Les maladies chroniques et les voyages - L'Infirmière Magazine n° 237 du 01/04/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 237 du 01/04/2008

 

santé publique

Cours

être atteint de diabète, d'insuffisance rénale ou encore de troubles respiratoires n'empêche pas forcément de voyager. Néanmoins, cela suppose de prendre des précautions pour pouvoir, par exemple, transporter les médicaments, ou s'assurer que le traitement pourra être correctement suivi sur place. Aider les patients à ne rien oublier fait partie du rôle infirmier.

« Et si j'ai une crise pendant le séjour ? », « Dois-je conserver mes médicaments dans des conditions particulières ? », « Comment adapter la prise de mon traitement en fonction du décalage horaire ? », « Vais-je pouvoir emporter mes seringues... et mon insuline ? » Pour les asthmatiques, allergiques, diabétiques, insuffisants cardiaques ou coronariens, épileptiques ou encore insuffisants respiratoires, envisager de voyager ne se résume pas à fixer une date, une destination et à faire ses valises... Exposés aux mêmes mésaventures que les sujets en bonne santé (mal des transports, troubles digestifs, mauvais coups de soleil...), les malades chroniques doivent, en plus, tenir compte des soins et des risques de complications inhérents à leur maladie. Il est donc important que les infirmières maîtrisent bien ce sujet : elles pourront ainsi apporter les conseils et les informations éclairées dont ils ont besoin pour partir en voyage l'esprit libre et en toute sécurité.

« En fait, explique le Pr Éric Caumes, exerçant au service des maladies infectieuses et tropicales de La Pitié-Salpêtrière (Paris), il n'y a pas de contre-indications formelles au voyage, si ce n'est celles qui sont liées aux voyages aériens, en particulier pour les insuffisants cardiaques et respiratoires. En dehors de cette restriction, et des précautions et consignes propres à chaque maladie, il existe deux messages-clés, communs à tous les patients atteints de maladies chroniques souhaitant voyager : il faut que le malade soit stabilisé avant le départ et que le voyage soit adapté à la maladie. » Au-delà de ces grands principes, les recommandations et conseils pratiques sont à personnaliser en fonction de la maladie.

ASTHME ET ALLERGIES

Destination. Pour les asthmatiques, les voyages sont déconseillés dans les jours qui suivent une crise d'asthme sévère et, d'une manière générale, en cas d'asthme très instable ou persistant sévère. Lorsque l'asthme est équilibré, voyager est envisageable à condition d'adapter la destination, le style de vacances et l'hébergement [lire l'encadré p. IV] à la maladie et aux capacités physiques du patient. Ainsi, les sujets sensibles aux pollens et aux animaux doivent éviter les séjours à la ferme et à la campagne en saison pollinique ou en période de moissons.

Si la stabilité de l'asthme est précaire, les séjours en haute montagne (plus de 2 500 mètres) doivent faire l'objet d'un avis médical car à cette altitude, la concentration d'oxygène dans l'air peut baisser de manière importante et avoir un retentissement sur l'état respiratoire du patient. De même, le vent froid, l'humidité et les tempêtes de neige peuvent aggraver l'état respiratoire des asthmatiques, qui doivent s'assurer des conditions météorologiques pour envisager des randonnées ou la pratique du ski en hiver. Pour autant, la montagne à basse et moyenne altitude reste, en hiver comme en été, un lieu privilégié de séjour pour les asthmatiques. Elle est d'autant plus conseillée qu'à partir de 1 500 mètres, les acariens se raréfient. Quant aux bords de mer, ils ne posent pas de problème, à condition de rester à l'abri en cas de canicule et par grands vents. Les rivages méditerranéens et de la côte atlantique, entre autres, sont généralement mieux tolérés que ceux de la Manche ou de la mer du Nord, car ils sont plus chauds.

Traitement. Les consignes en matière de médicaments sont simples :

- Emporter les médicaments habituels (traitement de fond et traitement d'urgence en cas de crise) en quantité suffisante. Le traitement de fond doit être d'autant plus scrupuleux que les vacances représentent un moment privilégié pour se lancer dans de nouvelles activités (sportives notamment) (1). De plus, il est toujours plus difficile en vacances d'écarter ou de maîtriser tous les facteurs de risque (visites de châteaux, de grottes, de zoos, spectacles de cirque, tabagisme passif...).

