« Des virus imprévisibles » - L'Infirmière Magazine n° 250 du 01/06/2009 | Espace Infirmier
 

L'Infirmière Magazine n° 250 du 01/06/2009

 

Grippe

Actualités

Santé

Le Dr Jean Marie Cohen, coordinateur national du Réseau des Groupes régionaux d'observation de la grippe, dissèque le nouveau virus A (H1N1).

Que faut-il craindre avec le nouveau virus A (H1N1) ?

Les virus grippaux humains A (H1N1) circulent depuis plus d'un siècle. Depuis 1957, ils ne provoquent plus que des épidémies de faible ampleur parce que, malgré leurs mutations incessantes, la majeure partie de la population a acquis une immunité au moins partielle contre eux. Ce nouveau virus A (H1N1) s'est modifié grâce à un autre mécanisme de transformation antigénique : il a incorporé, par recombinaisons successives, des gènes d'origine porcine, d'une part, et aviaire d'autre part. Les antigènes qu'il porte à sa surface ne sont plus reconnus par les anticorps actifs contre les virus grippaux humains A (H1N1) saisonniers.

On craint donc qu'il puisse infecter massivement la planète, provoquant une pandémie. Les cas observés jusqu'ici n'ont pas la gravité de la grippe espagnole [de 1918-1919]. Ils ressemblent aux formes habituelles de la grippe saisonnière. Le danger tient donc surtout au nombre des malades à venir.

En quoi est-il différent du virus A (H5N1) d'origine aviaire ?

Le virus grippal aviaire A (H5N1) est un virus animal, très dangereux pour les humains mais quasiment intransmissible d'un humain à l'autre. Le nouveau virus A (H1N1) est, au contraire, un virus humain qui se transmet facilement d'un humain à l'autre mais qui est beaucoup moins dangereux pour les humains infectés. Ces différences expliquent que, pour la grippe aviaire A (H5N1), le niveau d'alerte n'ait jamais dépassé 3 (cas humains isolés sans transmission entre humains) alors que, pour la nouvelle grippe A (H1N1), l'alerte a très vite atteint le niveau 5 (transmission interhumaine avec foyers épidémiques dans une même région OMS).

Le plan contre une pandémie grippale aviaire est-il adapté au nouveau virus ?

Oui. Le plan national de prévention et de lutte « pandémie grippale » a été conçu pour faire face à toutes les formes de pandémie grippale, quelles que soient la nature et l'origine du virus grippal.

Que peut-il se passer dans un avenir proche ?

Les virus grippaux sont imprévisibles. Il faut donc être particulièrement vigilant. Le Réseau des Groupes régionaux d'observation de la grippe (Grog) et tous les dispositifs de veille ont été placés en état d'alerte renforcée pour voir lequel des scenarii envisagés allait se réaliser. Si aucun foyer épidémique n'apparaît en dehors du continent américain, l'alerte restera au niveau 5 tant que des foyers persisteront sur ce continent. Si un foyer apparaît hors du continent américain, prouvant ainsi que le virus peut provoquer une flambée mondiale, le niveau d'alerte passera à 6, signant le début d'une pandémie.

Quelles seront les conséquences sur la vaccination antigrippale ?

L'Organisation mondiale de la santé va adapter les choix vaccinaux à l'évolution de la situation et aux capacités de production. Si le nouveau virus touche surtout les plus jeunes, deux sortes de vaccin seront diffusées séparément : un monovalent contre le nouveau A (H1N1) pour les plus jeunes et un vaccin antigrippal saisonnier bi ou trivalent pour les plus âgés.