Un embryon d'avancée - L'Infirmière Magazine n° 233 du 01/12/2007 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 233 du 01/12/2007

 

Mères porteuses

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Un couple qui avait eu recours à une mère porteuse a obtenu une reconnaissance. Le parquet a formé un pourvoi en cassation.

Une victoire pour les militants de la « gestation pour autrui » : fin octobre, la cour d'appel de Paris a donné raison à Sylvie et Dominique, un couple de Français qui avait eu recours à une mère porteuse pour donner naissance à deux jumelles, en 2000 dans l'État de Californie.

« intérêt de l'enfant »

En France, la « gestation pour autrui » est interdite depuis 1994. L'article 16-7 du Code civil ne souffre aucune ambiguïté : « Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui est nulle. » Conséquence : depuis sept ans, la justice française refusait d'inscrire à l'état civil les jumelles, nées en territoire américain. Pour justifier sa décision de reconnaître finalement la filiation, la cour d'appel de Paris a avancé « l'intérêt des enfants ».

« Cette décision correspond à l'esprit des avis rendus par le Comité consultatif national d'éthique », se félicite Claude Sureau, membre de l'instance. Dans son avis n°90, portant sur l'accès aux origines, l'anonymat et le secret de la filiation, le CCNE appelait aussi à prendre en compte l'intérêt de l'enfant.

La question de la « gestation pour autrui » s'était déjà posée à la justice française en 1991. Claude Sureau était alors le gynécologue d'une mère porteuse à qui la Cour de cassation avait donné tort. « Trois ans plus tard, en 1994, la loi de bioéthique a interdit cette pratique. » Révisée en 2004, la loi ne revient pas sur l'interdiction. Mais le texte doit à nouveau être discuté en 2009, et dans cette perspective, l'association Maia, qui milite pour les droits des couples stériles, a entamé une campagne de lobbying intensif pour peser sur la réflexion.

La prudence reste de mise : l'arrêt de la cour d'appel ouvre une brèche juridique, mais est suspendu à un pourvoi en cassation, formé le 13 novembre par le procureur général de Paris.

fins mercantiles

Depuis 2004, les législations étrangères ont évolué en la matière : l'Afrique du Sud, l'Argentine, le Brésil, le Canada, la Grèce, Israël, la Russie et certains États américains ont légalisé la pratique. Les Pays-Bas, la Belgique et le Danemark ne l'interdisent pas non plus. L'opinion y semble aussi favorable : « 55 % des Français pensent que le fait qu'une femme en bonne santé prête son corps à un couple pour porter leur enfant est acceptable », rapporte le quotidien Libération(1).

« L'opinion des Français a de l'importance, mais la plupart ne sont pas concernés, nuance Claude Sureau. La question des mères porteuses est très subtile. Quant aux législations étrangères, il faut se méfier : certains pays n'autorisent la gestation pour autrui qu'à des fins mercantiles. On peut comprendre la position restrictive de la France. »

Les lois bioéthiques doivent être révisées tous les cinq ans. « Il faut faire vite, c'est un domaine très mouvant, relève Claude Sureau. Il y a d'une part tous les thèmes liés à la filiation, avec les mères porteuses, les homosexuels et les célibataires. Le législateur devra aussi se pencher sur les questions relatives au don d'organes. Les questions sont nombreuses, et il n'est pas sûr que les réponses soient prêtes pour 2009. »

1- Charlotte Rotman, « Un combat porteur », 3 novembre 2007.

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