- Emporter l'ordonnance et l'emballage ou la notice de chaque médicament (surtout à l'étranger).

Trajet. Pour le trajet, attention aux aérations, ventilations, climatisations et aux diffuseurs de déodorant, parfois mal tolérés par les asthmatiques.

Précautions particulières :

- En cas de voyage aérien, conserver les aérosols doseurs dans un bagage à main. Selon les avions, une dépressurisation de la soute peut les vider.

- Se renseigner sur le voltage du lieu d'accueil et prévoir un adaptateur de prise électrique en cas d'utilisation d'un nébulisateur.

- Se renseigner sur les possibilités locales d'accès aux soins (voir les guides de la Sécurité sociale).

DIABÈTE

Par définition, les vacances sont synonymes de laisser-aller. Repas décalés, rythme de vie modifié, activités physiques débridées ou au contraire farniente intégral... rendent cette période propice au déséquilibre du diabète. Cela concerne tout particulièrement les jeunes diabétiques n'ayant pas encore acquis et intégré toutes les bonnes pratiques, ni expérimenté toutes les situations à risque. Si la destination n'est pas un problème en soi (à l'exception des trajets en avion pour les diabétiques de type 1, cf. conduite à tenir, p. X), les excès en tous genres imposent, plus que jamais, de tout prévoir et d'anticiper l'imprévu... Cela évite de voir ses vacances gâchées par des complications aiguës : hypoglycémie sévère ou acidocétose.

Précautions particulières :

- Consulter son médecin quatre à six semaines avant le départ, surtout dans la perspective d'un long voyage afin d'envisager, en cas d'équilibre insuffisant, un éventuel changement du schéma thérapeutique. « Celui-ci peut se faire au profit d'un schéma basal-bolus par injection d'insuline de longue durée d'action (Lantus ® ou Lemivir ®) et d'analogues ultrarapides qui présentent de nombreux avantages en voyage, indique le professeur Gérard Reach (2). Un tel changement se prépare, et c'est une des raisons pour lesquelles cette consultation doit avoir lieu bien avant le départ. »

- Avoir toujours à portée de main son matériel d'autosurveillance et d'injection, son traitement, ainsi qu'une collation riche en hydrates de carbone (biscottes, fruits secs), du sucre ou une boisson sucrée.

- Ne jamais pratiquer une activité physique à jeun (risque d'hypoglycémie) ou lorsque la glycémie est élevée (risque d'acidocétose).

- Vérifier sa glycémie régulièrement avant, voire pendant et surtout après l'effort (en cas d'exercice intense et prolongé), car une hypoglycémie peut survenir à distance de l'effort. Penser à adapter son alimentation et son traitement en fonction du type d'effort : par exemple endurant (longue randonnée) ou violent (match de tennis).

- Surveiller soigneusement ses pieds [lire l'encadré à droite].

Traitement :

- Emporter un conditionnement isotherme pour garder l'insuline à l'abri de la chaleur (elle doit être conservée à une température inférieure à 25° C).

- Avoir avec soi une ordonnance détaillée en cas de perte ou de vol des bagages.

- Prévoir les vaccinations en fonction de la destination (le diabète n'est pas une contre- indication aux vaccinations) et, si nécessaire, une prévention du paludisme.

Remarques. Il existe des cartes de diabétique permettant aux secouristes d'identifier très vite la cause possible du malaise (hypoglycémie par exemple). Elles sont disponibles auprès des antennes locales de l'Association française des diabétiques (AFD) (3).

Pour un diabétique, la règle d'or en toutes circonstances, y compris pendant les vacances, est l'équilibre glycémique. Il est donc important d'insister auprès des patients sur la consultation préparatoire au voyage, qui permet d'approfondir au cas par cas ses connaissances en matière de traitement et de prévention des complications. Les associations locales sont également disponibles pour répondre à toutes les questions sur ce sujet. Des ressources dont les diabétiques peuvent user et abuser !

INSUFFISANCE RÉNALE SÉVÈRE

Trouver un centre. Les insuffisants rénaux dialysés sont assujettis à un traitement chronique plurihebdomadaire (deux à trois fois par semaine), indispensable à leur survie. Autant dire que cela pose des problèmes d'organisation lorsque ces malades souhaitent partir en vacances. Or, voyager contribue au maintien de leur qualité de vie. C'est ce qui explique qu'ils prennent parfois des décisions hâtives, voire irréfléchies.

