Le zona | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 244 du 01/12/2008

 

infectiologie

Cours

S'exprimant de façon variable selon l'âge, le zona est souvent grave et très douloureux chez le sujet âgé. Cette dermatose virale peut engendrer des douleurs à distance de la phase aiguë, qu'il est possible de limiter par une prise en charge très précoce. Un vaccin est aujourd'hui disponible en prévention primaire, mais son usage reste discuté.

Le zona est une maladie infectieuse d'origine virale consécutive à la réactivation du virus responsable de la varicelle (Varicella Zoster Virus ou VZV). Par conséquent, seules les personnes ayant eu la varicelle peuvent développer cette maladie. Au cours de sa vie, une personne sur 100 a été ou sera atteinte d'un zona.

Cette maladie peut survenir à n'importe quel âge mais présente une symptomatologie relativement différenciée selon qu'elle atteint un sujet jeune ou âgé. « Chez le sujet jeune, explique le Pr Dominique Peyramond, chef du service maladies infectieuses et tropicales du CHU de Lyon, le zona est peu douloureux et présente les caractéristiques types (fièvre importante, forte éruption cutanée) d'une maladie infectieuse. Rarement problématique, il guérit rapidement sans séquelle. Chez le sujet âgé, il prend davantage l'allure d'une maladie neurologique douloureuse pouvant conduire à des complications graves. D'une manière générale, la réactivation du virus s'observe beaucoup plus fréquemment chez les sujets âgés. »

RÉACTIVATION DU VIRUS

Lors de la primo-infection, quel que soit l'âge de survenue de la varicelle, le virus n'est pas éliminé après guérison de la maladie. Il persiste à l'état latent dans les ganglions sensitifs des nerfs crâniens (ganglion de Gasser, ganglion du nerf trijumeau, par exemple) ou dans les ganglions sensitifs des racines postérieures de la moelle (racines nerveuses rachidiennes). Il peut parfaitement ne jamais réapparaître, mais il est également capable de se réactiver sous l'effet de facteurs déclenchants.

Dès lors, il recommence à se multiplier dans le neurone des racines sensitives (encadré p.V) et migre ensuite le long des fibres nerveuses sensitives jusqu'à un territoire cutané desservi par ces fibres pour donner une éruption : le zona. La réactivation du virus peut survenir une à plusieurs fois dans la vie, surtout s'il existe un terrain propice favorisant le processus de réactivation virale.

FACTEURS FAVORISANT LA RÉACTIVATION DU VIRUS

L'âge constitue l'un des principaux facteurs de risque de zona. En effet, sa fréquence, relativement faible dans la première moitié de la vie, commence à augmenter à partir de la cinquantaine et devient très importante après 60 ans. Selon les données de surveillance du réseau Sentinelle de l'Inserm, le taux d'incidence est de 2 pour 1 000 chez les moins de 50 ans, de 5,6 pour 1 000 de 50 à 69 ans, de 10,5 pour 1 000 de 70 à 79 ans et de 11,1 pour 1 000 à partir de 80 ans (source : direction générale de la Santé).

Le deuxième facteur majeur intervenant dans la réactivation du VZV est directement lié à l'état immunologique des patients. Les bouleversements immunologiques et en particulier ceux induits par les lymphomes (maladie de Hodgkin notamment), les traitements immunosuppresseurs prolongés (corticothérapie au-delà de trois semaines même à doses faibles) quelle que soit la raison de leur prescription (cancer, asthme, maladie inflammatoire...), les leucémies lymphoïdes, l'infection à VIH même si le patient est traité avec une réponse très correcte au traitement, exposent les patients à un risque élevé de zona. Ces patients sont également plus exposés à des récidives.

Au-delà de l'âge et de l'immunodépression, d'autres facteurs peuvent, dans une moindre mesure, contribuer à la réactivation du VZV. Par exemple, un zona rachidien lombaire peut survenir quelques jours après une ponction lombaire réalisée dans le cadre d'investigations médicales pour méningite. De même, une fatigue générale, un état de stress intense ou de surmenage, un traumatisme au niveau du rachis, une épine irritative locale (hernie discale, pleurésie ou sinusite chronique, par exemple), voire une importante exposition non protégée au soleil, sont des facteurs susceptibles de favoriser la réactivation du virus.

