Molécules d'espoir - L'Infirmière Magazine n° 248 du 01/04/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 248 du 01/04/2009

 

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Les thérapies moléculaires ciblées ouvrent un champ de recherche particulièrement prometteur pour soigner les malades du cancer.

« Au cours des trente années à venir, les thérapies moléculaires ciblées vont être au centre de la stratégie thérapeutique contre le cancer. Conceptuellement, on va rompre avec l'ère de la cure de chimiothérapie pour entrer dans celle de la pression continue sur les cellules tumorales », prédit le Pr Jean-Charles Soria (1). Chef du service des innovations thérapeutiques précoces (Sitep) à l'Institut Gustave-Roussy de Villejuif, il a profité des 12es Rencontres infirmières en oncologie, le 14 mars à Paris, pour promouvoir, auprès des quelque 900 infirmières présentes, l'intérêt pour des patients, le plus souvent en échec thérapeutique, d'être inclus dans des essais cliniques de phase I. Cette étape du développement d'une molécule consiste à tester chez l'homme les doses efficaces et maximales d'un traitement donné.

« Tsunami »

Si aujourd'hui, l'arsenal thérapeutique pour lutter contre le cancer est constitué d'environ 200 molécules avec AMM (2), 800 autres sont actuellement en développement de phase I, II et III. Parmi elles, 500 s'inscrivent dans des TMC. « Ce n'est pas une vaguelette mais un tsunami ! », confirme le praticien. Alors que la plupart des cancers métastasiques sont incurables à l'heure actuelle, l'enjeu est de se donner le plus de « cartouches » possible pour permettre à un patient de vivre plus longtemps et dans de bonnes conditions. « Dans ce contexte, participer à des essais cliniques, c'est participer à l'innovation thérapeutique », insiste le médecin.

Les résultats des essais de phase I plaident en faveur des TMC. « Aujourd'hui, 50 % des malades inclus dans un essai précoce en tirent un bénéfice, soit sous la forme d'une fonte de la tumeur soit, pour 40 % d'entre eux, par une stabilisation prolongée de plusieurs mois. Ce n'est pas rien », insiste le Pr Soria.

Concrètement, la thérapie moléculaire ciblée s'appuie sur une stratégie qui vise la molécule considérée comme étant impliquée dans la progression tumorale. « C'est-à-dire dans le comportement agressif de la cellule cancéreuse, précise le praticien. Ces innovations sont le fruit de progrès significatifs dans la compréhension de la biologie cellulaire. Il y a peu, en effet, on ignorait tout des médiateurs responsables de la division des cellules, qu'elles soient saines ou cancéreuses. »

Attaquer les antennes

Chaque cellule possède à sa surface moult capteurs dont la vocation est de la renseigner sur son environnement : existe-t-il des facteurs de croissance, des acides aminés, suffisamment d'apport nutritionnel... pour me diviser ? « Toutes ces antennes de réception sont potentiellement ciblables par les TMC », affirme le Pr Soria.

Besoin d'AMM

La TMC peut également agir sur le signal de transduction qui permet à une cellule d'adapter son comportement à l'information qu'elle reçoit de son environnement. Elle peut aussi être en capacité d'inhiber l'angiogenèse (3). Si ces recherches sont prometteuses, gardons malgré tout à l'esprit que seule une molécule sur dix en développement recevra un jour une AMM.

1- À lire : Thérapies moléculaires ciblées ; de la biologie aux applications cliniques, Stéphane Vignot et Jean-Charles Soria, éditions John Libbey Eurotext.

2- Autorisation de mise sur le marché.

3- Processus pathologique de néovascularisation primordial dans la croissance des tumeurs malignes et le développement des métastases.