Le lien du sang - L'Infirmière Magazine n° 226 du 01/04/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 226 du 01/04/2007

 

société

Dossier

Vecteur de vie, symbole social... Du don à la transfusion, les nouvelles questions éthiques véhiculées par le sang interpellent le soignant.

«Le sang est à la fois vital et létal. » Par ces mots, Jacques Hardy, président de l'Établissement français du sang (EFS), aborde un sujet sensible : symboliquement, le sang n'est pas un liquide comme les autres. Du don à la transfusion, son circuit porte en lui un débat éthique aux enjeux contradictoires : fraternité, progrès, mais aussi exclusion et méfiance sécuritaire. Deux groupes se distinguent, déséquilibrés : celui des donneurs et celui des receveurs. « Il faut 2 500 000 dons du sang par an en France, pour répondre aux besoins en produits sanguins de 500 000 malades, relève Bernard David, directeur médical de l'EFS. Les écarts ne sont pas énormes, mais les dons augmentent moins vite que la demande. » Depuis l'affaire du sang contaminé, un établissement « centralisateur de sang » a été créé et la méthode a évolué. Les questions éthiques, elles, demeurent.

Gratuité discutée

Le don à la française se veut éthique dans sa forme même : « dans sa générosité anonyme, il incarne l'éthique médicale », explique Didier Sicard, président du Comité consultatif national d'éthique. Trois mots d'ordre définissent ce don : volontaire, anonyme et gratuit. Depuis 1952, la loi a consacré son caractère bénévole, même si, historiquement, le don a pu donner lieu à de menues rétributions, comme l'octroi de tickets alimentaires. Aujourd'hui, le principe de gratuité, fondement du caractère éthique du don, fait débat. « Dans le contexte actuel, c'est très discuté, insiste Jacques Hardy. Avec la construction d'une Europe sanitaire, la question de l'utilisation d'éléments du corps humain à des fins thérapeutiques et commerciales est souvent évoquée. En Allemagne, le don de plasma est rémunéré dans certains Länder, comme dans certains États américains et en Amérique latine. En France, nous restons très attachés au bon vieux principe de gratuité, en place depuis les années 1950. » Cette vision désintéressée du don représente un modèle idéal destiné, selon Didier Sicard, à être recadré : « est-ce en faisant la promotion permanente de l'altruisme comme valeur sociale dominante qu'on pourvoira aux besoins ? » Certes, l'EFS a fixé des objectifs importants pour 2007 : 200 000 donneurs supplémentaires à accueillir et à fidéliser, soit 800 nouveaux par jour ouvrable. Mais pour Didier Sicard, le recrutement des donneurs ne doit pas se faire au détriment des exigences de sécurité, comme dans le milieu des années 1990 : « les valeurs éthiques de bénévolat et de générosité [...] ont été à la source d'une situation très préjudiciable pour les malades ». L'enjeu est de taille pour les centres de collecte : fidéliser sans relâche les donneurs, en étant à la fois très exigeant en matière de sécurité et reconnaissant dans la limite du raisonnable.

Responsabilisation

Il s'agit donc de « responsabiliser » le donneur de sang : « ce n'est pas parce qu'un acte est gratuit qu'il doit être jugé sans importance », commente Philippe Svandra, formateur à l'IFCS de l'hôpital Sainte-Anne, à Paris. Pour lui, l'acte est désintéressé : il s'agit de « faire don d'appartenance à la société ». Mais il ne peut se réaliser sans confiance mutuelle : « c'est là-dessus que devraient insister les centres de collecte, on ne doit pas donner pour être dans la communauté, on doit donner pour se montrer responsable d'autrui ». À ce titre, le questionnaire des entretiens pré-don constitue un élément important. Pas question de tricher : le médecin passe les réponses au crible pour détecter la moindre contre-indication. « C'est le choc de deux logiques, relève le sociologue Benoît Bastard, qui a assisté à 80 de ces entretiens. D'un côté, celle du donneur, en quête de reconnaissance, avec la délivrance d'un certificat de bonne santé et de citoyenneté. De l'autre, la logique de la transfusion, une logique biomédicale de maîtrise du risque. » Un pacte tacite se noue entre les deux acteurs. Le donneur accepte d'emblée cette relation déséquilibrée en se soumettant à un questionnaire intrusif et déconcertant, tout simplement parce qu'il veut donner son sang. Mais il veut le donner de manière responsable. Dans la relation, c'est le soignant qui domine et le donneur qui est dominé : « les établissements du sang ne vont pas chercher à intégrer de la négociation dans l'entretien, parce qu'on ne peut pas négocier sur les risques. Il n'existe pas de régulation négociée entre le médecin et le donneur, contrairement à d'autres domaines de la santé où le patient joue un rôle de plus en plus important. » Souvent responsabilisés et conscients de l'exigence sécuritaire nécessaire à la bonne marche de la chaîne du sang, les donneurs n'en restent pas moins des êtres humains, qui peuvent se sentir blessés lorsqu'ils sont exclus, même lorsqu'ils comprennent les raisons invoquées.

