Le décret d'actes en sursis ? - L'Infirmière Magazine n° 241 du 01/09/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 241 du 01/09/2008

 

Exercice infirmier

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Profession

Les actes autorisés pour les infirmières pourraient désormais être répertoriés dans un simple arrêté. Sur cette question, les organisations représentatives sont plus divisées qu'il n'y paraît.

Le 11 juillet dernier, les organisations syndicales représentatives de la profession infirmière se sont vu remettre par la Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (Dhos) un projet d'article (lire l'encadré ci-contre) prévu pour modifier l'article L. 4311-1 du Code de la santé publique, qui régit l'exercice infirmier.

Inquiétude

Dix jours plus tard, une large intersyndicale (CFDT, CFTC, CNI, Convergence, FNI, FO, Onsil, SNPI-CGC, Snics-FSU, Sud, Unsa, Ufmict-CGT) organisait une conférence de presse pour exprimer colère et inquiétude face à ce projet qui remet en cause le décret d'actes infirmiers (également appelé décret de compétence). D'après le texte, la liste d'actes infirmiers ne serait plus fixée par décret, mais par simple arrêté ministériel. Le gouvernement souhaitait inscrire la modification dans le projet de loi « Santé, patients, territoires » qui doit être débattu au Parlement à l'automne.

Pas de position

Mais à y regarder de plus près, le projet gouvernemental ne fait pas l'unanimité contre lui et les organisations représentatives sont plus divisées qu'il n'y paraît. Ainsi est-on surpris d'apprendre que ni la Fnesi ni le Cefiec n'ont de position officielle sur le sujet.

De sources syndicales concordantes, il semble que le gouvernement ait finalement renoncé à inscrire la modification juridique dans la loi pour des raisons de lourdeur technique. Cela ne vaut pas abandon pour autant.

Une commission ?

« Hier encore, j'ai eu le cabinet de la ministre au téléphone, déclarait Annick Touba, présidente du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil) à L'Infirmière magazine, le 13 août dernier. Ils m'ont demandé mon avis sur la personne qui devrait présider la commission de concertation sur le décret à la rentrée. » Le ministère aurait proposé Michelle Bressand. Mais aucune décision n'a été prise à ce jour.

LE TEXTE

« Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'exercice de la profession.

Un arrêté du ministre chargé de la Santé, pris après l'avis de l'Académie nationale de médecine, fixe la liste des actes relatifs à l'exercice de la profession, et notamment ceux réalisés sur prescription médicale. »

Extrait du projet d'article présenté aux organisations syndicales.

Philippe Tisserand (FNI)

Contre « Déqualifier la profession n'est pas une solution»

« On va créer des "infirmières light" en prenant les meilleures aides-soignantes et en leur délivrant une petite formation de quelques mois pour leur apprendre des gestes techniques et pouvoir les payer moins cher qu'une infirmière. C'est une erreur de remédier à la pénurie d'infirmiers par une déqualification de la profession. Il n'est pas nécessaire de toucher à notre texte pour nous attribuer de nouvelles missions, il suffit d'ouvrir la liste d'actes. On nous demande précipitamment une modification de notre cadre juridique sans que le chantier de la formation soit tranché. Il se peut très bien que ce soit le prélude à une formation de type apprentissage. »

Annick Touba (Sniil)

Pas contre « Cela peut être l'occasion de reconnaître nos compétences »

« Passer d'une logique d'actes à une logique de missions, c'est peut-être un avantage. Et passer du décret à l'arrêté, ça introduit de la souplesse. Il faut qu'on reconnaisse nos compétences qui, pour l'instant, ne sont pas formalisées. Quand on adapte une dose d'insuline, s'il n'y a pas de protocole écrit, c'est de l'exercice illégal de la médecine. Or, on en fait tous les jours ! Il faut faire reconnaître ce que nous faisons. Je ne pense pas qu'on veuille faire disparaître 500 000 infirmières dans ce pays pour confier les soins à du personnel non qualifié. »

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