ZONES CONCERNÉES

Le zona peut se fixer sur n'importe quelle partie du corps. Rien ne permet de dire, chez un individu donné, si un zona se fixera sur une zone plutôt que sur une autre, sauf s'il existe une épine irritative. Globalement, 95 % de zonas ont pour origine des racines nerveuses rachidiennes et 5 % sont des zonas crâniens. Ces derniers sont les plus graves.

Zona rachidien

Parmi les zonas rachidiens, les plus fréquents sont les zonas thoraciques (zonas intercostaux) touchant toutes les racines thoraciques de T1 à T12 et les zonas du plexus brachial affectant les racines C5 à C7. Certains zonas atteignent les territoires abdomino-lombaires et pelviens ; d'autres les membres inférieurs (zona sciatique ou génito-crural par exemple).

Zona crânien

Le zona crânien peut se localiser dans de multiples endroits du cou, du visage, de l'oreille ou de l'oeil... Dans les zonas crâniens, les plus fréquents sont les zonas de la branche ophtalmique du trijumeau (branche supérieure du trijumeau dite ophtalmique de Willis). Ces zonas sont aussi parmi les plus graves car ils peuvent laisser des lésions définitives lorsqu'ils atteignent l'oeil. Les autres zonas faciaux (zona auriculaire par exemple) ont des fréquences variables mais restent beaucoup plus rares que le zona ophtalmique.

SYMPTÔMES

D'aspect, l'éruption du zona est très voisine de celle de la varicelle. Toutefois, elle se distingue de l'éruption généralisée de la primo-infection par sa localisation très spécifique. Elle est métamérique, strictement circonscrite à un territoire cutané et unilatérale (elle ne dépasse pas la ligne médiane ni devant ni derrière).

Le fait que les fibres sensitives soient le siège de la migration virale explique le cortège de manifestations douloureuses qui accompagnent le zona dans la majorité des cas. La maladie est souvent précédée pendant 24 à 48 heures d'une phase prodromique purement douloureuse qui se manifeste par des sensations désagréables de cuisson et de brûlures au niveau du territoire où va apparaître le zona 48 heures après. Ces douleurs peuvent être très discrètes de prime abord, ou au contraire assez violentes. Dans ce cas, elles pourraient alerter mais chez quelqu'un qui n'a jamais eu de zona, elles sont rarement déterminantes pour la prise en charge. S'il est en effet difficile d'évoquer un zona dans la phase purement douloureuse, en revanche, quand l'éruption apparaît, le diagnostic est évident.

DIAGNOSTIC

Le diagnostic repose donc exclusivement sur la clinique. L'éruption est faite de petites vésicules regroupées en bouquets vésiculeux le long du trajet nerveux. Elle est très limitée, strictement unilatérale et associée à des douleurs d'intensité variable, mais d'autant plus fortes que le sujet est âgé. L'incidence de la douleur est de 50 % chez les sujets de 50 ans et de 70 % chez les sujets de 70 ans. Une personne de 80 ans a toujours un zona extrêmement douloureux.

Au-delà de la phase éruptive, les douleurs peuvent persister durant plusieurs semaines, voire plusieurs mois ou années. On parle de douleurs post-zostériennes.

UN CONTINUUM DOULOUREUX

Ces douleurs augmentent en fréquence et en intensité avec l'âge, elles sont décrites de façon très variable d'un sujet à l'autre (sensation de brûlure, de cuisson, de chaleur locale, voire de décharges électriques très violentes et brutales, de coups de couteau...).

On observe régulièrement un fond douloureux chronique sur lequel se greffent des pics douloureux paroxystiques que le patient décrit avec une imagerie très dense et caractéristique d'un vécu très pénible.

