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L'Infirmière Magazine n° 232 du 01/11/2007

 

accouchement

Dossier

De plus en plus de femmes demandent à accoucher à domicile. Mais dans l'ensemble, les soignants restent sur leurs gardes.

Elle a laissé place à l'instinct. La position, la gestion de la douleur... rien n'était prévu d'avance. « Il y a quelque chose d'animal qui parle dans certains moments de la vie », raconte Brigitte. Cette psychologue, qui vit dans l'Est de la France, a accouché chez elle, sans péridurale, sans monitoring, sans médecin. Un choix mûrement réfléchi : « C'était très clair, je ne voulais pas d'un acte médical, qu'on attrape mon enfant, qu'on lui nettoie les narines, qu'on lui mette des spots dans la figure, qu'on me dise dans quelle position me mettre. Je voulais être actrice de mon propre accouchement. Sinon, ça enlève du ressenti. Pour moi, la naissance, ce n'est pas facile, mais on ne fait pas ça tous les jours. »

Le jour J, elle n'a rien préparé de spécial. Juste un éclairage doux, diffus. Ses sensations l'ont amenée à accoucher accroupie, soutenue par son conjoint et sa soeur. Et son enfant est arrivé, en à peine deux heures. « ça reste un moment magique », assure-t-elle.

L'enthousiasme de Brigitte s'est cependant heurté à l'incompréhension de ses proches. « Ma mère m'a traitée de douce-dingue, elle ne comprenait pas pourquoi je voulais avoir mal... » Il faut dire que son choix reste rare en France : d'après l'Insee, seulement 1,2 % des accouchements, en 2004, ont eu lieu hors d'une maternité et avec l'assistance d'un professionnel (1).

Inversion de tendance

En fait, l'accouchement à domicile (AAD) avait quasiment disparu depuis une trentaine d'années. De 80 % des accouchements au début du XXe siècle, il est passé à 50 % dans les années 1950, puis à 20 % en 1960 et à moins de 1 % à partir des années 1970-1980. Aujourd'hui, on assiste à une inversion de tendance : comme Brigitte, de plus en plus de femmes affichent un intérêt pour l'accouchement à domicile. Selon une étude du CHU de Lyon réalisée en 1999, 52 % des femmes estimaient qu'il devrait être proposé aux futures mères. Et la demande semble exploser. « Elle a triplé depuis mes débuts », en 1995, confirme Doris Nadel, sage- femme à Montbazin, dans l'Hérault. « Localement, je ne pense répondre qu'à la moitié des demandes », affirme Isabelle Bar, sage-femme à Châteaubourg (Ille-et-Vilaine), qui assure trois à cinq accouchements à domicile par mois.

Moins de sages-femmes

Pourtant, le nombre de naissances à domicile n'a pas suivi : car dans le même temps, le nombre de sages-femmes proposant l'AAD s'est largement réduit. « On est passées de 150 en France, il y a quelques années, à une moyenne variant de 30 à 50 aujourd'hui selon les congés maternités et autres absences. » En cause dans cette chute brutale : les assurances. Depuis le début des années 2000, les sages-femmes ne sont plus couvertes pour l'accouchement à domicile, jugé trop risqué. Seule une minorité a choisi de continuer à exercer dans ces conditions précaires.

La pénurie de sages-femmes à domicile a transformé la recherche d'une accoucheuse en parcours du combattant. Dès lors, certaines soignantes surchargent un peu leur calendrier, acceptant de prendre en charge une naissance supplémentaire par rapport à leur quota mensuel idéal. Si la tendance s'est inversée depuis peu, c'est que l'accouchement à domicile trouve un public beaucoup plus large que celui des contestataires des années 1970. Aujourd'hui, les Françaises qui sont déterminées à donner naissance à leur enfant sans aucun acte médical se retrouvent dans toutes les couches de la société. Avec, toutefois, une dominance des classes sociales élevées.

