Du risque à l'addiction | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 245 du 01/01/2009

 

comportement

Dossier

Initiation aux drogues ou à l'alcool, jeux d'argent... derrière ces conduites se cachent fréquemment des troubles psychiques.

Depuis quelque temps, le binge drinking est sur toutes les bouches pour évoquer le mal-être de la jeunesse. Des adolescents, parfois à peine sortis de l'enfance, se retrouvent en petit comité, dans un appartement d'où les parents sont absents, ou dans un parc, et « jouent » à s'enivrer le plus rapidement possible. Pour dépasser ses limites, tout est bon : vodka, bière, « premix » et « alcopops » (boissons conditionnées, mélangeant un alcool fort à un soda ou à un arôme), vin, champagne.

Les cannettes de bière se vident et se succèdent à un rythme soutenu, parfois lors de véritables duels. Les verres d'alcool sont alignés, mesurés au mètre et sont également l'objet de compétitions. Ces jeunes prennent leur vélo ou leur scooter avec un taux d'alcoolémie démesurément élevé et n'ont plus conscience des risques qu'ils prennent. Certains se laissent entraîner dans des aventures douteuses, avec le danger qu'elles mènent à des abus sexuels. D'autres sont retrouvés inconscients sur la voie publique.

Multiplication des cas

Georges Picherot, responsable des urgences pédiatriques du CHU de Nantes s'alarme : « Dans nos équipes, nous avons repéré et nous suivons ce phénomène depuis plusieurs années. Depuis 2000, le nombre d'admissions aux urgences pédiatriques pour ivresse alcoolique a été multiplié par quatre. Et les filles arrivent chez nous en aussi grand nombre que les garçons. D'une manière générale, nous observons une progression des comportements à risque ou violents chez les jeunes. Nous recevons aussi aux urgences des adolescents qui ont tout cassé là où ils se trouvaient. Ils ne parviennent à s'exprimer qu'à travers une violence extrême. Ces jeunes souffrent, ils sont dans un état de grande instabilité et ne disposent pas de cadres éducatifs simples sur lesquels s'appuyer. »

L'enquête nationale Escapad (Enquête sur la santé et les comportements lors de l'appel de préparation à la défense), menée en 2005 sur des adolescents de 17 ans, a montré que les jeunes consommaient globalement moins d'alcool, mais qu'ils se trouvaient plus fréquemment en état d'ivresse forte. Quant à la consommation de cannabis, un produit de plus en plus banalisé, elle est en hausse constante depuis les années 1990. L'âge moyen des premières expérimentations de ces deux produits diminue : 15 ans à peine révolus. Enfin, le Baromètre santé des jeunes (Inpes) révèle que 15 % des adolescents déclarent avoir pris sciemment des risques lors de l'année écoulée.

« Quête de coma »

Le sociologue David Le Breton, professeur à l'université Marc-Bloch de Strasbourg, s'intéresse depuis de nombreuses années aux cultures adolescentes et aux conduites à risque des jeunes. « Ces jeunes sont dans une quête éperdue de coma. Ils recherchent une blancheur, une sorte de nouvelle naissance. C'est ce désir de blancheur qui, dans les processus les plus extrêmes, les poussera à quitter leur famille pour prendre la route et s'offrir en quelque sorte une nouvelle existence. Nos jeunes payent un lourd tribut à la crise du lien social que nous traversons. Ils ne se sentent pas exister dans la société actuelle, le monde se dérobe à eux et leur paraît de plus en plus abstrait. Pour se sentir exister, ils gagnent un contre-monde, fait de sensations pures, dans lequel ils vont renaître. Quand ils prennent des produits psycho-actifs, ils sont prêts à payer le prix pour se sentir exister. En adoptant des comportements à risque, ils relancent en permanence un goût de vivre qui, pour eux, n'est pas dans l'évidence. »