Spontanée, la douleur est toujours favorisée par le contact des vêtements ou le toucher. Elle régresse lentement. En général, 50 % des douleurs ont régressé dans le mois qui suit, et 70 % dans les trois mois. Toutefois, elles persistent chez certaines personnes qui conservent longtemps des sensations douloureuses à l'effleurage du territoire concerné. Plus la personne est âgée et en mauvais état général, plus le risque de conserver des douleurs post-zostériennes est important.

L'éruption en elle-même évolue sur une huitaine de jours, un peu comme l'éruption de la varicelle : après 3 à 4 jours, les vésicules se dessèchent et forment des croûtes plus ou moins prurigineuses qui chutent dans les 8 à 12 jours suivants. Elles laissent des cicatrices dyschromiques qui prennent la forme d'une zone très blanche dépourvue de mélanine ou, au contraire, d'une zone plus foncée.

COMPLICATIONS

Il existe un risque de surinfection qui peut être considérablement réduit si l'on prend la précaution d'observer les recommandations concernant les soins antiseptiques. Une autre complication, peu fréquente mais possible, est l'hémiplégie controlatérale au zona chez le sujet âgé. De même, chez les personnes âgées, certains zonas touchant des territoires riches en muscles peuvent provoquer une atrophie musculaire irréversible (fréquente au niveau des muscles interosseux de la main).

Cela dit, les principales complications du zona sont celles du zona ophtalmique et en particulier des zonas de la branche nasale, les plus dangereux. Les zonas ophtalmiques sont les seuls à donner des complications très aiguës sur un viscère. Ils peuvent atteindre l'oeil car la racine nasale innerve à la fois la conjonctive, donc l'oeil lui-même, et la face interne du nez (la fosse nasale). Ils laissent parfois des séquelles et imposent de diriger d'emblée les patients vers un spécialiste.

TRAITEMENTS

Traitements généraux

Traitements généraux. Les traitements généraux du zona reposent sur les antiviraux, dont l'efficacité est aujourd'hui éprouvée. Deux sont particulièrement recommandés dans cette indication : l'acyclovir (Zovirax®) et le valacyclovir (Zélitrex®), dérivé de l'acyclovir.

Acyclovir. L'acyclovir (Zovirax®) dont la découverte a valu à son auteur, le docteur Gertrude Helion, le prix Nobel de médecine dans les années 1980, peut être prescrit sous forme injectable ou orale.

La forme injectable est réservée aux zonas graves et aux zonas du sujet immunodéprimé, lesquels peuvent avoir une évolution brutale et sévère justifiant un traitement efficace et rapide. Elle est administrée par perfusion intraveineuse à raison de trois perfusions par jour durant en moyenne une semaine. Elle nécessite une hospitalisation justifiée par l'état des patients et le risque rénal associé au traitement.

La forme orale donne de bons résultats mais présente l'inconvénient d'avoir une très mauvaise biodisponibilité. Ceci implique de donner de très fortes doses réparties en cinq prises sur 24 heures pour obtenir une bonne efficacité.

Valacyclovir. Pour éviter la prescription d'une quantité dissuasive de médicaments, il est possible de remplacer l'acyclovir par le valacyclovir (Zélitrex®), prodrogue de l'acyclovir, qui présente une meilleure biodisponibilité que l'acyclovir et une bonne résorption digestive. Il permet d'obtenir quasiment l'efficacité des formes injectables et de traiter certains zonas graves par voie orale.

Particulièrement indiqué pour le traitement du zona ophtalmique, ce médicament est également recommandé en prévention des douleurs post-zostériennes chez les sujets de plus de 50 ans. Il a en effet été démontré qu'administré dans les 48 heures qui suivent le début de l'éruption, ce médicament réduit de façon importante l'intensité et la persistance des douleurs post-zostériennes. D'où l'intérêt de bien connaître la symptomatologie du zona pour le repérer et le traiter rapidement.

Traitements de la douleur

Le traitement des douleurs aiguës et post-zostériennes est très difficile à schématiser car il doit être adapté au cas par cas en fonction du ressenti du patient. D'une manière générale, il est recommandé de commencer par les antalgiques de palier 1 et d'adapter les doses et les produits en tenant compte des résultats obtenus et de la plainte du patient.

