Des lits de « sale gueule » - L'Infirmière Magazine n° 241 du 01/09/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 241 du 01/09/2008

 

racisme

Dossier

Le racisme ne s'arrête pas aux portes des hôpitaux, des maisons de retraite et des autres lieux où l'on soigne. En revanche, la parole et la réflexion aident à lui faire barrage.

Infirmier et coordonnateur d'un Ssiad (service de soins infirmiers à domicile), Marc travaille avec vingt aides-soignantes. « Parmi elles, Nadia, née au Maroc, a fait l'objet des propos racistes d'un patient et de son épouse lors de visites à domicile, relate-t-il. Mais on accepte toute l'équipe ou rien. » Ce principe est au coeur des règles de ce Ssiad. La prise en charge a donc été interrompue.

L'homme que Nadia venait soigner est atteint d'hémiplégie. Selon Marc, son absence de maîtrise verbale peut être attribuée à l'atteinte, liée à sa maladie, d'une zone cérébrale faisant office de « filtre régulateur ». Ne pouvant se contrôler, ce patient tenait des propos racistes, grossiers, parfois violents, depuis le début de l'intervention du Ssiad, et s'excusait toujours après. Sa maladie étant connue de l'équipe, ses membres « ne lui en tenaient pas trop rigueur ». Le problème s'est posé lorsque son épouse s'est mise à proférer des injures encore plus outrageantes. Elle ne souffrait, elle, d'aucune maladie particulière.

Cette femme étant éprouvée, avec son mari handicapé et sa mère atteinte de la maladie d'Alzheimer, également chez elle, Marc tient à parler avec elle avant de prendre une décision. « Au domicile du couple, des propos d'une rare violence sont réitérés devant moi », indique Marc. Ce couple avait quitté l'Afrique du Nord lors de la guerre d'Algérie. Aujourd'hui, l'aide-soignante fait l'objet d'insultes de type « bicot ». « Ces gens-là ne sont bons qu'à causer des problèmes ! ajoute l'épouse. Vous savez, je ne suis pas raciste... Nous avons eu des gens comme ça en Algérie et nous les traitions bien. » Elle veut bien recevoir toutes les aides-soignantes, sauf Nadia. « Ma démarche fut inutile, tant cette femme a confirmé, voire amplifié ses propos, conclut-il. J'ai dû procéder à l'arrêt de cette prise en charge, après en avoir informé le médecin traitant et la direction départementale de l'action sanitaire et sociale. M'inquiétant tout de même du devenir de ce patient, j'ai joint un infirmier libéral, qui venait d'être contacté par la famille. Ce patient n'a pas souffert d'interruption des soins. »

Souffrance morale

Gaëlle, « infirmière polyvalente » dans un CHU du sud de la France, décrit une situation similaire survenue dans le service de long séjour. « Une collègue, aide-soignante et noire, s'apprêtait à réaliser un soin de nursing », indique-t-elle. Dialysée trois fois par semaine, la patiente âgée était réputée « difficile » et « n'ayant pas sa langue dans sa poche ». « Cette dame a demandé à l'aide-soignante de "retourner dans son champ de coton" », précise Gaëlle. Elle a décrété que ma collègue "ne la toucherait pas". J'ai vivement repris la patiente. Son expérience personnelle lui ayant certainement prouvé que répondre ne servirait à rien, les mentalités ne changeant pas comme ça, ma collègue est passée à autre chose ! La plus choquée, c'était moi ! »

« C'était moi ou rien »

Un troisième exemple est donné par Lio, infirmière en oncologie. « Dans le service où je travaille la nuit, une de mes patientes ne voulait pas être prise en charge par une femme noire comme moi », indique-t-elle. Sa réponse ne se fit pas attendre : « Écoutez, il n'y a que moi... Si vous préférez rester avec les fesses dans les selles, libre à vous ! » Puis Lio quitte la chambre. « Elle n'avait guère le choix, note l'infirmière. C'était moi ou rien. Cette patiente a donc réfléchi et m'a présenté ses excuses. Elle a bien voulu être changée. Elle est devenue gentille, un peu hypocrite, disant "Merci madame" ou "S'il vous plaît"... mais le mal était fait. »

