Le pied de la personne âgée - L'Infirmière Magazine n° 242 du 01/10/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 242 du 01/10/2008

 

gériatrie

Cours

Comme tous les organes, le pied subit les effets du vieillissement. Il est également touché par de nombreuses pathologies, qui mettent en péril la qualité de vie, la mobilité et l'autonomie des personnes âgées. Pour les aider à s'en prémunir, une surveillance attentive et une éducation soutenue du patient doivent être mises en oeuvre.

Chez les sujets âgés, avoir de bons pieds, c'est-à-dire des pieds fonctionnels, est une condition importante pour préserver son autonomie et maintenir une activité physique adéquate. Or, la prévalence des symptômes et affections podologiques est élevée chez les personnes de plus de 75 ans. « Ces affections sont responsables de troubles de la marche et de chutes, lesquelles représentent, toutes étiologies confondues, 55 000 fractures du col du fémur et près de 12 000 décès par an dans notre pays, explique le docteur Bernard Daum, rhumatologue-podologue à Nancy. Autant dire qu'il convient de s'en préoccuper et surtout de tout mettre en oeuvre pour les prévenir ou éviter leur aggravation. »

ÉTAT DES LIEUX

Selon l'Insee, la France métropolitaine comptait en 2007 plus de 13 millions de personnes âgées de 60 ans et plus. Les 75 ans et plus étaient plus de 5 millions, les 85 ans et plus 1,3 million...

D'après des données communiquées par Alain Monnier, directeur de recherche à l'Ined, le pourcentage de personnes âgées de 70 ans et plus, qui était respectivement de 12,5 % en 2006, sera de 13 % en 2015, de 18,2 % en 2030 et de 21,7 % en 2050. Le pourcentage de personnes de 75 ans et plus (8,3 % en 2006) sera de 9,3 % en 2015, de 12,7 % en 2030 et de 16,6 % en 2050. Le pourcentage de personnes âgées de 80 ans et plus (4,7 % en 2006) sera de 5,9 % en 2015, de 7,7 % en 2030 et de 11,3 % en 2050.

Or, ainsi qu'en attestent les études rapportées dans les recommandations de la Haute Autorité de santé (1), la plupart des sujets âgés situés dans cette tranche d'âge, et plus fréquemment les femmes que les hommes, présentent des douleurs, des lésions cutanées, des déformations, des troubles trophiques ou vasculaires des pieds (lire l'encadré p. IV).

En outre, au-delà de 75 ans, près de 70 % des patients ne sont plus en mesure d'assurer seuls les soins d'hygiène, la coupe des ongles ou la surveillance cutanée de leurs pieds du fait de troubles visuels, de l'incapacité à atteindre leurs pieds, d'une force de préhension insuffisante ou de la présence de troubles cognitifs.

Pour autant, ils ne font pas systématiquement entretenir leurs pieds. En effet, selon les études, 14 à 40 % des patients nécessitant des soins de pédicurie-podologie ne font pas appel aux professionnels de santé. Désintérêt, négligence, manque de considération... « À l'exception du pied diabétique qui fait l'objet d'une attention particulière en et hors institution, le pied, parce qu'il est dissimulé et loin des centres nobles de la pensée, fait figure de parent pauvre, pour ne pas dire de mal-aimé », commente Claire Igwal, pédicure-podologue à Rambouillet. « Qui plus est, ajoute le Dr Daum, c'est un domaine mal connu du corps médical. À la croisée des problèmes ostéo-articulaires, neurologiques, dermatologiques, vasculaires et infectieux, le pied est un organe extrêmement complexe qui n'inspire guère les médecins. »

Il en résulte une prise en charge souvent tardive et des répercussions fonctionnelles (troubles de l'équilibre et de la marche) parfois sévères, pouvant aller jusqu'à des chutes répétées, l'immobilité forcée, la perte d'autonomie, l'isolement social. « Curieusement, ajoute le Dr Daum, les sujets âgés, et particulièrement les femmes qui souffrent de troubles pédicuriques douloureux, vont d'emblée trouver un palliatif (arrêter de marcher, porter des chaussons à la place des chaussures) qui les soulagent mais qui ne soignent pas les troubles. Cette attitude peut avoir de lourds retentissements et impose à tous les acteurs de soins de mieux connaître les effets du vieillissement physiologique et pathologique du pied pour mieux les prévenir et les prendre en charge. »