On administre du paracétamol, puis on suit un schéma d'escalade en fonction des besoins :

-> Paracétamol + codéine

-> Paracétamol + dextropropoxifène (Di-Antalvic®)

-> Autres antalgiques jusqu'aux antalgiques psychotropes (Nozinan® par exemple) ou certains anticonvulsivants (carbamazépine/Tégrétol®),

ou certains antidépresseurs à des doses antalgiques (Rivotryl®, Laroxyl®).

Traitements locaux

Concernant les traitements locaux, comme pour les lésions de la varicelle, il est recommandé de ne mettre aucune crème, aucune pommade, aucun gel ni talc sur les lésions zonateuses. Tous ces produits favorisent la surinfection et non la guérison de la maladie. En pratique, il est donc recommandé de se laver quotidiennement (douche ou bain) avec un savon dermatologique simple et éventuellement d'appliquer sur les lésions, après les avoir séchées par tamponnement avec un mouchoir en papier, un antiseptique simple tel que la Chlorexhydine® solution ou l'Héxomédyne® solution pour ses effets désinfectant et asséchant. Les produits colorants, de type éosine alcoolique ou bleu de méthylène sont à proscrire.

ZONA OPHTALMIQUE

Il représente 10 % des zonas. C'est une affection bénigne et douloureuse entraînant une fatigue durable de plusieurs semaines. Son diagnostic est aisé du fait de signes cliniques parlants. L'affection est consécutive à la réactivation du virus au niveau du ganglion de Gasser et à l'atteinte du territoire sensitif de la branche V1 du nerf trijumeau correspondant au nerf ophtalmique. Le zona ophtalmique comporte trois localisations différentes réparties selon les trois rameaux de l'ophtalmique de Willis : frontale (front et paupière supérieure), lacrymale (cornée) et nasale (tissus internes de l'oeil).

Localisation nasale : danger !

« La localisation nasale est la plus dangereuse pour l'oeil, explique le Dr Christine Pandolfi, ophtalmologiste dans les Yvelines. Révélée si l'éruption survient sur l'aile du nez (1) ou la lèvre supérieure, elle présente un risque de complications pouvant compromettre le pronostic visuel. En effet, lorsqu'il existe une atteinte endoculaire (2) ou une iritis non traitée car non diagnostiquée, l'évolution vers une uvéite peut être responsable d'une cécité. Fort heureusement, cette évolution est rare dans notre pays car les zonas atteignant la face sont généralement adressés au spécialiste (pour vérifier la présence ou non d'une atteinte oculaire) ou traités par voie générale par le médecin traitant, le traitement systémique étant efficace sur l'atteinte oculaire lorsqu'elle ne s'accompagne pas de signes inquiétants ».

L'atteinte du nerf lacrymal par le zona engendre une dégénérescence neurotrophique de la cornée qui se manifeste par une anesthésie primaire de la cornée et l'apparition secondaire d'une kératite possiblement ulcéreuse. « D'une manière générale, précise le Dr Pandolfi, la cornée est la principale cible des zonas ophtalmiques [les kératites sont présentes dans 25 à 30 % des cas, ndlr]. Dans la plupart des cas, il s'agit d'atteintes superficielles qui laissent des séquelles à type de cicatrices opaques de la cornée qui laissent moins bien passer la lumière et sont responsables d'une perte d'acuité visuelle de deux à trois dixièmes et d'une hypersensibilité secondaire difficile à soulager. » Les patients présentent en permanence un oeil larmoyant et particulièrement sensible au vent, au froid et à la lumière.