Difficile exclusion

En France, selon l'EFS, environ 9 % des donneurs ne sont pas retenus à l'issue de l'entretien préliminaire. C'est l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) qui est chargée d'établir les critères d'accès au don. Sont exclues les personnes atteintes de pathologies lourdes et porteuses de virus, les personnes ayant voyagé dans certains pays étrangers comme en Grande-Bretagne avant 1997, les personnes ayant eu des rapports sexuels non protégés dans les mois précédant le don, les homosexuels masculins et les personnes transfusées. Parmi ces donneurs radiés, Marie-Andrée Blanque : infirmière sensibilisée aux besoins en sang, elle était donneuse régulière jusqu'à ce qu'on lui diagnostique un cancer du sein en 2000. À force de courage et de traitements douloureux, elle a vaincu la maladie, mais a été radiée du don. Une mise à l'écart qu'elle a du mal à accepter, au vu de sa totale guérison : « à ma question concernant le risque couru par les receveurs, le médecin a reconnu qu'aucune preuve scientifique n'avait été apportée quant à un risque éventuel, et qu'on faisait jouer le principe de précaution ». Marie-Andrée contacte alors un centre de dons d'organes, afin de vérifier si ce principe y prévaut également : « à ma grande surprise, on m'a dit que mon état ne contre-indiquait pas le don d'organes après huit ans sans expression de la maladie, les organes étant lavés au sérum physiologique avant la greffe. J'ai alors fait remarquer qu'il pouvait y avoir une ou quelques cellules cancéreuses fixées sur les tissus sans qu'il soit possible de les détecter. Je leur ai demandé : "pourquoi ne pas faire également jouer le principe de précaution ?" "Parce que le risque est faible", m'a-t-on répondu. » Aujourd'hui, avec le recul, l'infirmière tente de positiver : « j'ai pu transmettre la nécessité de ce geste de solidarité à mon fils. Il est devenu donneur régulier, il a le même groupe sanguin que moi. ça me fait du bien, j'ai donné la vie à un enfant qui continue à donner la vie. » Malgré cela, elle continue d'éprouver un sentiment de rejet et de confinement dans son statut de malade. Christine Lesin, psychologue clinicienne au service des maladies infectieuses de l'hôpital Saint-Antoine (Paris), a rencontré ce même sentiment de rejet auprès de patients ayant appris leur séropositivité lors d'un don : « souvent, ils disent ne plus pouvoir rien apporter aux autres, puisque, dans leur tête, ils sont fautifs. Le don aurait pu être un moyen de "racheter leur faute", de rester utile. Certains patients disent que si la maladie n'était pas transmissible par le sang, s'ils pouvaient encore donner, quelque part cela les soulagerait. ça atténuerait leur impression d'être des bombes à retardement, des porteurs de mort. Évidemment, d'un point de vue sanitaire, ils jugent cette exclusion tout à fait normale et nécessaire. Mais d'un point de vue psychique, ils ont l'impression de ne plus être acceptables aux yeux de la société. À cela s'ajoute un sentiment d'enfermement, comme si leur identité ne pouvait se construire qu'à travers le filtre de la maladie. » À ce jour, il n'existe pas de recette miracle et toujours valable pour soutenir psychologiquement ces exclus du don. Selon Christine Lesin, ces situations se gèrent au cas par cas : «on peut essayer de comprendre pourquoi, pour eux, c'est une nécessité de donner, car certains sont éduqués sur des principes de devoir moral. Dans d'autres cas, on essaie de leur montrer qu'ils peuvent se construire autrement. »

