« La santé psychique se dégrade » - L'Infirmière Magazine n° 226 du 01/04/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 226 du 01/04/2007

 

Étudiants

Questions à

Selon Michaël Delafosse, représentant de la Mutuelle des étudiants (LMDE), les indicateurs du moral des jeunes sont inquiétants, notamment dans sa région, le Languedoc-Roussillon.

Pouvez-vous présenter la LMDE ?

La LMDE est la première mutuelle étudiante au niveau national. Elle représente, à ce jour, 500 salariés, 42 millions d'euros de budget, 360 millions de chiffre d'affaires.

En quoi consistaient les premières « assises étudiantes de la santé » ?

On est partis d'un constat : la gestion de la protection sociale de la santé des étudiants permet d'avoir un regard privilégié sur leur situation sanitaire et sociale. Il est essentiel que ceux-ci s'approprient pleinement les enjeux en matière de santé. Ces assises, organisées en juin 2005 à Montpellier ont rassemblé 600 étudiants, des élus des universités et des Crous ainsi que des professionnels de la santé. Nous avons pu présenter les résultats de la première enquête nationale sur la santé des étudiants.

En matière de santé, la LMDE est-elle reconnue comme un interlocuteur par l'État ?

Suite à nos travaux, une mission parlementaire a été menée sur la santé des étudiants. Le député (UMP) Laurent Wauquiez a rendu un rapport qui préconise, entre autres, un renforcement des structures de santé et d'aide psychologique dans le milieu universitaire, ainsi que la création d'une aide pour faciliter l'accès à une couverture complémentaire. Cette mission révèle une prise de conscience des politiques. Depuis, diverses actions ont été mises en place dans plusieurs départements.

Votre enquête identifie des signes inquiétants de mal-être dans l'académie de Montpellier...

Globalement, les jeunes sont en bonne santé physique. Mais si l'on compare les résultats de l'étude de 2002 « Comment vivent et se soignent les jeunes » avec les résultats de 2006, on constate effectivement une dégradation de leur état psychique, notamment en Languedoc-Roussillon.

Quels sont les signes révélateurs de cette dégradation ?

Un étudiant sur deux dit être fatigué, stressé et ne pas avoir confiance en l'avenir. En France, 62,1 % des étudiants estiment que la société ne leur donne pas les moyens de réussir. En Languedoc-Roussillon, ils sont 70,7 %. On peut penser que ce résultat est une conséquence du climat économique. En effet, le taux de chômage, qui atteint près de 4 points de plus que la moyenne nationale, est le plus fort de France. Et près de 15 % des étudiants ont eu des idées suicidaires.

Les consultations de psychiatres sont aussi plus fréquentes...

7,6 % des étudiants ont consulté un psychiatre au cours des douze derniers mois, ce qui est significativement plus important que la moyenne (4,7 %). Autre aspect préoccupant, la consommation d'alcool : 26,6 % en consomment au moins une fois par semaine. À 17 ans, dans la région, seulement 17 % n'ont pas consommé d'alcool au cours du mois précédent l'enquête. Les jeunes mangent aussi plus mal que dans les autres régions : 14,8 % vont dans un fast-food une à trois fois par semaine, contre une moyenne nationale de 10 %. La part d'expérimentateurs de drogues est la plus élevée après la Bretagne : plus de 1 étudiant sur 10 a déjà consommé du poppers.

Des décisions ont-elles été prises suite à cette enquête ?

Il a été décidé, en partenariat avec la LMDE et la communauté d'agglomération de Montpellier, de travailler sur une harmonisation des horaires de cours et des transports en commun. Les universités ont décalé d'un quart d'heure leurs horaires pour faciliter l'accès au tramway, donc réduire les retards et à partir du 21 juin, les lignes de tram fonctionneront jusqu'à 2 h du matin. Il reste maintenant à travailler sur les emplois du temps universitaires qui ne respectent pas toujours la pause déjeuner. La faculté des lettres a créé un espace sanitaire et social regroupant tous les services qui peuvent être utiles à un étudiant. Voilà des exemples très concrets. Concernant les étudiants salariés, l'agglo va proposer des emplois spécifiquement adaptés à leurs heures de cours, et pour la rentrée 2007, les bibliothèques et les lieux administratifs devraient fermer plus tard.

Comment voyez-vous l'avenir du système de santé ?

Il faut qu'il évolue vers un renforcement de la prévention. Ces premières assises ont été l'occasion de poser la pierre d'un engagement fort pour faire de la santé des étudiants un enjeu majeur des politiques.

Michaël Delafosse Ancien président de la LMDE

Étudiant en géographie, il s'engage dès 1995 dans le syndicalisme étudiant après avoir créé et présidé l'Union nationale lycéenne (UNL). Élu en 1998 à la tête de la section locale de la Mutuelle nationale des étudiants de France (Mnef) à Montpellier, il préside entre 2003 et 2006 la LMDE (La Mutuelle des étudiants), nouveau nom de la Mnef. Il a publié en 2006 Qu'est-ce que La Mutuelle des étudiants ? aux éditions de l'Archipel.