Responsabilité conjointe - L'Infirmière Magazine n° 236 du 01/03/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 236 du 01/03/2008

 

Stages

Juridique

En cas de faute suivie d'un dommage pendant un stage obligatoire, une étudiante en soins infirmiers peut être mise en cause... mais aussi l'infirmière qui l'encadre.

Lors de l'accomplissement de ses stages professionnels, l'étudiante infirmière doit se montrer très prudente. En cas de doute, elle doit s'entourer des conseils des infirmières diplômées, voire refuser les actes ou soins qu'elle ne se sent pas capable d'accomplir seule. Surtout, elle doit consigner ses actes, ses doutes ou ses refus par écrit dans le dossier de soins.

pas aide-soignante !

Les contraintes de temps et de personnel, ou même l'orgueil de la stagiaire, peuvent conduire celle-ci à passer outre cette règle de bon sens. L'infirmière encadrante devra alors redoubler de vigilance. Mais il ne faut pas tomber dans l'excès : certaines encadrantes préfèrent jouer la carte de la prudence et ne confier aux stagiaires que des tâches ne relevant pas nécessairement des compétences infirmières, mais plutôt de celles des aides-soignantes.

Ces deux professions sont pourtant nettement distinctes. Certes, les textes relatifs au diplôme d'État d'aide-soignante prévoient que ce DE est délivré, entre autres, aux étudiantes infirmières ayant effectué et validé leur première année, et qui décident d'interrompre leurs études en cours de formation, ou après un échec au diplôme d'État. Mais ce n'est pas le cas de la stagiaire. Et une étudiante inscrite en deuxième ou troisième année d'Ifsi ne saurait prétendre au diplôme d'aide- soignante afin d'exercer la profession parallèlement à la poursuite de ses études en soins infirmiers.

dérogation

L'étudiante d'Ifsi en stage bénéficie d'une dérogation qui lui permet d'exercer sans être encore titulaire du diplôme d'État. Ce cadre juridique implique d'importantes responsabilités : une faute, même légère mais aux conséquences graves parce qu'ayant entraîné le décès d'un patient, peut être constitutive d'homicide involontaire, et conduire à des poursuites devant les tribunaux correctionnels. C'est souvent le cas, notamment lorsque l'étudiante a la compétence technique et professionnelle nécessaire pour suivre les instructions données par l'infirmière diplômée.

Dans les affaires de décès consécutifs à des surdosages de médicaments, les tribunaux retiendront systématiquement la culpabilité de la stagiaire, et elle seule, sur la base du délit d'homicide involontaire lorsque l'étudiante infirmière effectue son stage pratique de troisième année.

comme une cadre

En ce qui concerne l'infirmière référente, ses règles de responsabilité sont à rapprocher de celles du cadre de santé. Après les obligations d'organisation, le contrôle des soins constitue la seconde mission du cadre. En contrôlant l'exécution des soins, le cadre de santé veille à la bonne application des dispositions du décret de compétence. Lorsqu'une infirmière, relevant de son service, commet une faute, un manquement à ses obligations prévues par le décret de compétence, la responsabilité du cadre pourra être engagée si l'infirmière fautive était bien placée sous son autorité.

Ainsi, le cadre de santé qui tolère que les infirmières de son service administrent des médicaments sans prescription écrite, engage lui aussi sa responsabilité. Dans le même sens, la négligence du cadre alors qu'il n'a pas directement participé aux soins à l'origine de la faute peut être source de responsabilité : c'est lui qui a permis la réalisation de la faute. Ce système de double responsabilité est particulièrement lourd.

Les tribunaux n'hésiteront pas, en cas d'homicide involontaire, à retenir la culpabilité de l'étudiante, mais aussi de l'infirmière sous l'autorité de laquelle elle exerçait. Cela vaut notamment lorsque l'étudiante n'avait pas été autorisée à préparer seule certains médicaments - du fait de son manque d'expérience - et que l'infirmière diplômée n'avait pas surveillé son travail. Et si les tribunaux retiennent souvent des circonstances atténuantes en dispensant les infirmières de l'exécution des peines, les condamnations, même symboliques, sont la plupart du temps assorties d'une interdiction à vie d'exercice de la profession.

formateurs d'ifsi

Rappelons que la première responsabilité incombant à l'encadrante sera de refuser la présence d'une stagiaire si elle estime ne pas pouvoir assurer un suivi ou un contrôle suffisant.

Les cadres formateurs des Ifsi doivent quant à eux assurer un suivi pédagogique régulier des étudiants en stage afin de vérifier que les connaissances acquises au cours de leur formation théorique ont bien été acquises. Au titre de leurs responsabilités, ils doivent aussi veiller à ce que les organismes agréés comme terrains de stage disposent des moyens et effectifs nécessaires pour assurer un encadrement efficace des stagiaires.

À RETENIR

> La responsabilité de l'étudiante sera engagée si le soin à l'origine du dommage avait bien été réalisé par elle.

> L'encadrante qui confie à une étudiante l'exécution d'un acte sans s'assurer qu'elle en a bien fait l'apprentissage est pénalement et solidairement responsable, avec l'étudiante.