Socialement marqués ? - L'Infirmière Magazine n° 229 du 01/07/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 229 du 01/07/2007

 

Brûlures

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Une étude révèle les difficultés des brûlés à s'insérer et à se relever de leur traumatisme. Certains remettent en cause leur façon de vivre.

Comment réinsérer les grands brûlés dans leur vie sociale ? Le 27e congrès de la Société française d'étude et de traitement des brûlures, organisé du 30 mai au 1er juin à Tours, n'a pas seulement été l'occasion de mettre en perspective les progrès réalisés par la science. À son échelle, l'étude d'Hélène Rienmeyer, médecin brûlologue au centre de rééducation de l'Argentière, à Aveize (Rhône), apporte des informations cruciales sur la situation des grands brûlés.

obstacles

Cette réinsertion se heurte à des obstacles. L'enquête relève que sur les 157 patients reçus en 2006, 25 % souffraient de troubles psychologiques ou de problèmes socio-économiques qui « nécessitent la mise en oeuvre d'ergothérapie et d'un accompagnement social avec la préparation de leur projet de vie ».

Venant des grands centres hospitaliers lyonnais, ces grands brûlés éprouvent de sérieuses difficultés à retrouver un semblant de vie normale. Seulement 75 % d'entre eux sont retournés vivre dans leur domicile. Les 25 % restants ont été placés dans des structures, type CHRS, de moyen ou long séjour, en appartement d'urgence ou thérapeutique. « Près de 7 % sont recueillis par un proche ou membre de la famille. Pour les autres, nous devons faire face au problème de l'isolement. Avec toutes les contraintes administratives et financières que cela suppose », s'inquiète Hélène Rienmeyer. Ils seraient 17 % à vivre seuls, sans famille ni ressources. 9 % des brûlures font suite à des tentatives de suicide ; mais les accidents du travail et domestiques demeurent les principales causes, tandis que 6 % ont été causées par une agression.

La reprise d'activité est loin d'être systématique (72 %). Pour les autres, les explications divergent selon les cas : « Plus de la moitié d'entre eux ne peuvent tout simplement pas retrouver un travail, leur infirmité étant trop lourde. 23 % sont licenciés par leur employeur, 2 % subissent le rejet des autres - notamment pour les brûlés au visage - et 20 % décident eux-mêmes de tout arrêter. »

Il n'est pas rare que les victimes remettent en cause jusqu'à leur façon de vivre. « Certains ont déjà payé leur maison. Ils acceptent de vivre avec la seule allocation adulte handicapé, préférant s'investir dans autre chose. »

avant l'accident

Se pose la question de l'aide, du suivi. Comment remettre sur les rails ces personnes qui accusent le coup ou celles qui - dans 24 % des cas - étaient en situation de précarité (chômage, RMI...) avant l'accident ?

Pour ces dernières, la durée des séjours est augmentée de 70 %. D'où la nécessité de mettre en place « un accompagnement social dès l'entrée du patient dans le centre de traitement de brûlés. C'est à l'ensemble du service - des médecins et chirurgiens aux infirmières - de prendre en charge ce travail », estime Hélène Rienmeyer.

Dans le même temps, elle espère attirer l'attention des pouvoirs publics. L'ANPE en tête : « Ils ne prennent pas forcément en considération le degré de traumatisme. Les victimes sont souvent radiées après avoir refusé plusieurs offres d'emplois. »

Consciente de ce dysfonctionnement, l'Association française des brûlés s'est organisée pour venir en aide juridiquement à des victimes en litige avec leurs employeurs ou l'assurance chômage.