Des essais à la loupe - L'Infirmière Magazine n° 246 du 01/02/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 246 du 01/02/2009

 

Recherche biomédicale

Éthique

En France, toute recherche biomédicale est soumise à l'accord préalable des comités de protection des personnes. Une infirmière siège de droit dans chacune de ces instances.

Depuis 2006, tout promoteur d'un projet de recherche biomédicale, qu'il soit public ou privé, doit obtenir l'accord d'un comité de protection des personnes (CPP) situé dans la zone géographique où exerce l'investigateur principal de la recherche, pour mettre en oeuvre son étude (1). Par recherche biomédicale, le législateur entend « tous les essais ou expérimentations organisés et pratiqués sur l'être humain, en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales ». Le spectre est large. En fonction de la nature du projet, la recherche doit également obtenir l'aval d'une autorité compétente : soit l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), soit la Direction générale de la santé.

Deuxième génération

Il existe quarante comités de protection des personnes sur le territoire, répartis en sept interrégions de recherche clinique. Auparavant, ce sont les comités consultatifs de protection des personnes se prêtant à des recherches biomédicales, institués par la loi Huriet-Sérusclat de 1988, qui avaient ce rôle. Mais, comme indiqué dans leur libellé, leur avis « consultatif » n'était pas toujours suivi.

Consentement éclairé

Chaque année, plusieurs dizaines de milliers de personnes, adultes et mineures, sont incluses dans des investigations cliniques. Pour assurer la protection des personnes, les CPP, composés chacun de quatorze membres titulaires, dont au moins une infirmière, doivent contrôler la conformité de la recherche au regard des règles juridiques, médicales et éthiques : information préalable, recueil du consentement, période d'exclusion, délai de réflexion... Ils évaluent également la pertinence de la recherche et l'adéquation entre les objectifs poursuivis et les moyens mis en oeuvre pour les atteindre.

Dans certains cas, le comité de protection des personnes doit aussi recevoir la justification de la recherche lorsqu'elle concerne des personnes dans l'incapacité de donner leur consentement libre et éclairé. Soulignons que les représentatants des usagers sont eux aussi membres de droit des CPP.

Le remplacement des anciens comités consultatifs par les comités actuels n'est pas un changement de pure forme. La distinction entre recherche « avec » ou « sans » bénéfice individuel direct, qui prévalait jusqu'alors, a en effet été abandonnée au profit d'un « bilan bénéfices-risques » pour tous les participants à une étude.

Soucieux d'éthique

De surcroît, l'intérêt de ces derniers « doit toujours primer sur les seuls intérêts de la science et de la société ». Cependant, les comités de protection des personnes ne sont ni des comités d'éthique ni des comités scientifiques. Ils prennent position sur l'opportunité scientifique du projet, ses aspects méthodologiques et réglementaires. Mais comme l'explique un de ses membres : « La pluridisciplinarité qui préside à l'examen de chaque dossier permet un débat éthique de qualité. Et le résultat de cet échange peut faire basculer une décision. »

Bientôt du neuf ?

Dans le cadre du réexamen de la loi de bioéthique, actuellement en cours (2), les comités de protection des personnes pourraient voir leur mission évoluer à nouveau. Mais rien ne filtre pour l'heure.

1- Les comités de protection des personnes ont été créés par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.

2- Lire « En pistes pour la loi ! », L'Infirmière magazine n°245, p. 23.

TÉMOIN

Sophie Lechaton membre d'un comité de protection des personnes « L'apport de notre "oeil infirmier" est essentiel »

« À partir de 1995, j'ai participé aux travaux d'un comité consultatif de protection des personnes se prêtant à des recherches biomédicales, et je fais désormais partie du comité de protection des personnes Île-de-France II, raconte Sophie Lechaton, coordinatrice de recherche clinique à l'hôpital Necker-Enfants malades (Paris). Ma motivation est venue en partie de mon désir de mieux comprendre comment s'organise une recherche, et de cerner sa finalité. Mais aussi de mon envie de voir les infirmières mieux informées en ce domaine. En effet, alors qu'elles sont indispensables au bon déroulement d'une étude, elles sont le plus souvent cantonnées à un rôle d'exécutantes. Notre présence au sein des comités de protection des personnes est essentielle parce que nous avons « l'oeil infirmier » pour apprécier, par exemple, si tel ou tel geste est possible au cours du protocole, ou s'assurer que les documents nécessaires au consentement du patient sont clairs pour lui et ses proches. Bref, je suis résolument du côté du soin, et ma voix au comité de protection des personnes compte autant qu'une autre. »