Au-delà de la souffrance morale de Lio, qui tente tout de même de « prendre du recul » et de considérer qu'elle « est là pour soigner les gens », ces incidents concernent toute l'équipe, car leurs conséquences se répercutent sur le travail des uns et des autres. « Si l'une de nous refusait de retourner dans la chambre pour cette raison, pense Lio, les collègues n'accepteraient pas forcément de prendre le relais pour réaliser le soin, car on ne choisit pas son soignant. »

Sandrine Musso est anthropologue et secrétaire général de l'association Amades (Anthropologie médicale appliquée au développement et à la santé). Elles souligne l'impact que peuvent avoir ces insultes ou des attitudes racistes au travail : « Pour une soignante, il est d'autant plus difficile de faire face à un acte faisant référence à l'origine, à la race ou à l'ethnicité, si aucune reconnaissance du préjudice subi ne peut être mise en oeuvre au sein de son service. »

Les discriminations envers les soignants ne sont pas les seules. « Le racisme de soignants envers les patients, ça existe aussi ! tient à dire Aymé, 30 ans, née en Afrique, venue en France avec ses parents, universitaire et journaliste, à l'âge de sept ans, et IDE depuis 2004. De même, il existe entre soignants, et même entre patients. » Elle cite le reproche de « faire trop d'enfants » visant des femmes étrangères. « Ces propos étaient tenus devant moi, dit-elle, en l'absence de la mère, par une puéricultrice qui s'occupait des jumeaux prématurés d'une femme congolaise. » Cette Africaine avait déjà huit enfants. Trois se trouvaient à la pouponnière pendant les suites de couches. « La puéricultrice lui reprochait de trop enfanter, puis de "placer ses enfants dans les organismes d'État pour se reposer". Elle omettait que trois de ses enfants se trouvaient en pouponnière en raison de son accouchement par césarienne et de ses déplacements quotidiens pour venir voir ses jumeaux. Elle avait demandé que les trois petits soient gardés dix jours de plus le temps de mieux se remettre et de sortir les jumeaux de la néonatalogie. »

Aymé cite aussi le commentaire d'un étudiant en soins infirmiers à propos d'un couple d'immigrés kosovars devenus parents d'un prématuré. Il fulminait : « Ils font plein de gosses et ils ne peuvent pas les assumer ! Ils les mettent dans nos hôpitaux avec les aides sociales que les Français n'ont pas. Ils prétendent à des soins d'un niveau dont ils ne disposent pas chez eux ! » Aymé ne comprend pas que l'on puisse en vouloir à des parents de vouloir sauver leur enfant prématuré...

Manque de soutien

En maison de retraite, les comportements racistes de certains résidents âgés peuvent être décourageants. « La situation était scandaleuse dans les maisons où j'ai travaillé ! » déclare Rannou. Elle cite également le départ d'une ASH marocaine et débutante qui en a « pris plein la figure ». « Comment voulez-vous que ces maisons de retraite trouvent du personnel ? J'ai choisi de travailler dans une association d'aide à domicile, où je ne rencontre aucun racisme. » Face à ce type de situation, des agents originaires du Maghreb ou d'Afrique noire déplorent l'absence de soutien de la direction ou des responsables intermédiaires comme les chefs de cuisine. À l'inverse, des maisons de retraite ont entrepris de valoriser le respect des anciens, très présent dans les cultures des pays d'origine des agents, comme contribution à une démarche de qualité des soins.