Recherche du mieux-être

Ces femmes se soucient de rendre l'acte plus personnel et naturel. Selon une étude britannique du National Birthday Trust Fund, publiée en 1997, un tiers des futures mères se tournant vers l'AAD recherchent une meilleure prise en compte de la physiologie et 24 % en attendent une réduction du stress, ou encore un meilleur contrôle de leur accouchement. Elles estiment qu'avec moins de contraintes extérieures, l'accouchement devient plus instinctif et plus facile. Les autres motivations pour l'accouchement à domicile sont le côté pratique, la présence de la famille, une mauvaise expérience vécue à l'hôpital ou, au contraire, un précédent AAD réussi.

Pour la majorité des parturientes, la réflexion sur l'accouchement à domicile suit donc un mouvement beaucoup plus global de recherche du mieux-être. Brigitte n'a pas pensé immédiatement à mettre son bébé au monde chez elle. « Je cherchais des méthodes d'accouchement sans violence, explique-t-elle. Je connaissais déjà la méthode de Frédérick Leboyer [lire l'encadré page 7]. Cela m'a donné envie de me renseigner. »

Surmédicalisation ?

Les recherches de Brigitte l'amènent à rencontrer une sage-femme proposant une naissance à domicile ou en plateau technique (sous la responsabilité d'une sage-femme en maternité mais sans acte médical). Pour son premier enfant, elle choisit le plateau technique. Pour son deuxième, l'hôpital ayant fermé le plateau, ce sera l'accouchement à domicile. Même si ce n'était pas son choix premier, Brigitte assure ne pas s'être inquiétée : « C'était naturel pour moi. Christiane, ma sage-femme, n'est pas du genre à vouloir suivre une grossesse s'il y a le moindre problème. » « Chez soi, c'est beaucoup plus intime, poursuit-t-elle. On fait comme on veut, comme on le sent, à son rythme. Ailleurs, il y a tout de même une adaptation... même en plateau technique. Pour moi, l'accouchement n'est pas médical mais naturel. C'est une histoire intime dans laquelle on n'a pas envie que quelqu'un de différent intervienne. »

Madeleine Akrich, sociologue et directrice du Centre de sociologie de l'innovation de l'école des Mines, à Paris, impute le nouvel essor de la demande à trois facteurs : « Il se peut que la médicalisation soit allée trop loin. Mais aujourd'hui, Internet rend aussi plus visibles les différentes pratiques : il est plus facile de s'informer sur l'AAD et de partager des expériences avec d'autres femmes. Et puis, j'ai l'impression que les journaux grands publics et la presse spécialisée dans la grossesse commencent à faire transparaître les différents points de vue sur l'accouchement, même s'ils maintiennent des positions classiques. J'ai été éberluée en lisant le numéro de Elle avec un article sur l'accouchement à domicile. Il y avait bien un aspect sécuritaire, mais c'était assez ouvert. »

«Hérésie»

Si l'AAD rencontre de plus en plus d'échos dans l'opinion, elle garde de farouches opposants, surtout dans le corps médical. Car pour la plupart des soignants, c'est une prise de risque inutile. Leur position : tout peut arriver lors d'un accouchement, le pire étant imprévisible. « L'accouchement à domicile est vécu par la communauté [des gynécologues-obstétriciens] comme une proposition hérétique, insensée, folle. Dès qu'une personne en parle, elle est considérée comme quelqu'un qui a envie de jouer avec le feu », confirme le docteur Bernard Maria. Chef du service de gynécologie-obstétrique de Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne) et ancien président du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), il est pourtant favorable à l'accouchement sans assistance médicale, sous certaines conditions.