« Très souvent, les patients dialysés déterminent leur destination, réservent leur voyage et leur séjour, et ne cherchent qu'ensuite un centre de dialyse... ce qui peut occasionner des déconvenues, en particulier lorsqu'il faut annuler les réservations faute d'avoir trouvé à proximité un centre pour les accueillir, indique Anne Stinat, chargée de la réservation des traitements de dialyse-vacances à l'association International Dialysis Organisation (IDO) et chargée de mission Ceapir (4) à la Fédération nationale d'aide aux insuffisants rénaux (Fnair). Or, il est évident que le prérequis pour ces malades consiste à trouver d'abord le centre de traitement, à réserver préalablement les séances de dialyse et à chercher ensuite un hébergement à proximité pour éviter les trajets fatigants et chronophages, qui ont un impact négatif sur la qualité et la durée du séjour. »

Assurance. Bien entendu, les patients dialysés peuvent mettre au point leur voyage eux-mêmes, à condition de respecter ce principe et d'élaborer ce projet en liaison avec leur néphrologue, qui enverra le dossier médical au centre de dialyse choisi pour assurer les soins pendant les vacances. « Dans ce cas, précise Anne Stinat, il est utile de leur conseiller de prendre une assurance couvrant le risque lié à l'insuffisance rénale avant le départ et pendant le séjour » [lire l'encadré p. VI]. Mais cette mesure s'ajoute aux contraintes liées à l'organisation du voyage et peut être dissuasive pour beaucoup d'insuffisants rénaux dialysés.

De même, le décret de septembre 2002, basé sur le principe de « plus de sécurité », est très contraignant pour les patients habituellement traités dans des centres « lourds » (assistance permanente d'une équipe médicale), car il leur impose d'être pris en charge dans les mêmes conditions sur leur lieu de villégiature. Cette disposition ne leur permet donc pas d'accéder aux unités d'autodialyse. Cela pose un réel problème, en particulier, pour certains patients qui sont suivis en centre lourd par simple manque de place dans les centres d'autodialyse situés à proximité de leur domicile.

Quelques pistes. « Face à ce problème, ajoute Anne Stinat, la Fnair et l'IDO ont mené une action auprès des unités d'autodialyse afin qu'elles acceptent de prendre en charge les patients habituellement suivis en centre lourd. Et ceci sur présentation d'un certificat médical de leur médecin autorisant l'autodialyse pendant la durée de leurs vacances. » Parallèlement, une action est conduite depuis quelques années auprès du ministère pour assouplir le décret de 2002 dans ce sens.

Pour les amateurs de voyages en mer, l'organisme Pons Voyages propose des croisières avec dialyse à bord, garantissant une sécurité totale aux patients. Outre leur coût, le remboursement des soins par la Sécurité sociale peut poser problème : se renseigner préalablement sur les modalités de prise en charge auprès de sa CPAM. De même, la souscription d'une assurance complémentaire est vivement conseillée à la commande du voyage pour prévenir les impondérables (incapacité temporaire empêchant le départ, rapatriement en urgence en cas de greffe par exemple).

INSUFFISANCE RESPIRATOIRE SÉVÈRE

Accès aux transports. Voyager, lorsqu'on est insuffisant respiratoire, devient un problème à partir du moment où la maladie requiert une assistance respiratoire et un appareillage d'oxygénothérapie. Ce problème peut être résolu dans les transports terrestres grâce à la miniaturisation du matériel (petite bouteille d'oxygène gazeux, dispositif portable d'oxygène liquide, concentrateur portable (5)).

En revanche, dès qu'il s'agit de prendre l'avion, les choses se corsent. « Bien qu'il existe un décret selon lequel "toute personne insuffisante respiratoire doit pouvoir emprunter les transports publics avec la quantité de gaz nécessaire à son déplacement", l'accès aux transports aériens reste très difficile », déplore Jean-Claude Roussel, président de la Fédération française des associations et amicales de malades insuffisants ou handicapés respiratoires (FFAAIR).