« Comme un virus »

Nadia est née d'un père immigré marocain et d'une mère française. « Jusqu'à la fin de mes études, j'ignorais tout du racisme, admet-elle. C'est quand j'ai voulu intégrer le monde du travail que j'ai compris qu'étant maghrébine, je portais une lourde tare aux yeux de beaucoup. » Elle vit mal une réflexion fréquente de collègues : « Toi, ça va encore... Tu ne l'es qu'à moitié et ça ne se voit pas ! Si tu ne le dis pas, on ignore que tu l'es. » Nadia se tait au travail et vit seule cette souffrance. « Mais les personnes qui tiennent ces propos, lâche-t-elle, me donnent l'impression que j'ai une sorte de virus dans le sang. »

« Sale noir », « sale bougnoule », comme toute invective de cet ordre, constituent des insultes racistes. « Ces injures, comme le refus de l'offre de soins, relèvent du dispositif de lutte contre les discriminations », assure Sandrine Musso. « Dans les cas de racisme avérés, la première chose à faire est le recours à la loi, soutient Patrick Fermi, psychologue, ethnologue, référent de la consultation interculturelle du CHS de Cadillac et enseignant à l'université de Bordeaux. La législation française interdit le racisme, qu'il vienne d'un patient ou d'un soignant. » Élisabeth Fernagu, infirmière en oncologie devenue directrice d'une maison-relais, estime elle aussi qu'il faut porter plainte : « La perte des repères et des savoirs est telle que la clinique ne suffit plus. »

Le débat sur l'efficacité de ces démarches n'est cependant pas clos. « Les partisans des recours en justice pensent qu'ils contribuent à rendre visibles des discriminations qui existent mais ne se voient pas », précise Sandrine Musso. D'autres doutent que l'insulte ou l'acte raciste puissent être traités ainsi. « Figure des recherches sur le genre et enseignante américaine à l'université de Berkeley, Judith Butler a travaillé sur les insultes racistes et sexistes. Pour elle, opposer la loi aux agresseurs reste une façon de ne pas régler le problème. Le recours à la punition présume la responsabilité de la personne. » Pour ceux qui pensent comme elle, on ne résout pas la question du racisme en négligeant les facteurs sociaux qui favorisent ces insultes et ces actes.

Cumul des discriminations

Une forte proportion des agents d'un établissement peut être concernée. Dans un hôpital parisien, Marguerite Cognet a montré que, tous groupes professionnels confondus, on dénombrait 23 % d'« immigrants » (1). Parmi eux, 8 % sont nés dans les Dom-Tom et 15 % à l'étranger. Chez les seules aides-soignantes, le taux cumulé atteint 33 %. « Or, ces personnes sont surreprésentées dans la partie basse de la hiérarchie des professions de santé », rappelle Sandrine Musso. L'anthropologue souligne que le racisme direct, par les insultes et d'autres actes, vise des personnes qui subissent les discriminations sociales plus globales qui constituent le « racisme indirect ». « Ce sont souvent les mêmes pour lesquelles l'accès aux études, au travail et au logement sont aussi plus difficiles, dit-elle. Depuis vingt ans, les recherches montrent qu'il n'y a pas besoin d'actes racistes pour qu'existe une minorité discriminée. Mais il a fallu attendre 1998 pour que l'existence de ces discriminations indirectes bénéficie d'une reconnaissance officielle en France à travers le rapport du Haut Comité à l'intégration. »

Les recherches sur la santé des populations victimes de discriminations raciales se sont multipliées au cours des années 2000. Elles montrent que ces personnes souffrent davantage d'hypertension artérielle (2, 3, 4), de maladies respiratoires (3) de maladies de longue durée (3), de troubles anxieux et dépressifs (3), d'idées de suicide (5) et de psychoses (3, 6). « Les réponses au stress des systèmes neuroendocriniens et immunitaires sont des mécanismes qui peuvent expliquer les effets du racisme sur la santé », indique Kwame McKenzie, professeur de psychiatrie transculturelle au Collège universitaire de Londres. Les actes racistes suscitent un stress aigu. La perception de la société comme raciste et les effets du racisme sur la perception de soi constituent des stresseurs chroniques. » (7)

L'Association américaine de santé publique détaille aussi comment le racisme cause « des disparités ethniques en matière de santé » (8). Elles peuvent apparaître à trois niveaux : « les différences dans les expositions sociales, politiques, économiques et environnementales, qui provoquent des différences dans l'incidence des maladies », « les différences dans l'accès aux soins ou services de santé préventifs et curatifs » et « les différences de qualité des soins au sein du système de santé ».