VIEILLISSEMENT PHYSIOLOGIQUE

Au fil de la vie, le pied est soumis à des modifications morphologiques (il s'allonge et s'élargit au niveau de l'avant-pied après 50 ans) et à un vieillissement physiologique, très variable d'un sujet à l'autre mais inévitable après la soixantaine. « Schématiquement, poursuit le Dr Daum, on distingue trois profils de vieillissement du pied : le vieillissement réussi grâce à un entretien régulier ; le vieillissement usuel qui entraîne une diminution de la capacité fonctionnelle ; et enfin le vieillissement par fragilité. » Ce dernier peut affecter l'ensemble des structures articulaires, musculaires, cutanées et sensitives du pied.

Vieillissement musculo-articulaire. Avec l'avancée en âge, l'os s'amincit et le cartilage se fragilise. La mobilité articulaire du pied diminue d'autant plus qu'il existe une arthrose sous-jacente ou un facteur favorisant le raidissement (alitement, manque d'exercice physique volontaire, maladie).

Quant à la force musculaire, on estime que la perte liée à l'âge est de 1 à 2 % par an à partir de 60 ans (2). Elle peut être couplée à un affaissement plantaire, qui apparaît généralement dans les années qui suivent la ménopause chez la femme, et plus tardivement chez l'homme.

Vieillissement cutané. Avec l'âge, toutes les structures de la peau (épiderme, derme, hypoderme) s'amincissent et s'atrophient du fait de la perte de mélanocytes. « L'atrophie du capiton plantaire est l'expression la plus fréquente du vieillissement cutané du pied, souligne le Dr Daum. Ce n'est pas la conséquence la plus visible car elle concerne le tissu cutané profond et l'hypoderme, mais c'est un motif de consultation fréquent car le malade ressent une gêne importante à la marche (il a l'impression de marcher sur des cailloux). »

La peau perd également de son élasticité car elle s'assèche et se desquame (les glandes sudorales perdent 70 % de leur activité après 70 ans). Elle devient plus fragile et plus fréquemment exposée à des phlyctènes (ampoules) ou des plaies. Par ailleurs, les ongles durcissent et épaississent, ce qui rend l'hygiène des pieds plus difficile à garantir. Un épaississement exagéré est toujours pathologique.

Vieillissement sensitif. La sensibilité tactile, positionnelle et vibratoire de la plante des pieds se détériore. Il en résulte une diminution de la perception à l'effleurage, de la sensibilité vibratoire (3) et des réflexes achiléens (4).

Au-delà du vieillissement physiologique, le pied est également soumis à des pathologies locales ou générales qui entraînent un vieillissement pathologique.

VIEILLISSEMENT PATHOLOGIQUE

Selon le Pr Jean-Bernard Piera (chef de service à l'hôpital Charles-Foix d'Ivry-Sur-Seine), 65 % des personnes âgées ont un pied pathologique. Au-delà du diabète, dont les retentissements podologiques représentent un sujet en soi, non développé dans ce dossier, l'arthrose et les pathologies vasculaires (varices, thromboses veineuses profondes) sont des facteurs qui favorisent les pathologies du pied chez le sujet âgé. Celles-ci sont extrêmement nombreuses mais les plus fréquemment rencontrées sont les troubles de la statique latérale ou longitudinale du pied, les affections cutanées et les troubles trophiques des ongles.

Troubles de la statique. Chez les sujets âgés, ces troubles associés à la diminution des capacités d'adaptation posturale peuvent avoir des retentissements majeurs : douleurs, troubles de l'équilibre et de la marche, chutes.