En effet, un autre décret, ne faisant pas la différence entre le transport de grosses quantités d'oxygène et le transport individuel, indique que « l'oxygène médical fait partie des gaz dangereux au niveau des transports ». En outre, même si certaines compagnies indiquent que les patients peuvent voyager avec leur matériel, le malade ne peut pas accéder à l'avion car ce matériel ne passe pas les postes de sécurité (il doit être vidé et mis en soute).

Dispositifs pour l'oxygène. Certaines compagnies proposent de louer pour environ 100 euros (non pris en charge par la Sécurité sociale), un kit d'oxygène qui permet au patient, une fois monté dans l'avion, de disposer de son traitement durant le voyage. Ce dispositif oblige souvent le patient à payer deux places, une pour lui et une pour le matériel. Qui plus est, à l'arrivée, un prestataire de services doit assurer le remplissage du matériel personnel.

La FFAAIR, associée à d'autres partenaires, négocie depuis quelques années avec la délégation interministérielle pour que les patients puissent voyager avec des concentrateurs portables fabriquant de l'oxygène au fur et à mesure de la demande, et fonctionnant sur batterie sèche avec une quantité de lithium acceptée dans les transports aériens. Cela faciliterait le passage des postes de filtrage, l'accès à l'avion, le voyage (l'appareil branché peut être glissé sous le siège durant le vol) et l'arrivée à destination.

« Ce type d'appareil est déjà autorisé par les compagnies aériennes américaines, confirme Jean-Claude Roussel. C'est la raison pour laquelle nous militons depuis plusieurs années pour la reconnaissance de ce matériel par toutes les instances concernées (6). »

Aide pratique. La FFAAIR propose une procédure (photos, descriptif détaillé) pour permettre aux postes de sécurité de contrôler la conformité du matériel. Parallèlement, elle négocie avec la Sécurité sociale pour que ce matériel soit pris en charge dans le cadre des forfaits versés aux prestataires sur prescription médicale.

Ce combat pour l'amélioration de la qualité de vie des patients et la continuité des soins sans surcoût discriminant pour ces malades est soutenu par la conférence de consensus de la Société de pneumologie de langue française (SPLF). L'enjeu est de taille, puisqu'il concerne environ 320 000 personnes prises en charge en ALD (affection de longue durée) pour une insuffisance respiratoire. Pour ces patients, tout projet de voyage doit être envisagé en concertation avec le pneumologue. Si le feu vert est donné, la FFAAIR peut apporter une aide pratique et des conseils pour l'organisation du voyage. Dans tous les cas, il convient de contacter la compagnie aérienne avant de prendre le billet pour préparer le transport au départ et à l'arrivée dans les deux sens. Le prestataire est également un des acteurs à ne pas négliger pour bien préparer le départ. Enfin, il est bon de savoir que la FFAAIR organise elle-même des séjours- vacances (17 en 2008) qui permettent aux malades de partir sans inquiétude.

ÉPILEPSIE

L'épilepsie, lorsqu'elle est bien contrôlée, n'est contre-indiquée pour aucun voyage. « Le premier conseil que l'on peut donner à ces patients, c'est de ne pas se priver de voyager, indique le Dr Bertrand Bazin, neurologue à Rambouillet (Yvelines). Pour autant, il est important que les crises soient contrôlées par un traitement correctement observé et que le voyage soit bien préparé. Car si les moyens de transports ne sont pas épileptogènes en soi, en revanche, la fatigue, le manque de sommeil et le stress engendrés par les transports sont des facteurs qui favorisent la survenue des crises. » Il est donc important de bien organiser le voyage en ménageant des pauses, voire des étapes pour récupérer.

Décalage horaire. Le principe à retenir est de se caler sur l'heure d'arrivée. Par exemple, en cas d'arrivée à 3 heures de l'après-midi, le patient doit attendre le soir (heure locale) pour prendre normalement son traitement. « Si cela entraîne deux prises rapprochées ou deux prises éloignées, ce n'est pas important, insiste le neurologue. Cette règle présente l'avantage d'être facile à retenir pour le patient, car il pourra se baser sur l'heure et le rythme de vie de la destination, même en cas de décalage très important. »

Précautions :

- Prendre rigoureusement son traitement. Le relâchement lié aux vacances ne doit pas retentir sur la prise des médicaments (l'abstention est le plus grand facteur déclenchant des crises, insiste le Dr Bazin).

- Prévoir le nombre de médicaments nécessaires, plus une marge (retour retardé par exemple).

