La maladie de Kawasaki - L'Infirmière Magazine n° 237 du 01/04/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 237 du 01/04/2008

 

pédiatrie

Conduites à tenir

Ce syndrome rare touche le jeune enfant avant 5 ans. S'il n'est pas pris en charge à temps, il risque d'évoluer vers des atteintes cardiaques aux séquelles définitives.

CAS CLINIQUE

Mathis, âgé de 18 mois, est adressé par son médecin traitant au service de pédiatrie de l'hôpital pour bilan complémentaire après neuf jours de fièvre élevée cédant mal aux antipyrétiques. Malgré l'antibiothérapie mise en place après un diagnostic de scarlatine, l'enfant présente toujours une adénopathie cervicale avec une inflammation écarlate de la langue et des lèvres, une conjonctive non suppurée et un érythème polymorphe localisé plus intensément sur la paume des mains et la plante des pieds, avec un oedème induré douloureux. Ces données cliniques, ainsi qu'une VS et une CRP très élevées, conduisent à prescrire une échographie cardiaque qui révèle un anévrisme de certaines artères coronaires.

DÉFINITION

La maladie a été décrite pour la première fois au Japon en 1967 par un pédiatre (Tomisaku Kawasaki) qui repéra un syndrome adéno-cutanéo-muqueux chez certains enfants, différent des autres maladies éruptives infantiles. L'étiologie de ce syndrome n'est pas encore clairement élucidée : il semblerait qu'un agent infectieux viral, avec sécrétion de toxines, soit en cause puisque la maladie apparaît par petites épidémies saisonnières. Cependant, la contagion entre individus est exceptionnelle et le déclenchement de l'infection se produirait sur un terrain génétiquement prédisposé au cours d'un processus immunitaire lié à des superantigènes.

Sa gravité réside dans le fait qu'elle provoque une vascularite systémique fébrile, qui atteint préférentiellement les artères coronaires.

ÉPIDÉMIOLOGIE

Rapportée dans le monde entier, la maladie de Kawasaki a une incidence plus grande dans les populations asiatiques, en particulier au Japon, où l'on dénombre 6 000 cas par an, alors que l'incidence se situe aux alentours de 10 cas pour 100 000 enfants aux États-Unis et seulement 5 pour 100 000 enfants en Europe. La dernière enquête rétrospective française fait état de 200 cas par an.

La maladie atteint plus souvent les garçons, entre 6 mois et 5 ans, avec un pic de fréquence vers 18 mois, période où les anticorps maternels transmis diminuent dans l'organisme avant l'acquisition de l'immunité naturelle. Les risques cardiaques sont plus élevés avant l'âge d'un an et plus fréquents si le traitement n'est administré qu'après deux semaines de maladie.

TABLEAU CLINIQUE

Phase aiguë. En phase aiguë, si la forme est complète, elle présente un tableau typique dans lequel on retrouve :

- une fièvre de cinq jours au moins, qui peut durer jusqu'à quinze jours en l'absence de traitement ;

- une conjonctivite bilatérale, non exsudative ;

- un exanthème scarlatiliforme avec une atteinte palmo-plantaire caractéristique, associé à un oedème de la face dorsale des mains et des pieds ;

- un érythème oro-pharyngé présentant une langue rouge « framboisée » et des lèvres gonflées, fissurées aux commissures ;

- une adénopathie cervicale ;

- des céphalées et une altération de l'état général.

Phase subaiguë. Suite à la manifestation de ce contexte fébrile, survient une phase subaiguë de deux à quatre semaines, accompagnée du signe pathognomonique de la maladie : la desquamation de la pulpe des doigts et des orteils à début péri-unguéal.

C'est à ce stade que, si le diagnostic n'a pas été posé pendant la période fébrile et le traitement mis en place, se constituent les lésions cardiaques.

Convalescence. L'évolution triphasique de la maladie conduit à la phase de convalescence, asymptomatique, mais qui doit faire redouter des complications cardiaques subites, dues aux lésions constituées précédemment. Les examens biologiques retrouvent surtout une élévation de la VS et de la CRP, ainsi qu'une hyperleucocytose non spécifique du syndrome inflammatoire.

COMPLICATIONS

L'atteinte cardiaque concerne un quart des cas de l'affection. Il s'agit de péricardites, de myocardiopathies et d'anévrismes coronariens, spécifiques de cette maladie. Ces atteintes peuvent entraîner des troubles du rythme, une insuffisance cardiaque aiguë, voire un infarctus du myocarde. Il semble que toutes les artères soient touchées (mais à différents degrés) par cette vascularite, ce qui provoque des risques de dilatations et de thromboses.

TRAITEMENT

Il réside essentiellement en l'administration, de préférence avant le dixième jour, d'une dose unique élevée d'immunoglobulines polyvalentes en intraveineuse.

Ce traitement est complété par de l'aspirine, à forte dose les quatorze premiers jours, pour son action anti-inflammatoire et antithrombotique, puis à dose plus faible, pendant environ trois mois, jusqu'à normalisation des examens biologiques, en l'absence d'anomalie des coronaires. En cas d'atteinte cardiaque, le traitement par aspirine est maintenu.

SURVEILLANCE ET ÉVOLUTION

Dès le diagnostic, l'hospitalisation s'impose pour évaluer la fièvre, administrer les immunoglobulines et réaliser une échographie cardiaque bidimensionnelle, à la recherche d'anomalies artérielles. Cette échocardiographie est répétée chaque semaine jusqu'à la convalescence. Puis la fréquence de cette surveillance est évaluée en fonction de la régression des atteintes cardiaques. La majorité des anomalies disparaît dans un délai allant de six mois à deux ans.

En ce qui concerne les anévrismes géants, qui persistent, la surveillance cardiaque doit être étroite, étant donné le risque de sténose avec ischémie myocardique.

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