Haro sur les erreurs - L'Infirmière Magazine n° 246 du 01/02/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 246 du 01/02/2009

 

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Les conditions dans lesquelles plusieurs patients sont morts à l'hôpital pendant les vacances de Noël ont déclenché une violente polémique.

Les déclarations fracassantes du pr juvin, chef des urgences de l'hôpital Beaujon, à Clichy (92), en ont stupéfié plus d'un. « J'estime qu'au moins 10 000 personnes meurent chaque année à l'hôpital du fait de l'exercice de la médecine. Et pourtant, ces décès sont évitables », a affirmé le praticien, par ailleurs secrétaire national de l'UMP, tout en reconnaissant qu'« aucune statistique fiable n'existe en France sur ce sujet ». Ces propos alarmistes ont suscité de vives réactions. Ainsi, la commission médicale d'établissement de l'AP-HP a adopté à l'unanimité une motion dénonçant des chiffres « sans aucun fondement scientifique ».

Fautes collectives

Au-delà des batailles de chiffres, s'il est une chose que l'enquête Énéis [lire ci-dessous] nous dit, de même que les autres enquêtes internationales, c'est que l'erreur médicale est rarement imputable à une seule personne. Elle est souvent le produit d'une série de failles dans l'organisation d'un service ou du manque de communication au sein d'une équipe.

C'est ce qui s'est passé dans les deux cas de décès médiatisés qui ont impliqué des infirmières pendant les fêtes. Le 2 janvier, Louis-Joseph, 6 mois, décédait après un mauvais réglage de perfusion à l'hôpital de pédiatrie de Bullion (78) : écoulement du substitut nutritionnel dix fois trop rapide. L'auxiliaire puéricultrice qui a réglé le dosage et l'infirmière qui l'a validé ont assuré aux enquêteurs n'avoir pas commis d'erreur en tapant la dose sur la pompe, mais ont reconnu ne pas avoir contrôlé la valeur inscrite sur l'écran. Le parquet de Versailles a ouvert une information judiciaire pour homicide involontaire contre X et souhaite faire expertiser la pompe.

Soutiens reçus

La nuit de Noël, Ilyès, 3 ans, décédait à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul. L'infirmière s'est trompée de produit injectable, administrant du chlorure de magnésium en lieu et place du soluté requis. Or, selon les premières conclusions de l'audit interne, « le flacon de chlorure de magnésium n'aurait jamais dû se trouver dans l'armoire des solutés du service de pédiatrie générale ».

Le conseil régional de l'ordre infirmier a exprimé « son soutien à sa consoeur anéantie par les conséquences de son geste » et s'est dit « choqué par sa mise en garde à vue immédiate et prolongée » alors qu'elle avait « spontanément averti sa hiérarchie » de son erreur. Mise en examen pour homicide involontaire, l'infirmière est soumise à un contrôle judiciaire lui interdisant de retourner à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul et de voir ses collègues.

L'enquête Énéis

L'étude nationale sur les événements indésirables liés aux soins (Énéis), réalisée en 2004 par le Centre de coordination de l'évaluation clinique et de la qualité en Aquitaine, a évalué les événements indésirables graves et évitables au sein de 71 établissements tirés au sort. Les chercheurs ont estimé que 350 000 à 460 000 événements indésirables graves se produisaient chaque année à l'hôpital, dont 50 % liés à une opération chirurgicale. Une minorité aboutissent au décès, mais l'étude ne précise pas combien.