- Avoir, en plus de son traitement de fond, des benzodiazépines en gouttes ou comprimés (Valium®, Urbanyl®) que l'on peut prendre en cas de crise. Ces molécules, dont l'action est rapide, ont pour intérêt de prévenir la survenue d'une récidive car la succession de crises peut présenter un danger pour un épileptique (état de mal).

- Avoir son traitement avec soi et l'ordonnance comprenant tous les médicaments nécessaires, avec leur dénomination internationale (DCI) et les posologies en milligrammes.

- Idéalement, le patient peut emporter une synthèse de son dossier médical de façon à permettre, en cas d'hospitalisation d'urgence, une prise en charge plus rapide.

- Prévoir les vaccinations en fonction des pays visités. Il n'existe aucune contre-indication à la vaccination. En revanche, en cas de séroprophylaxie antipaludéenne, il est nécessaire de s'assurer qu'il n'existe pas de risque d'inactivation de l'antipaludéen par le traitement antiépileptique. Dans ce cas, envisager une autre molécule.

- Savoir qu'en cas de crise en vol, les personnels navigants commerciaux ont suivi une formation qui leur permet de gérer cette situation. Si l'état du patient le justifie, un déroutement peut le cas échéant être envisagé sans répercussion financière pour le patient, indique la DGAC. De même, les patients épileptiques n'ont aucune obligation de prévenir le personnel de bord.

- Rappeler que le manque de sommeil ou l'abus d'alcool, souvent moins contrôlés en vacances, doivent être aussi limités que possible.

- Ne pas conduire si les crises ne sont pas contrôlées. Les épileptiques ne peuvent prendre le volant que s'ils ont une autorisation de la commission du permis de conduire. Celle-ci est délivrée si les personnes ont un électroencéphalogramme normal et ne font pas de crise sous traitement au moins pendant une certaine durée, précisée par la commission.

MALADIES CORONAIRES

En cas de maladie coronaire aiguë (infarctus du myocarde, syndrome coronaire aigu ou angors instables tels que : angine de poitrine, douleur au repos, douleur au repos prolongé de plus d'un quart d'heure) les voyages sont formellement contre-indiqués, quel que soit le moyen de transport. Il faut traiter la maladie en urgence.

Pour les patients coronariens chroniques, bien stabilisés depuis au moins un mois (électrocardiogramme de repos normal, ECG d'effort satisfaisant) le voyage est possible à condition d'observer rigoureusement le traitement protecteur. Si les examens donnent des signes d'instabilité, il convient de différer le voyage et de réaliser un bilan complémentaire. Ce bilan est d'autant plus important que le patient présente des facteurs de risque (âge avancé, tabagisme, diabète, sédentarité, HTA...).

« Avec l'efficacité des traitements préventifs (7) et curatifs (stent, pontages) actuels, les patients coronariens peuvent avoir une vie normale et voyager dans plus de 90 % des cas, indique le Pr Beaune, chef du service de cardiologie de l'hôpital cardiologique de Lyon et président de la Fédération française de cardiologie. Bien entendu, ils doivent associer à ces traitements une bonne hygiène de vie (alimentation équilibrée, exercice physique, arrêt du tabac notamment (8) et prendre des précautions particulières. »

Choix de la destination. Il faut tenir compte du fait que la température extérieure et l'altitude sont les principaux ennemis de l'insuffisance coronaire. Le froid provoque une vasoconstriction qui rend plus difficile l'irrigation périphérique des artères du coeur et majore l'effort cardiaque. Le coeur, moins bien oxygéné, souffre. Le même effet se produit du fait de la raréfaction de l'oxygène au dessus de 1 500 mètres d'altitude. À l'inverse, la chaleur produit une vasodilatation qui fait baisser la tension.

Si les coronaires sont endommagées (lumière réduite), cela entraîne une diminution du débit coronaire, une moins bonne oxygénation du coeur et une souffrance cardiaque. En conséquence, en fonction de la gravité de la maladie coronaire, les patients doivent se méfier et choisir une destination qui permette de se protéger des grands froids, des fortes chaleurs et de l'altitude.