Il explique l'attitude de la majorité de ses collègues par l'héritage qu'ils ont reçu. « Cela remet en cause les pratiques que l'histoire nous a léguées. Il y a cinquante ans, les obstétriciens voyaient arriver dans leur service les catastrophes de l'accouchement à domicile. C'étaient des grands moments d'émotion. Mais la pratique était mal définie. Aujourd'hui, beaucoup refusent de se poser des questions sur les interventions médicales nécessaires. Doit-on sortir l'artillerie lourde dans tous les cas ? Est-ce toujours justifié ? »

Méfiance à l'hôpital

Le docteur Maria va plus loin : « C'est un conflit de pouvoir entre le médecin qui sait et qui dit, et la parturiente qui veut que l'on prenne en compte ses désirs. » Entre les deux, les sages-femmes qui ont choisi d'assister les patientes lors d'un accouchement sans acte médical se retrouvent souvent confrontées à l'hostilité du personnel hospitalier. « C'est toujours compliqué, témoigne Jacqueline Lavillonnière, présidente de l'Union nationale des syndicats de sages-femmes françaises. Il nous faut toujours affûter nos arguments. Une fois, des professionnels m'ont même dit : "On ne veut pas s'occuper de vos merdes". »

Et en plateau technique, y compris lorsque tout s'est bien déroulé, les rapports sont compliqués. « Aujourd'hui, mes relations sont très bonnes avec les médecins de l'hôpital, même s'ils ne sont pas d'accord avec ma pratique. Il y a un échange, de la réflexion, assure Geneviève Govillé, sage-femme à Bagnolet (Seine-Saint-Denis). Mais avant, combien de fois j'ai eu droit au "T'as de la chance que ça se soit bien passé !" »

Risque de contentieux

Pour Doris Nadel, la sage-femme de Montbazin, ces réflexions reflètent un manque d'informations et de formation. « Neuf médecins sur dix fantasment, lâche-t-elle. La plupart ignorent complètement qu'il existe une charte de l'AAD, que nous ne prenons en charge que des grossesses physiologiques [par opposition à pathologiques, ndlr] et que nous mettons l'accent sur la prévention (le partage des connaissances, un régime alimentaire sain, etc.). De toute façon, les femmes doivent faire une visite en maternité avant d'accoucher. Eux, ils transposent l'AAD aux grossesses pathologiques qu'ils voient. Ils se comportent comme si la grossesse était une maladie. » L'autre argument des soignants contre l'accouchement à domicile est le risque grandissant de contentieux : le recours aux tribunaux, de plus en plus fréquent, effraie tout le corps médical. « Ce n'est pas un frein, relativise Geneviève Govillé. J'avertis les futurs parents à la première rencontre, je leur explique aussi les risques d'hémorragie, l'absence de monitoring.... Puis c'est une relation de confiance qui doit s'installer, des deux côtés. »

Hostilité des confrères et consoeurs, absence d'assurance, horaires suspendus à des naissances imprévisibles... la sage-femme de Bagnolet ne regrette rien. « J'ai l'impression d'être au bon endroit, à la bonne place. » En accompagnant simplement les femmes dans leur accouchement, elle « laisse faire quelque chose de normal ». Elle ajoute : « À l'hôpital, on a toujours les vieux réflexes et on est beaucoup plus tenté de réaliser des gestes techniques. »

Aux Pays-Bas, une habitude

Cette envie de limiter la part des actes médicaux dans la naissance est de plus en plus affirmée dans d'autres pays d'Europe, tels que l'Allemagne, l'Autriche, ou la Grande-Bretagne. Aux Pays-Bas, champions en la matière, le taux d'AAD n'a même jamais chuté en dessous de 30 %. Sans compter les 10 % de Hollandaises qui accouchent en polycliniques, des maternités hospitalières qui ne proposent que des plateaux techniques et laissent rentrer les femmes chez elles vingt-quatre heures après avoir donné naissance.

Là-bas, l'accouchement est abordé autrement : « Si en France, tout accouchement est considéré comme potentiellement risqué, aux Pays-Bas, les femmes, sauf preuve du contraire, sont supposées en bonne santé et censées pouvoir mener à bon terme la grossesse et l'accouchement », affirme Madeleine Akrich dans son rapport De la conception à la naissance : comparaison France/Pays-Bas des réseaux et des pratiques obstétriques, publié en 1995.