Diagnostic clinique

Les premiers signes qui apparaissent sont des sensations de fourmillement, de brûlures et de douleurs vives au niveau cutané (cuir chevelu, front, paupières, ailes du nez, lèvres). Il apparaît ensuite une rougeur de ces territoires et une éruption deux à trois jours plus tard au niveau de l'hémiface. « Elle est caractéristique car elle partage le front en deux suivant une ligne parfaitement médiane, précise le Dr Pandolfi. Au onzième jour, la formation de vésicules puis de croûtes au niveau des paupières est également typique du zona ophtalmique. »

Si l'oeil est atteint, il devient rouge. Le diagnostic est donc exclusivement clinique et repose sur ce cortège de signes caractéristiques. Toutefois, l'atteinte endoculaire n'est pas toujours facile à mettre en évidence. C'est la raison pour laquelle il est très important d'orienter très rapidement le patient qui présente un zona facial vers un spécialiste afin qu'il puisse confirmer ou écarter la présence d'une lésion cornéenne. Ce diagnostic repose en effet sur un examen par lampe à fente à la lumière bleue avec instillation préalable d'un produit de coloration (fluorescéine) et sur un examen plus approfondi du fond d'oeil permettant de diagnostiquer un iritis, une sclérite, voire une uvéite consécutive à l'atteinte plus profonde de l'oeil.

Des exceptions à la règle.

Il existe néanmoins des cas de zona ophtalmique plus difficiles à diagnostiquer et dont les signes cliniques sont plus discrets, et des zonas dont le diagnostic est posé à distance des premiers signes caractéristiques (patients consultant tardivement suite à des douleurs inexpliquées par exemple). Il convient alors de réaliser des examens complémentaires (ponction de la chambre antérieure) en milieu hospitalier pour rechercher des anticorps témoins de l'infection par le VZV.

Traitements

Par voie générale. Il repose sur les antiviraux spécifiques du zona (acyclovir et valacyclovir) administrés per os et prescrits sur une durée d'un mois. Ils sont associés à un traitement local dégressif.

Traitement local. L'acyclovir en pommade ophtalmique est prescrit à raison d'une application cinq fois par jour pendant la première semaine. Ensuite, le patient réduit progressivement le nombre d'applications quotidiennes pour arrêter le traitement après un mois. Un antibiotique ophtalmique par collyre est systématiquement associé à l'antiviral en prévention des surinfections.

Traitement des douleurs post-zostériennes. Les douleurs de l'hémicrâne sont très invalidantes et souvent rebelles au traitement. Elles doivent être prises en charge par des antalgiques de palier 2 ou 3.

Attention aux corticoïdes ! Il est très important d'insister sur le fait qu'en ophtalmologie, les traitements locaux à base de cortisone ne peuvent être utilisés qu'en l'absence de kératite, donc uniquement sur prescription médicale. « Or, il arrive que devant un oeil rouge, les pharmaciens délivrent sans ordonnance ce type de traitements, pourtant formellement contre-indiqués pour traiter une atteinte zostérienne, commente le Dr Pandolfi. En effet, en présence d'un ulcère de la cornée, le contact direct du corticoïde creuse la lésion. Il est contre-indiqué. En revanche, en cas de kératite non ulcéreuse, le traitement à la cortisone peut être prescrit. Il est donc important de retenir et de faire savoir qu'il ne faut jamais mettre de corticoïdes dans un oeil sans avis médical. »

LE ZONA AURICULAIRE (OTITIQUE)

« Le zona auriculaire (également appelé zona otitique ou zona du ganglion géniculé, ou encore syndrome de Ramsay-Hunt) est assez rare, observe le Dr Matthieu Choutet, ORL libéral à Versailles et praticien hospitalier (service ORL du centre hospitalier de Rambouillet, dans les Yvelines). Qui plus est, ce zona passe parfois inaperçu lorsque l'éruption cutanée est absente et que le tableau clinique se présente uniquement sous la forme d'une paralysie faciale a frigore (idiopathique). »

Symptômes

« Il s'agit d'une forme de zona très particulière due à la réactivation du VZV dans le ganglion géniculé du nerf facial (nerf essentiellement moteur), indique le Dr Matthieu Choutet. La forme typique se présente par une douleur vive de l'oreille suivie deux à quatre jours après par une éruption cutanée érythémateuse avec de petites vésicules typiques du zona au niveau de la zone de Ramsay-Hunt (conque du pavillon de l'oreille et conduit auditif externe), seul territoire d'innervation sensitive cutanée du nerf facial. Cette éruption peut également atteindre l'hémilangue homolatérale. Il s'y associe une paralysie faciale de type périphérique qui est souvent le signe majeur. Cette paralysie dure généralement plusieurs semaines et peut laisser des séquelles définitives. Peuvent s'associer, enfin, des signes d'atteinte cochléaire ou vestibulaire : surdité (souvent définitive), acouphènes, vertiges. »

