Traitement et observance - L'Infirmière Magazine n° 227 du 01/05/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 227 du 01/05/2007

 

Pathologies lourdes

Thérapeutiques

En psychiatrie, l'observance médicamenteuse par le patient ne va pas de soi, et dépend beaucoup de la relation avec le soignant.

Les produits pharmaceutiques disponibles en psychiatrie agissent sur bon nombre de symptômes. Si, pour les troubles névrotiques et « réactionnels », les médicaments sont surtout symptomatiques et jouent un rôle d'étayage ponctuel dans des situations où l'abord psychothérapique doit être au premier plan, il en va différemment pour les pathologies mentales lourdes.

efficacité

Dans les cas de psychoses et de troubles thymiques graves, la chimiothérapie est un outil indispensable aux soins. De nombreuses études ont montré l'efficacité des médicaments sur plusieurs plans : réduction des symptômes aigus et chroniques, diminution des complications, prolongement de la qualité et de l'espérance de vie, raréfaction des rechutes et des réhospitalisations.

interruptions

Les patients sont peu enclins à suivre la prescription médicale et interrompent fréquemment le traitement, au risque de rechuter. Au cours des premiers épisodes délirants aigus, près de 70 % des malades interrompent leur traitement dans l'année qui suit.

inobservance

Les études sont contradictoires car elles portent sur des populations très hétérogènes, mais des facteurs de risque de rupture de soins sont identifiés :

- le sexe masculin ;

- l'association de la pathologie avec une prise de toxiques ;

- l'isolement social, l'éloignement géographique par rapport à un lieu de consultation et la période du début de la prise en charge.

observance

Globalement, la relation soignant-soigné, la qualité du lien social et du maillage offert par le système de soins favorisent une bonne observance médicamenteuse. Les programmes « psycho-éducatifs », fondés sur des techniques cognitivo-comportementalistes et développés par les laboratoires pharmaceutiques, aident éventuellement à éduquer le patient sur sa maladie et sur la bonne observance du traitement. D'autres praticiens utilisent des mesures de soin sous contrainte pour des patients suivis en ambulatoire.

Ces techniques négligent le fait qu'avant d'être un problème collectif, l'observance médicamenteuse est une question qui se pose d'abord au sujet souffrant puis au prescripteur et à l'équipe qui le prend en charge. Or la particularité des maladies mentales est d'atteindre le sujet dans son existence même. Lors d'un état aigu, la personne est submergée par des angoisses massives. Ainsi, pour certains patients, le refus de traitement peut être lié au fantasme d'intrusion de l'autre que représente l'ingestion de comprimés ou de gouttes ; pour d'autres patients en état « d'aliénation », le suivi scrupuleux du traitement peut être tout autant obsessionnel... Demander à un malade d'être responsable par rapport à l'observance de son traitement n'a de sens que s'il a retrouvé une assise solide dans la réalité, et que d'une place de sujet, il peut exprimer un désir, une volonté.

terrain d'entente

La question de l'observance médicamenteuse chez un patient présentant une pathologie mentale sévère sous-entend la prise en compte de la dialectique du sujet atteint, oscillant entre liberté et aliénation. La difficulté pour le soignant est d'assister la personne quand elle est débordée par le processus pathologique, mais aussi d'entendre son désir lorsque sa parole est libre.

Dans la relation de soin, le refus du traitement ou l'observance peuvent revêtir des significations multiples et singulières : une position infantile de soumission ou de rébellion, ou une projection dans laquelle le soignant représente une menace pour son intégrité. Les équipes doivent s'interroger sur le sens de ce que montre le patient lorsqu'il ne suit pas la prescription médicale afin de trouver un terrain d'entente loin des recettes techniques. Peut-être est-il utile de se souvenir que l'observance médicale est un élément important de la prise en charge, mais pas la fin ultime du traitement du patient.