Affections cutanées et troubles trophiques des ongles. Les troubles trophiques et cutanés du pied du sujet âgé sont principalement causés par la sénescence cutanée et les difficultés d'entretien et d'hygiène locale. Ils impliquent un risque de surinfection locale en cas de terrain polypathologique (combinant de manière plus ou moins importante des maladies artérielles, veineuses, neurologiques ou endocriniennes).

Affections cutanées. Elles comprennent principalement les hyperkératoses (cors, durillons), les dermatoses (mycoses) et les manifestations cutanées des affections vasculaires.

Hyperkératoses. Plus connues sous le nom de cors ou de durillons, les hyperkératoses résultent d'un conflit entre la chaussure et le pied. Ce conflit peut être consécutif à un trouble statique entraînant une mauvaise répartition de charge, des déformations orthopédiques (hallux valgus, griffes d'orteils...) ou encore des chaussures non adaptées. L'âge et l'état de la peau (sécheresse, fonte de l'épaisseur du capiton plantaire, diabète, mauvaise circulation veineuse, dermatoses...) sont aussi déterminants.

Les hyperkératoses sont plus souvent présentes à l'avant du pied et forment des indurations qui peuvent faire souffrir et risquent de se compliquer (ulcère, surinfection) jusqu'à provoquer une arthrite septique, voire une gangrène chez un artéritique. Elles nécessitent des soins de pédicurie réguliers, associés à la correction des troubles statiques pour éviter la récidive. Les orthèses plantaires ou semelles orthopédiques vont harmoniser les appuis plantaires, décharger les zones douloureuses. Les orthoplasties protégeront un orteil contre les forces de frottement ou de cisaillement par rapport aux orteils voisins et à la chaussure.

Dermatoses. Parmi les dermatoses fréquentes chez le sujet âgé, les atteintes mycosiques sont légion. Elles résultent de la modification de la flore cutanée de surface consécutive à l'appauvrissement du film lipido-acide.

Ce phénomène rend les pieds du sujet âgé beaucoup plus vulnérables aux effets de la macération et de la transpiration. Il en résulte des infections mycosiques appelées intertrigo. Ces mycoses sont dues à des champignons dermatophytes ou à des levures (de type Candida). Elles sont favorisées par une hygiène approximative mais aussi par des lésions, une surcharge pondérale ou encore des chaussures favorisant la sudation et la macération. L'étude de Forette réalisée sur 53 patients hospitalisés en moyen et long séjours (avec une moyenne d'âge de 82 ans pour les hommes et de 90 ans pour les femmes) retrouve un intertrigo dans 50 % des cas examinés (2).

Cet intertrigo peut être sec et prurigineux (le fond des espaces interdigitaux prend un aspect blanc nacré avec desquamation en lambeaux). C'est le plus fréquent. Il peut aussi être suintant et fissuraire. Dans ce cas, les lésions interdigitales sont kératosiques et douloureuses. Elles s'accompagnent de sensations de brûlure et se compliquent de fissures au fond du pli. Elles doivent être traitées rapidement de façon à éviter la propagation de l'infection à d'autres zones cutanées ou d'autres personnes, mais aussi pour prévenir des infections bactériennes posant davantage de problèmes (infections à streptocoques par exemple). Il est important de préciser que certaines maladies dermatologiques (comme le psoriasis ou la dermatite atopique) peuvent passer pour un intertrigo, ce qui justifie un diagnostic différentiel éclairé.

La moitié des intertrigos disparaît en quelques jours par lavage quotidien avec un savon liquide, rinçage et séchage. Dans les autres cas, quelle que soit la forme, le traitement repose principalement sur l'application d'antifongiques locaux tels le Lamisil® (terbinafine), le Fazol® (isoconazole), le Pevaryl (éconazole) ou l'Amicor® (bifonazole). Trois semaines minimum de traitement sont nécessaires pour limiter les récidives et éviter le recours aux antifongiques oraux, déconseillés chez les sujets âgés en raison de leur toxicité.

