Les péricardites - L'Infirmière Magazine n° 241 du 01/09/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 241 du 01/09/2008

 

cardiologie

Conduites à tenir

L'inflammation du péricarde peut avoir des conséquences plus ou moins importantes suivant son étiologie. Les signes de complications sont à surveiller méticuleusement.

DÉFINITION

Une péricardite est une inflammation des membranes qui enveloppent le coeur.

PHYSIOPATHOLOGIE

Après une phase de péricardite appelée « sèche », purement inflammatoire, à l'origine des douleurs thoraciques, survient une phase de péricardite liquidienne au cours de laquelle un épanchement liquidien se constitue dans la cavité péricardique (voir le schéma à droite). Le volume de cet épanchement est variable, et peut atteindre un litre.

Cet épanchement, lorsqu'il est abondant et de constitution rapide, peut gêner le remplissage du coeur au cours de la diastole. Cette gêne au remplissage entraîne, en amont des cavités droites, une hyperpression veineuse avec au maximum des signes d'insuffisance cardiaque droite, en aval des cavités gauches, une diminution du débit cardiaque par diminution du volume de remplissage du ventricule gauche. Ce tableau clinique caractérise une complication majeure appelée « tamponnade ».

Au cours de certaines maladies, l'épanchement liquidien péricardique est de très faible abondance, mais le péricarde s'épaissit considérablement, se transformant en un sac inextensible, parfois calcifié. Il s'agit alors d'une péricardite chronique constrictive.

PÉRICARDITES AIGUËS

Clinique. La douleur thoracique alarme le plus souvent le malade. Elle peut simuler en tout point une douleur d'angine de poitrine mais deux caractères lui sont particuliers :

- son accentuation lors de l'inspiration profonde ;

- sa disparition ou son atténuation en position assise, penchée en avant.

Parfois, cette douleur ne constitue qu'une gêne thoracique, sans particularité. Une fièvre est fréquente.

L'auscultation cardiaque affirme souvent le diagnostic lorsqu'elle retrouve un frottement péricardique, bruit perçu en plus des bruits normaux du coeur, lié au frottement des deux feuillets péricardiques l'un contre l'autre. On recherche des signes de mauvaise tolérance : tachycardie, pression artérielle pincée, signes d'insuffisance cardiaque droite.

Examens complémentaires. L'électrocardiogramme montre un microvoltage et des troubles de la repolarisation ventriculaire dont l'évolution est caractéristique.

L'échocardiographie permet d'affirmer le diagnostic, en montrant la présence de liquide entre les deux feuillets péricardiques. Elle participe en plus à la recherche de signes de mauvaise tolérance de l'épanchement et à sa surveillance.

Parfois, une ponction-biopsie péricardique chirurgicale, par voie sous-xyphoïdienne, est indiquée, permettant une analyse chimique, bactériologique et cytologique de l'épanchement et une analyse anatomopathologique du péricarde.

Évolution. Elle est en grande partie fonction de l'étiologie de la péricardite. Mais une tamponnade peut toujours survenir.

Étiologies

Péricardites aiguës idiopathiques. Ce sont les plus fréquentes. Elles surviennent plus volontiers chez l'homme, à tous les âges.

Une majeure partie d'entre elles est probablement d'origine virale, même si l'enquête virologique demeure souvent négative. Lorsqu'un virus est mis en évidence, il s'agit souvent du virus de la grippe (Myxovirus influenzae), d'un virus Coxsackie, d'un virus syncytial respiratoire ou d'un adénovirus... Elles s'accompagnent fréquemment d'une pleurésie séro-fibrineuse.

L'évolution est favorable, sans séquelle, mais des rechutes sont possibles.

Péricardite aiguë et rhumatisme articulaire aigu. Une péricardite aiguë est fréquente au cours du rhumatisme articulaire aigu. Son évolution est bénigne par rapport à la gravité des atteintes myocardiques et valvulaires.

Péricardites aiguës au cours de l'infarctus du myocarde. Elles sont de deux types :

- les péricardites survenant au cours des dix premiers jours de l'infarctus : elles traduisent l'inflammation du péricarde au contact de la zone de nécrose ; la survenue de douleurs thoraciques fait toujours craindre un angor séquellaire ou une récidive d'infarctus ; leur évolution est favorable en quelques jours le plus souvent ;

- les péricardites survenant entre deux semaines et quatre mois après l'infarctus : elles réalisent le syndrome postinfarctus, d'étiologie inconnue, associant aux douleurs thoraciques de la péricardite des douleurs aux épaules, de la fièvre ; leur évolution est lente, avec possibilité de rechute.

On rapproche du syndrome postinfarctus les péricardites survenant entre la deuxième semaine et le quatrième mois après une chirurgie cardiaque. Leur évolution est identique.

