Grippe dans les collectivités de personnes âgées - L'Infirmière Magazine n° 243 du 01/11/2008 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 243 du 01/11/2008

 

santé publique

Conduites à tenir

Pour éviter qu'une épidémie endeuille un établissement hébergeant des personnes âgées, l'accent doit être mis sur la vaccination du personnel et les mesures d'hygiène.

COMMENT ÉVITER L'APPARITION D'UN FOYER ?

Vaccination. Les soignants et tous ceux qui travaillent dans une collectivité de personnes âgées ont le devoir moral d'être vaccinés contre la grippe. La preuve en a été apportée par des hôpitaux écossais qui ont sélectionné une série de services hébergeant des personnes âgées puis tiré au sort deux groupes de services : dans l'un, une promotion intensive de la vaccination antigrippale a été menée auprès des soignants. Dans l'autre groupe, aucune campagne n'a été menée.

Pendant l'épidémie de grippe qui a suivi, en surveillant la mortalité chez les personnes âgées hébergées, il a été constaté que, dans les services à forte couverture vaccinale des soignants, la mortalité des personnes âgées était significativement inférieure à celle observée dans les autres services, que les personnes âgées soient vaccinées ou non contre la grippe. Ces résultats ont démontré que les soignants qui ne se vaccinent pas contre la grippe mettent en péril la vie des résidents dont ils s'occupent.

COMMENT LE DÉTECTER ?

Recherche des causes. Les établissements d'hébergement des personnes âgées (Ehpa) sont propices à la diffusion de la grippe à des sujets dont le système immunitaire peut être défaillant.

Dès que plusieurs cas d'infection respiratoire surviennent dans un de ces établissements, il faut en chercher immédiatement la cause, surtout si le nombre de cas est encore très faible et se limite à deux ou trois malades. La grippe est le premier diagnostic à rechercher à l'aide de tests rapides de surveillance (TRS) car une épidémie nosocomiale due à la grippe justifie l'usage immédiat des antiviraux spécifiques de la grippe, en complément des autres mesures barrières (masques, hygiène des mains, isolement). Les recommandations officielles sont formelles là-dessus.

Si la grippe n'est pas en cause, il peut s'agir notamment d'une épidémie de virus respiratoire syncytial (VRS). Ces épidémies surviennent en France avec une régularité de métronome, entre novembre et février, avec un pic au moment des fêtes de fin d'année. Dans ce cas, l'usage des antiviraux spécifiques de la grippe ne présente pas d'intérêt.

Tests rapides de surveillance. Les TRS peuvent être pratiqués au lit du malade. Il existe plusieurs types de TRS grippe. Tous partagent une bonne spécificité : il y a peu de faux positifs et un test positif permet d'affirmer quasiment à coup sûr qu'il s'agit bien d'une grippe. Ces TRS sont très utiles dans les réseaux d'alerte et lors des épidémies nosocomiales dans les collectivités de personnes âgées. Les Groupes régionaux d'observation de la grippe (Grog) les utilisent abondamment.

Par contre, leur sensibilité est médiocre : même si leur valeur prédictive augmente pendant les épidémies de grippe, les faux négatifs ne sont pas rares ; un TRS négatif ne permet pas d'éliminer le diagnostic de grippe. A fortiori, si le prélèvement est mal fait, le résultat est forcément négatif. Contrairement aux prélèvements recherchant un streptocoque A dans la gorge, un prélèvement à la recherche de virus demande un peu d'expérience et un bon tour de main. Cela explique que les TRS soient rarement utilisés pour le diagnostic de grippe en médecine de ville.

QUE FAIRE SI CELA SE PRODUIT ?

Alerte. D'une façon générale, l'apparition de plusieurs cas d'infection respiratoire chez les résidents d'une collectivité de personnes âgées impose d'alerter la Ddass, pour lui permettre de déclencher des investigations virologiques en liaison avec l'Institut de veille sanitaire.

Mesures barrières. La mise en place immédiate des mesures barrières permet d'enrayer l'épidémie et de préserver la vie des résidents :

- port du masque antiprojection par les malades et maintien en chambre pour limiter la transmission des virus respiratoires ;

- port du masque FFP2 par l'ensemble du personnel, ce qui constitue une excellente façon de freiner la diffusion de l'agent infectieux au sein de l'établissement ;

- interdiction temporaire des visites extérieures ou port du masque, ce qui n'est pas toujours facile à faire admettre aux visiteurs. Cependant, si le personnel de l'Ehpa sait expliquer les raisons de cette interdiction (éviter la dissémination de l'infection aux autres pensionnaires), rares seront les visiteurs qui résisteront ;

- information interne rappelant qu'en milieu gérontologique, un soignant malade est un soignant dangereux pour ceux qu'il soigne. Mieux vaut qu'il reste à l'écart tant qu'il est contagieux. Cette logique médicale est parfois difficile à mettre en pratique en raison du manque de personnel dans les Ehpa ;

- usage des antiviraux quand c'est possible. La directrice n'a pas le pouvoir de prescrire des médicaments ! En revanche, il faut la convaincre de l'intérêt de veiller à ce que les mesures barrières, antiviraux inclus, soient comprises par tout le personnel et utilisées sans perdre de temps dans tout l'établissement. Pour les pensionnaires grippés depuis plus de quarante-huit heures, il est peu utile de leur prescrire des antiviraux (c'est trop tard).