparino-thérapie et des soins symptomatiques.

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