Réunions de régulation

Pour les soignants, ces situations laissent d'autant plus de séquelles lorsque le professionnel se sent seul et ne peut en parler à ses collègues. « Ces incidents doivent faire l'objet de débats en équipe, insiste Patrick Fermi. On ne peut pas faire comme si de rien n'était et laisser la situation en l'état. » En cancérologie, Lio dit beaucoup discuter, la nuit, avec ses collègues infirmières. « Nous en parlons aussi pendant les transmissions, ajoute-t-elle. Mais le cadre et le médecin ne lisent guère les transmissions écrites des infirmières et les ignorent. J'ai le sentiment de ne pas être soutenue par nos médecins, qui ont d'autres choses à faire. »

Parler de ces situations en équipe donne à chacun la possibilité de livrer ses informations et de donner son avis. « Cela donne l'occasion de considérer toutes les variables de la situation, parce qu'un des membres de l'équipe sait toujours un petit quelque chose de plus à propos d'un patient, d'un collègue ou de leur relation », ajoute Patrick Fermi. Ces réunions de régulation permettent de minimiser la manifestation de mécanismes psychologiques comme les défenses et les projections, qui brouillent la compréhension des situations et le discernement des meilleures façons d'y répondre. « Mais ces réunions devraient être favorisées en permanence, glisse-t-il, et pas seulement lorsqu'un problème survient. »

Origine psychologique

Il est utile de distinguer racisme et xénophobie, souligne Patrick Fermi. « Au quotidien, les faits relèvent souvent de la peur de l'autre, ou xénophobie. Le mal n'en est pas moins grand. L'interprétation raciste semble souvent une formation-écran à visée défensive. Le psychisme est avide de représentations... Voir la couleur d'une peau, la texture des cheveux ou la forme des yeux est une perception à la portée de tous. En revanche, poursuit-il, interpréter la pauvreté, l'exclusion, la violence ou la perversité des jeux de pouvoirs est un acte complexe. Cet acte engage son auteur dans son intelligence, dans la réalité ou l'éventualité de sa propre insécurité affective et matérielle, dans l'ambivalence de ses pulsions. Dans ses formes les plus régressives, la xénophobie, phénomène plus archaïque et plus ancien, nous confronte à l'incertitude de notre unité, à l'angoisse de la désintégration, à la menace de la fragilité de notre état de conscience. »

Certaines conduites qualifiées de racistes peuvent être interprétées comme une défense contre cette angoisse xénophobique. Elles viseront le vieillard, le fou, le débile, le mongolien autant que l'étranger. Dans les cas « litigieux », le recours à la loi sera modulé, voire précédé par une analyse avec les personnes concernées, afin de créer les conditions propices à une prise de conscience de ces mécanismes. On tiendra compte aussi de la maladie du patient. « L'angoisse de certains malades croît avec le déploiement de certaines pathologies, poursuit-il. La régression que cela implique peut favoriser un effritement des défenses sociales, qui sont mises à mal, s'effondrent, laissant émerger des fantasmes que les censures et la socialisation - le surmoi de la psychanalyse - bloquent d'ordinaire. » Des personnes qui souffrent de psychose ou de maladie d'Alzheimer peuvent ainsi développer des conduites racistes, alors qu'elles n'en avaient jamais adopté au cours de leur vie.