Il ne faut pas oublier que la conduite à risque est source de plaisir et qu'à l'adolescence, elle représente une mise à l'épreuve, un rite de passage. Élisabeth Rossé, psychologue à l'hôpital Marmottan, à Paris, s'est intéressée aux récits des lendemains de soirées festives des jeunes gens : « C'est rétrospectivement qu'ils s'aperçoivent qu'ils ont pris de gros risques. En racontant comment ils sont rentrés sains et saufs chez eux, sans savoir comment, en évoquant les trous noirs de leur mémoire, ces moments d'inconscience lors desquels tout aurait pu se passer, ils prennent une dimension héroïque : ils ont pris des risques importants, qu'ils ont su surmonter. »

Société répressive

Catherine Miachon, sociologue et directrice du CIRDD (Centre d'information régional sur les drogues et les dépendances) Rhône-Alpes et sociologue, rappelle que les conduites à risque concernent également les adultes. « Nous vivons dans une société de plus en plus répressive. Moins l'individu est responsabilisé, moins il peut faire appel à son libre arbitre et plus il a tendance à se réfugier dans les paradis artificiels. L'augmentation du chômage renforce ce recours à la fuite. Si ces tendances se confirment, à l'avenir, nous risquons de voir exploser la consommation de produits psycho-actifs. Et les adultes transmettent leur souffrance aux adolescents. Que penser d'une société qui a le regard braqué sur sa jeunesse, qu'elle passe à la loupe et dont elle traque les moindres faux pas, comme pour ne plus avoir à regarder ses propres dysfonctionnements ? Avec des trajectoires de vie de moins en moins rectilignes, faites de ruptures dans la vie personnelle et professionnelle, les adultes connaissent également des périodes de transition. Pour les traverser, ils font eux aussi appel aux comportements à risques. »

La consommation à risque est également le moyen de se sentir appartenir à un groupe social. Amine Benyamina, psychiatre et responsable médical du Certa (Centre d'enseignement, de recherche et de traitement des addictions) au CHU de Villejuif (Val-de-Marne) décode le binge drinking : « Il s'agit de s'opposer à la génération précédente. Le binge drinking, c'est boire l'alcool de papa mais l'utiliser d'une manière différente, sans aucune limite. » De la même manière, les enfants dont les parents ont une consommation régulière et modérée de cannabis s'adonneront à cette pratique, en forçant largement sur les doses. Pour marquer les frontières. La sociologue Catherine Miachon a observé le fonctionnement de petites entreprises ou de milieux professionnels « où il est de bon ton, pour renforcer la cohésion du groupe, de prendre régulièrement de la cocaïne ensemble. Cela permet de booster les équipes, d'obtenir une meilleure implication des individus qui se sentent également plus soudés entre eux ». De telles pratiques ne mettent pas forcément en danger les participants. Mais les personnes plus fragiles, physiquement, socialement ou psychologiquement, pourront entrer dans la spirale de l'addiction.

Plus ou moins vulnérables

Le passage de la consommation à risque à l'addiction est difficilement mesurable et repérable. Il dépend des limites de chacun. Amine Benyamina affirme qu'« on ne sait jamais où va mener le produit. On peut juste déterminer quatre profils : ceux qui n'essaieront jamais, ceux pour qui l'essai ne sera pas concluant, ceux qui utiliseront le produit pour gérer leurs affects et ceux qui auront besoin de consommer le produit pour se sentir bien et combler un manque ». Les addictologues expliquent l'addiction par la rencontre de trois facteurs : une personne, un environnement et un produit. Chaque individu réagit aux offres qui lui sont proposées dans son milieu, en fonction de sa personnalité et de son histoire personnelle.