Moyens de transport et organisation du voyage. Lorsque la maladie est stabilisée, il n'y a pas de contre-indication particulière à voyager par voie aérienne, car les avions sont en général soumis à une pression d'oxygène équivalente à celle que l'on rencontre à 1 500 mètres d'altitude. D'une manière générale, il est préférable que le patient coronarien se prémunisse contre un excès de fatigue brutal. Il doit ainsi éviter les heures d'affluence, les horaires extrêmes (très tard le soir ou très tôt le matin), les bagages lourds et les files d'attente. Les patients porteurs d'un pacemaker doivent se signaler car le passage sous les portiques de sécurité peut déprogrammer ce matériel.

En cas de voyage lointain, les coronariens sous anticoagulants peuvent facilement faire face à un décalage horaire de six à huit heures (Antilles, États-Unis, etc.). « Ce traitement étant généralement prescrit le soir, je conseille aux patients de se caler sur la destination et de prendre leur traitement le soir du jour d'arrivée, poursuit le Pr Beaune. En cas de décalage plus important (douze heures) ils doivent rajouter une demi-dose à leur posologie habituelle. Quant au contrôle d'INR (International Normalized Ratio), il faut s'adapter en fonction des conditions et du lieu du séjour. Si le voyage dure plus de trois semaines, il est préférable de faire un dosage en tenant compte d'une marge liée aux techniques d'analyse qui diffèrent d'un pays à l'autre. Si le séjour dure entre huit et douze jours et si le patient est bien équilibré, il peut sauter un dosage mais il doit limiter sa consommation de légumes comportant de la vitamine K : tomates, choux, brocolis, etc. »

Pour les patients qui ne sont pas sous anticoagulants au long cours, il peut être nécessaire, notamment en cas de voyage aérien prolongé, de prévoir une injection sous-cutanée préventive d'antithrombotique par HBPM (héparines à bas poids moléculaire) une heure ou deux avant le départ. Le médecin en déterminera les modalités. Parallèlement, il peut être utile de rappeler aux patients de marcher régulièrement toutes les heures durant le voyage, de ne pas porter de vêtements serrés et de s'hydrater régulièrement.

Autres conseils :

- Prévoir d'adapter les activités en fonction des capacités physiques et planifier des plages de récupération pour ne pas soumettre l'organisme à des efforts violents ou trop longs.

- Prévoir un tube de trinitrine (antiangoreux) à croquer ou en pulvérisation sublinguale en cas de crise aiguë d'angine de poitrine.

- Emporter un résumé du bilan de santé, voire les derniers examens et derniers résultats sanguins, ainsi que le carnet de surveillance de l'INR et une ordonnance correctement libellée.

INSUFFISANCE CARDIAQUE

Un insuffisant cardiaque à fonction systolique altérée mais stabilisée peut voyager sans problème, à condition qu'il suive son traitement (diurétiques, IEC, bétabloquants) et un régime très peu salé pour éviter l'oedème pulmonaire, entre autres. L'activité physique doit être limitée mais surtout adaptée aux possibilités cardiaques (pas de repos strict).

En revanche, l'insuffisance cardiaque aiguë (insuffisance ventriculaire gauche pouvant entraîner un oedème pulmonaire) est une contre-indication formelle aux voyages.

De même, en cas d'insuffisance ventriculaire droite, plus sévère que l'insuffisance ventriculaire gauche, les voyages sont généralement contre-indiqués. Mais si la personne va bien, est stable et a une capacité fonctionnelle relativement conservée, il est possible de l'autoriser à voyager en prenant des précautions. « En fait, conclut le Pr Beaune, l'objectif du médecin confronté à un malade chronique qui souhaite voyager, c'est de tout mettre en oeuvre pour qu'il puisse faire ce qu'il a envie de faire, en évaluant du mieux possible le rapport bénéfice-risque. Cela participe de manière importante à la qualité de vie des patients et constitue aujourd'hui une réelle préoccupation de tous les acteurs de santé. »

1- La seule contre-indication formelle pour les asthmatiques est la plongée sous-marine.

2- Gérard Reach, « Adapter le schéma thérapeutique en fonction du décalage horaire », Le Concours médical, 12 juin 2007.

3- La liste des associations locales de l'AFD (127 en France) est disponible sur Internet (http://www.afd.asso.fr) ou par téléphone (01 40 09 24 25).

4- Ceapir : Confédération européenne des associations de patients insuffisants rénaux.