Manifestations cutanées des affections vasculaires. Les personnes âgées présentent un risque accru de lésions cutanées au niveau des pieds. Celles-ci touchent une personne de plus de 80 ans sur deux. Les plus fréquentes sont celles de l'insuffisance veineuse (dilatations variqueuses, dermite ocre, ulcère ou encore oedème) ; l'insuffisance artérielle provoque une flétrissure de la pulpe des orteils, une cyanose de déclivité, des pieds froids. Elle peut également entraîner une embolie (orteil bleu) ou le début d'une gangrène localisée sur un point de pression.

En cas de neuropathie diabétique, la perte de la sensibilité peut expliquer l'apparition d'ulcérations neurotrophiques. De même, des maux perforants, complications de l'hyperkératose, se développent fréquemment aux points de pression. En cas d'alitement prolongé non associé à une prévention bien conduite, des escarres peuvent se former au niveau des zones d'appui ou de frottement (talon, orteils, malléoles).

Troubles trophiques des ongles. Ces troubles (onychopathies) sont soit d'origine mécanique, résultant avant tout de microtraumatismes, ou plus généralement liés à l'incapacité physique et visuelle des personnes âgées à entretenir leurs pieds et à couper leurs ongles. Il existe de nombreuses pathologies unguéales chez le sujet âgé dont les plus fréquentes (tableau ci-dessus) sont les ongles incarnés, les onychomycoses et les épaississements et hypertrophies de l'ongle. Il est également important de savoir qu'une artériopathie évoluée, un syndrome de Reynaud grave ou une vascularite peuvent provoquer un « infarctus sous-unguéal » avec perte de l'ongle et qu'une tumeur maligne (épithélioma, mélanome), peut également être à l'origine d'ulcérations du lit de l'ongle.

Loin d'être exhaustif, ce rapide aperçu montre qu'il existe de nombreuses raisons d'être particulièrement attentif à l'état podologique des personnes âgées, non seulement pour améliorer l'entretien courant de leurs pieds, mais aussi pour améliorer l'accès aux soins de ceux dont les troubles nécessitent une prise en charge spécialisée. Ceci dans le but de traiter tout en prévenant l'installation de troubles possiblement handicapants.

RÔLE INFIRMIER

Si l'entourage peut jouer un rôle majeur dans le repérage des troubles, l'infirmière, quel que soit son mode d'exercice, peut, au titre de son rôle propre :

- Assurer la surveillance régulière des pieds des sujets âgés et en particulier des sujets à risque (patients atteints de diabète, d'arthrose, d'insuffisance veineuse ou éprouvant des difficultés à assurer l'hygiène quotidienne de leurs pieds) ;

- Étre attentive aux plaintes des patients concernant leurs pieds (douleurs, difficultés à se chausser, plaies...) ;

- Mettre en oeuvre les soins d'entretien courant ;

- Signaler les affections podologiques et leurs retentissements fonctionnels et orienter les patients vers le médecin ou le pédicure-podologue en fonction des troubles (lire l'encadré p. VI).

« À partir de l'examen général du pied, l'infirmière peut discerner s'il existe ou non un point d'appel (ongle incarné, mycose, douleur, raideur, déformation, etc.) justifiant des soins rapprochés, une surveillance constante ou une réévaluation à distance de l'état podologique, indique le docteur Daum. La surveillance doit être d'autant plus rigoureuse que les signes d'appel sont importants (pied vasculaire, pied arthrosique, ou encore pied du diabétique). »

Au-delà du contrôle visuel et des conseils d'entretien et de chaussage préventifs, l'infirmière peut également, chez les sujets à risque, vérifier régulièrement les pouls tibiaux postérieurs et pédieux, de même que la sensibilité superficielle des pieds, à l'aide d'une technique validée telle que le test de la perception du monofilament 10-g de Semmes-Weinstein (lire l'encadré à droite).