Le rôle-clé des sages-femmes

Les Pays-Bas ont toujours encouragé l'AAD, estimant que ce qui peut-être accompli en dehors de l'hôpital doit être perpétué. La clé du système : les sages-femmes. Ce sont elles qui suivent et guident les parturientes, les envoyant à l'hôpital dès le moindre signe alarmant.

Madeleine Akrich a schématisé le parcours d'une grossesse ainsi : « Les femmes enceintes se rendent chez le généraliste, qui les oriente vers un cabinet de sages-femmes s'il existe, ou directement chez une accoucheuse. S'il n'y a pas de cabinet de sages-femmes, il suivra la grossesse et assistera à l'accouchement. » Le suivi est régulier : « Douze à quinze visites de contrôle sont effectuées afin de vérifier que tout est normal et détecter des pathologies à partir de critères explicitement définis. Pour cela, les sages-femmes utilisent la liste d'indication obstétricale "Verloskundige Indicatie List", qui fait l'inventaire d'un certain nombre de maladies ou de troubles divers qui peuvent faire partie du passé médical et obstétrical de la femme enceinte, ou qui sont susceptibles de se déclarer lors de la présente grossesse, lors de l'accouchement ou en post-partum. »

Jacqueline Lavillonière explique : « L'accouchement à domicile est culturel aux Pays-Bas. Du coup, les sages-femmes n'ont pas besoin de prendre en compte l'accompagnement psychologique. Nous, nous avons dû créer un accompagnement global de la maternité qui nous sert également à nous protéger dans un climat difficile », confie Jacqueline Lavillonière.

Mortalité comparable

Le choix de la société hollandaise reste unique dans le monde occidental : l'Angleterre et l'Allemagne notamment, ont opté pour des structures intermédiaires entre domicile et hôpital, où moins de 10 % des accouchements se font sans aucun acte médical. Mais il est intéressant de noter que malgré un nombre particulièrement élevé d'AAD, les Pays-Bas affichent des taux de mortalité infantile et maternelle du même ordre que ceux des autres pays occidentaux. Si on compare avec la France, les taux de mortalité infantile est identique (4 pour 1 000 en 2000 selon l'Organisation mondiale de la santé(2)), et celui de mortalité maternelle est même meilleur (15 pour 1 000 contre 17 pour 1 000 selon l'OMS). Ces données sont les seules de ce type disponibles pour la France, car aucune comparaison n'a pu être réalisée dans l'Hexagone entre les risques de l'accouchement à domicile et ceux de la naissance en maternité : le nombre de candidates à l'AAD est trop petit.

Des recherches ont été conduites dans d'autres pays occidentaux. Cathy-Anne Pireyn-Piette, dans son mémoire réalisé à l'école de sages-femmes de Strasbourg en 2005 (Accouchement à domicile : risque ou modèle ?) reprend ainsi cinq études (réalisées au Royaume-Uni, au Danemark, au Canada, aux Pays-Bas et en Suisse entre 1997 et 2004) comparant des accouchements à domicile et des accouchements en milieu hospitalier de femmes à bas risque. Sa conclusion : « Après analyse, rien ne prouve que l'AAD soit plus dangereux que l'accouchement en milieu hospitalier. De plus, cette alternative permet une réduction de la morbidité maternelle et des interventions médicales tout en améliorant la satisfaction des femmes. »

Moins de chirurgie

De fait, les études démontrent que le nombre d'actes chirurgicaux est moins élevé à la maison qu'à l'hôpital. En 2007, la sage-femme Isabelle Messina(3) a comparé des données portant sur 125 primipares de 18 à 39 ans ayant prévu un accouchement à l'hôpital de Bourg-en-Bresse et sur 125 primipares de 20 à 39 ans ayant suivi un accompagnement global pour accoucher à domicile. Les deux groupes montraient un faible risque obstétrical au moment de l'accouchement, avec début de travail spontané à terme, et pronostic d'accouchement favorable.