5- Les concentrateurs assurent l'extraction de l'oxygène à la demande et son utilisation immédiate sans avoir besoin de stocker l'oxygène dans un conteneur intermédiaire.

6- Aéroports, compagnies aériennes, police de l'air et des frontières, gendarmerie de l'air, sociétés de surveillance, Direction générale de l'aviation civile.

7- Antiagrégants plaquettaires (aspirine ou clopidogrel), statines, bétabloquants, IEC, antihypertenseurs, oméga-3.

8- L'arrêt du tabac est la mesure la plus efficace pour le pronostic futur du coronarien fumeur.

Un logement sans allergies

Les lieux d'hébergement réservent parfois des surprises aux personnes sensibles aux moisissures et aux acariens. Si tout le soin apporté chez soi pour évincer les facteurs de risque ne peut pas être mis en oeuvre dans une location de vacances ou une résidence secondaire, il convient au moins d'aérer longuement les pièces et la literie dès l'arrivée et quotidiennement durant le séjour. Le sujet sensible peut également emporter sa housse de matelas anti-acariens et éviter les couvertures en laine, ainsi que les oreillers en plumes.

Pied diabétique

Le pied du diabétique, particulièrement fragile et mis à l'épreuve par la marche et l'humidité, devra faire l'objet d'une attention particulière tant au niveau du chaussage (prévoir de bonnes chaussures, correctement aérées) qu'en matière d'entretien : sécher rigoureusement les pieds après la baignade, utiliser des chaussettes en coton et des pansements hydrocolloïdes (Compeed® par exemple) pour éviter les ampoules.

Insuffisants rénaux : s'assurer

Les risques liés à l'insuffisance rénale doivent être assurés avant le départ et pendant le séjour pour couvrir un empêchement de dernière minute ou une complication durant le voyage nécessitant un rapatriement, par exemple. Ces risques étant connus d'emblée et associés à une probabilité bien plus importante qu'un risque aléatoire, ils ne sont habituellement pas couverts par les assurances vendues par les agences de voyage. Pour ces malades, il existe l'International Dialysis Organisation (IDO), association créée par le président de la Fnair pour organiser les séjours des patients dialysés. Elle propose des formules « clés en main », en France et à l'étranger, comprenant la réservation des séances de dialyse et les formalités concernant le voyage, l'hébergement et l'assurance. Cette assurance peut également être contractée par les insuffisants rénaux dialysés qui prennent en charge eux-mêmes leur voyage.

Renseignements

> Association Asthme et allergies.

Tél. : 0 800 19 20 21 (appel gratuit). http://www.asthme-allergies.org

> Association française des diabétiques, 88, rue de la Roquette, 75544 Paris cedex 11. Tél. : 01 40 09 24 25. http://www.afd.asso.fr

> Fédération française de cardiologie, 5, rue des Colonnes-du-Trône, 75012 Paris. Tél. : 01 44 90 83 83. http://www.fedecardio.com

> « Cardiaques et voyages », Coeur et santé (revue de la FFC) n° 130, mars-avril 2002.

> Fédération nationale d'aide aux insuffisants rénaux. Tél. : 05 61 62 54 62. fnair@wanadoo.fr http://www.fnair.asso.fr

> International Dialysis Organisation.

Tél. : 04 72 30 12 30. ido2@wanadoo.fr http://www.eurodial.org

> FFAAIR, La Maison du poumon, 66, boulevard Saint-Michel, 75006 Paris. Tél. : 01 55 42 50 40. http://www.ffaair.org

À retenir

> Faire un bilan de la maladie avant le départ : elle doit absolument être stabilisée.

> Vérifier les vaccinations et se mettre à jour avant le départ.

> Se renseigner sur les structures de soins existant sur place.

> Emporter avec soi un compte rendu médical mentionnant les traitements en cours, les contre-indications et les allergies éventuelles, si possible en anglais, ainsi qu'une ordonnance récente portant la dénomination commune internationale (le nom commercial peut varier d'un pays à l'autre) et la posologie en milligrammes.

> Conserver sur soi les médicaments nécessaires à quelques jours de traitement si le voyage s'effectue en avion (retard, perte de bagages...).

> Éviter de voyager seul.

> Ne pas oublier : carte européenne d'assuré, contrat d'assistance, carnet de vaccination, coordonnées de l'ambassade.