CONSEILS D'HYGIÈNE ET D'ENTRETIEN

Concernant l'hygiène élémentaire des pieds des sujets âgés, l'infirmière peut dispenser les conseils suivants :

- se laver les pieds sans les laisser tremper plus de deux minutes ;

- bien essuyer les orteils, de même que les zones interdigitales ;

- masser quotidiennement les pieds avec un corps gras neutre pour les protéger du desséchement et des fissures ;

- couper les ongles au carré à l'aide d'une pince à ongles à mors droits de bonne qualité ;

- ne pas arracher les cors et durillons avec des ustensiles domestiques septiques ;

- ne pas utiliser de coricides caustiques.

Lorsque le patient n'est plus en mesure d'assurer lui-même l'entretien courant de ses pieds, l'infirmière chargée de son suivi médical peut réaliser des soins de pédicurie de base (couper les ongles, soulager un ongle incarné, soigner les plaies et les mycoses, appliquer une pommade hydratante spéciale pieds). Elle peut également s'assurer que le patient est correctement chaussé et fera appel au pédicure (avec l'accord du patient) lorsque le cas dépasse le champ de son intervention et requiert une expertise.

CONSEILS DE CHAUSSAGE

Le chaussage est un point important : inadapté, il peut causer, voire aggraver certains troubles ; bien choisi, il peut, à l'inverse, constituer un moyen thérapeutique à part entière.

Il est donc important d'accorder de l'attention à la manière dont le sujet âgé se chausse. La chaussure doit être légère (garantie d'utilisation), souple (afin de s'adapter aux déformations), pas trop plate (un talon de 2 à 4 centimètres corrige les troubles de l'équilibre arrière) et dotée d'une semelle amortissante (pour compenser l'atrophie du capiton plantaire) et d'un bon contrefort au niveau de la tige (de façon à maintenir l'arrière-pied).

Mieux vaut privilégier le confort, le maintien et l'adéquation du chaussant à la morphologie plutôt que l'esthétique. Dans certains cas (déformation très importante par exemple), la réalisation de chaussures thérapeutiques sur mesure peut être envisagée.

SURVEILLANCE DES POULS TIBIAUX ET PÉDIEUX

Face à un patient qui présente une perte de sensibilité du pied ou un aspect cyanosé, l'infirmière peut s'assurer de la présence ou non des pouls tibiaux et pédieux et, selon les résultats, diriger le patient vers son médecin. La mesure peut s'effectuer sur plusieurs trajets artériels : le pouls pédieux est généralement pris sur la face dorsale du pied dans le prolongement du tibia, et le pouls tibial postérieur en arrière des malléoles internes sur une ligne tracée entre la malléole et le calcanéus.

En présence d'un terrain à risque, l'abolition des pouls pédieux et tibiaux postérieurs représente un signal d'alerte (elle peut être associée à un risque accru de lésion ulcérée des pieds et, au pire, d'amputation). Cela impose d'approfondir les investigations et d'orienter le patient vers une prise en charge adéquate. « Il est vraiment essentiel, conclut le docteur Daum, d'être à l'écoute et d'acquérir le réflexe "pied" chez les sujets âgés, de manière à améliorer le repérage précoce des troubles et leur prise en charge. Cette préoccupation, aujourd'hui très concrètement prise en compte dans les institutions destinées aux personnes âgées, doit être omniprésente chez tous les acteurs de soins en contact avec elles. Les infirmières, quel que soit leur mode d'exercice, occupent une place privilégiée pour jouer ce rôle de sentinelle et rendre aux pieds la place qu'ils devraient occuper dans la prise en charge globale des patients. »

1- « Le pied de la personne âgée : approche médicale et prise en charge de pédicurie-podologie », recommandations professionnelles de la Haute Autorité de santé, juillet 2005.

2- « Pied de la personne âgée, vieillissement physiologique et pathologique », J.-B. Piéra, O. Razanadramasy-Chapelle, Revue du soignant en gériatrie, octobre 2004, n° 13, 20-24.

3- La sensibilité vibratoire est évaluée à l'aide d'un diapason posé et mis en résonance sur le membre ; si l'on ne sent pas la vibration sur le membre, c'est qu'il y a une perte de la sensibilité vibratoire.

4- Contraction du mollet qui entraîne une légère extension momentanée (flexion plantaire) du pied lors de la percussion du tendon.

