Raconte-moi une histoire ! - L'Infirmière Magazine n° 231 du 01/10/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 231 du 01/10/2007

 

Intergénération

Du côté des associations

Les « Mamies et Papys lecture » de l'association Lire et faire lire transmettent le plaisir des mots dans les écoles primaires de France.

« Environ 10 % des élèves qui entrent en sixième ont de grandes difficultés à lire. Je ne pense pas qu'il y ait une bande de pervers qui essaie de faire échouer les enfants en classe ! Et on ne peut pas non plus demander aux enseignants de régler tous les problèmes de la société. C'est pourquoi j'ai cherché des pratiques qui avaient fait leurs preuves », raconte Alexandre Jardin, écrivain et cofondateur de l'association Lire et faire lire.

L'inspiration viendra de Brest, où des ateliers d'aide à la lecture ont été montés en 1985 dans les écoles par l'Office des retraités brestois (ORB). Ce projet repose sur la solidarité entre générations, utilisant les compétences des retraités pour donner le goût de la lecture aux plus jeunes. « Cette initiative m'a semblé pleine de bon sens, peu coûteuse et gratifiante pour tout le monde. Il fallait trouver un système permettant de répandre cette pratique à l'échelle du pays », poursuit Alexandre Jardin.

double réseau

Fin 1999, le projet se réalise via la création de l'association Lire et faire lire, en s'appuyant sur deux structures bien implantées dans l'Hexagone : la fédération de la Ligue de l'enseignement et l'Union nationale des associations familiales (Unaf). Cette collaboration a permis de profiter de leur réseau et de leur maillage du territoire.

Depuis quatre ans, Philippe Houzelot intervient comme bénévole deux fois par semaine dans une école du XIIIe arrondissement de Paris, pour faire la lecture à de petits groupes de cinq ou six enfants de CE1. « Pendant une demi-heure, trois-quarts d'heure, je lis des histoires, et ils en lisent à voix haute. Ce qui est extraordinaire, c'est les progrès qu'ils font entre le début et la fin de l'année. On a un retour extraordinaire des enfants, c'est une récompense pour nous. » Ce sont les enfants qui choisissent de participer aux ateliers de lecture, et ils sont libres d'arrêter, de revenir, de faire ce qui leur plaît. « On est là pour le plaisir, pour donner le goût des livres. Tout enfant devrait pouvoir lire et comprendre, c'est essentiel pour se construire », plaide Philippe Houzelot.

Pas de méthode, pas d'obligations, pas de note. Ces ateliers ont une seule mission : transmettre le goût des mots, autrement. « Nous ne faisons pas de pédagogie, nous avons un rôle différent de celui des enseignants. On fait ça avec son coeur. Quand on donne de son temps, il faut le faire pour le plaisir, sinon ça ne peut pas marcher », ajoute le bénévole. « J'ai commencé dès ma retraite en tant que jeune « Papy lecture », et j'espère bien devenir un vieux « Papy lecture » ! Les enfants m'appellent par mon prénom. L'écart d'âge, les cheveux blancs, un ensemble de choses font que des liens forts se tissent entre nous. »

régularité

Les années passent et ne se ressemblent pas. Certains groupes sont plus forts que d'autres. Un point commun, les progrès : « Au sein de chaque groupe, certains lisent bien, d'autres ont un peu plus de mal, mais ils ne sont pas complexés ou cruels entre eux. Ils le sont pour d'autres choses, comme les habits, les marques... »

Alexandre Jardin ne compte pas s'arrêter là. « Quand on est devant un problème de société, il faut rénover les pratiques. Aujourd'hui, je suis furieux que ce soit un succès et non pas un triomphe ! La Ligue et l'Unaf n'ont pas assez de moyens pour encadrer tous les bénévoles. Une centaine d'emplois en plus seulement dans ces réseaux associatifs permettrait de passer de 11 000 à 50 000 intervenants. Imaginez : une nation de lecteurs, et une armée de « Mamies » et de « Papys lecture » ! Donc des liens intergénérationnels renforcés et des gamins qui réussissent. »

« Tout se joue en maternelle et en primaire, poursuit-il. Or, nous avons trouvé un système qui marche. Pour l'instant, les politiques paraissent plus intéressés par les grands événements, les fêtes, les salons. Mais avec les gamins, il faut de la régularité et du lien. Une fête ou un salon sur la lecture une fois par an, ça ne les fera pas progresser de la même façon ! »

Internet : http://www.lireetfairelire.org.

Tél. (n°Indigo) : 0 825 832 833.

Mél : information@lireetfairelire.org.

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