L'école analytique apporte un regard différent. Aymeric Reyre, psychiatre et responsable médical du CSST (Centre spécialisé de soins aux toxicomanes) Boucebci de l'hôpital Avicenne, à Bobigny (Seine-Saint-Denis) explique : « L'addiction est une solution que choisit une personne qui souffre. Pour sortir de son état douloureux, elle aurait pu tout autant opter pour le délire ou la dépression. Avec la prise de produit, une personne vulnérable qui manque d'enveloppe, d'unité, pourra d'une part arrêter la pensée, source de souffrance, et d'autre part faire une expérimentation physique forte pour trouver cette enveloppe, cette consistance qui lui fait défaut. »

Sorte d'automédication

Si les interprétations peuvent varier, une même définition est en tout cas admise par tous. Les personnes qui souffrent d'une addiction voient leur vie quotidienne réglée par une dépendance qu'elles ne sont plus capables d'abandonner, tout en ayant conscience des effets négatifs qu'elle opère sur leur vie personnelle, familiale et sociale. La pratique addictive peut être vue comme une automédication que l'on s'administre pour faire face à une souffrance profonde. Un médicament qui fait ses preuves sur un temps limité et qu'il faut sans cesse reprendre.

On divise les addictions en deux grands groupes. Il y a d'un côté les addictions à un produit psycho-actif (tabac, alcool, drogues...) et d'un autre les addictions comportementales (alimentaires, au jeu, aux sports extrêmes, aux rencontres sexuelles, etc.). L'addiction comportementale peut être tout aussi prégnante que l'addiction à un produit.

Les jeux d'argent et de hasard sont de véritables conduites à risque. Plus le joueur perd d'argent, et plus il éprouve le besoin de prendre un risque important pour « se refaire ». En achetant des tickets de grattage et de tirage, en pariant aux courses ou en affrontant des heures durant les bandits manchots des casinos, les joueurs misent souvent de petites sommes. Mais une fois cumulées, ces sommes d'argent peuvent conduire à des situations financières dramatiques. Élisabeth Rossé, psychologue à l'hôpital Marmottan, décrypte ce comportement : « Il y a une recherche de contrôle, celui que l'on n'a pas dans sa vie. En misant, en prenant un risque financier, le joueur a le sentiment de contrôler le hasard. Le jeu produit aussi une excitation, des sentiments forts qui peuvent manquer dans la vie de tous les jours. Parmi les "addictés" aux jeux, il y a un nombre important de personnes âgées, qui se sentent mises de côté et qui éprouvent des difficultés pour se sentir vivre. »

Prise en charge souple

Les addictions aux jeux de stratégie en ligne procéderaient d'un phénomène inverse. Selon Élisabeth Rossé, « le recours au jeu en ligne est le contraire d'une prise de risque. Il s'agit de se mettre dans une bulle virtuelle où plus aucun danger réel ne peut survenir. Il s'agit de s'identifier à un personnage souvent valorisant, un guerrier que l'on est rarement dans la vie réelle ». Les jeux en lignes permettent une interaction avec d'autres, dans des limites acceptables, qui ne font pas peur. Ici, le jeu excessif est surtout le symptôme d'une souffrance et d'une impossibilité à communiquer, à entrer en relation avec les autres.

Sortir d'une addiction est un processus long et plein de surprises, de sorties fulgurantes de l'addiction et de retours en arrière imprévus. Les structures de prise en charge essaient de faire preuve de souplesse pour s'adapter à l'évolution de la pathologie. Cet accompagnement est d'autant plus complexe qu'un nombre important de personnes associent plusieurs addictions. La prise en charge est multidisciplinaire et combine des approches complémentaires.

Au CSST d'Avicenne, la prise en charge est fondée sur le travail psychanalytique. « Nous ne sommes pas focalisés sur l'abstinence, explique Aymeric Reyre. Nous préférons prescrire des traitements de substitution qui permettent à nos patients de ne pas se mettre en danger avec une "drogue sale". Notre objectif, c'est d'aider la personne à retrouver une souplesse de pensée, du plaisir à vivre et à se sentir mieux avec les autres. » Pour aider des patients qui éprouvent de grandes difficultés à raconter une histoire souvent très douloureuse, le CSST propose des groupes thérapeutiques qui permettent de relâcher le contrôle sur la parole. La musique, les jeux de mots et de discours sont utilisés pour libérer les émotions. Quand la personne est prête, un travail individuel avec un thérapeute peut être entamé.