Rôle infirmier

L'infirmière représente également un soutien moral important pour la personne exclue du don. Elle reste à l'écoute du donneur et peut recadrer ou préciser l'explication du médecin quant à ce refus. Patricia Trumbic, infirmière aux armées, revient sur ce rôle infirmier : « en raison du principe de précaution, les personnes transfusées ne peuvent plus donner leur sang. Cela représente quelque chose de très brutal pour ces anciens donneurs. Pour les aider à mieux accepter cette situation, nous discutons avec eux, nous insistons sur le fait que les receveurs sont des patients déjà affaiblis d'un point de vue immunitaire, et que par conséquent il faut prendre beaucoup de précautions avec le sang qui leur est destiné. » D'autres éléments comme le don par procuration peuvent être évoqués pour atténuer la déception du donneur recalé. Si une personne ne peut pas donner, rien ne l'empêche d'encourager son entourage à accomplir le geste à sa place.

Dans l'entretien pré-don, l'infirmière assume un rôle d'accompagnement. Elle procède aux prélèvements et accueille les donneurs avec le médecin. Son rôle est appelé à s'accroître : demain, elle pourrait mener elle-même ces entretiens. L'objectif est de pallier la crise démographique des médecins. Des expériences pilotes sont menées en France sous l'égide de l'EFS. S'ils étaient mis en place, ces « entretiens infirmiers » resteraient néanmoins placés sous la responsabilité d'un médecin. Pas de grand bouleversement à prévoir, plutôt une progression logique dans l'organisation de la collecte.

Du côté des receveurs

À l'autre bout de la chaîne se trouve le receveur, en attente d'un sang sûr. Environ 500 000 malades sont transfusés en France chaque année. La maîtrise du risque de transmission d'agents infectieux ou pathogènes est la mission de l'EFS : « aujourd'hui, le risque résiduel est moindre. L'Institut de veille sanitaire estime le risque de transmission de l'hépatite C à 1 pour 6 millions d'unités transfusées », souligne son directeur médical, Bernard David. De son côté, Didier Sicard s'interroge sur la prédominance du principe de précaution, souvent assimilé à une exigence éthique. Il compare l'affaire du sang contaminé aux attentats du 11 septembre 2001 : « depuis, le voyage aérien est devenu un cauchemar, les contrôles et le stress se sont multipliés. On observe le même phénomène dans le monde de la transfusion, on déploie un luxe de précautions pour aller chercher le VIH à tout prix chez des personnes négatives. » Côté sécurité, de nouvelles techniques sont déployées chaque année pour sécuriser la transfusion : déleucocytation, nanofiltration, PCR virale pour détecter le VIH, l'hépatite B et l'hépatite C. Mais ces précautions ont un coût : « cette sécurisation, qui n'a jamais de fin, rend les produits sanguins de plus en plus chers, et leur utilisation réduite à des situations de plus en plus graves. Dans le doute, l'attitude est plus à l'abstention transfusionnelle qu'au geste transfusionnel », ajoute Didier Sicard. Une position relativisée par l'EFS : « le confort n'est plus mis en balance avec un risque. Pendant un temps, les médecins prescripteurs transfusaient certains patients anémiés au minimum afin de prévenir tout risque. Aujourd'hui, nous n'en sommes plus là et nous n'hésitons plus à transfuser pour assurer le bien-être du patient », commente Bernard David. Si la sécurité du receveur et le principe de précaution demeurent les premiers dogmes de l'EFS, l'institution tente parfois de relativiser sa position sécuritaire : « il nous est peut-être arrivé d'aller trop loin dans la précaution, mais dans ces cas-là il est extrêmement difficile de revenir en arrière. Cependant, au début de l'année 2006, nous nous sommes aperçus qu'il n'était plus nécessaire de recommander des tests de sérologie virale après les transfusions. Le risque de contracter une infection était tellement infime que l'obligation a cessé d'être systématique. »

Formation éthique

L'équilibre entre la préservation de la ressource et le bien-être du patient est souvent évoqué pendant la formation des infirmières : « les étudiants se posent des questions sur la transfusion de plaquettes à des malades en fin de vie. S'acharner à leur donner un sang qui ne les sauvera pas n'est pas la bonne solution. En même temps, leur rôle est de s'assurer que ces personnes partiront le plus dignement possible en atténuant leur douleur. L'enseignement de l'éthique leur apprend qu'il n'y a pas de règle générale, mais seulement des vécus particuliers. Ce sont la volonté et le bien-être du patient qui priment », explique Marie-Ange Zamboni, enseignante à l'Ifsi Charles-Foix d'Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne). Si ce maintien du bien-être du patient nous vient d'emblée à l'esprit quand on traite d'éthique, un autre aspect, moins évident, est évoqué par les infirmières de bloc opératoire : « j'ai été régulièrement confrontée à des accidents d'exposition au sang lors d'interventions, raconte Sylvie Daussy, infirmière au bloc de l'hôpital de Château-Thierry (Aisne). Dans ces cas-là, on suit le protocole comme il nous a été enseigné. On désinfecte la zone touchée, on signale l'accident et on procède à un dépistage pour soi-même et pour le malade avec son consentement. Se protéger et se préserver des risques, ce sont des notions éthiques que l'on garde à l'esprit. »

