Dépister les troubles mentaux chez l'enfant - L'Infirmière Magazine n° 233 du 01/12/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 233 du 01/12/2007

 

pédiatrie

Conduites à tenir

Les signes de souffrance psychique chez l'enfant peuvent laisser craindre des troubles cognitifs et d'apprentissage, aux conséquences graves. Il faut savoir les repérer.

ÉPIDÉMIOLOGIE

Les rapports de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sont alarmants pour la prochaine décennie : l'ensemble des maladies mentales devrait augmenter de 50 % d'ici 2020 et représenter la cinquième cause de morbidité infantile dans le monde.

La France ne fait pas figure d'exception : 12 % des jeunes de moins de 18 ans sont touchés par un ou plusieurs troubles psychiatriques (1). Selon le sexe et l'âge, ces troubles s'expriment différemment, avec des vulnérabilités plus marquées à certaines périodes de l'enfance et de l'adolescence. Les mécanismes par lesquels ces affections apparaissent suscitent encore de nombreuses interrogations.

LES TROUBLES MENTAUX

Malgré le constat d'un diagnostic trop tardif quelle que soit la pathologie, les troubles restent difficiles à reconnaître du fait de l'évolution constante du développement psychocognitif de l'enfant dans ses premières années. Certains symptômes définissent des critères d'aide à la classification, qui évoluent au fur à mesure des connaissances et des études.

L'autisme infantile. L'enfant souffre d'une perturbation du développement qui affecte la communication, la relation sociale émergente, avec un repli sur soi et une indifférence progressive aux personnes qui l'entourent. Les troubles sont repérables dès 1 an, mais c'est plus souvent l'absence de langage et le désintérêt aux autres qui évoquent un développement anormal vers l'âge de 30 mois. Ces symptômes doivent conduire à orienter l'enfant et sa famille vers des centres de diagnostic pour effectuer un bilan complet. Cela peut amener l'enfant à bénéficier d'une prise en charge éducative avant l'âge de 4 ans, garante des résultats les meilleurs.

Le trouble de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDHA). Ce syndrome neurocomportemental regroupe trois signes qui ne sont pas spécifiques de l'affection s'ils se situent de façon isolée ou inconstante. L'inattention, l'impulsivité et l'agitation incessante doivent être repérées de façon prolongée dans chaque espace de vie (maison, école, loisirs...). L'entrée à l'école primaire, avec les difficultés d'apprentissage liées à ces troubles, pousse à poser le diagnostic, alors que le repérage de certains signes d'appel en structure d'accueil ou à la maternelle permettrait d'entamer un traitement pour réduire les symptômes. L'exploration retrouve dans 50 à 70 % des cas d'autres troubles mentaux associés.

Les troubles obsessionnels compulsifs (TOC). La moitié des cas de TOC apparaissent dans l'enfance, à l'entrée en primaire et vers la prépuberté : certaines obsessions s'emparent du mental et perturbent alors le cours des pensées. Les quatre obsessions principales observées chez les enfants sont la crainte de la contamination, la peur des blessures et de la mort, l'obsession des nombres et l'intensité marquée des scrupules. L'enfant met alors en place des stratagèmes répétitifs - les compulsions - afin d'essayer de se prémunir et de calmer l'anxiété provoquée. Ces TOC sont à distinguer des rituels de l'enfance, fréquents à cette période. Ils sont associés dans deux tiers des cas à d'autres désordres mentaux.

Les troubles anxieux. Ils recouvrent différents symptômes d'anxiété majeure (hyperanxiété, « trouble panique », stress post-traumatique) qui laissent l'enfant démuni, en proie à une détresse intense. Les conséquences en sont des troubles du sommeil, des symptômes d'agitation et d'hypervigilance, des accès de colère et parfois de l'auto-agressivité. Ces manifestations amènent trop rarement à consulter. C'est lors de complications plus graves (échec scolaire, dépression, tentative de suicide) que le diagnostic est le plus souvent posé.

Les troubles du comportement alimentaire (TCA). C'est à l'âge de la puberté, période fragile où l'image du corps est difficile à appréhender au cours de son évolution, que se révèlent ces troubles, souvent reconnus tardivement par l'entourage. Les signes d'appel sont une préoccupation excessive de l'image du corps avec une perte d'estime de soi et une fixation sur l'alimentation qui conduit à un comportement anorexique ou boulimique.

La schizophrénie. Cette psychose débute très rarement dans l'enfance. Les troubles apparaissent au moment du passage à la vie adulte et les signes précurseurs ne sont pas assez spécifiques pour orienter vers une prise en charge précoce.

SENSIBILISER AU DÉPISTAGE

Les professionnels en contact régulier avec les enfants doivent être sensibilisés au repérage de ces signes d'alerte. C'est grâce à l'observation fine du développement psycho-sensori-moteur et cognitif de l'enfant dans son environnement, ainsi qu'à l'attention portée à l'acquisition du langage et au comportement émotionnel que le dépistage des troubles mentaux sera plus précoce. La souffrance psychique exprimée par l'enfant, et l'aide à apporter à sa famille dans sa prise en charge, appellent à cette vigilance.

1- Source : Inserm, Troubles mentaux : dépistage et prévention chez l'enfant et l'adolescent, expertise collective de décembre 2002.

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