Dans ce type de structures, le rôle de l'infirmière, qui accueille et qui coordonne les soins, est central. Nadia Ounnoughi, infirmière au centre Boucebci, est venue travailler au CSST par choix : « Nous avons une relation privilégiée avec les patients. Nous sommes leur premier contact au CSST. Nous devons rester bienveillantes et vigilantes. Nous leur proposons un espace de liberté. Avec nous, il n'y a ni ordonnance à la clé, ni temps imparti. Le patient peut ne rien nous dire ou au contraire se confier le temps qu'il veut. Nous recueillons beaucoup de choses que nous transmettons ensuite à l'équipe. Le travail en groupe est fondamental ici. Le patient n'a pas affaire à une seule personne et nous échangeons beaucoup à son sujet. Le plus important est de tenir sur le long terme, d'être patient. »

« Balance décisionnelle »

À l'unité d'addictologie de l'hôpital Paul-Brousse, à Villejuif, la prise en charge est plus centrée sur le comportement addictif. Éric Lefort, cadre infirmier, décrit le processus de soin : « Nous nous basons sur la motivation du patient. Quand il vient nous voir, c'est qu'il veut changer quelque chose dans sa vie. Nous n'avons pas d'expertise à lui apporter. Nous l'accompagnons dans la réalisation de ses objectifs. Ceux-ci peuvent d'ailleurs changer au cours de la prise en charge. Et nous ne l'influençons pas dans ses choix, même si nous avons l'impression qu'il se trompe. » La prise en charge s'appuie sur une série d'« entretiens motivationnels », qui sont menés alternativement par un médecin et une infirmière de l'unité. Il s'agit de renforcer les ressources propres, la motivation de la personne qui souffre d'une addiction. Pour soutenir le patient, les soignants font appel à ce qu'ils nomment la « balance décisionnelle » : d'un côté, ce qui freine et de l'autre ce qui pousse au changement. Il s'agit de renforcer la personnalité, d'augmenter le sentiment de maîtrise et d'autonomie du patient pour qu'il fasse pencher la balance du bon côté.

Dans l'ensemble de ces structures, les assistantes sociales prennent une part active au traitement de l'addiction. Toute prise en charge débute d'ailleurs par un bilan physique, psychologique et social du patient. Les addictions sont souvent la source de coûts importants, et peuvent même entraîner des conséquences financières désastreuses. Les joueurs, en particulier, peuvent avoir à gérer un dossier de surendettement. Aborder de front les questions concrètes est aussi un moyen de reprendre contact avec le réel, de reprendre prise sur sa vie. Aline Patron est assistante sociale au centre d'addictologie du CHU de Nantes : « Nous pouvons faire levier, apporter un autre éclairage, plus distancié. Tout est bon pour aider la personne qui souffre d'une addiction. On est parfois surpris de voir sur quoi le patient s'est appuyé pour changer d'attitude. »

Les adolescents ne sont pas à proprement parler concernés par les addictions, puisqu'ils sont encore en développement et que leurs comportements peuvent très vite changer. Néanmoins, des études menées dans les pays nordiques et aux États-Unis ont montré que des jeunes qui développent des consommations à risques à l'adolescence ont statistiquement une probabilité plus élevée de souffrir plus tard d'une addiction. Sans oublier que l'absorption de produits psycho-actifs peut avoir des effets négatifs évidents sur la scolarité et la vie sociale d'un jeune, et que cette prise de risque, même temporaire, peut lourdement grever son avenir. La politique de santé publique s'est logiquement concentrée sur la prévention auprès des adolescents.

Ainsi, la loi de santé publique d'août 2004 prévoit d'informer les collégiens et les lycéens sur les consommations à risque. Et l'actuel projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires » comporte un volet visant à réduire l'offre d'alcool aux jeunes. Les professionnels de la santé et du social saluent cette initiative qui rendra le produit moins accessible, tout en étant convaincus que ces dispositions ne changeront rien au problème de fond.