Témoins de Jéhovah

Pour approfondir cette approche, certains Ifsi proposent de travailler sur la symbolique du sang : « on ne considère pas le sang comme un médicament, il revêt des significations différentes selon les personnes. Bien cerner sa symbolique permet de mieux accompagner le patient dans le changement de son état de santé. Par exemple, certaines femmes musulmanes veulent que la poche de sang leur soit cachée. Il arrive donc qu'on la recouvre de papier aluminium », explique Izabel Mabit, formatrice à l'Ifsi des Diaconesses de Reuilly. Ainsi, pour la plupart des religions, le sang est « pur » lorsqu'il circule dans le corps, « souillé » lorsqu'il est extériorisé. Selon cette acception, comment considérer qu'un sang impur puisse redevenir pur ? « Pour tenter de répondre à cette question, le soignant a tout intérêt à dépasser sa vision purement biologique du sang », commente la formatrice.

Beaucoup de soignants ont été confrontés dans leur expérience au cas des témoins de Jéhovah. Ces derniers refusent la transfusion : pour eux, le sang symbolise l'âme de l'être humain, et tout échange de sang est considéré comme impur. Mais depuis 2002, en cas d'urgence vitale absolue, le médecin prescripteur peut transfuser la personne malgré ses réticences(1), tout en étant juridiquement protégé.

Visage humain ?

Parallèlement, les droits des malades se sont accrus avec la loi du 4 mars 2002 : « dans le domaine juridico-médical, il y a eu plus d'avancées entre 2002 et 2007 que durant ces cinquante dernières années. On assiste à l'émergence d'une démocratie médicale dans laquelle le malade peut exercer ses droits de citoyen », commente Alain Deneufgermain, cadre supérieur de santé à l'hôpital de Saint-Quentin (Aisne). Selon cette loi, aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne : c'est le principe d'autonomie. Pour Philippe Svandra, cette loi soulève un débat éthique sur le statut des témoins de Jéhovah : « jusqu'à présent, en cas de risque vital avéré, les juges refusent de privilégier la volonté des patients témoins de Jéhovah sur l'obligation médicale de soigner. Cela veut-il dire que le témoin de Jéhovah ne serait pas un être réellement autonome ? Tout dépend de la façon dont on définit l'autonomie. Les pouvoirs publics en France considèrent le mouvement des témoins de Jéhovah comme une secte, on peut donc supposer qu'ils ne reconnaissent pas une véritable autonomie à leurs membres. » La loi du 4 mars 2002 a ouvert la voie à celle du 22 avril 2005, dite « loi Leonetti », qui permet au patient, en cas de maladie grave et incurable, de demander à ne pas entreprendre ou à suspendre les soins curatifs, consacrant ainsi un « droit à laisser mourir ». En conséquence, il ne serait pas légitime de transfuser un malade en fin de vie qui refuserait ce traitement.

Aujourd'hui, la fin de vie ne représente aucunement la limite du débat éthique dans la chaîne du sang. De nouvelles questions essentielles émergeront, allant de pair avec les innovations techniques. Les cellules souches issues du sang placentaire représentent un enjeu de taille et un espoir pour la médecine réparatrice. Selon Jacques Hardy, ces progrès nécessitent un cadrage éthique : « il faut éviter que le don du sang placentaire ne soit dirigé, il doit rester anonyme et géré par des banques de conservation pour éviter toute inégalité dans l'accès aux greffons. » Un autre danger potentiel est l'émergence d'une marchandisation des éléments du corps humain. Le visage de la transfusion sanguine de demain n'est pas encore reconnaissable, mais il se dessine peu à peu. Et une question se pose : restera-t-il humain ?

1- Arrêt du conseil d'État du 16 août 2002.

Ce qu'il faut retenir

> Depuis l'affaire du sang contaminé, le principe de précaution s'applique de la collecte du sang jusqu'à la transfusion.