Clinique multiculturelle

Il est aussi possible de promouvoir une politique de prévention à travers une « clinique multiculturelle ». C'est la démarche de l'association Géza- Róheim, que préside Patrick Fremi. « Elle permet de sensibiliser les soignants en les soumettant à l'épreuve de l'altérité, explique-t-il. Elle rend sensible et attentif aux différences culturelles auxquelles l'autre se réfère, à la variation des expressions pathologiques, ainsi qu'aux conceptions étiologiques et thérapeutiques des patients. » L'association a réalisé des formations pour les infirmiers de secteur psychiatrique du centre hospitalier Charles-Perrens, à Bordeaux, mais aussi pour des enseignants de ZEP (zones d'éducation prioritaire) ou des agents médicaux, paramédicaux et socio-éducatifs de communes. En psychiatrie, l'association travaille avec des interprètes. « En général, les personnes que nous voyons ne sont pas en situation de pouvoir décrire leurs difficultés de la vie quotidienne en français, a fortiori d'exprimer leurs émotions dans cette langue. On connaît l'importance des lapsus et des jeux de mots dans la psychanalyse et dans certains processus thérapeutiques. Sans interprète, la dimension relationnelle et psychologique s'amenuise beaucoup avec certains patients. »

Question de point de vue

Un Asiatique, considéré comme psychotique et soigné en psychiatrie, n'avait jamais été écouté dans sa langue. Patrick Fermi note que quand ce fut possible, les personnes présentes, de même origine que lui, ne l'ont pas trouvé particulièrement délirant. « Nous sommes attentifs à la dimension culturelle des propos du patient, poursuit-il. Mais nous le considérons aussi comme sujet singulier, avec son histoire propre. Nous nous inspirons en cela du "complémentarisme" de Georges Devereux (9), psychanalyste et anthropologue franco-américain, qui associait l'écoute d'une dimension personnelle et celle d'une dimension plus culturelle ou collective. »

Une telle approche, en combattant l'incompréhension entre les soignants et les soignés, est une piste parmi d'autres pour réduire la souffrance psychologique liée au racisme. Elle souligne l'importance d'une réflexion collective construite sur ce sujet au sein des équipes, et nous rappelle que pour favoriser une prise de conscience, il faut d'abord encourager la prise de parole.

1- M. Cognet, « Quand l'ethnicité colore les relations dans l'hôpital », in Hommes et migrations, 2001, n° 1233, pp. 101-107.

2- N. Krieger, L. Berkman, I. Kawachi, « Discrimination and Health », in Social Epidemiology, Oxford University Press, 2000, p. 36-75.

3- S. Karlsen, J. Nazroo, « Relation Between Racial Discrimination, Social Class, and Health Among Ethnic Minority Groups », American Journal of Public Health, 2002, n° 92, pp. 624-631.

4- J.P. Harrell, S. Hall, J. Taliaferro, « Physiological Responses to Racism and Discrimination : an Assessment of the Evidence », American Journal of Public Health, février 2003, n° 93, pp. 243-248.

5- R. M. Diaz et alii, « The Impact of Homophobia, Poverty and Racism on the Mental Health of Gay and Bisexual Latino Men : Findings of Three US Cities », American Journal of Public Health, 2001, n° 91, pp. 927-931.

6- I. Janssen et alii, « Discrimination and Delusional Ideation », British Journal of Psychiatry, 2003, n° 182, pp. 71-76.

7- K. McKenzie, « Racism and Health : Antiracism is an Important Health Issue », British Medical Journal, 11 janvier 2003, n° 326, pp. 65-66.

8- American Public Health Association, « Research and Intervention on Racism as a Fundamental Cause of Ethnic Disparities in Health », American Journal of Public Health, mars 2001, vol. 91, n° 3, pp. 515-516.

9- Georges Devereux, Essais d'ethnopsychiatrie générale, Gallimard, 1971.

À retenir

> Les attitudes racistes ou xénophobes peuvent affecter les soignants comme les patients.

> De la part d'un patient, une telle conduite est parfois favorisée par la maladie.