Apprendre à dire non

Dans un établissement scolaire, la politique de prévention et d'éducation à la santé se décide au sein du CESC, le conseil d'éducation à la santé et à la citoyenneté. Les infirmiers scolaires délivrent une information scientifique aux jeunes qui participent aux clubs santé et discutent ensuite de la meilleure manière de la diffuser auprès de leurs pairs. Les infirmiers scolaires soulignent l'importance de la discussion dans le travail de prévention. Nadia Onnoughi, du CSST d'Avicenne, est régulièrement appelée pour intervenir en milieu scolaire. « Quand on demande aux jeunes pourquoi ils consomment, par exemple du cannabis, ils répondent souvent que c'est pour ne pas paraître ringard ou pour ne pas passer pour une sainte-nitouche », observe-t-elle.

Si la consommation de produits renforce le sentiment de groupe, elle ne va pas sans une certaine pression sur l'individu. « Sans banaliser la prise de produits, mais sans la diaboliser, nous leur disons que cela peut arriver de prendre quelque chose. Mais je cherche aussi à les aider à trouver leurs limites », souligne Pascal Danthieux, infirmier scolaire au lycée Clemenceau de Villemomble, et adjoint à l'infirmière départementale de Seine-Saint-Denis. La discussion permet de renforcer la personnalité de chaque jeune pour lui permettre de mieux savoir ce qu'il veut, et de faire face au groupe s'il n'a pas envie de consommer un produit.

Expression personnelle

« Il n'y a pas d'âge pour ce genre de démarche, explique Dominique Daviaud, infirmière scolaire de secteur au collège Lavoisier de Pantin (Seine-Saint-Denis). Il y a des jeux de rôle adaptés à tous les stades du développement. Ils sont basés sur le même principe : l'expression personnelle. Et il faut dire que l'école laisse peu de place à l'expression de ses sentiments et de ses pensées. Plus un enfant ou un jeune peut exprimer ce qu'il ressent, moins il sera tenté par une conduite à risque. Et plus il saura faire face aux pressions de son entourage. »

Le comportement à risque est aussi un appel, une volonté de se faire remarquer. Il s'accompagne souvent d'autres signes : agressivité, chute des résultats scolaires, absentéisme. L'infirmier scolaire suit l'élève, essaie de comprendre ce qui ne va pas. « Nous avons observé que cette souffrance provenait souvent d'un manque de communication à la maison, note Pascal Danthieux. Je demande aux parents de venir et j'organise une discussion avec l'enfant. Dans mon bureau, ils doivent alors poser les choses, dire que ça ne va pas. Et nous assistons souvent à de petits miracles. Tout le monde pleure et ils repartent en discutant. Dans les deux tiers des cas, les problèmes sont réglés comme ça. » Pour des souffrances plus profondes, les élèves sont orientés vers des structures adaptées, comme les maisons des adolescents. Le plus important est de ne pas laisser les jeunes s'isoler. Ce principe vaut également pour les adultes. Si le comportement à risque se pratique souvent à plusieurs, il conduit ensuite au repli sur soi, dans l'addiction.

témoignage

« C'EST UN SUPER-JEU »

« Tout est dans le timing. Tout dans la résistance. Et tout dans l'explosion. La soirée s'élance enfin. Elle va bientôt battre son plein. Certains partiront ivres morts bien trop vite, le temps d'en sourire... J'attends le moment où les pensées sont en retard sur les mots, en retard sur les gestes, on s'en fout des pensées.

C'est un super-jeu. Le genre de jeu auquel une personne sobre ne jouerait jamais. D'une certaine manière, ce jeu prouve qu'on a quitté les rangs ternes de la foule grise, assise, celle qui se démolit à l'ennui pour rejoindre les rangs de ceux qui se démolissent au plaisir.

Il faudrait se limiter à l'alcool « convivial », autre pelure d'apparence ? Modérez, modérez, mais avec consommation ! Alors non, le drapeau des vrais, des vivants, c'est vraiment l'im-mo-dé-ra-tion.