> La sécurité du receveur prime sur la volonté altruiste du donneur. Les recalés du don peuvent mal vivre cette exclusion.

> Les relations donneur-receveur et soignant-patient sont régies par des règles à la fois strictes et évolutives, afin d'équilibrer les aspects sécuritaires et éthiques du don.

transfusion

DE LOUIS XIV À L'EFS

> 1667 : Jean-Baptiste Denis, médecin personnel de Louis XIV, est le premier à injecter le sang d'un jeune agneau à un homme atteint de typhus. L'homme meurt peu après ce qui s'avère être la première transfusion sanguine.

> 1914-1918 : les premières « vraies » transfusions ont lieu lors de la Grande Guerre.

> 1940 : Karl Landsteiner et Alexander Solomon Wiener découvrent ensemble le facteur « rhésus », du nom du singe Macacus rhesus ayant servi à l'expérience.

> 1952 : en France, une loi définit les principes éthiques du don : bénévolat, gratuité, anonymat.

> 1985 à 1990 : affaire du sang contaminé. Environ 4 400 personnes auraient été contaminées par le virus du sida après administration de produits sanguins dans 31 pays européens.

> 1993 : la loi « sang » garantit la sécurité des donneurs et des receveurs lors du don et de la transfusion. Le gouvernement encourage le don.

> 1998 : création d'un Comité national de veille sanitaire.

> 2000 : création de l'Établissement français du sang, opérateur unique de la transfusion sanguine en France. Les employés sont rémunérés par l'État.

formation

SOUS L'OEIL DE LA CAMÉRA

Filmer l'acte transfusionnel pour mieux le décrypter, c'est ce qu'a entrepris l'Ifsi de Tours avec vingt-quatre de ses étudiants. Ceux-ci passent d'abord un par un devant la caméra et tentent de répondre à la question : « existe-t-il une éthique en transfusion sanguine ? » « Notre démarche invitait à réfléchir au sens du soin et à l'éthique de la chaîne du sang, explique Claire Fournier, la formatrice. En parlant devant une caméra, les étudiants se retrouvent dans une situation semblable à celle d'un patient, dans son lit, face à une équipe de soignants qui l'observent. » Ensuite, les étudiants ont filmé, monté et commenté des scènes de don et de transfusion, pour faire le point sur les questions éthiques qui se posent. Comme pour un film de fiction, les étudiants ont élaboré un scénario en images de leur travail, mais les situations et les personnes rencontrées sont bien réelles. Destinée à un usage interne, leur production vise à donner une image plus concrète de la pratique.

entretien pré-don

LES GAYS DISCRIMINÉS ?

Les questionnaires distribués lors des entretiens qui précèdent le don du sang sont en passe d'être modifiés. La question « avez-vous eu des relations homosexuelles ? » devrait être remplacée d'ici le mois de mai par « avez-vous eu des pratiques sexuelles à risque ? » L'exclusion des gays du don du sang continue cependant de faire débat.

Bernard David, directeur médical de l'EFS. « Ce n'est pas le comportement homosexuel qui nous importe mais les pratiques sexuelles à risque. Statistiquement, chez les homosexuels hommes, le risque de transmettre un agent infectieux est 60 fois supérieur à celui de la population générale. Il faut garder à l'esprit que la volonté du donneur ne prime pas sur la sécurité du receveur. »

Clément Bascoul, président de Centr'Égaux, association des centristes gays, lesbiennes et gay-friendly. « Il n'est pas acceptable de réduire l'homosexualité à une pratique sexuelle à risque en excluant d'office les potentiels donneurs homosexuels. On en a assez de l'amalgame homos = sida qui court depuis trente ans. Nous revendiquons le droit à une vie banale et le don du sang en fait partie. Mais nous respectons le principe de précaution, dès lors qu'il n'est pas discriminant. »

En savoir plus

> Un point sur la symbolique du sang :

Le sang et les hommes, Jacques-Louis Binet, Gallimard, 2001, 12,30 euros.

> Donner son sang en France, Jacques Malet, Cerphi, 2006 (http://www.cerphi.org/pdf_publications/Donner_ Son_Sang-Edition2006.pdf).

> L'histoire de la transfusion sanguine du XVIIe siècle à nos jours : La transfusion sanguine de Jacques Ruffié, Jean-Charles Sournia, Fayard, 1996, 24,50 euros.

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