Résultat : « 92 % des accouchements se faisaient par voie basse à la maison contre 68 % à l'hôpital. La ventouse et le forceps étaient utilisés dans 3 % des cas à la maison, contre respectivement 1 % des cas pour la ventouse et 19 % des cas pour les forceps à l'hôpital. Le taux de césarienne était de 2 % à la maison contre 11 % à l'hôpital. Par ailleurs le taux de périnée intact était de 11 % à l'hôpital contre 37 % à la maison, celui d'épisiotomie s'élevait à 59 % à l'hôpital contre 9 % à la maison. Par contre, le taux de déchirure est plus élevé à la maison. »

Remise en cause

Aujourd'hui, la France fait figure de mauvais élève pour les actes chirurgicaux pratiqués lors de l'accouchement : selon l'OMS, en 2000, le nombre de césariennes était de 18 % contre les 15 % préconisés, et le taux d'épisiotomie de 35 % contre les 20 % recommandés. D'ailleurs, « les critiques concernant le nombre excessif de césariennes commencent à se faire entendre, affirme le Dr Bernard Maria. Le fait que les excès techniques soient remis en cause depuis deux ou trois ans par des associations de patients fait évoluer la profession tout doucement. » Geneviève Govillé, la sage-femme de Bagnolet, confirme : « Les médecins sont plus ouverts depuis quelques années, même si certains se montrent encore très réticents. »

Le retour de l'assurance ?

Même du côté de l'assurance, les choses semblent se débloquer. « Depuis 2006, nous sommes assurées via l'AIAS(4) pour notre responsabilité civile professionnelle dans les cas d'accouchement en plateau technique », affirme Jacqueline Lavillonière. D'ici un an ou deux, les sages-femmes libérales devraient demander à l'assureur d'étendre le contrat à l'accouchement à domicile. « Il ne manque plus qu'un pas », avance la présidente de l'union syndicale.

Quant à la relève, Doris Nadel, sage-femme à Montbazin qui forme des infirmières à l'AAD en compagnonnage, reste optimiste : « On forme des techniciennes supérieures en obstétrique, plus que des sages-femmes. Dans tout ce touche la physiologie, la carence est totale. Cependant, on constate une demande croissante des sages-femmes à être formées à la pratique de l'accouchement à domicile. »

Un nouveau choix

Pour Paul Cesbron, obstétricien et membre de la Société d'histoire de la naissance, l'accouchement à domicile va trouver sa place dans le système de santé français. Son analyse : « La transformation du statut de la femme au XXe siècle est la clé de la naissance. La première étape consistait à choisir avec qui et quand faire un bébé, la seconde est de décider comment le mettre au monde. Le nombre d'associations de parents a augmenté. Positionnés sur des problématiques relatives aux soins apportés aux bébés, ils s'intéressent de plus en plus à l'AAD, le remettant ainsi à l'ordre du jour », explique-t-il. « L'accouchement à domicile est défendu par les classes sociales élevées de la société - enseignants, femmes médecins, personnes cultivées. Or, ce sont elles qui insufflent les tendances. »

1- Ces statistiques concernent les accouchements à domicile ou dans un autre lieu qu'un établissement spécialisé et avec assistance. Mais elles écartent ceux dont les lieux d'accouchement ne sont pas déclarés.

2- Isabelle Messina, Primipares à bas risque obstétrical : comparaison entre l'accouchement médicalisé à l'hôpital et l'accouchement physiologique à domicile, mémoire, 2007.

3- « World Health Statistics 2007 ». Ces données sont en ligne sur le site de l'OMS (http://www.who.int/whosis/whostat2007).