La symptomatologie est très variable. On distingue quatre stades :

- stade 1 : otalgie et éruption cutanée ;

- stade 2 : mêmes symptômes avec paralysie faciale ;

- stade 3 : identique au stade 2 avec des troubles de l'audition ou de l'équilibre ;

- stade 4 : association à une atteinte d'autres nerfs crâniens.

Cependant, on peut également rencontrer une paralysie faciale avec une éruption cutanée absente et une otalgie très modérée. Toutes les « combinaisons » de signes cliniques sont possibles.

Complications

Les principaux risques de complications sont séquellaires de la paralysie faciale ou de la surdité (perte auditive), note le Dr Choutet. Des douleurs post-zostériennes résiduelles sont également fréquentes. La forme particulière qui associe zona ophtalmique et zona auriculaire est d'autant plus grave que la paralysie de l'occlusion palpébrale (due à la paralysie faciale), aggrave les risques cornéens.

Diagnostic

Le diagnostic de zona est le plus souvent clinique, mais dans les formes graves et atypiques, le diagnostic virologique a toute son importance : il repose sur la mise en évidence du virus par culture cellulaire ou de l'ADN viral par technique d'amplification génique (PCR) après ponction du liquide vésiculaire. En revanche, le diagnostic sérologique (dosage des IgG, IgM et IgA) est moins intéressant car plus tardif.

Protocole thérapeutique.

Le protocole thérapeutique associe un traitement antiviral (acyclovir, valacyclovir), une corticothérapie à 1 mg/kg/j en cure courte (10 jours maximum) en cas d'absence d'atteinte cornéenne, et des antalgiques, éventuellement associés à des antivertigineux. Les vasodilatateurs n'ont pas fait la preuve de leur efficacité mais ils sont souvent associés en cas de paralysie faciale. Ce traitement peut être entrepris par voie orale en cas de zona de stade 1, mais l'apparition d'une paralysie faciale doit le faire considérer comme une forme grave, qui nécessite donc un traitement par voie intraveineuse.

Comme pour toute paralysie faciale périphérique, des mesures de protection cornéenne (application de pommade à la vitamine A, mise en place d'un pansement ophtalmique occlusif la nuit) doivent être utilisées tant que la fermeture palpébrale n'est pas complète, précise le Dr Choutet.

PRÉVENTION VACCINALE

Seul vaccin actuellement disponible contre le zona, le Zostavax® bénéficie d'une AMM depuis 2006 en « prévention primaire du zona et des douleurs post-zostériennes chez les sujets de plus de 60 ans ». Un essai contrôle contre placebo, portant sur plus de 38 000 personnes de plus de 60 ans également réparties entre groupe vacciné et groupe placebo, a montré une réduction de l'incidence du zona de 63,9 % chez les sujets âgés de 60 à 69 ans et de 37,6 % chez ceux âgés de 70 ans et plus mais aucune réduction cliniquement significative de l'intensité et de la durée des douleurs en phase aiguë du zona.

En revanche, une réduction de l'incidence des douleurs post-zostériennes a été observée chez les personnes de plus de 70 ans. Précisons néanmoins qu'il n'existe pas de données permettant de juger de l'efficacité du vaccin au-delà de 180 jours.

Le Conseil supérieur d'hygiène publique de France (section maladies transmissibles) ne recommande pas, dans l'état actuel des connaissances, la vaccination large par le vaccin contre le zona (lire l'encadré ci-dessous). Il devrait reconsidérer sa position dès que des données seront disponibles sur son efficacité à long terme et sur l'intérêt d'un éventuel rappel vaccinal. En pratique clinique, de nombreux spécialistes confirment que si le vaccin se justifie dans certaines indications ciblées (personne chez qui on vient de découvrir une maladie du système comme une polyarthrite rhumatoïde traitée par immunosuppresseurs, par exemple).

