Les AG des âgés - L'Infirmière Magazine n° 246 du 01/02/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 246 du 01/02/2009

 

Intergénération

Du côté des associations

Quatre ans après leur lancement, les Cafés des âges se multiplient, libèrent la parole des aînés et se font force de proposition.

Les clichés sur la vieillesse ont fait leur temps ! Paulette Guinchard-Kunstler, ancienne secrétaire d'État aux Personnes âgées dans le gouvernement Jospin, raconte : « Après mon expérience au gouvernement, j'ai été marquée par le fait qu'on parlait toujours de la dépendance et de la maladie à propos de la vieillesse, alors que beaucoup de gens vieillissent bien. Il m'a paru nécessaire d'essayer de porter un regard positif sur la vieillesse, qui n'est qu'un temps de la vie comme un autre. »

D'où la création de l'association « Vieillir, c'est vivre » en 2005, dans la foulée de l'appel du même nom. Objectif proclamé : « Créer un mouvement citoyen visant à mettre en valeur les rapports entre générations. » Pour le mettre en pratique, les « Café des âges » s'inspirent de l'expérience belge des « cafés-géronto ». Ils visent à donner la parole aux personnes âgées afin qu'elles puissent s'exprimer librement sur leurs difficultés et leurs aspirations. L'initiative d'organiser un Café des âges peut émaner d'une collectivité, d'un établissement public, d'une association ou d'un simple groupe de citoyens. Lequel, pour recevoir le label « Café des âges », doit adhérer à l'association, signer l'appel et s'engager à organiser la rencontre dans un cadre convivial et intergénérationnel, puis à en transmettre un compte rendu au niveau national.

Sujets inattendus

Si la plupart des thèmes de débat, choisis par les participants, ont trait à la place de la vieillesse dans la société (« quelle solidarité entre les âges ? », « l'habitat des personnes âgées », etc.), d'autres sont beaucoup plus inattendus, par exemple « les métiers manuels » ou encore « la fantaisie des petites bestioles ».

Avec plus de 700 Cafés des âges labellisés, et un millier de sites actuellement en projet, en France mais aussi à l'étranger (Belgique, Allemagne, Italie, Canada, etc), le bilan est déjà largement positif. Seule ombre au tableau : le public n'est pas toujours aussi intergénérationnel que les créateurs de « Vieillir, c'est vivre » pourraient le souhaiter : s'il arrive que les générations soient toutes réunies autour d'un Café des âges, ces rencontres attirent principalement des personnes âgées. Cela s'explique en grande partie par le statut des organisateurs, qui sont souvent des Ehpad ou des associations construites autour des problématiques de la vieillesse.

Occasions précieuses

Présidente de l'association, Paulette Guinchard-Kunstler explique cette réussite par le fait que, « dans une société qui place la jeunesse sur un piédestal, les personnes âgées n'ont que rarement l'occasion de s'exprimer, et encore moins celle de parler de leur expérience de la vieillesse et de leurs souhaits à cet égard ». D'autant que les Cafés des âges veulent être de réels lieux d'échange, et en aucun cas prendre la forme de conférences. Il s'agit de libérer la parole : non seulement celle des personnes âgées elles-mêmes, mais aussi celle qui s'adresse à nos aînés. « Car, se désole Paulette Guinchard, dans une société qui cloisonne à l'extrême les générations, les gens ont souvent oublié comment parler aux personnes âgées. »

À terme, les conclusions des débats de tous les Cafés des âges seront reprises par un comité scientifique et transcrites dans un ouvrage diffusé auprès des instances politiques. En 2006 déjà, ces comptes rendus ont fait l'objet d'une première analyse par Daniel Reguer, sociologue et président du conseil scientifique de l'association. À la lumière d'une première année d'expérience, plusieurs préconisations se profilaient pour améliorer la vie des séniors. Parmi elles, le développement de campagnes de communication et la mise en place de structures à travers lesquelles pourrait s'exprimer la parole des plus âgés, l'exploration de nouvelles formes d'habitat pour faire cohabiter les générations, ou encore la mise en place d'un contrat pluriannuel « Vivre ensemble, à travers nos âges » permettant de développer des actions sur une longue durée.

Besoin d'une « dolto »

Pour Paulette Guinchard, il est nécessaire d'explorer deux pistes pour faire évoluer la société : « D'abord, favoriser un vrai travail de recherche en sciences sociales sur le vieillissement. La France est en retard sur ce sujet, même si les choses commencent à bouger. » Il faudrait, selon la présidente de l'association, une « Dolto du troisième âge » : « Elle a favorisé la diffusion dans toute la société d'une approche beaucoup plus ouverte de la petite enfance et de l'adolescence. Pourquoi quelqu'un ne pourrait-il pas faire pareil pour la vieillesse ? » En second lieu, affirme-t-elle, il faudrait encourager la formation du personnel attaché aux personnes âgées, mais aussi, et peut-être surtout, du grand public : « Plus la parole sur la vieillesse sera diffusée à une large échelle, plus les gens seront à l'aise avec cette période de la vie. »

Contact

Jean-Michel Caudron-Callewaert

Délégué national de l'association « Vieillir, c'est vivre ! »

Tél. : 06 80 96 25 69

Fax : 08 20 56 88 62

Cybercafé des âges : http://www.cafe-des-ages.net