Péricardites aiguës tuberculeuses. Celles-ci sont devenues exceptionnelles grâce à la prophylaxie de la tuberculose par le BCG et le traitement antituberculeux des primo-infections. Ces péricardites sont très graves du fait :

- de la dissémination possible de la maladie vers d'autres appareils (poumon, péritoine...) ;

- du risque de tamponnade ;

- du risque à long terme de péricardite chronique constrictive.

Péricardites aiguës des maladies de système. Elles peuvent survenir dans le cadre de ces maladies et les révéler : lupus érythémateux disséminé, polyarthrite rhumatoïde. Nous citerons également les péricardites aiguës après radiothérapie du médiastin, les péricardites aiguës au cours de l'insuffisance rénale chronique, les péricardites néoplasiques et de l'hypothyroïdie.

Péricardites purulentes. Rares, elles surviennent dans un contexte d'infection pleuropulmonaire, en général grave. Les germes responsables sont surtout le staphylocoque, le pneumocoque, Haemophilus influenzae.

Traitement. La surveillance des malades atteints de péricardite doit être particulièrement rigoureuse afin de dépister au plus tôt la survenue d'une tamponnade. Il faut savoir que toute mobilisation du patient doit être extrêmement prudente, pouvant décompenser un état jusqu'alors précaire.

Certains traitements sont formellement contre-indiqués, en particulier les anticoagulants (antivitamine K ou héparinique). Ils peuvent entraîner un hémopéricarde par saignement intrapéricardique avec risque majeur de tamponnade.

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (aspirine, indométacine, etc.) calment la douleur et ont un effet antipyrétique sans gêner l'interprétation des examens complémentaires à visée étiologique. En effet, le véritable traitement est celui de la cause de la péricardite aiguë :

- traitement anti-inflammatoire non stéroïdien des péricardites aiguës idiopathiques, virales et au cours de l'infarctus du myocarde ;

- corticothérapie au cours des péricardites des maladies de système, du syndrome postinfarctus et postchirurgie cardiaque ;

- traitement antituberculeux et corticothérapie au cours des péricardites tuberculeuses ;

- antibiothérapie adaptée au germe retrouvé au cours des péricardites purulentes.

TAMPONNADE

Clinique. Le plus souvent, la tamponnade est subaiguë, réalisant le tableau d'une insuffisance cardiaque globale inquiétante et d'évolution rapide :

- signes d'insuffisance cardiaque gauche, tachycardie, chute de la pression artérielle, polypnée et dyspnée de décubitus ;

- signes d'insuffisance cardiaque droite, turgescence des veines jugulaires, hépatomégalie douloureuse ;

- à ces signes s'ajoute l'existence d'un pouls paradoxal (diminution de l'amplitude du pouls lors de l'inspiration profonde).

Diagnostic. Lorsqu'ils sont réalisables en urgence, certains examens vont rapidement le confirmer :

- l'échocardiographie montre l'écrasement des cavités cardiaques par l'épanchement péricardique ;

- le cathétérisme droit montre l'hyperpression veineuse et la gêne au remplissage diastolique du ventricule droit.

Traitement. Il est urgent : c'est la ponction péricardique à l'aiguille par voie xyphoïdienne, après anesthésie locale et en respectant une asepsie rigoureuse. La progression de l'aiguille est suivie à l'amplificateur de brillance ou à l'échocardiographie. Des prélèvements sont effectués pour analyse chimique, bactériologique et cytologique du liquide péricardique.

L'effet de la ponction péricardique est immédiat :

- soulagement du malade ;

- remontée de la pression artérielle, diminution de la tachycardie et de la pression veineuse ;

- parfois, l'amélioration apportée par la ponction est incomplète, et le risque de récidive est grand. C'est alors l'indication d'un drainage chirurgical en urgence.

PÉRICARDITES CHRONIQUES CONSTRUCTIVES

Le tableau clinique est celui d'une grande insuffisance cardiaque droite chronique. Le diagnostic repose sur l'échocardiographie et le cathétérisme droit. Le traitement est chirurgical : décortication péricardique la plus large possible. L'étiologie de ces péricardites chroniques est essentiellement liée à la tuberculose.

SOINS INFIRMIERS

Surveillance rigoureuse :

- Surveiller le patient pour dépister les signes d'une mauvaise tolérance d'un épanchement péricardique ; surveiller la douleur d'une péricardite aiguë (douleur, dyspnée, tachycardie, hypotension artérielle...).

- Prendre les constantes à l'arrivée du patient et au cours de la maladie.

- Sur prescription médicale écrite ou en application d'un protocole écrit :

- mettre en place une voie veineuse ;

- réaliser les prélèvements pour les examens biologiques et les hémocultures ;

- enregistrer un électrocardiogramme ;

- monitorer le patient.

Examens complémentaires :

- Assurer la préparation et la surveillance spécifique aux investigations prescrites (surveillance de cathéter).

- Administrer les prescriptions médicamenteuses.

- Assurer la surveillance spécifique à chaque traitement (par exemple, tolérance digestive des anti-inflammatoires).

- Inscrire les transmissions significatives dans le dossier de soins.

- Favoriser le repos du patient.

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