Répondre aux « appels » - L'Infirmière Magazine n° 227 du 01/05/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 227 du 01/05/2007

 

Hôpital

Du côté des réseaux

Selon le Réseau pour la psychanalyse à l'hôpital, les maladies organiques peuvent être des signaux de détresse psychologique.

Créé en 1997 par le psychanalyste Fernando de Amorim, le Réseau pour la psychanalyse à l'hôpital (RPH) résulte de l'évolution de ses travaux de recherche clinique auprès des malades organiques : « l'inconscient, la notion de sujet, la question du transfert, la spécificité et l'autonomie de la praxis psychanalytique se réaffirment aujourd'hui, peut-être encore plus qu'hier, compte tenu de l'évolution de nos sociétés, comme les questions essentielles pour ouvrir et ré-ouvrir au sein du cadre hospitalier un espace extraterritorial d'énonciations ».

clinique du partenariat

Fort de ce constat, le réseau vise à définir la position du psychanalyste à l'hôpital, d'interroger la question de la cure (de l'intérieur à l'extérieur de l'institution) et de constituer un lieu privilégié de réflexion. « La spécificité de l'action du RPH consiste à faire sortir les psychanalystes de leur cabinet pour aller là où sont les malades organiques, c'est-à-dire à l'hôpital », observe Édith de Amorim, psychothérapeute et membre du bureau du RPH depuis 2002. Située à l'extérieur de l'hôpital mais opérant en liaison étroite avec celui-ci, l'association compte aujourd'hui une quarantaine de membres actifs, dont l'orientation psychanalytique est freudo-lacanienne.

La démarche des psychothérapeutes et psychanalystes agissant en son nom vise à « établir une clinique du partenariat, en accord avec l'évolution de l'histoire de la psychanalyse », explique Jean-Baptiste Legouis, psychothérapeute, membre du RPH depuis 2000 et actuel secrétaire général. Le psychothérapeute, qui considère la maladie organique comme un « appel », se fait connaître auprès de malades en souffrance, auprès de médecins, et « répond alors à une demande par un apport psychanalytique, qui n'a rien à voir avec la psychosomatique ; il s'agit plus d'un élargissement du traitement ».

La cure, entreprise en trois temps, permet d'établir une passerelle entre généralistes et psychothérapeutes dans un processus appelé « cônification du transfert ». D'abord, un premier temps clinique, pendant lequel le psychanalyste se déplace à l'hôpital. Durant cette phase, « si le malade consent à le recevoir et à lui parler, l'équipe soignante sent une différence assez tôt, cela aide à évacuer une angoisse, et le malade fait l'expérience des effets produits par sa parole ». Puis, lors d'un deuxième temps de consultation, toujours à l'hôpital, en ambulatoire par exemple, le malade devient patient, passant du désir de guérison au désir de reconnaissance. Enfin, lors d'un troisième temps extra-hospitalier, le patient peut devenir « psychanalysant », se rend au cabinet du psychanalyste et nourrit son désir de savoir.

Cette orientation clinique a amené le RPH à créer au sein de son siège social(1) une consultation publique de psychanalyse, se déroulant à l'extérieur de l'hôpital, ainsi qu'un service d'écoute téléphonique(2). La consultation publique de psychanalyse s'adresse aussi aux personnes désireuses d'entamer un travail thérapeutique quels que soient leurs moyens financiers : elle pourra ainsi être gratuite. De la même façon, « la dimension sociale du réseau se manifeste à travers la formation d'étudiants en psychanalyse, qui bénéficient d'un local où ils peuvent recevoir des patients, sous la supervision des membres du bureau », souligne Édith de Amorim.

freud et lacan

Chaque deuxième mardi du mois, le RPH organise une réunion clinique autour de la présentation écrite d'un cas d'un membre clinicien. Des groupes de lecture se réunissent régulièrement pour une étude chronologique des écrits de Freud et de Lacan. Enfin, Fernando de Amorim anime un séminaire, le quatrième mardi de chaque mois, au siège de l'association, ayant pour thème « l'identification en médecine et en psychanalyse ».

Le RPH organise deux colloques par an, dont les actes sont publiés dans La Revue de psychanalyse et clinique médicale. Le dernier colloque, organisé le 12 mai au Musée des moulages de l'hôpital Saint-Louis, à Paris, porte sur le thème : « la plainte en médecine et en psychanalyse : l'arbre qui cache la forêt ? » La question est abordée par des psychanalystes, des médecins, des chirurgiens, mais aussi des juristes et des philosophes.

plainte et malaise

« C'est par la plainte que le patient nous communique ses symptômes, estime Jean-Baptiste Legouis. La clinique nous a appris que la plainte est une manière aussi de signaler un malaise d'un autre ordre. Lequel ? Les plaintes incompréhensibles au premier abord, ou difficiles à saisir, mettent inévitablement le clinicien dans un état d'attention redoublée car sa crainte, qu'il soit médecin, chirurgien ou psychanalyste, est de passer à côté de quelque chose de plus grave ou à risque létal pour le patient. »

1- Réseau pour la psychanalyse à l'hôpital (RPH), 33, rue Pigalle, 75009 Paris.

Internet : http://www.rphweb.net.

2- Tél. : 01 45 26 81 30.