Pourquoi on boit comme des trous ? Mais parce que le trou préexiste, c'est tellement simple. Évidemment, il ne faut pas se pencher dessus. »

Extraits tirés de Super biture, mon enfer dans le binge drinking, Hugo L., éditions Jacob-Duvernet, novembre 2008.

En jeu

À Nantes, le Centre de référence sur le jeu excessif (CRJE) est né d'un partenariat entre le pôle universitaire d'addictologie et psychiatrie du CHU et deux opérateurs privés : le PMU et la Française des jeux. Le centre s'inspire d'expériences menées au Canada et en Suisse. Son activité principale est la recherche sur les pratiques et les addictions liées aux jeux. Il propose également des formations pour les professionnels de santé, en collaboration avec l'hôpital Marmottan.

Internet : http://www.crje.fr.

En vitrine

« Tête à tête » est un espace d'information et de prévention des risques destiné aux 13-25 ans. Installé dans un centre commercial, Rosny 2, en Seine-Saint-Denis, il reçoit beaucoup de visites spontanées de jeunes. Une exposition permanente met en scène dans des vitrines la sexualité, le tabac et les drogues. L'équipe répond à toutes les questions et propose des entretiens individuels, voire un suivi aux jeunes qui semblent avoir une demande plus préoccupante.

Tél. : 01 48 12 01 01.

santé publique

LE PLAN ANTI-ADDICTIONS

En novembre 2006, le ministère de la Santé a lancé le Plan de prévention et de prise en charge des addictions qui prévoit, sur la période 2007-2011 :

- D'une part, l'organisation de la prise en charge hospitalière, au moyen de :

- la mise en place de consultations et d'équipes de liaison en addictologie dans les hôpitaux dotés d'une structure d'urgence. Ces équipes ont pour mission de repérer les patients en difficulté pendant leur hospitalisation et d'orienter le parcours de soin.

- la création d'un service d'hospitalisation en addictologie au sein de chaque territoire de santé de plus de 500 000 personnes ;

- la mise en place d'un pôle d'addictologie dans chaque CHU.

- D'autre part, l'accompagnement de la personne, via :

- la création de centres de soins d'accompagnement et de prévention en addictologie (Csapa) qui réuniront les CSST (centres de soins spécialisés aux toxicomanes) et les CCAA (centres de cure ambulatoire en alcoologie) ;

- l'implication de la médecine de ville : l'objectif est de créer 250 nouveaux réseaux ville-hopital en addictologie.

bibliographie

POUR ÊTRE IVRE DE LIVRES

- Conduites addictives, conduites à risque : quels liens, quelle prévention ?, Jean-Luc Vénisse, Daniel Bailly et Michel Reynaud, Masson, 2002.

- Les Conduites addictives : comprendre, prévenir, soigner, Alain Morel et Jean-Pierre Couteron, Dunod, 2008.

- Adolescents et conduites à risque : prévention et écoute, Jean-Pascal Assailly, Daniel Coum, Patrick Dessez, Hélène de la Vaissière, ASH éditions, 2007.

- L'Adolescence à risque, David Le Breton (dir.), Autrement, 2002.

- Alcool et adolescence, jeunes en quête d'ivresse, Patrick Huerre et Florence Marty (dir.), Albin Michel, 2007.

- La Teuf, Essai sur le désordre des générations, Monique Dagnaud, Seuil, 2008.

- En souffrance : adolescence et entrée dans la vie, David Le Breton, Métailié, 2007.

- Les Conduites à risque au regard de la psychanalyse, François Duparc et Christian Vasseur (dir.), In Press, 2003.

Dans la littérature :

- Le Joueur, Fédor Dostoievski, LGF, Livre de poche, 2008.

- Le vin est tiré, Robert Desnos, Gallimard L'imaginaire, 1992 (Ce roman évoque les drogues, contrairement à ce que son titre laisse à penser).

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