Doutes sur l'« exemple » - L'Infirmière Magazine n° 237 du 01/04/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 237 du 01/04/2008

 

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Le système néerlandais est décrit comme un modèle par Rachida Dati, mais la rétention de sûreté ne fait pas l'unanimité aux Pays-Bas.

Pyromanes, pédophiles, psychotiques... Aux Pays-Bas, l'obligation de soins dans un hôpital-prison est une mesure que le juge impose depuis les années 1920 aux criminels partiellement irresponsables de leurs actes. Douze centres fermés, nommés TBS (Ter Beschikkingstelling, « mise à disposition ») accueillent environ 1 350 personnes dans le pays. Ils y suivent des thérapies individuelles et collectives. Seule différence avec l'hôpital psychiatrique : de 6 heures du soir à 7 heures du matin, ils sont enfermés dans une cellule derrière des portes électroniquement verrouillées.

centres inadaptés

Le gouvernement s'enorgueillit des résultats de la méthode : 15 % de récidive après un séjour de 6 ans en TBS, contre 50 à 60 % pour les condamnés quittant la prison. La situation du détenu est évaluée tous les deux ans par le psychiatre et transmise au juge, qui prolonge ou non l'internement forcé. Au bout de six ans (durée maximale souhaitée du « traitement »), un groupe d'experts plus large est réuni pour aider le juge dans sa décision. À chaque étape, le malade peut faire appel.

Une solution équilibrée ? La situation n'est pas si simple. Selon un rapport récent, de plus en plus de patients ne sortent pas des TBS, parce qu'ils sont trop malades, ou parce que le risque de récidive est trop important. Ce cas de figure, intitulé longstay (« long séjour »), n'était pas prévu par la loi, et les centres TBS, configurés pour aider les détenus à retourner dans la société, n'y étaient pas adaptés. Mais face à l'explosion du nombre de ces cas, des unités spécialement aménagées pour les accueillir ont ouvert.

abandon des soins

À l'heure actuelle, les malades en longstay seraient 165 environ aux Pays-Bas. Le plus ancien d'entre eux est interné depuis 1960, un enfermement bien plus long que la période de sûreté maximale prévue pour la rétention à perpétuité en France, qui est de 22 ans. « Le problème du longstay, c'est que les patients ne sont plus traités, car les traitements précédents n'ont rien donné, estime le professeur Hjalmar van Marle, psychiatre et expert sur la question. Ces personnes sont enfermées à vie et leur nombre augmente rapidement. Cela n'a plus rien à voir avec leur trouble psychiatrique. »

« Le climat pénal s'est indéniablement durci aux Pays-Bas », s'indigne de son côté le quotidien De Volkskrant. Ces patients « souffrent plus qu'avant de troubles divers et parfois difficiles à soigner, notamment en ce qui concerne les délinquants sexuels, dont on peut se demander s'ils sont de toute façon curables », relève le journal de gauche.

Pour éviter que les droits des détenus ne soient bafoués, la « bonne solution » serait de soumettre la décision de placement en longstay à un juge, « au moins tous les six ans », fait observer Hjalmar van Marle.

choix politique

Dans un rapport, le Conseil pour l'application des peines a sommé le législateur de choisir : diminuer drastiquement le nombre de longstay, ou éliminer ce cas de figure en envoyant les malades dans des hôpitaux. Une idée que la secrétaire d'État à la Justice a déjà exclue, sous la pression des parlementaires et de l'opinion. Priorité, pour elle, à « la sécurité de la société ».