4- Amicale des infirmières et assistantes sociales de la Croix-Rouge.

témoignage

« J'AI SOULAGÉ LES CONTRACTIONS DANS LE BAIN »

Audrey Courtois-Lemoine, 33 ans, ergothérapeuthe, raconte : « À la naissance de ma première fille, Lyne, j'ai réalisé que je n'avais pas pu maîtriser mon accouchement. Avec la péridurale, j'ai perdu des sensations. Et puis la sage-femme a coupé le cordon et attrapé ma fille elle-même. J'ai dû attendre très longtemps avant de la récupérer. Pour Léïa, j'ai décidé d'accoucher sans péridurale. Je désirais maîtriser mon accouchement. J'ai apprécié de faire la moitié du travail à la maison, par contre j'ai eu du mal à gérer le parcours vers l'hôpital, puis les examens et la pose du monitoring.

Alors pour Lucie, ma troisième, j'ai choisi d'accoucher à la maison, avec une sage-femme. La préparation reposait sur la relation au corps. J'ai soulagé les contractions dans le bain puis sur une chaise de cuisine, assise en position asymétrique. Je me laissais aller contre mon mari en soufflant et en me concentrant sur ses paroles réconfortantes. Sa présence m'a beaucoup aidé ! J'ai pu prendre Lucie tout de suite contre moi sans qu'on me tripote. Un superbe moment. »

soins

DES MÉTHODES ALTERNATIVES POUR LA NAISSANCE

Dans les années 1970, Frédérick Leboyer, ancien chef de clinique à la faculté de Paris, s'est rendu célèbre par son livre Pour une naissance sans violence (Seuil). Ses préceptes : limiter au maximum la lumière et les bruits ; effectuer tout geste avec lenteur, au rythme du bébé ; dès la délivrance, poser le nouveau-né à plat ventre sur le ventre de la mère et, très lentement, le tourner de côté puis sur le dos ; attendre la fin des battements du cordon pour le sectionner, afin d'alimenter le bébé en oxygène jusqu'à la relève complète des poumons.

De son côté, la méthode Bonapace (du nom de la Québécoise Julie Bonapace, maître en éducation et médiatrice familiale), propose des outils basés sur la compréhension du mécanisme de la douleur et la modulation de sa perception. Les plus connus : le massage des zones douloureuses par effleurement entre les contractions, afin de bloquer dans la moelle une partie du message douloureux ; la création d'un second point de douleur pour que le corps secrète de l'endorphine, un opiacé naturel. Ainsi, à l'accouchement, des massages sont pratiqués dans des zones sensibles qui correspondent souvent aux points connus en acupuncture.

institutions

DES MAISONS DE NAISSANCE ENCORE EN GESTATION

Une maison de naissance est un lieu géré par des sages-femmes, qui prend en charge l'accueil, le suivi de la grossesse et l'accouchement, tant qu'il n'est pas pathologique. Ces maisons existent au Canada, aux États-Unis, en Suisse, en Allemagne ou en Autriche. En France, des associations de familles et des sages-femmes les réclament depuis 1970. Mais dix ans après l'avis favorable de Bernard Kouchner (alors secrétaire d'État à la Santé), aucune n'a vu le jour. Aujourd'hui, des projets fleurissent partout en France et le plan de périnatalité 2005-2007 prévoit leur expérimentation. Un groupe pluri-professionnel a été mis en place par la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) pour établir un cahier des charges et un cadre réglementaire. Or, les points de vue divergent : la DHOS exige la présence des maisons près des maternités (écartant toute idée de gestion autonome) ainsi que deux sages-femmes par accouchement et un pédiatre dans la maison de naissance. Des conditions dénoncées par le Ciane(1), collectif de professionnels de la périnatalité, et l'Unaf(2). Pour l'heure, la discussion est bloquée.

1 - Collectif interassociatif autour de la naissance.

2 - Union nationale des associations familiales.

En savoir plus

> Au coeur de la Naissance, éditions Remue-Ménage, Lysane Grégoire et Stéphanie Saint-Amant (dir.), 2004. 31,95 euros à la Librairie du Québec, 30, rue Gay-Lussac, Paris (Ve).

> Thèse de Christiane Jeanvoine, sage-femme et docteur en médecine : Analyse d'une pratique d'accompagnement médical de la maternité physiologique vers les maisons de naissance, 2003.

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