Prévalence

Les affections podologiques touchent la population âgée dans des proportions importantes.

> Pied douloureux : 12 % à 20 %.

> Pied déformé :

- Hallux valgus : 20 à 74 % ;

- Déformations des orteils : plus de 50 %.

> Pieds présentant des lésions cutanées, des troubles trophiques ou vasculaires :

- ulcères : 1 à 5 % ;

- ongles incarnés : 7 à 12 % ;

- hypertrophies unguéales : 12 à 30 % ;

- oedèmes : 11 à 15 %.

> Hyperkératoses : 30 à 70 %.

Source : Haute Autorité de santé.

Orienter les patients

Depuis 2005, les patients peuvent avoir recours aux soins de pédicurie-podologie, avec ou sans prescription médicale. Ils doivent être orientés en cas de troubles trophiques ou statiques du pied :

- responsables de douleurs à l'appui ou au chaussage ;

- associés à des troubles de la marche ou de l'équilibre, ou avec antécédents de chute ;

- pas nécessairement symptomatiques mais associés à une neuropathie, une artériopathie ou un diabète ;

- avec des plaies ou des zones d'hyperkératose « conflit » entre la chaussure et le pied ;

- en cas d'incapacité du patient à assurer (soi-même ou avec l'aide d'un tiers) les soins courants du pied tels que la coupe des ongles.

D'après Repères en gériatrie n° 69 (lire bibliographie p. VIII).

En savoir plus

> « Pathologie régionale du pied et de la cheville », A. Chevrot, N. Chemla, A.-M. Dupont, D. Godefroy, B. Vacherot, A. Langer-Cherbit, hôpital Cochin, Paris. Consultable sur le site http://www.med.univ-rennes1.fr/cerf/edicerf, rubrique « Pathologie ostéo-articulaire ».

> « Le pied de la personne âgée : approche médicale et prise en charge de pédicurie-podologie », recommandation professionnelle de la Haute Autorité de santé (consultable sur http://www.has-sante.fr).

> « Principales mesures thérapeutiques, soins de pédicurie, orthèses et éducation thérapeutique », I. Herbaux, P. Berthelot, Y. Kagan, Repères en gériatrie, mars 2007, vol. 9, n° 69.

> Site Internet de la Fondation nationale de gérontologie : http://www.fng.fr.

Test de la sensibilité avec monofilament

Ce test, qui peut être réalisé par les infirmières, doit être effectué au calme pour permettre au patient de se concentrer sur ce qu'il ressent.

L'opérateur doit respecter les consignes suivantes :

> Pratiquer le test sur une zone saine en dehors de toute zone hyperkératosique, cicatricielle, ulcéreuse ou nécrotique. En cas d'ulcères, le test peut être réalisé à la périphérie des lésions.

> Appliquer en premier lieu le monofilament sur les mains, le coude ou le front du patient afin qu'il sache ce qu'il doit ressentir.

> S'assurer que le patient ne puisse pas voir si le soignant applique ou non le filament, ni l'endroit où il l'applique.

> Tester les trois sites suivants sur chaque pied :

- la face plantaire de la tête du premier métatarsien ;

- la face plantaire de la tête du cinquième métatarsien ;

- la pulpe de l'hallux (gros orteil).

> Appliquer le filament perpendiculairement à la surface de la peau avec une force suffisante pour faire bomber le filament. Ne pas le faire glisser sur la peau ou faire des contacts répétés au niveau de la zone explorée.

> Le geste (approche du filament, contact cutané et retrait) doit durer environ 2 secondes.

> Simultanément au geste, demander au patient s'il ressent la pression appliquée (oui/non) et où il la ressent (pied droit/gauche).

> Répéter l'application deux fois au même site en intercalant test « factice » (le filament n'est pas appliqué) et test réel (au total trois questions par site).

> La sensation est conservée à chaque site si le patient répond correctement à deux applications sur trois. Elle est absente si deux des trois réponses sont fausses : le patient est considéré à risque d'ulcération.

> Encourager le patient à se concentrer pendant le test.