Associer l'animal au soin - L'Infirmière Magazine n° 228 du 01/06/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 228 du 01/06/2007

 

Troubles de la communication

Thérapeutiques

Révélateurs d'états émotionnels, les animaux peuvent apaiser et stimuler certaines personnes âgées tout en rompant leur isolement.

Les Anglo-Saxons parlent de thérapie par l'animal, l'Association française d'information et de recherche sur l'animal de compagnie (Afirac) évoque de préférence les « AAA » (« activités associant l'animal »), exercées par de simples bénévoles d'associations. Ces « AAA » deviennent des « AAA-T » (à orientation thérapeutique) à condition que des professionnels de la santé y prennent part (infirmière, kinésithérapeute, psychologue). Si certains hôpitaux et maisons de retraite accueillent des poissons, de petits animaux et des chats - qui s'invitent souvent spontanément sur les lieux -, ce sont essentiellement des chiens « éduqués » qui sont introduits dans les programmes les plus structurés.

boucles relationnelles

Chez des personnes présentant des troubles de la communication et du comportement, l'animal permet de réactiver des boucles relationnelles que le soignant peut ensuite mettre à profit. Ainsi, la qualité d'attention que l'animal accorde à une personne démente déclenche parfois chez elle des effets très positifs : apaisement, baisse de l'agressivité, arrêt des cris ou des insultes... Des déblocages linguistiques peuvent survenir, via la prononciation de quelques mots véhiculant une charge affective. Autres exemples : la présence d'un animal, couché à proximité et regardant dans les yeux une malade, a permis à des infirmières de faire dans de bonnes conditions la toilette d'une patiente habituellement violente durant cet exercice. Une autre dame, qui avait pris l'habitude de promener le chien (dressé à revenir à l'intérieur du service à l'approche des portes de sortie), fuguait ensuite beaucoup moins, même lorsqu'elle se déplaçait seule ! Le chien peut aussi servir de prétexte à de nombreux exercices de mémoire (en répétant son nom, ou en donnant des ordres).

stimulations motrices

Dans une unité de long séjour, un patient, atteint par la maladie de Parkinson, opposait une résistance forte aux séances de rééducation. Grâce à la présence d'un golden retriever, il s'est remis à la marche pour promener le chien une demi-heure par jour dans le parc, lui parle et participe avec lui aux séances de kinésithérapie. D'autres gestuelles peuvent être encouragées via le brossage, le lancer de balle, la pose du collier, etc.

conditions de réussite

La visite de l'animal doit être soutenue tant par la direction que par le personnel. L'intervenant formé qui intervient avec un chien « éduqué » doit d'abord observer la vie du service, afin de différencier les lieux permis ou interdits, savoir où le chien peut faire ses besoins... Certaines règles doivent être expliquées au personnel (se laver les mains, ne pas donner à manger ou caresser l'animal sans l'accord de son maître, déterminer qui nettoiera les poils). Il convient de fixer quels patients vont être mis en contact avec le chien (idéalement, deux fois par semaine), quel partenariat envisager avec les soignants... Les résultats bénéfiques de ces rencontres font l'objet de comptes rendus illustrés afin que le soignant puisse s'en servir dans ses futurs contacts avec la personne âgée.

les limites

Il est impossible de tout programmer avec un animal : durant la rencontre, l'intervenant doit justement posséder beaucoup de doigté pour rebondir sur les interactions intéressantes qui surgissent. Il lui faut aussi savoir s'adapter à la mobilité de l'animal et à ses différentes attitudes. Par ailleurs, chaque chien est plus ou moins doué pour certaines choses, et si un chien vif est excellent pour intervenir en neurologie, il vaudra mieux en choisir un plus calme pour la gériatrie. Enfin, un chien éduqué ne peut « travailler » qu'environ dix ans, avec des séances qui ne peuvent pas dépasser les vingt minutes, et pas tous les jours. L'animal n'est pas non plus un remède miracle, mais il augmente les chances d'aller bien ou d'aller mieux. Pour monter un tel projet, il faut penser au financement et à l'assurance.

Lire aussi « Des Chiens aux petits soins » (rubrique « mieux vivre »), L'Infirmière magazine n°229, à paraître le 30 juin.