Si elle est insistante, elle peut justifier l'interruption des soins.

> La reconnaissance du préjudice et la solidarité de l'équipe envers la victime sont essentielles.

> Pour aller au-delà des incompréhensions, certaines équipes pratiquent ce que l'on appelle une « clinique multiculturelle ».

droit

L'ARSENAL JURIDIQUE SE RENFORCE

En France, de plus en plus de textes peuvent être invoqués contre le racisme et les discriminations.

> Déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789 (art. 1, 6, 11).

> Loi modifiée du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

> Préambule de la Constitution de 1946.

> Constitution de 1958 (art. 1 et 2).

> Loi du 1er juillet 1972 (licenciement pour raisons raciales).

> Nouveau code pénal (1994) :

- Diffamation raciale (art. 32 de la loi de 1881) et injure raciale (art. 33) ;

- Interdiction de mémoriser des données portant sur la race (art. 31 et 42 de la loi du 6 janvier 1978) ;

- Refus de fournir un bien ou un service fondé sur une discrimination nationale, ethnique, raciale ou religieuse (art. 225-1 et 225-2, point 1) ;

- Offre d'emploi, refus d'embauche ou licenciement sous condition discriminatoire (points 3, 4 et 5).

> Loi du 3 février 2003 (aggravation des peines pour les actes racistes, antisémites ou xénophobes).

> Loi du 21 juin 2004 (devoir des hébergeurs et fournisseurs d'accès à Internet de lutter contre la diffusion de données à caractère pédophile, négationniste et raciste).

> Loi du 30 décembre 2004 créant la Halde (Haute Autorité de lutte contre le racisme et pour l'égalité), afin d'informer le grand public et accompagner les personnes discriminées.

Nations unies

« L'expression "discrimination raciale" vise toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique, qui a pour but ou pour effet de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice, dans les conditions d'égalité, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans le domaine politique, économique, social et culturel ou dans tout autre domaine de la vie publique. »

Article 1 de la Convention de l'ONU du 7 mars 1966.

interview

« PORTER PLAINTE EST FACILE »

Jean-Pierre Dubois, président de la Ligue des droits de l'homme, recommande aux soignants de faire valoir leurs droits.

> Face à des actes ou des propos racistes, des infirmières réclament un rappel à la loi, sans bien connaître les procédures...

Il suffit d'écrire au procureur de la République ou de se rendre dans un commissariat ! Des personnes en difficulté, s'exprimant mal, parviennent à le faire. Pourquoi des professionnels de santé n'y réussiraient-ils pas ? La marche à suivre figure sur de nombreux sites Internet. Elle se résume à une déclaration du type : « Voici ce qui est arrivé. Je considère que je fais l'objet d'une discrimination liée à mon origine. »

> Que proposent les permanences juridiques de la LDH ?

Nous travaillons sur les données précises qu'on nous apporte et aidons à monter les dossiers. Mais aucune réponse unique n'existe. Nous ne pouvons garantir le succès de la plainte. Le plaignant n'est d'ailleurs pas tenu d'avoir raison pour porter plainte.

> Une réflexion clinique demeure nécessaire...

Bien sûr. Le choix d'entamer une action juridique ou non dépend de la personne qui a agi ou insulté. Cela dépend de son état de colère ou d'exaltation à ce moment-là. Tout ne peut être pris avec le même sérieux. Mais il est facile de porter plainte quand cela semble opportun.

Sur Internet

> Institution

- Haute Autorité de lutte contre les discriminations : http://www.halde.fr.

> Droits de l'homme et antiracisme

- http://www.ldh-France.org.

- http://www.sos-racisme.org.

- http://www.mrap.fr.

> Clinique et recherche

- Association Géza-Roheim : http://pagesperso-orange.fr/geza.roheim/

- Anthropologie médicale appliquée au développement et à la santé (Amades) : http://www.amades.net.