En revanche, la fréquence relative de cette maladie et le manque de recul dont on dispose sur son efficacité à terme (faudra-t-il refaire des injections, selon quelle fréquence, jusqu'à quel âge ?) ne justifient pas qu'on le propose à tous les sujets de plus de 60 ans n'ayant jamais fait de zona (les personnes ayant fait un zona ne sont pas éligibles à ce vaccin). Pour l'heure, une extension récente de l'autorisation de mise sur le marché autorise la vaccination chez les personnes de plus de 50 ans de manière à se rapprocher des indications des médicaments antiviraux prescrits contre le zona. Une disposition qui n'apporte pas de réponse aux partisans d'une prescription ciblée reposant sur l'identification préalable des sujets à haut risque.

1- Le nerf qui siège au niveau de l'aile du nez a une ramification à l'intérieur de l'oeil. Cette ramification correspond à la branche nasociliaire (ramification allant de l'aile du nez au corps ciliaire de l'oeil).

2- Atteinte des tuniques internes de l'oeil.

Les racines sensitives

Les racines sensitives se trouvent à chaque étage vertébral (étage métamérique) du rachis et sur tous les nerfs crâniens qui ont des composantes sensitives. À l'exception des nerfs optique, olfactif et moteurs de l'oeil qui n'ont pas de composantes sensitives et sont exclusivement sensoriels ou moteurs, les nerfs crâniens ont pratiquement tous des composantes sensitives. Celui qui en a le plus est le nerf trijumeau qui, au niveau du ganglion de Gasser, se répartit à chaque étage en trois branches susceptibles de donner des zonas différents : la branche ophtalmique, la branche maxillaire supérieure et la branche mandibulaire. Par ailleurs, l'atteinte du ganglion géniculé peut être à l'origine du zona auriculaire (l'éruption siège dans la zone de Ramsay-Hunt). Les racines sensitives peuvent également provoquer des zonas du pharynx et de la moitié de l'hémilangue.

Le zona est-il contagieux ?

Un zona ne se transmet pas. En revanche, une personne atteinte d'un zona peut transmettre le virus de la varicelle car celui-ci est présent dans les vésicules et les croûtes. Par conséquent, les personnes non immunisées (personnes n'ayant jamais eu la varicelle) peuvent, au contact d'un sujet présentant un zona, développer une varicelle de novo. Il est donc important de conseiller aux malades atteints de zona d'éviter le contact avec les très jeunes enfants (une varicelle contractée avant l'âge d'un an peut être à l'origine d'un zona dans l'enfance), les femmes enceintes (il existe un risque de zona chez le très jeune enfant lorsque la mère a contracté une varicelle durant la grossesse) et les sujets immunodéprimés, quel que soit l'âge.

Vaccination large ?

Le Conseil supérieur d'hygiène publique de France (section maladies transmissibles) ne recommande pas, dans l'état actuel des connaissances, la vaccination large par le vaccin contre le zona pour les raisons suivantes :

- le vaccin proposé actuellement est congelé, ce qui rend son utilisation difficile en France ;

- la durée de protection conférée par le vaccin n'est pas connue à ce jour ;

- il n'existe pas de démonstration d'une corrélation entre l'immunité sérique obtenue et la protection clinique ;

- le traitement précoce du zona (dans les 48 à 72 heures suivant le début de l'éruption zostérienne) par un antiviral permet de réduire discrètement la durée des douleurs de la phase aiguë du zona, et de manière plus importante l'incidence, l'intensité et la durée des douleurs post-zostériennes ;

- l'efficacité d'un éventuel rappel après l'âge de 70 ans n'est pas établie cliniquement ;

- il est possible que l'administration du vaccin se contente de repousser la survenue d'un zona à un âge plus avancé, lequel comporterait alors un risque plus élevé de douleurs post-zostériennes possiblement plus intenses et de durée plus longue.