La fumée bannie du lycée - L'Infirmière Magazine n° 232 du 01/11/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 232 du 01/11/2007

 

Tabac

Du côté des réseaux

Pour accompagner l'interdiction de la cigarette en milieu scolaire, des lycées, institutions et associations du Languedoc-Roussillon ont créé un réseau de prévention.

« dans les lycées, il y a eu comme un vent de panique lorsqu'il a fallu appliquer la loi Évin, dans le cadre du programme Académie sans tabac, [l'interdiction est entrée en vigueur le 1er février 2007, ndlr]. Les proviseurs ont appelé toutes les associations de prévention, ce qui s'est traduit par une période de cacophonie. Il était nécessaire de réunir tous les partenaires autour d'une table », témoignent Catherine Nguyen, tabacologue, et Muriel Bousquet, enseignante en éducation pour la santé.

programme atypique

Toutes deux travaillent à Épidaure(1), structure qui est à l'initiative, en Languedoc-Roussillon, de la création du Réseau Lycée Libre comme L'R(2). Ce réseau de prévention anti-tabac mutualise les moyens et propose aux intervenants en milieu scolaire des outils et des formations. Lorsque « Libre comme L'R » reçoit une demande d'intervention, il dirige l'établissement demandeur vers la structure la plus adaptée.

Dans le cadre de ce réseau, Muriel Bousquet et Catherine Nguyen animent, avec cinq autres professionnels, la formation « Accompagnement au sevrage tabagique et animation d'Action 5+1+ » (3), dispensée principalement aux infirmières scolaires. Atypique, ce programme pour les lycéens est né en 2003 d'une analyse de la situation en Languedoc-Roussillon, où la proportion de jeunes fumeurs dépassait la moyenne nationale.

Les formations apportent des connaissances sur la prise en charge du sevrage, notamment via les substituts nicotiniques. « Nous abordons aussi le volet des conduites à tenir concernant la consommation de cannabis, qui est malheureusement très présente », ajoutent les intervenantes.

un « challenge »

Reste à se donner les moyens d'agir. « Nous avions constaté que beaucoup de jeunes désiraient arrêter de fumer mais que peu y arrivaient, poursuivent-elles. Ils nous disent souvent : "On fume parce qu'on s'ennuie." Ou "ça fait grand." Ou encore : "En soirée, sans tabac, qu'est-ce que je vais faire de mes mains ?" Nous avons fait une revue de la littérature et nous avons élaboré ce projet. Testé avec succès durant un an auprès de lycées pilotes, il a été pérennisé. »

Les élèves qui s'inscrivent, sur la base du volontariat, participent à six séances de deux heures après les cours. « C'est un "challenge". L'objectif est de leur faire vivre l'expérience de l'arrêt du tabac et du cannabis. Ils s'engagent à ne pas fumer à partir du troisième soir. Les quatrième et cinquième jours, nous analysons leurs difficultés et les solutions que nous pouvons trouver. Le but est qu'ils passent le week-end sans tabac. On en parle le lundi et, en général, ces jeunes sont surpris et fiers d'avoir tenu bon. Ensuite nous faisons un suivi en fonction de la demande », explique Muriel Bousquet.

ateliers interactifs

Un « CO-Testeur » est utilisé pendant l'Action 5+1+, puis tout au long de l'année grâce à l'accompagnement des infirmières scolaires. Cet appareil permet d'évaluer le taux de monoxyde de carbone dans l'air expiré, et donc le niveau d'intoxication au tabac. Les séances reposent sur des ateliers interactifs. Cette approche ludique permet aux participants de s'exprimer, de mieux se connaître et d'évaluer la place que tient le tabac dans leur vie. « Nous leur donnons la parole constamment, une dynamique de groupe se met en place, et en fait, tous s'éclatent bien », constate Muriel Bousquet.

pas de leçon de morale

« Focus group », « brainstorming », relaxation, expression corporelle... ces ateliers pédagogiques ne comportent ni cours magistraux, ni discours moralisateurs. « Nous souhaitons que ce programme de sevrage soit adapté à tous les niveaux. Le Mind Map® (carte heuristique, voir l'illustration à gauche) est particulièrement apprécié des ados. C'est une technique d'animation basée sur le dessin, détaille Catherine Nguyen. Nous demandons aux participants de se représenter au milieu d'une feuille de papier, puis de faire apparaître tout ce qui compte pour eux dans leur vie. »

« La plupart du temps, remarque la tabacologue, la cigarette est inexistante ou illustrée de manière négative. Cet atelier permet de relativiser le poids du tabac dans leur vie et de développer l'affirmation de soi. Le programme aide à trouver des alternatives à la cigarette dans les moments de stress dus à la rentrée, aux examens, à l'internat ou à d'autres situations difficiles de la vie quotidienne. »

1- Épidaure est le département de prévention du Centre régional de lutte contre le cancer (CRLC) de Montpellier.

2- Le réseau, financé par le conseil régional, la Drass, l'Urcam et le CRLC, est soutenu par de nombreux organismes.

3- Le nom signifie « cinq séances pour chaque soir de la semaine, plus une le lundi suivant, plus le suivi ».

Contact

Épidaure propose une formation à l'Action 5+1+ les 29 et 30 novembre 2007, gratuite pour les infirmières du Languedoc-Roussillon. Renseignements : Épidaure, tél. : 04 67 61 30 00.

Site Web : http://www.epidaure.fr, http://www.librecommelr.fr

Articles de la même rubrique d'un même numéro